La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/06/2024 | FRANCE | N°23/08185

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 20 juin 2024, 23/08185


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4



ARRET SUR RENVOI DE CASSATION



ARRÊT AU FOND

DU 20 JUIN 2024



N°2024/















Rôle N° RG 23/08185 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLPPA







S.A. AXA FRANCE IARD





C/



S.A.S. SICEP









Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Romain CHERFILS





Arrêt en date du 20 Juin 2024 prononcé sur saisine

de la cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 25 Mai 2023, qui a cassé et annulé l'arrêt n° RG 21/15065 rendu le 17 Mars 2022 par la cour d'appel de AIX EN PROVENCE (Chambre 1-3).





DEMANDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION



S.A. AXA FRANCE IARD

prise en la pers...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRET SUR RENVOI DE CASSATION

ARRÊT AU FOND

DU 20 JUIN 2024

N°2024/

Rôle N° RG 23/08185 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLPPA

S.A. AXA FRANCE IARD

C/

S.A.S. SICEP

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Romain CHERFILS

Arrêt en date du 20 Juin 2024 prononcé sur saisine de la cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 25 Mai 2023, qui a cassé et annulé l'arrêt n° RG 21/15065 rendu le 17 Mars 2022 par la cour d'appel de AIX EN PROVENCE (Chambre 1-3).

DEMANDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION

S.A. AXA FRANCE IARD

prise en la personne de son représentant légal en exercice

, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me David CUSINATO de la SELARL ABEILLE & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Thomas MARIANI, avocat au barreau de MARSEILLE

DEFENDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION

S.A.S. SICEP

, demeurant [Adresse 2]

Défaillante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 806 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Mars 2024 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :

Madame Inès BONAFOS, Président-Rapporteur,

et M. Adrian CANDAU, conseiller- rapporteur,

chargés du rapport qui en ont rendu compte dans le délibéré de la cour composée de :

Madame Inès BONAFOS, Présidente

Mme Véronique MÖLLER, Conseillère

M. Adrian CANDAU, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Mai 2024, puis avisées par message le 23 Mai 2024, que la décision était prorogée au 20 Juin 2024.

ARRÊT

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte en date du 16 avril 2021, la SAS SICEP a fait assigner devant le Tribunal de Commerce de Marseille la SA AXA France IARD aux fins de demander au tribunal de :

*Vu les articles 1170 et 1171 du Code civil,

*Vu l'article L 113 - 1 du Code des assurances,

*Vu les pièces versées aux débats,

- Dire que la clause d'exclusion invoquée par la société AXA France IARD pour denier sa garantie au titre des pertes d'exploitation subies par la société SICEP du fait des fermetures administratives dont elle a été l'objet en raison de l'épidémie de coronavirus est réputée non écrite,

- Condamner la société AXA France IARD à verser à la société SICEP la somme de 205 882 € au titre de l'indemnisation qui lui est due,

- Condamner la société AXA France IARD à verser à la société SICEP la somme de 10 000 € en réparation du préjudice subi du fait de la résistance abusive de la société AXA France

-Condamner la société AXA France IARD à verser à la société SICEP la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner la société AXA France IARD aux entiers dépens.

Par jugement du 09 septembre 2021 le tribunal de commerce de Marseille a :

Vu les dispositions de l'article L. 113-1 du Code des Assurances,

Déclare réputée non écrite la clause d'exclusion de garantie libellée en ces termes :

« SONT EXCLUES LES PERTES D'EXPLOITATION, LORSQUE, A LA DATE DE LA DECISION DE FERMETURE, AU MOINS UN AUTRE ETABLISSEMENT, QUELLE QUE SOIT SA NATURE ET SON ACTIVITE, FAIT L'OBJET, SUR LE MEME TERRITOIRE DEPARTEMENTAL QUE CELUI DE L'ETABLISSEMENT ASSURE, D'UNE MESURE DE FERMETURE ADMINISTRATIVE, POUR UNE CAUSE IDENTIQUE. » ;

