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20/06/2024 | FRANCE | N°23/01969

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 20 juin 2024, 23/01969


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4



ARRET SUR RENVOI DE CASSATION



ARRÊT AU FOND

DU 20 JUIN 2024



N°2024/







Rôle N° RG 23/01969 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BKX5W







S.A. AXA FRANCE IARD





C/



S.A.R.L. BERAHA (À L'ENSEIGNE [3])















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Romain CHERFILS



Me Jean-pierre TERTIAN




r>Arrêt en date du 20 Juin 2024 prononcé sur saisine de la cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 1er Décembre 2022, qui a cassé et annulé l'arrêt n° RG 20/10358 rendu le 20 Mai 2021 par la cour d'appel de AIX EN PROVENCE (Chambre 1-3).





DEMANDERESSE SUR RENVOI DE ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRET SUR RENVOI DE CASSATION

ARRÊT AU FOND

DU 20 JUIN 2024

N°2024/

Rôle N° RG 23/01969 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BKX5W

S.A. AXA FRANCE IARD

C/

S.A.R.L. BERAHA (À L'ENSEIGNE [3])

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Romain CHERFILS

Me Jean-pierre TERTIAN

Arrêt en date du 20 Juin 2024 prononcé sur saisine de la cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 1er Décembre 2022, qui a cassé et annulé l'arrêt n° RG 20/10358 rendu le 20 Mai 2021 par la cour d'appel de AIX EN PROVENCE (Chambre 1-3).

DEMANDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION

S.A. AXA FRANCE IARD

prise en la personne de son représentant légal en exercice

, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Marine CHARPENTIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Pascal ORMEN de la SELARL ORMEN PASSEMARD & AUTRES, avocat au barreau de PARIS substituée par Me David CUSINATO, avocat au barreau de MARSEILLE

DEFENDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION

S.A.R.L. BERAHA

(À L'ENSEIGNE [3])

, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Jean-pierre TERTIAN de la SCP TERTIAN-BAGNOLI & ASSOCIÉS, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 13 Février 2024 en audience publique devant la cour composée de :

Madame Inès BONAFOS, Présidente,

Mme Véronique MÖLLER, Conseillère

M. Adrian CANDAU, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 18 Avril 2024, puis avisées par message le 18 Avril 2024, que la décision était prorogée au 23 Mai 2024, puis avisées par message le 23 Mai 2024, que la décision était prorogée au 20 Juin 2024.

ARRÊT

FAITS ET PROCÉDURE

 

La société Beraha, exploitante d'un fonds de commerce de restaurant a souscrit le 7 février 2014 auprès de la société Axa France IARD, un contrat d'assurance « multirisque professionnelle » incluant une garantie « protection financière ».

A la suite d'un arrêté, publié au Journal officiel le 15 mars 2020, portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus Covid-19, édictant notamment l'interdiction pour les restaurants et débits de boissons d'accueillir du public du 15 mars 2020 au 15 avril 2020, prorogée jusqu'au 2 juin 2020 par décret du 14 avril 2020, la société Beraha a effectué une déclaration de sinistre auprès de l'assureur afin d'être indemnisée de ses pertes d'exploitation en application d'une clause du contrat stipulant que : « La garantie est étendue aux pertes d'exploitation consécutives à la fermeture provisoire totale ou partielle de l'établissement assuré, lorsque les deux conditions suivantes sont réunies : 1. La décision de fermeture a été prise par une autorité administrative compétente, et extérieure à vous-même. 2. La décision de fermeture est la conséquence d'une maladie contagieuse, d'un meurtre, d'un suicide, d'une épidémie ou d'une intoxication ».

L'assureur a refusé de garantir le sinistre en faisant valoir que l'extension de garantie ne pouvait pas être mise en 'uvre en raison de la clause excluant : « ... les pertes d'exploitation lorsque, à la date de la décision de fermeture, au moins un autre établissement, quelle que soit sa nature et son activité, fait l'objet, sur le même territoire départemental que celui de l'établissement assuré, d'une mesure de fermeture administrative, pour une cause identique ».

La société Beraha a effectué deux autres déclarations de sinistre à la suite de nouvelles fermetures administratives, ordonnées du 28 septembre au 4 octobre 2020, par arrêté préfectoral du 27 septembre 2020, et à compter du 30 octobre 2020, par décret du 29 octobre 2020.

Elle a assigné l'assureur devant un tribunal de commerce à fin de garantie.

