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27/06/2024 | FRANCE | N°23/00985

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-4, 27 juin 2024, 23/00985


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-4



ARRÊT SUR DÉFÉRÉ

DU 27 JUIN 2024



N° 2024/ 126









Rôle N° RG 23/00985 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BKUOQ







S.A.S. LC & P CONSEILS





C/



[P] [O]

S.A.S. VILHET FRUIT





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Françoise BOULAN



Me Julien VOLLE









Décision déférée à la Cour :



Ordonnance du magistrat délégué de la chambre 3-2 de la Cour d'Appel d'AIX-EN-PROVENCE en date du 05 Janvier 2023 enregistrée au répertoire général sous le n° 22/7145.





REQUERANTE



Société LC & P CONSEILS S.A.S., prise en la personne de son représentant légal en exerc...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-4

ARRÊT SUR DÉFÉRÉ

DU 27 JUIN 2024

N° 2024/ 126

Rôle N° RG 23/00985 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BKUOQ

S.A.S. LC & P CONSEILS

C/

[P] [O]

S.A.S. VILHET FRUIT

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Françoise BOULAN

Me Julien VOLLE

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du magistrat délégué de la chambre 3-2 de la Cour d'Appel d'AIX-EN-PROVENCE en date du 05 Janvier 2023 enregistrée au répertoire général sous le n° 22/7145.

REQUERANTE

Société LC & P CONSEILS S.A.S., prise en la personne de son représentant légal en exercice, dont le siège social est sis [Adresse 1]

représentée par Me Françoise BOULAN de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et assistée de Me Rebecca VANDONI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant

DEFENDEURS

Maître [P] [O] mandataire judiciaire pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SAS VILHET FRUIT

demeurant [Adresse 3]

[Adresse 3]

représenté par Me Julien VOLLE de la SCP LOBIER & ASSOCIES, avocat au barreau de TARASCON, et assisté de Me Stéphane GOUIN, avocat au barreau de NIMES, plaidant

Société VILHET FRUIT S.A.S., prise en la personne de son représentant légal en exercice, dont le siège social est sis [Adresse 2]

défaillante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 14 Mai 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

Madame Gaëlle MARTIN, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Juin 2024.

MINISTERE PUBLIC :

Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.

ARRÊT

Défaut,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Juin 2024,

Signé par Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Par jugement rendu le 22 avril 2022 entre Maître [P] [O] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Vilhet fruit et la société LC & P conseils et assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de commerce de Tarascon a :

- prononcé la nullité de la vente intervenue entre la société Vilhet fruit et la société LC & P conseils portant sur un véhicule Mercedes,

- condamné la société LC & P conseils à restituer le véhicule à Maître [O] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Vilhet fruit dans le mois de la signification, et à défaut de restitution, à payer à Maître [O] ès qualités la somme de 69 097 euros en derniers ou quittance,

-condamné la société LC & P conseils aux dépens et à payer à Maître [O] ès qualités 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La société LC & P conseils a interjeté appel de cette décision le 17 mai 2022.

Le 30 juin 2022, le magistrat délégué a invité le conseil de l'appelante à s'expliquer sur la caducité de la déclaration d'appel encourue pour défaut de signification de la déclaration d'appel à la société Vilhet fruit, intimée, dans les 10 jours de l'avis de fixation à bref délai.

Au vu des explications données, les parties ont été convoquées par le magistrat délégué à une audience d'incident.

Par ordonnance du 5 janvier 2023, le magistrat délégué a déclaré caduque la déclaration d'appel régularisée le 17 mai 2017 (sic) par la société LC & P conseils et condamné cette dernière aux dépens.

Le magistrat délégué a retenu à cet effet :

Ainsi que le rappelle l'article 905-1 du code de procédure civile, lorsque l'affaire est fixée à bref

délai, à peine de caducité de la déclaration d'appel relevée d'office, l'appelant dispose d'un délai

de 10 jours à compter de l'avis de fixation qui lui a été adressé par le greffe pour signifier la déclaration d'appel à l'intimé.

En l'occurrence, il n'est pas contesté que la société LC & P conseils n'a pas signifié la déclaration d'appel à la société Vilhet fruit.