En conséquence,

Condamne la société AXA FRANCE IARD S.A. à payer à la société SICEP S.A.S. la somme de 100.000 €  à titre de provision à valoir sur les pertes d'exploitation qu'elle a subies lors de la fermeture de son établissement du 15 mars au 2 juin 2020 et du 30 octobre au 31 décembre 2020 ;

Sur le quantum de la perte d'exploitation de la société SICEP S.A.S. :

Désigne monsieur [N] [P], en qualité d'expert avec pour mission

- d'examiner les pertes d'exploitation garanties contractuellement par le contrat d'assurance, sur les périodes du 15 mars au 2 juin 2020 et du 30 octobre au 31 décembre 2020, déduction faite d'une franchise de 3 (trois) jours,

- d'évaluer le montant des pertes d'exploitation consécutives à la baisse du chiffre d'affaires causée par l'interruption ou la réduction de l'activité, de la marge brute (chiffre d'affaires -charges variables) incluant les charges salariales et les économies réalisées, en recherchant si du chiffre d'affaires a été généré par des ventes à emporter ou « click and collect » et en le retranchant alors, en prenant compte les facteurs externes indépendamment des pertes d'exploitation liées a la fermeture administrative,

- de déterminer le montant de l'indemnité due au titre de la garantie « PERTE D'EXPLOITATION SUITE A FERMETURE ADMINISTRATIVE », prévue au contrat d'assurance pour les périodes du 15 mars au 2 juin 2020 et du 30 octobre au 31 décembre 2020 ;

Condamné la société AXA FRANCE IARD S.A. à payer à la société SICEP S.A.S. la somme de 2.000€ au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

Conformément aux dispositions de l'article 696 du Code de Procédure Civile, condamne la société AXA FRANCE IARD S.A. aux dépens toutes taxes comprises de la présente instance tels qu'énoncés par l'article 695 du Code de Procédure Civile, étant précisé que les droits, taxes et émoluments perçus par le secrétariat-greffe de la présente juridiction sont liquides a la somme de 70,55 euros T.T.C.) ;

Réservé les dépens à venir ;

Conformément aux dispositions des articles 514 et 515 du Code de Procédure Civile, dit que le présent jugement est de plein droit exécutoire à titre provisoire ;

Rejette pour le surplus toutes autres demandes, 'ns et conclusions contraires aux dispositions du présent jugement.

Par arrêt du 17 mars 2022 la Cour d'appel d'Aix en Provence a confirmé le jugement en date du 10 mars 2021 en toutes ses dispositions y ajoutant la condamnation de la SA AXA France IARD au paiement d'une somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code procédure civile et aux dépens.

Par arrêt du 25 mai 2023, la cour de cassation a cassé cet arrêt en toute ses dispositions considérant :

-d'une part que la circonstance particulière de réalisation du risque privant l'assuré du bénéfice de la garantie n'était pas l'épidémie mais la situation dans laquelle, à la date de la fermeture, un autre établissement faisait l'objet d'une mesure de fermeture administrative pour une cause identique à l'une de celles énumérées par la clause d'extension de garantie, de sorte que l'ambiguïté alléguée du terme « épidémie » était sans incidence sur  la  compréhension,  par  l'assuré,  des  cas  dans  lesquels  l'exclusion s'appliquait, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

-d'autre part que la garantie couvrait le risque de pertes d'exploitation consécutives, non à une épidémie, mais à une fermeture administrative ordonnée à la suite d'une maladie contagieuse, d'un meurtre, d'un suicide, d'une épidémie ou d'une intoxication, de sorte que l'exclusion considérée, qui laissait dans le champ de la garantie les pertes d'exploitation consécutives à une fermeture administrative liée à ces autres causes ou survenue  dans  d'autres  circonstances  que  celles  prévues  par  la  clause d'exclusion, n'avait pas pour effet de vider la garantie de sa substance, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Elle a renvoyé l'affaire devant la Cour d'appel d'Aix en Provence autrement composée.