 

 

Par jugement en date du 15 octobre 2020, le Tribunal de commerce de MARSEILLE a : 

Vu les articles l'article L113-1 du Code des assurances et 1162 du Code civil, dans sa rédaction antérieure au 1er octobre 2016,

-          Déclare réputée non écrite, la clause d'exclusion de garantie dont se prévaut la Société AXA FRANCE IARD telle que ci-dessous reproduite : « SONT EXCLUES LES PERTES D'EXPLOITATION, LORSQUE, A LA DATE DE LA DECISION DE FERMETURE, AU MOINS UN AUTRE ETABLISSEMENT, QUELLE QUE SOIT SA NATURE ET SON ACTIVITE, FAIT L'OBJET, SUR LE MEME TERRITOIRE DEPARTEMENTAL QUE CELUI DE L'ETABLISSEMENT ASSURE, D 'UNE MESURE DE FERMETURE ADMINISTRATIVE, POUR UNE CAUSE IDENTIQUE »

-          Condamne la Société AXA FRANCE IARD S.A. à payer à la société BERAHA S.A.R.L. la somme de 92.818 € à titre de provision, au titre des pertes d'exploitation qu'elle a subies lors de la fermeture de son établissement du 15 mars au 2 juin 2020 et ce, avec intérêts au taux légal à compter du 21 aout 2020, date de la mise en demeure ;

-          Condamne la société AXA FRANCE IARD à mettre en 'uvre la procédure d'expertise prévue au contrat dans les deux mois de la signi'cation du présent jugement et passe ce délai, sous astreinte provisoire de 500 € par jour de retard pendant un mois ;

Vu les dispositions de l'article 444 du Code de Procédure Civile,

-          ORDONNE la réouverture des débats et renvoie l'affaire a la plus prochaine audience utile, a'n qu'à l'issue de la procédure d'expertise prévue au contrat les parties s'expliquent contradictoirement sur le montant dé'nitif de l'indemnité due à la société BERAHA au titre des pertes d'exploitation qu'elle a subies lors de la fermeture de son établissement du 15 mars au 2 juin 2020 ;

-          Seul l'enrôlement emportant saisine du tribunal,

-          Laisse à la charge de la société BERAHA S.A.R.L. le paiement des frais de remise au rôle de la présente affaire ;

-          Dit que le défaut de remise au rôle emporte absence de saisine de notre juridiction ;

-          Condamne la société AXA FRANCE IARD S.A. à payer à la société BERAHA S.A.R.L. la somme de 3.500 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

-          Conformément aux dispositions de l'article 696 du Code de Procédure Civile,

-          Condamne la société AXA FRANCE IARD S.A. aux dépens toutes taxes comprises de la présente instance tels qu'énoncés par l'article 695 du Code de Procédure Civile, étant précisé que les droits, taxes et émoluments perçus par le secrétariat-greffe de la présente juridiction sont liquides à la somme de 74,18 € TTC ;

-          Conformément aux dispositions des articles 514 et suivants du Code de Procédure Civile, dit que le présent jugement est de plein droit, exécutoire à titre provisoire ;

-          Rejette pour le surplus toutes autres demandes, 'ns et conclusions contraires aux dispositions du présent jugement ;

Par arrêt en date du 20 mai 2021, la Cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-3) a :

-         Confirmé le jugement déféré,

Y ajoutant,

-         Dit qu'en vertu du contrat d'assurance souscrit le 7 février 2014 la SA Axa France IARD doit garantir la SARL Beraha des pertes exploitation subies à la suite à des fermetures administratives ordonnées en raison de l'épidémie de Covid-19, pour les périodes suivantes :

. du 28 septembre au 4 octobre 2020,

. à compter du 30 octobre 2020 et dans les limites contractuelles,

-         Condamné la SA Axa France IARD à payer à la SARL Beraha une provision complémentaire de 79 43 0€ à valoir sur l'indemnisation des pertes d'exploitation subies lors de la fermeture de son établissement pour les périodes suivantes : du 28 septembre 2020 au 4 octobre 2020,  du 30 octobre 2020 au 31 décembre 2020,

-         Dit que ladite somme portera intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

-         Condamné, pour les périodes précitées, la SA Axa France IARD à mettre en 'uvre la procédure d'expertise prévue au contrat dans les deux mois de la signification du présent arrêt, et passé ce délai, sous astreinte provisoire de 500 € par jour de retard pendant un mois,

-         Renvoyé la cause et les parties devant le tribunal de commerce de Marseille pour la suite de la procédure,

-         Condamné la SA Axa France IARD à payer à la SARL Beraha la somme de 7000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-         Condamné la SA Axa France IARD aux dépens d'appel et fait application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Me Jean Pierre Tertian.