Nonobstant les dénégations de l'appelante et quelles que soient les mentions de la déclaration

d'appel, s'agissant d'un litige qui touche à la consistance de l'actif de sa procédure collective,

bien qu'effectivement représentée par Me [O], la société Vilhet fruit dispose d'un droit propre à faire valoir, ce qui impose de lui permettre de s'expliquer en lui signifiant la déclaration d'appel.

Dès lors, la société LC & P conseils se trouvait dans l'obligation de déférer aux dispositions de l'article 905-1 du code de procédure civile.

À défaut, il convient effectivement de constater la caducité de la déclaration d'appel.

Contrairement à ce que suggère la société LC & P conseils, s'agissant de statuer sur l'annulation de la vente d'un bien appartenant à une société en liquidation judiciaire, le litige est indivisible au sens de l'article 553 du code de procédure civile de sorte que, conformément à ce texte, l'appel doit être déclaré irrecevable erga omnes.

La société LC & P conseils a déféré cette ordonnance à la cour par requête déposée le 12 janvier 2023.

L'affaire a été fixée devant la chambre 3-5 le 1er juin 2023 puis déplacée au 13 novembre 2023, avant d'être transférée à la chambre 3-4 et fixée au 14 mai 2024.

Par conclusions déposées et notifiées au liquidateur le 7 mai 2024, la société LC & P conseils demande à la cour, vu les articles 916 et suivants, 901 et suivants, 905-1, 905-2, 552, 553, 961 du code de procédure civile de :

' Sur l'exception de nullité de la requête en déféré :

À titre principal,

- se déclarer incompétente afin de statuer sur l'exception de nullité soulevée par Maître [O] en sa qualité de liquidateur de la société Vilhet fruit,

À tout le moins,

- déclarer Maître [O] en sa qualité de liquidateur de la société Vilhet fruit irrecevable à soulever la nullité de la requête et des conclusions en déféré de la société LC & P conseils,

À titre subsidiaire,

- débouter Maître [O] en sa qualité de liquidateur de la société Vilhet fruit de sa demande de nullité de la requête en déféré formée par la société LC & P conseils,

' Sur l'irrecevabilité des conclusions de la société LC & P conseils :

À titre principal,

- dire que l'irrecevabilité prévue par l'article 961 du code de procédure civile est inopposable dans le cadre du déféré,

En conséquence,

- débouter Maître [O] en sa qualité de liquidateur de la société Vilhet fruit de sa demande d'irrecevabilité des conclusions notifiées par la société LC & P conseils,

À titre subsidiaire,

- débouter Maître [O] en sa qualité de liquidateur de la société Vilhet fruit de sa demande d'irrecevabilité des conclusions notifiées par la société LC & P conseils,

' Sur le bien-fondé du déféré :

- déclarer recevable et bien fondé le présent déféré,

- annuler ou à tout le mois réformer l'ordonnance d'incident en date du 5 janvier 2023 en ce qu'elle a déclaré caduc l'appel formé le 17 mai 2022 par la SAS LC&P conseils,

- dire et juger que la notification de la déclaration d'appel à Me [O] en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Vilhet fruit, seul intimé, a bien été faite dans le délai prescrit par l'article 905-1 du code de procédure civile,

- dire et juger n'y avoir lieu à caducité de la déclaration d'appel régularisée le 17 mai 2022 par la Société LC & P conseils,

- débouter Me [O] ès qualité de liquidateur de la société Vilhet fruit de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- condamner Me [O] ès qualité au paiement de la somme de 700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- statuer ce que de droit sur les dépens dont ceux du présent déféré seront distraits au profit de Me Françoise Boulan, avocat associée du cabinet LX Aix-en-Provence.

Elle soutient que la requête en déféré n'ouvre pas une instance autonome et ne peut se voir appliquer les sanctions prévues à l'article 57 du code de procédure civile pour les actes de saisine d'une juridiction,

que la cour statuant sur déféré d'une ordonnance du président de chambre n'a pas le pouvoir de statuer sur une exception de nullité,

que les indications auxquelles est subordonnée la recevabilité des conclusions conformément à l'article 961 du code de procédure civile ne sont pas exigées pour la requête aux fins de déféré,

qu'en tout état de cause, le siège indiqué dans les actes correspond à celui fixé par les statuts et publié au RCS et est à ce titre présumé réel et sérieux, l'activité de la société LC & P conseils ne nécessite pas la présence de locaux, la preuve de la fictivité du siège n'est pas rapportée par Maître [O].