La S.A. AXA FRANCE IARD a saisi la cour d'appel par déclaration au greffe du 21 juin 2023 pour obtenir la réformation du jugement rendu le 09 septembre 2021 par le Tribunal de commerce de Marseille en ce qu'il a :

  - Déclaré réputée non écrite la clause d'exclusion de garantie libellée en ces termes : « SONT EXCLUES - LES PERTES D'EXPLOITATION, LORSQUE, A LA DATE DE LA DECISION DE FERMETURE, AU MOINS UN AUTRE ETABLISSEMENT,QUELLE QUE SOIT SA NATURE ET SON ACTIVITE, FAIT L 'OBJET, SUR LE MEME TERRITOIRE DEPARTEMENTAL QUE CELUI DE L 'ETABLISSEMENT ASSURE, D 'UNE MESURE DE FERMETURE ADMINISTRATIVE, POUR UNE CAUSE IDENTIQUE »

 - Condamné la Société AXA FRANCE IARD S.A. à payer à la Société SICEP S.A.S. la somme de 100.000 €  à titre de provision, à valoir sur les pertes d'exploitation qu'elle a subies lors de la fermeture de son établissement du 15 mars au 2 juin 2020 et du 30 octobre au 31 décembre 2020.

 - Désigné Monsieur [N] [P], en qualité d'expert avec pour mission :

 ° d'entendre les parties en leurs explications et de répondre à leurs dires et à leurs observations, ° de se faire communiquer tous documents utiles à ses investigations, notamment l'estimation effectuée par la Société SICEP S.A.S. et/ou son expert-comptable, accompagnée de ses bilans et comptes d'exploitation sur les trois dernières années,

° d'entendre tous sachants,

° de s'adjoindre, si besoin, un sapiteur de son choix,

 ° d'examiner les pertes d'exploitation garanties contractuellement par le contrat d'assurance, sur les périodes du 15 mars au 2 juin 2020 et du 30 octobre au 31 décembre 2020, déduction faite d'une franchise de 3 (trois) jours,

 ° d'évaluer le montant des pertes d'exploitation consécutives à la baisse du chiffre d'affaires causée par l'interruption ou la réduction de l'activité, de la marge brute (chiffre d'affaires -charges variables) incluant les charges salariales et les économies réalisées, en recherchant si du chiffre d'affaires a été généré par des ventes à emporter ou « click and collect » et en le retranchant alors, en prenant compte les facteurs externes indépendamment des pertes d'exploitation liées à la fermeture administrative,

° de déterminer le montant de l'indemnité due au titre de la garantie « PERTE D'EXPLOITATION SUITE A FERMETURE ADMINISTRATIVE », prévue au contrat d'assurance pour les périodes du 15 mars au 2 juin 2020 et du 30 octobre au 31 décembre 2020,

 - Condamné la Société AXA FRANCE IARD S.A. à payer à la Société SICEP S.A.S. la somme de 2 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

 - Condamné la Société AXA FRANCE IARD S.A. aux dépens toutes taxes comprises de la présente instance tels qu'énoncés par l'article 695 du Code de Procédure Civile, étant précisé que les droits, taxes et émoluments perçus par le secrétariat-greffe de la présente juridiction sont liquidés à la somme de 70,55 euros

- Réservé les dépens à venir.

- Dit que le présent jugement est de plein droit exécutoire à titre provisoire.

- Débouté la SA AXA France IARD de ses demandes.

L'affaire a été fixée à l'audience des plaidoiries du 05 mars 2024 par avis communiqué aux parties le 20 septembre 2023.

 

Dans ses conclusions notifiées le 09 août 2023 et dénoncées avec la déclaration d'appel le 15 septembre 2023 la société AXA FRANCE IARD demande à la cour :

Vu la clause d'exclusion stipulée dans le contrat d'assurance souscrit par l'assurée auprès d'AXA FRANCE IARD,

Vu les pièces produites aux débats,

Vu les articles 1103, 1170 et 1192 du Code civil,

Vu les articles L. 113-1 et L. 121-1 du Code des assurances, 

Vu le jugement dont appel,

-  DECLARER recevable et bien-fondé l'appel interjeté par la société AXA FRANCE IARD et, y faisant droit :