Par arrêt en date du 1er décembre 2022, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a :

-        CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

-        Remis l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;

-        Condamné la SARL Beraha aux dépens ;

-        En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes

Au visa de l'article L. 113-1 du code des assurances, la Cour rappelle :

-que seules les clauses d'exclusion de garantie qui privent l'assuré du bénéfice de la garantie en considération de circonstances particulières de la réalisation du risque doivent être formelles et limitées. Une clause d'exclusion n'est pas formelle lorsqu'elle ne se réfère pas à des critères précis et nécessite interprétation.

Elle considère que la circonstance particulière de réalisation du risque privant l'assuré du bénéfice de la garantie n'était pas l'épidémie mais la situation dans laquelle, à la date de la fermeture, un autre établissement faisait l'objet d'une mesure de fermeture administrative pour une cause identique à l'une de celles énumérées par la clause d'extension de garantie, de sorte que l'ambiguïté alléguée du terme « épidémie » était sans incidence sur la compréhension, par l'assuré, des cas dans lesquels l'exclusion s'appliquait, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

-que les clauses d'exclusion de garantie, qui privent l'assuré du bénéfice de la garantie en considération de circonstances particulières de la réalisation du risque, doivent être formelles et limitées. Une clause d'exclusion n'est pas limitée lorsqu'elle vide la garantie de sa substance, en ce qu'après son application elle ne laisse subsister qu'une garantie dérisoire.

Elle considère que la garantie couvrait le risque de pertes d'exploitation consécutives, non à une épidémie, mais à une fermeture administrative ordonnée à la suite d'une maladie contagieuse, d'un meurtre, d'un suicide, d'une épidémie ou d'une intoxication, de sorte que l'exclusion considérée, qui laissait dans le champ de la garantie les pertes d'exploitation consécutives à une fermeture administrative liée à ces autres causes ou survenue dans d'autres circonstances que celles prévues par la clause d'exclusion, n'avait pas pour effet de vider la garantie de sa substance, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Par déclaration en date du 2 février 2023, la SA AXA France IARD a saisi la Cour d'Appel sur renvoi, en l'état de la cassation totale intervenue le 1er décembre 2022 par l'arrêt de Cassation, aux fins de réformer et/ou annuler le jugement rendu par le Tribunal de Commerce d'Aix-en-Provence le 30 novembre 2020, en ses dispositions qui ont :

-Déclaré valable l'assignation délivrée le 9 septembre 2020 à la requête de la SARL BERAHA.

 - Déclaré réputée non écrite, la clause d'exclusion de garantie dont se prévaut la société AXA FRANCE IARD telle que ci-dessous reproduite :

« SONT EXCLUES LES PERTES D'EXPLOITATION, LORSQUE, A LA DATE DE LA DECISION DE FERMETURE, AU MOINS UN AUTRE ETABLISSEMENT, QUELLE QUE SOIT SA NATURE ET SON ACTIVITE, FAIT L'OBJET, SUR LE MEME TERRITOIRE DEPAR TEMENTAL QUE CELUI DE L'ETABLISSEMENT ASSURE, D'UNE MESURE DE FERMETURE ADMINISTRATIVE, POUR UNE CAUSE IDENTIQUE »

 - Condamné la société AXA FRANCE TARD S.A. à payer à la SARL BERAHA la somme de 92.818 € à titre de provision, au titre des pertes d'exploitation qu'elle a subies lors de la fermeture de son établissement du 15 mars au 2 juin 2020 et ce, avec intérêts au taux légal à compter du 21 août 2020, date de la mise en demeure.

- Condamné la société AXA FRANCE IARD à mettre en 'uvre la procédure d'expertise prévue au contrat dans les deux mois de la signification du présent jugement et passé ce délai, sous astreinte provisoire de 500 € par jour de retard pendant un mois.

- Ordonné la réouverture des débats et renvoyé l'affaire à la plus prochaine audience utile, afin qu'à l'issue de la procédure d'expertise prévue au contrat les parties s'expliquent contradictoirement sur le montant définitif de l'indemnité due à la SARL BERAHA au titre des pertes d'exploitation qu'elle a subies lors de la fermeture de son établissement du 15 mars au 2 juin 2020.

- Condamné la société AXA FRANCE IARD S.A. à payer à la SARL BERAHA la somme de 3.500 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

 - Condamné la société AXA FRANCE IARD S.A. aux dépens toutes taxes comprises de la présente instance tels qu'énoncés par l'article 695 du Code de Procédure Civile.

- Dit que le présent jugement est de plein droit, exécutoire à titre provisoire.

- Débouté la société AXA FRANCE IARD de ses demandes, fins et conclusions.