Sur le bien fondé du déféré, elle rappelle que le jugement n'opposait que deux parties à savoir Maître [P] [O] agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Vilhet fruit et la société LC & P conseils et affirme qu'elle n'a intimé qu'une seule partie, à savoir la société Vilhet fruit, en faisant apparaître en complément d'information comme représentant de l'intimée organe de la procédure collective et non en partie distincte Maître [P] [O], mandataire judiciaire, que le fichier ensuite généré par le greffe ne constitue pas la déclaration d'appel proprement dite, seul le fichier XLM saisissant la cour,

que la déclaration d'appel saisissant la cour ne pouvait imposer à l'appelant d'intimer une partie non présente en première instance et de surcroît dessaisie de ses droits en application de l'article L.641-9 I du code de commerce sans risquer de faire un appel irrecevable,

qu'en énonçant, en contradiction avec les règles de la procédure collective, que la société Vilhet fruit avait un droit propre à faire valoir, et en requérant en appel la présence aux débats de la société liquidée à peine de caducité, le président de chambre a commis un excès de pouvoir,

que le président a dénaturé les articles 905-1 et 905-2, qui n'imposent de signifier la déclaration d'appel qu'aux parties à l'instance d'appel,

que le président a également excédé ses pouvoirs en opposant d'office, sans avoir invité les parties à s'en expliquer, pour prononcer la caducité de l'appel, un moyen d'irrecevabilité tiré de l'indivisibilité du litige au sens de l'article 553 du code de procédure civile,

que la question de l'indivisibilité du litige relève de la compétence de la formation de jugement, que si le litige est indivisible, alors le jugement est nul,

que l'article 553 du code de procédure civile n'est pas applicable à l'égard d'une partie qui n'était pas dans la cause en première instance.

Par conclusions déposées et notifiées le 26 avril 2024, Maître [P] [O] agissant en qualité de liquidateur de la société Vilhet fruit demande à la cour de :

- à titre principal, vu les articles 916, 57 et 114 du code de procédure civile, prononcer la nullité de la requête en déféré de la société LC & P conseils du 12 janvier 2023, à défaut, vu les articles 916, 960, 961 du code de procédure civile, juger irrecevables les conclusions notifiées lar la société LC & P conseils les 2 février 2023 et 19 avril 2024 donc juger irrecevable la procédure en déféré,

- subsidiairement, vu les articles 900, 901, 905-2 du code de procédure civile, juger que la société LC & P conseils n'a pas signifié à la société Vilhet fruit la déclaration d'appel dans les 10 jours de l'avis de fixation à bref délai du 15 juin 2022, en conséquence, confirmer par substitution de motifs l'ordonnance d'incident du 5 janvier 2023,

- en toute hypothèse, débouter la société LC & P conseils de toutes ses demandes, fins et conclusions, condamner la société LC & P conseils à porter et payer à Maître [P] [O] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Vilhet fruit la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Le liquidateur soutient que le siège social mentionné par la société LC & P conseils dans sa requête en déféré et ses conclusions sur déféré est manifestement fictif puisque l'huissier mandaté pour l'exécution du jugement dont appel a constaté qu'il n'y avait qu'une boîte aux lettres et qu'aucun local n'y était exploité,

que Maître [O] subit un grief manifeste tiré de l'impossibilité d'exécuter le jugement dont appel exécutoire de plein droit,

que la requête en déféré doit notamment contenir les mentions prescrites par l'article 57 du code de procédure civile qui renvoie à l'article 54,

que la cour est compétente pour statuer sur la régularité des actes qui la saisissent en déféré au fur et à mesure de leur accomplissement,

Sur le fond elle prétend que contrairement à ce qu'a jugé le président de chambre, la société Vilhet fruit n'avait aucun droit propre à faire valoir et n'avait pas à être mis en cause dans le cadre de l'instance en nullité initiée par le liquidateur,

mais que dès lors que l'appelante a fait le choix délibéré d'intimer la société Vilhet fruit elle-même et pas seulement son liquidateur, et alors même que cette société n'était pas partie en première instance, il lui appartenait de lui signifier la déclaration d'appel à peine de caducité.

La société Vilhet fruit n'a pas été assignée et n'a pas constitué avocat.

MOTIFS :

Sur l'exception de nullité de la requête en déféré :

Si, comme le soutient l'appelante, la cour d'appel saisie du déféré d'une ordonnance du président de la chambre ne peut statuer que dans le champ de compétence de ce dernier, elle est cependant compétente, comme toute formation de jugement, pour apprécier la régularité de l'acte qui la saisit.