 A TITRE PRINCIPAL  

-  INFIRMER le jugement du 9 septembre 2021 du Tribunal de commerce de Marseille en ce qu'il a : 

-  Considéré que la clause d'exclusion ne serait ni formelle ni limitée au sens de l'article L.113-1 du Code des assurances et qu'AXA FRANCE IARD devra garantir la société SICEP au titre de la perte d'exploitation de son activité de restauration ; 

-  Condamné AXA FRANCE IARD à payer à la société SICEP, la somme de 100.000 euros à titre de provision, à valoir sur les pertes d'exploitation qu'elle a subies,

 -  Ordonné une expertise judiciaire et nommé à cette fin monsieur [N] [P] avec la mission telle que décrite dans le jugement entrepris, 

-  Condamné AXA FRANCE IARD à payer à la société SICEP la somme de 2.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

-  Condamné AXA FRANCE IARD aux entiers dépens. 

-  INFIRMER le jugement du 9 septembre 2021 du Tribunal de commerce de Marseille en ce qu'il a débouté AXA FRANCE IARD de ses demandes tendant à juger de la validité de la clause d'exclusion;  

STATUANT A NOUVEAU  

-  JUGER que l'extension de garantie relative aux pertes d'exploitation consécutives à une fermeture administrative pour cause d'épidémie est assortie d'une clause d'exclusion, qui est applicable en l'espèce ;

-  JUGER que cette clause d'exclusion respecte le caractère formel exigé par l'article L. 113-1 du Code des assurances ; 

-  JUGER que cette clause d'exclusion ne vide pas l'extension de garantie de sa substance et respecte le caractère limité de l'article L.113-1 du Code des assurances et qu'elle ne prive pas l'obligation essentielle d'AXA FRANCE IARD de sa substance au sens de l'article 1170 du Code civil ; 

-  JUGER qu'AXA n'a commis aucun acte de résistance abusive ;  

En conséquence : 

-  JUGER applicable en l'espèce la clause d'exclusion dont est assortie l'extension de garantie relative aux pertes d'exploitation consécutives à une fermeture administrative pour cause d'épidémie ;

 

-  DEBOUTER la société SICEP de l'intégralité de ses demandes formées à l'encontre d'AXA FRANCE IARD et la condamner à lui restituer les sommes perçues au titre de l'exécution du jugement du 9 septembre 2021 ;

EN TOUT ETAT DE CAUSE 

-  DEBOUTER la société SICEP de toutes demandes, fins ou conclusions contraires au présent dispositif;  

-  CONDAMNER la société SICEP à payer à AXA FRANCE IARD la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de Maître Romain CHERFILS, membre de la SELARL LEXAVOUE AIX EN PROVENCE, avocat associé aux offres de droit. 

 L'avis de fixation de l'affaire à l'audience du 05 mars 2024, a été notifié par le greffe le 20 septembre 2023 et signifié à la personne de l'intimée le 27 septembre 2023.

A l'audience du 05 mars 2024, l'affaire a été retenue.

MOTIVATION

Il n'est pas contesté et il résulte des pièces contractuelles versées au dossier de la procédure que la relation des parties est régie par un contrat d'assurance Multirisque Professionnelle avec effet au 01/01/2020 comprenant les conditions générales 690200Q et les conditions particulières du contrat n°6733851004.

Les pages 9 et 10 des conditions particulières mentionne un paragraphe relatif à une extension de garantie à la perte d'exploitation suite à la fermeture administrative de l'établissement.

Cette garantie porte sur les pertes d'exploitation consécutives à la fermeture provisoire totale ou partielle de l'établissement assuré lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

1.la décision de fermeture a été prise par une autorité administrative compétente et extérieure à l'assuré.

2. La décision de fermeture est la conséquence d'une maladie contagieuse, d'un meurtre, d'un suicide, d'une épidémie ou d'une intoxication.

La garantie commence le jour du sinistre et dure tant que les résultats de l'établissement sont affectés par le dit sinistre dans la limite de 3 mois maximum.

Le montant de la garantie est limité à 300 fois l'indice.