Par conclusions du 30 janvier 2024 la société AXA France IARD sollicite voir :

Vu les articles 1103,1108, 1131 ancien, 1143, 1169, 1170, et 1188 et suivants du Code civil, Vu les articles L.112-4, L. 113-1 et L.121-1 du Code des assurances, Vu les articles 564, 700 et 910-4 du Code de procédure civile, Vu le jugement dont appel,

Il est demandé à la Cour de :

-           DECLARER recevable et bien-fondé l'appel interjeté par la société AXA FRANCE IARD et, y faisant droit :

A TITRE LIMINAIRE,

-           JUGER TANT IRRECEVABLE QUE MAL-FONDEE toute demande de la société BERAHA fondée sur l'article L112-4 du Code des assurances ;

-           JUGER TANT IRRECEVABLE QUE MAL-FONDEE toute demande de la société BERAHA au titre d'un manquement d'AXA FRANCE à son obligation d'information et de conseil ;

En conséquence :

-           DEBOUTER la société Beraha de ses demandes formulées au titre de l'article L. 112-4 du Code des assurances et du devoir d'information et de conseil.

A TITRE PRINCIPAL

-           INFIRMER le jugement du 15 octobre 2020 du Tribunal de commerce de Marseille, en toutes ses dispositions et notamment en ce qu'il a :

.           JUGE que la clause d'exclusion ne respectait pas les caractères formel et limité exigés par l'article L. 113-1 du Code des assurances ;

.           JUGE que la clause d'exclusion vidait l'extension de garantie de sa substance et privait l'obligation essentielle d'AXA France IARD de sa substance ;

            Et en ce qu'il a :

 - Déclaré valable l'assignation délivrée le 9 septembre 2020 à la requête de la Société BERAHA. ;

- Déclaré réputée non écrite, la clause d'exclusion de garantie dont se prévaut la société AXA FRANCE IARD telle que ci-dessous reproduite : « SONT EXCLUES LES PERTES D'EXPLOITATION, LORSQUE, A LA DATE DE LA DECISION DE FERMETURE, AU MOINS UN AUTRE ETABLISSEMENT, QUELLE QUE SOIT SA NATURE ET SON ACTIVITÉ, FAIT L'OBJET, SUR LE MEME TERRITOIRE DEPARTEMENTAL QUE CELUI DE L'ETABLISSEMENT ASSURE, D'UNE MESURE DE FERMETURE ADMINISTRATIVE, POUR UNE CAUSE IDENTIQUE »

- Condamné la société AXA FRANCE TARD S.A. à payer à la SARL BERAHA la somme de 92.818 € à titre de provision, au titre des pertes d'exploitation qu'elle a subies lors de la fermeture de son établissement du 15 mars au 2 juin 2020 et ce, avec intérêts au taux légal à compter du 21 août 2020 ;

- Condamné la société AXA FRANCE IARD à mettre en 'uvre la procédure d'expertise prévue au contrat dans les deux mois de la signification du présent jugement et passé ce délai, sous astreinte provisoire de 500 € par jour de retard pendant un mois ;

 - Ordonné la réouverture des débats et renvoie l'affaire à la plus prochaine audience utile, afin qu'à l'issue de la procédure d'expertise prévue au contrat les parties s'expliquent contradictoirement sur le montant définitif de l'indemnité due à la SARL BERAHA au titre des pertes d'exploitation qu'elle a subies lors de la fermeture de son établissement du 15 mars au 2 juin 2020 ;

- Condamné la société AXA FRANCE IARD S.A. à payer à la SARL BERAHA la somme de 3.500 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

 - Condamné la société AXA FRANCE IARD S.A. aux dépens toutes taxes comprises de la présente instance

- Dit que le présent jugement est de plein droit, exécutoire à titre provisoire ;

- Rejeté toutes autres demandes, fins et conclusions de la SA AXA France IARD.

STATUANT A NOUVEAU

-           JUGER que l'extension de garantie relative aux pertes d'exploitation consécutives à une fermeture administrative pour cause d'épidémie est assortie d'une clause d'exclusion, qui est applicable en l'espèce ;

-           JUGER que cette clause d'exclusion respecte le caractère formel exigé par l'article L. 113-1 du Code des assurances ;

-           JUGER que cette clause d'exclusion ne vide pas l'extension de garantie de sa substance et respecte le caractère limité de l'article L. 113-1 du Code des assurances et qu'elle ne prive pas l'obligation essentielle d'AXA FRANCE IARD de sa substance au sens de l'article 1170 du Code civil et qu'elle n'est pas contraire aux dispositions des articles 1108, 1131 ancien et 1169 du Code civil ;

-           JUGER que AXA FRANCE ne s'est rendue coupable d'aucune « violence » à l'encontre de l'intimée au sens de l'article 1143 du Code civil ;

-           JUGER que l'extension de garantie relative aux pertes d'exploitation consécutives à une fermeture administrative pour cause d'épidémie est assortie d'une clause d'exclusion, qui est inscrite en des termes très apparents, de sorte que sa rédaction est conforme aux règles de formalisme prescrites par l'article L. 112-4 du Code des assurances ;