Aux termes de l'article 916 du code de procédure civile, la requête en déféré, remise au greffe de la chambre à laquelle l'affaire est distribuée, contient, outre les mentions prescrites par l'article 57 et à peine d'irrecevabilité, l'indication de la décision déférée ainsi qu'un exposé des moyens en fait et en droit.

L'article 57 dispose que la requête contient, outre les mentions énoncées à l'article 54, également à peine de nullité :

- lorsqu'elle est formée par une seule partie, l'indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre laquelle la demande est formée ou s'il s'agit d'une personne morale, de sa dénomination et de son siège social ;

- dans tous les cas, l'indication des pièces sur lesquelles la demande est fondée.

Elle est datée et signée.

L'article 54 dispose que la demande initiale est formée par assignation ou par requête remise ou adressée au greffe de la juridiction (...).

À peine de nullité, la demande initiale mentionne :

(...)

3° b) Pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l'organe qui les représente légalement ;

(...).

Les articles 54 et 57 du code de procédure civile figurent au chapitre I intitulé 'la demande initiale' du titre IV intitulé 'la demande en justice'.

Ainsi que le fait valoir à juste titre l'appelante, la requête en déféré, qui s'inscrit dans le déroulement de la procédure d'appel et n'ouvre pas une instance autonome, n'introduit pas une demande initiale au sens de l'article 54.

Elle n'est donc pas directement soumise aux dispositions des articles 54 et 57.

Le formalisme de la requête en déféré est régi par l'article 916 qui emprunte à l'article 57 le seul énoncé des mentions qui doivent y figurer, sans édicter de sanction spécifique à leur omission, la seule sanction prévue par ce texte consistant en une irrecevabilité de la requête en cas d'omission de l'indication de la décision déférée ou de l'exposé des moyens.

L'exception de nullité de la requête en déféré sera en conséquence écartée.

Sur l'irrecevabilité des conclusions notifiées par la société LC & P conseils :

Il résulte des articles 960 à 961 du code de procédure civile que les conclusions ne sont pas recevables tant que n'ont pas été fournies, s'agissant d'une personne morale, les indications sa forme, sa dénomination, son siège social et de l'organe qui la représente légalement.

Ces dispositions contenues dans le sous-titre III intitulé 'dispositions diverses' du titre VI intitulé 'dispositions particulières à la cour d'appel' s'appliquent aux conclusions notifiées devant la cour d'appel statuant sur le déféré d'une ordonnance du président de la chambre.

Si la cour d'appel saisie du déféré d'une ordonnance du président de la chambre ne peut statuer que dans le champ de compétence de ce dernier, elle est cependant compétente, comme toute formation de jugement, pour apprécier la recevabilité des conclusions qui la saisissent.

Les conclusions sur déféré déposées et notifiées par la société LC & P conseils mentionnent que cette société a son siège social au [Adresse 1].

Cette adresse du siège social correspond à celle mentionnée dans les statuts de la société et enregistrée au RCS.

Le liquidateur soutient que ce siège social est manifestement fictif puisque l'huissier mandaté pour l'exécution du jugement dont appel a constaté qu'il n'y avait qu'une boîte aux lettres et qu'aucun local n'y était exploité.

Ces constatations sont cependant insuffisantes à caractériser la fictivité du siège social au regard des éléments produits par la société LC & P conseils et notamment :

- la convention de domiciliation souscrite auprès de la SCI Carline,

- les factures EDF du 19 mars 2023 et 17 avril 2024 envoyées à cette adresse, également mentionnée comme point de livraison,

- le relevé d'identité bancaire de la société ainsi qu'un document édité par la banque le 12 mai 2023 mentionnant cette adresse,

- la liasse fiscale pour l'exercice clos le 31 mars 2023 et les avis d'impôt 2022 et 2023 pour la cotisation foncière des entreprises, établis à cette adresse.

La société LC & P conseils fait en outre valoir que son activité de conseil exercée sur le terrain et à distance ne nécessite pas de locaux et produit son bilan au 31 mars 2024 faisant apparaître une quasi absence d'immobilisations corporelles, de sorte que le fait que l'huissier n'ait pas constaté la présence de locaux d'exploitation n'est pas déterminant.