L'assuré conserve à sa charge une franchise de 3 jours ouvrés.

La clause d'exclusion de garantie opposée par la société AXA France IARD pour dénier à l'assuré la garantie perte d'exploitation pour la période de fermeture de l'établissement en raison de l'épidémie de COVID 19   est rédigée comme suit :

SONT EXCLUES :

LES PERTES D'EXPLOITATION, LORSQUE, A LA DATE DE LA DECISION DE FERMETURE, AU MOINS UN AUTRE ETABLISSEMENT, QUELLE QUE SOIT SA NATURE ET SON ACTIVITE, FAIT L'OBJET, SUR LE MEME TERRITOIRE DEPARTEMENTAL QUE CELUI DE L'ETABLISSEMENT ASSURE, D'UNE MESURE DE FERMETURE ADMINISTRATIVE, POUR UNE CAUSE IDENTIQUE.

L'assuré fait valoir que cette clause doit être réputée non écrite voire nulle comme non conforme aux dispositions régissant la légalité des clauses d'exclusion de garantie.

L'article L113-1 du code des assurances dispose que les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré sont à la charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police.

Ce texte implique que pour être opposable à l'assuré, la portée ou l'étendue de la clause d'exclusion de garantie doit être claire, précise, sans ambigüité et sans incertitude afin que celui-ci puisse déterminer le périmètre de la non garantie et si, de ce fait, l'assurance proposée correspond à ses attentes et est conforme à l'intérêt de l'entreprise.

La jurisprudence en déduit que lorsqu'elle est sujette à interprétation, une clause d'exclusion de garantie ne peut être considérée comme formelle et limitée.

En ce qui concerne la clause de garantie des pertes financières précitée offerte par AXA à sa clientèle  ,même si les conditions d'application de la clause limitant l'étendue de la garantie  ont généré un contentieux important , si AXA a transigé avec une partie de ses assurés,  si les clauses de cette nature ont suscité une réflexion sur la qualité de rédaction des polices d'assurance notamment par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution , si de ce fait l'assureur a pu vouloir en modifier les termes s'agissant des contrats à venir, la cour de cassation a jugé que la clause litigieuse  de cette police répondait aux critères définis par le texte précité et sa jurisprudence.

La plupart des cours d'appel saisies sur renvoi lui ont emboîté le pas.

Dans l'arrêt du 25 mai 2023 concernant le présent litige ,la Cour de cassation relève que s'agissant d'un contrat prévoyant la garantie des pertes d'exploitation en cas de fermeture administrative consécutive à certaines causes qu'elle énumère, dont l'épidémie, est formelle la clause qui exclut ces pertes d'exploitation de la garantie, lorsque, à la date de la décision de fermeture, au moins un autre établissement, quelles que soient sa nature et son activité, fait l'objet, sur le même territoire départemental, d'une mesure de fermeture administrative, pour une cause identique ;

Elle ajoute que n'a pas pour effet de vider la garantie de sa substance la clause qui exclut de la garantie des pertes d'exploitation consécutives à la fermeture administrative de l'établissement assuré, pour plusieurs causes qu'elle énumère, dont l'épidémie, lorsque, à la date de la décision de fermeture, au moins un autre établissement, quelles que soient sa nature et son activité, fait l'objet, sur le même territoire départemental, d'une mesure de fermeture administrative, pour une cause identique à l'une de celles énumérées.

La jurisprudence retient ainsi que le risque couvert par la garantie est la fermeture administrative pouvant avoir plusieurs causes expressément mentionnées, un meurtre, un suicide, une épidémie, une maladie contagieuse, une intoxication et non le risque épidémie et que la clause d'exclusion portant sur la fermeture administrative édictée à l'égard de plusieurs établissements n'a pas pour effet de vider la garantie de sa substance et reste formelle et limitée.

La garantie contractuelle objet du litige couvre ainsi les hypothèses de la fermeture du seul établissement exploité par la SAS SICEP dans le département des Bouches du Rhône en raison de la survenance d'un meurtre, d'un suicide, d'une épidémie, d'une maladie contagieuse, d'une intoxication.