 - JUGER la demande de condamnation au titre du devoir d'information et de conseil irrecevable et en tout cas non fondée ;

En conséquence :

-           DEBOUTER l'assurée de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions formées à l'encontre d'AXA FRANCE IARD et la condamner à lui restituer les sommes perçues au titre de l'exécution du jugement du 15 octobre 2020 ;

A TITRE SUBSIDIAIRE si par extraordinaire la Cour confirmait le jugement dont appel et estimait que la garantie d'AXA FRANCE IARD était mobilisable ou qu'elle aurait engagé sa responsabilité en l'espèce :

-           JUGER que la preuve du montant des pertes d'exploitation correspondant à l'indemnité sollicitée n'est pas rapportée ;

-           JUGER que la preuve du principe et du montant de la perte de chance correspondant à l'indemnité sollicitée n'est pas rapportée ;

En conséquence :

-           DEBOUTER la demande de condamnation définitive de la société BERAHA au titre de la première période d'indemnisation du 15 mars au 2 juin 2020 ;

-           DEBOUTER la demande de provision complémentaire de la société BERAHA d'un montant de 180.000 euros ;

-           COMPLETER la mission de l'expert missionné par AXA FRANCE IARD au titre des pertes d'exploitation subies entre le 28 septembre et le 4 octobre 2020 et entre le 30 octobre 2020 et le 30 janvier 2021 ;

EN TOUT ETAT DE CAUSE

-           DEBOUTER l'assurée de toutes demandes, fins ou conclusions contraires au présent dispositif;

-           CONDAMNER la société BERAHA à payer à AXA FRANCE IARD la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel, ces derniers distraits au profit de Maître Romain CHERFILS, membre de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat associé, aux offres de droit.

A titre liminaire, la société AXA France IARD soulève l'irrecevabilité et le caractère mal fondé du moyen nouveau présenté en appel relatif à l'absence de formalisme de la clause d'exclusion sur le fondement de l'article L112-4 du Code des assurances.

Ensuite, la demande de condamnation d'AXA sur le fondement de l'article L112-4 du Code des assurances est mal fondée, la rédaction de ladite clause en lettres majuscules, en grand format et détachée des paragraphes précédents, répond au formalisme exigé par l'article L112-4 du Code des assurances.

De plus la société AXA France IARD soulève également l'irrecevabilité et le caractère mal fondé de la demande nouvelle présentée en appel au titre du devoir d'information et de conseil.

Cette demande ne constitue pas un fait nouveau justifiant qu'une demande nouvelle en cause d'appel soit présentée en application de l'article 564 du Code de procédure civile. La violation du devoir d'information et de conseil s'apprécie à la date de souscription du contrat, soit en l'espèce au 19 décembre 2019. La proposition d'avenant faite par AXA le 30 septembre 2020 concerne le renouvellement du contrat à la date du 1er janvier 2021, et elle est parfaitement indépendante du contrat en cours soumis à l'appréciation de la Cour. Le contenu de cet avenant n'apporte ainsi aucun élément nouveau susceptible de justifier une quelconque responsabilité d'AXA lors de la souscription du contrat en date du 19 décembre 2019.

Cette demande est également mal fondée en l'absence de violation de son devoir d'information et de conseil par la société AXA et le préjudice de l'intimée qui consisterait en une perte de chance de souscrire une garantie plus favorable est, en l'espèce, inexistant. En effet, l'intimée est bien incapable de démontrer qu'elle aurait été en mesure de souscrire un contrat plus adapté à la crise du Covid-19

A titre principal, la société AXA France sollicite la réformation du jugement. Elle se fonde sur l'harmonisation de la jurisprudence opérée par la Cour de cassation dans son arrêt du 1er décembre 2022 (N°G21-19.342), et confirmée depuis par sept arrêts rendus le 25 mai 2023, dans cinq arrêts rendus le 15 juin 2023 et dans un arrêt rendu le 12 octobre 2023, tous publiés au rapport et au bulletin.  Ni les articles de doctrine visés par l'assurée, ni le rapport du conseiller rapporteur M. [Z] [E] sollicitant un rejet pour des considérations techniques dans une faire concernant la même clause d'exclusion, ne remettent en cause la portée de la jurisprudence de la Cour de cassation.

Dès lors, la société AXA FRANCE sollicite la réformation du jugement en ce qu'il a jugé que la clause d'exclusion devait être considérée comme non-écrite et a condamné AXA FRANCE à verser à l'assurée la somme de 114.105,54 euros au titre de ses pertes d'exploitation. En effet, le Tribunal a débouté AXA FRANCE de sa demande tendant à juger de la validité de la clause d'exclusion dont elle sollicite la stricte application.