La fictivité du siège social de la société LC & P conseils n'étant pas démontrée, le liquidateur sera débouté de sa demande tendant à faire juger irrecevables les conclusions notifiées par la société LC & P conseils.

Sur la caducité de la déclaration d'appel :

Il résulte de l'examen du dossier numérique de la cour que la SAS LC & P conseils a formalisé sa déclaration d'appel du 17 mai 2022 en faisant figurer en qualité de partie intimée la SAS Vilhet fruit, RCS 500883111, domiciliée [Adresse 2].

Elle a également fait figurer en complément d'information Maître [P] [O], représentant la partie intimée en qualité d'organe de la procédure collective, mandataire liquidateur.

Une telle présentation est inadéquate puisque bien qu'étant habilité à exercer les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine par l'article L.641-9 du code de commerce, le liquidateur n'est pas le représentant légal de la personne morale débitrice qui conserve sa personnalité et son dirigeant en fonction, jusqu'à la clôture de la liquidation pour insuffisance d'actif.

L'organe de la procédure collective et le débiteur sont deux parties procéduralement distinctes.

La société LC & P conseils aurait dû intimer non pas la société Vilhet fruit mais Maître [P] [O], en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Vilhet fruit.

Il résulte en tout état de cause de cette présentation que la société Vilhet fruit, bien que n'étant pas partie au jugement dont appel, a été intimée par l'appelante, qui, à ce titre avait l'obligation de lui signifier la déclaration d'appel dans les 10 jours conformément aux dispositions de l'article 905-1 du code de procédure civile.

Cette signification n'ayant pas été effectuée, la caducité de la déclaration d'appel à l'encontre de la société Vilhet fruit est encourue.

L'ordonnance déférée sera en conséquence confirmée en ce qu'elle a déclaré caduque la déclaration d'appel régularisée par la société LC & P conseils contre la société Vilhet fruit, sauf à rectifier l'erreur purement matérielle figurant au dispositif de l'ordonnance concernant la date de la déclaration d'appel qui est le 17 mai 2022 et non le 17 mai 2017.

La caducité de l'appel formé à l'encontre de l'un des intimés n'entraîne la caducité de l'appel à l'égard de tous les intimés qu'en cas d'indivisibilité du litige entre les partie.

L'indivisibilité du litige n'est caractérisée que lorsque sa division pourrait donner lieu à des décisions contradictoires impossibles à exécuter simultanément.

En l'espèce, il n'existe aucune indivisibilité du litige puisque la société Vilhet fruit, qui comme le soulignent les deux parties, n'a aucun droit propre à faire valoir dans une instance tendant à la reconstitution de l'actif, n'était même pas partie au jugement dont appel.

La caducité de la déclaration d'appel à l'égard de la société Vilhet fruit, intimée à tort, n'affecte pas la poursuite de l'instance d'appel entre la société LC & P conseils et Maître [P] [O] pris en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Vilhet fruit.

L'ordonnance déférée sera réformée sur ce seul point.

Chacune des parties conservera la charge des dépens par elle exposés sur le déféré, sans qu'il y ait lieu à condamnation sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par défaut,

Se déclare compétente pour statuer sur l'exception de nullité de la requête en déféré et sur l'irrecevabilité des conclusions sur déféré,

Déboute Maître [P] [O] ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Vilhet fruit de son exception de nullité et de sa fin de non-recevoir,

Confirme l'ordonnance déférée en ce qu'elle a déclaré caduque la déclaration d'appel formalisée par la SAS LC&P conseils contre la société Vilhet fruit, sauf à rectifier l'erreur purement matérielle figurant au dispositif de l'ordonnance concernant la date de la déclaration d'appel qui est le 17 mai 2022 et non le 17 mai 2017, et en ce qu'elle a condamné la société LC & P conseils aux dépens de l'incident,

Infirme l'ordonnance en ce qu'elle a étendu l'effet de la caducité à l'appel dirigé contre le liquidateur et en ce qu'elle a condamné la société LC & P conseils aux dépens de l'instance au fond,

Dit que l'instance d'appel se poursuit entre la société LC & P conseils et Maître [P] [O] pris en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Vilhet fruit,

Dit n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que chacune des parties conservera la charge des dépens par elle exposés sur le déféré.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-4
Numéro d'arrêt : 23/00985
Date de la décision : 27/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-27;23.00985 ?
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