La clause conditionnant la garantie à l'absence de fermeture par l'autorité administrative d'autres établissements du même département pour une cause identique est limitée en ce qu'elle ne fait pas obstacle à la garantie de la fermeture administrative de l'établissement pour les autres causes qu'une épidémie.

La jurisprudence décide ainsi que s'agissant de la fermeture administrative pour cause d'épidémie, le fait que la garantie contractuelle porte sur la fermeture par l'autorité administrative du seul établissement exploité par la SAS SICEP dans le territoire de l'intégralité du département urbanisé des Bouches du Rhône en raison d'une épidémie ne vide pas la garantie de sa substance.

Dans un arrêt du 21 septembre 2023 n°21/25921, la cour de cassation statuant sur le moyen suivant lequel il est  illusoire qu'une fermeture administrative liée à une épidémie, s'agissant d'une maladie contagieuse se propageant à une population étendue, puisse ne concerner qu'un unique établissement et relevant que l'assureur ne cite aucun cas de fermeture administrative isolée suite à une propagation par contagion mais uniquement des cas d'intoxications par des produits corrompus ou causées par un manque d'hygiène ou d'entretien, a maintenu que la garantie couvrant le risque de pertes d'exploitation consécutives, non à une épidémie, mais à une fermeture administrative ordonnée à la suite d'une maladie contagieuse, d'un meurtre, d'un suicide, d'une épidémie ou d'une intoxication, de sorte que l'exclusion considérée, qui laissait dans le champ de la garantie les pertes d'exploitation consécutives à une fermeture administrative liée à ces autres causes ou survenue dans d'autres circonstances que celles prévues par la clause d'exclusion, n'avait pas pour effet de vider la garantie de sa substance.

Or la fermeture administrative pour laquelle l'assurée demande la garantie de l'assureur résulte d'un arrêté du 14 mars 2020 édictant l'interdiction pour les restaurants et débits de boissons de l'ensemble du territoire et donc de l'intégralité du département des Bouches du Rhône d'accueillir du public du 15 mars 2020 au 15 avril 2020, prorogée jusqu'au 2 juin 2020 par décret du 14 avril 2020.

Par voie de conséquence, il y a lieu de réformer sur ce point le jugement du tribunal de commerce de Draguignan en application de la jurisprudence susvisée.

La SA AXA France IARD demande que soit ordonnée la restitution des sommes qu'il a versées en vertu du jugement assorti de l'exécution provisoire,

Cependant le présent arrêt, infirmatif sur ce point, constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement, et les sommes devant être restituées portent intérêt au taux légal à compter de la signification, valant mise en demeure, de la décision ouvrant droit à restitution ; Il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu de statuer cette demande.

Il en est de même relativement à l'expertise ordonnée par le premier juge.

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

La décision du premier juge étant réformée au principal, il y a lieu de l'infirmer en ce qu'elle condamne la SA AXA France IARD aux dépens et alloue une somme de 2000 euros à la SAS SICEP sur le fondement de l'article 700 du code de procédure.

A l'issue du litige, il convient ainsi de condamner la SAS SICEP aux dépens et au paiement d'une somme de 1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire , par mise à disposition au greffe :

Infirme le jugement du tribunal de commerce de Marseille du 09 septembre 2021

Statuant à nouveau,

Déboute la SAS SICEP de sa demande d'indemnisation des sinistres perte d'exploitation du fait de la fermeture de l'établissement en application des mesures gouvernementales de protection contre la propagation de l'épidémie de COVID 19 formulée à l'encontre de son assureur la SA AXA France IARD.

Dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de restitution des sommes versées en vertu de l'exécution provisoire attachée au jugement déféré à la cour .

Condamne la SAS SICEP à payer la somme de 1500 euros à la SA AXA France IARD en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la SAS SICEP aux dépens de première instance et d'appel y compris les frais d'expertise, dont distraction au profit des avocats en ayant fait l'avance.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Juin 2024.

Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Monsieur Achille TAMPREAU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 23/08185
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;23.08185 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award