D'une part, AXA France soutient que la clause d'exclusion, contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal, est parfaitement formelle et que l'intimée en a par ailleurs parfaitement compris la portée.

D'autre part, AXA FRANCE soutient que la clause d'exclusion respecte le caractère limité exigé par l'article L. 113-1 du Code des assurances et ne vide pas de sa substance l'obligation essentielle souscrite par l'assurée, car une épidémie peut être la cause de la fermeture administrative d'un unique établissement.

Enfin, dans un cadre subsidiaire, AXA France sollicite l'infirmation du jugement en ce qu'il a retenu le montant des pertes d'exploitation subies par la société BERAHA sur la base d'une évaluation établie de façon non contradictoire.

-        Dans le cadre de la procédure d'appel, l'intimée sollicite l'infirmation du jugement en ce qu'il a limité son indemnisation à hauteur de la provision de 92.818 euros et a sollicité la condamnation d'AXA FRANCE au paiement de la somme de 216.024,53 euros HT, pour la période du 15 mars au 2 juin 2020. Par ailleurs, l'intimée a sollicité la condamnation d'AXA FRANCE à l'indemniser à hauteur de la somme de 14.212,14 euros HT au titre des pertes d'exploitation qu'elle aurait subies du 28 septembre au 4 octobre 2020 et de 170.545,68 euros HT au titre des pertes d'exploitation qu'elle aurait subies du 30 octobre 2020 et le 31 décembre 2020 inclus.

-        Un rapport d'expertise contractuelle déposé le 11 mars 2022 par le cabinet TGS. Ce rapport chiffre la perte d'exploitation de la société BERAHA à la somme de 80.157 euros pour la période du 15 mars au 1er juin 2020. En revanche, il conclut à l'absence de pertes d'exploitation pour les deux autres périodes d'indemnisation.

Ainsi, dans l'hypothèse extraordinaire où la Cour estimait devoir faire droit aux prétentions de l'intimée sur la validité de la clause d'exclusion ou sur le devoir de conseil, elle ne pourra prononcer de condamnation définitive au titre de la première période, et devra ordonner un complément de mission suivant la procédure d'expertise prévue au contrat pour les deux autres périodes.

-        A titre liminaire, il est relevé l'impossibilité pour la Cour de prononcer une condamnation définitive à l'encontre d'AXA au titre de la première période. En effet en application de l'article 658 alinéa 1 du Code de procédure civile, la fixation de l'indemnité finale devra d'abord être déterminée par le Tribunal de commerce d'Aix-en-Provence, sans quoi AXA FRANCE serait privée d'un double degré de juridiction.

-        Sur l'évaluation du préjudice subi, AXA fait remarquer qu'il n'a pas été tenu compte des facteurs externes, des écritures comptables et résultats des exercices antérieurs au titre de la même période, des charges variables non supportées durant la fermeture, ainsi que des charges variables non supportées durant la fermeture.

Par conclusions du 21 avril 2023 la société BERAHA, intimée sollicite voir :

Vu les dispositions de l'article 632 du Code de Procédure Civile ;

 Vu les dispositions des articles 1108 et 1143 du Code Civil ;

Vu les dispositions des articles 1169 et 1170 du Code Civil ;

Vu les dispositions des articles L 113-1 et L.112-4 du Code des Assurances ;

Vu les dispositions de l'article 1231-1 du Code Civil ;

 Vu le contrat d'assurance souscrit ;

-           CONFIRMER le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de Marseille le 15 octobre 2020 au besoin par adjonction des motifs, en ce qu'il a condamné la société AXA FRANCE IARD à garantir les sinistres perte financière suite à fermeture administrative, subis par la société BERAHA entre le 15 mars 2020 et le 2 juin 2020, le 28 septembre et le 4 octobre 2020, et entre le 30 octobre 2020 et le 30 janvier 2021, après avoir déclarée la clause d'exclusion opposée à l'assuré non mobilisable et/ou non écrite, pour absence de caractère très apparent, absence de contrepartie, et pour absence de caractère formel et limité ;

-           CONDAMNER la société AXA FRANCE IARD à payer, en denier ou quittance, à la société BERAHA, la somme de 172.248,00 € à titre de provision, et renvoyer AXA à l'instauration de l'expertise contractuelle prévue dans sa police d'assurance ;

 

Subsidiairement,

-           INFIRMER le jugement rendu et CONDAMNER la Société AXA FRANCE IARD à payer à la société BERAHA la somme de 172,248,00 € de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi à raison des manquements fautifs de l'assureur à ses obligations générales d'information, de conseil et de mise en garde.

EN TOUT ETAT DE CAUSE,

- DEBOUTER la société AXA FRANCE IARD de ses demandes ;

- CONDAMNER la société AXA FRANCE IARD à payer 10.000 € à la société BERAHA sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile en cause d'appel ;

- CONDAMNER la société AXA FRANCE IARD aux dépens.

La société BERAHA, rappelle préalablement que le prononcé d'un arrêt de cassation ne fige aucunement la jurisprudence. La juridiction est entièrement libre, dans le plein exercice de son pouvoir juridictionnel, de refuser de suivre la solution posée par l'arrêt de cassation l'ayant saisi de la connaissance du litige. La juridiction de renvoi, en effet, est investie d'un plein pouvoir juridictionnel, ce pourquoi l'article 638 du code de procédure civile énonce : « L'affaire est à nouveau jugée en fait et en droit par la juridiction de renvoi à l'exclusion des chefs non atteints par la cassation. » Et l'article L. 431-6 du code de l'organisation judiciaire prévoit que le renvoi devant l'assemblée plénière « doit » être ordonné « lorsque, après cassation d'un premier arrêt ou jugement, la décision rendue par la juridiction de renvoi est attaquée par les mêmes moyens ». 

Or en l'espèce la contradiction des décisions rendues par les juges du fond dénote à tout le moins le caractère ni formel ni limité de la clause d'exclusion. Par ailleurs la décision rendue par la Cour de cassation est vivement critiquée par la doctrine. Rien n'interdit donc à la cour de céans, statuant comme juridiction de renvoi, de s'écarter de la solution posée par la Cour de cassation, dans ses arrêts du 1er décembre 2022.

La société BERAHA, soutient que les sinistres pertes d'exploitation sont garanties par AXA. En effet, aux termes des Conditions Particulières du contrat souscrit par la société demanderesse, régulièrement produit aux débats, la société BERAHA, a expressément souscrit une garantie « protection financière » couvrant notamment la perte d'exploitation. Selon les critères du contrat, il apparait que la garantie perte financière est acquise dès lors que :

-         Une fermeture administrative est prononcée :

-         La décision de fermeture a été prononcée par une autorité administrative :

-         Cette interdiction est motivée par l'existence d'une épidémie Dès lors, que les Conditions Particulières de la Police d'assurance de l'intimée, prévoient expressément l'indemnisation des pertes financières en cas d'épidémie, il apparait que les critères d'indemnisation du sinistre qu'a subi la Société concluante sont remplis

Elle ajoute que la clause d'exclusion invoquée par AXA est inopposable.

La société BERAHA, soulève une série de moyens qu'elle juge recevables comme non tranchés par la Cour de cassation :

-         Absence de caractère très apparent de la clause conformément à l'Article L.112-4 du Code des Assurances

La clause d'exclusion de garantie litigieuse ne correspondant c pas aux exigences de l'article L.112-4 du Code des Assurances elle doit, être réputée non écrite

-         Absence de mobilisation de la clause d'exclusion : Selon la société BERAHA, les termes « décision de fermeture » et « mesure de fermeture » utilisés dans la clause d'exclusion seraient distincts. En effet, selon elle, la « décision de fermeture » serait l'acte juridique ordonnant la fermeture de l'établissement lui-même, tandis que la « mesure de fermeture » concernerait les autres établissements du département. Elle en déduit que AXA aurait prévu d'exclure la garantie uniquement en cas de pluralité de décisions de fermeture administrative individuelle, ayant une cause identique, ce qui ne serait pas le cas en l'espèce puisqu'une seule décision collective a atteint l'ensemble des établissements de restauration sur le territoire national

-         Absence de contrepartie : Au sens de l'Article 1169 du Code Civil 28, la clause subordonnant la mise en 'uvre de la garantie ''fermeture administrative suite à épidémie'' au fait que seul l'établissement fasse l'objet d'une fermeture apparait abusive puisque liée à un évènement certain (la fermeture d'autres établissement) rendant illusoire ou dérisoire la garantie principale souscrite et facturée à l'assuré. La clause encourt également la nullité au visa de l'Article 1108 du Code Civil 29, qui définit la notion d'aléa comme un événement incertain alors même que la fermeture de plusieurs établissements dans un département en cas d'épidémie apparait comme certain.

La société BERAHA, soutient que la clause est inapplicable pour cause d'absence de caractère formel et limité de la clause d'exclusion au sens de l'article L113-1 du Code des assurances compte tenu  

-de la nécessité d'interprétation : la clause n'est pas formelle pour nécessiter une interprétation en l'absence de définition du terme « d'épidémie ».

L'assuré considère que la clause litigieuse rend dérisoire l'application de la garantie en cas d'épidémie, qui est une extension de la maladie contagieuse à un grand nombre de personne dans un lieu donné, en l'occurrence à minima une commune ou un département

La clause d'exclusion litigieuse nécessite ainsi incontestablement une interprétation, faute pour AXA d'avoir défini contractuellement les termes « fermeture », « établissement » mais aussi « épidémie », « maladie contagieuse » ou « intoxication »

-Cette clause encourt en outre la nullité en vertu des articles 1170 du Code Civil et L.113-1 du Code des Assurances puisqu'elle vide de sa substance la garantie et, partant, l'obligation essentielle assumée par l'assureur, et par là même est dénuée de tout caractère limité.

La clause d'exclusion a pour effet de rendre inapplicable l'indemnisation des pertes d'exploitation consécutives à toutes fermetures administratives par les autorités en cas d'épidémie qui nécessairement ne se limitera jamais à un établissement.

AXA est dans l'incapacité totale, de rapporter la preuve qu'il a été amené à indemniser ne serait-ce qu'une fois un assuré au titre de la garantie « fermeture en cas d'épidémie ». Les quelques cas qu'elle tente d'invoquer en exemple, concernent des maladies transmissibles interhumaines qui ne rentrent pas dans le cadre de la définition courante d'une épidémie.

En jugeant valable la garantie « fermeture administrative » parce qu'elle restait mobilisable au titre des autres causes de fermeture prévues par la clause d'extension, la Cour de Cassation a commis un abus de langage sur le terme « garantie ». La fermeture administrative n'est pas une garantie mais un évènement garanti, c'est-à-dire l'un des dommages couverts par la garantie.

En résumé les arrêts du 1er décembre 2022 sont contestés par une doctrine presque unanime et au sein de la Haute Cour elle-même : un débat devant l'Assemblée Plénière apparait souhaitable tant en droit qu'en équité.

A titre subsidiaire, la société BERAHA, soutient que l'assureur a manqué à son devoir de conseil.

S'agissant des pertes subies par l'assuré, le contrat prévoit l'indemnisation de la perte d'exploitation, pour une durée maximum de trois mois par sinistre dans une limite de 300 fois l'indice FFB (994,50 au 1er octobre 2019), déduction faite d'une franchise de trois jours ouvrés. L'élément déclencheur de la garantie est la fermeture administrative : il y a donc autant de sinistres que de décisions de fermeture administrative.

La société BERAHA a produit aux débats ses comptes de résultat, arrêtés au 31 décembre 2019, régulièrement déposés au RCS de Marseille.

La SARL BERAHA a aussi produit une attestation du Cabinet CPM AUDIT, expert-comptable, commissaire aux comptes, évaluant la perte de chiffres d'affaires qui ressort, pour la seule 1ère période à 335.152 € HT avec un taux de marge brute de 67%.

En reprenant les mêmes recettes journalières, les pertes d'exploitation subies par la SARL BERAHA, à raison des deux périodes ultérieures de fermeture administrative sont chiffrées à la somme de 184.757,82 € HT. Il conviendra d'allouer à titre de provision, à la société BERAHA une somme de 172.248,00 €, montant des sommes par elle perçues dans le cadre de la procédure, et de renvoyer AXA à l'instauration de l'expertise contractuelle prévue dans sa police d'assurance.

L'affaire a été fixée à l'audience du 13 février 2024 à laquelle elle a été retenue.

 

MOTIVATION

Il n'est pas contesté et il résulte des pièces contractuelles versées au dossier de la procédure que la relation des parties est régie par un contrat d'assurance Multirisque Professionnelle avec effet au 01/01/2014 comprenant les conditions générales éditées en septembre 2012 et les conditions particulières du contrat n°1929382504.

La page 9 des conditions particulières mentionne un paragraphe relatif à une extension de garantie à la perte d'exploitation suite à la fermeture administrative de l'établissement.

Cette garantie porte sur les pertes d'exploitation consécutives à la fermeture provisoire totale ou partielle de l'établissement assuré lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

1.la décision de fermeture a été prise par une autorité administrative compétente et extérieure à l'assuré.

2. La décision de fermeture est la conséquence d'une maladie contagieuse, d'un meurtre, d'un suicide, d'une épidémie ou d'une intoxication.

La garantie commence le jour du sinistre et dure tant que les résultats de l'établissement sont affectés par le dit sinistre dans la limite de 3 mois maximum.

Le montant de la garantie est limité à 300 fois l'indice.

L'assuré conserve à sa charge une franchise de 3 jours ouvrés.

La clause d'exclusion de garantie opposée par la société AXA France IARD pour dénier à l'assuré la garantie perte d'exploitation pour la période de fermeture de l'établissement en raison de l'épidémie de COVID 19 est rédigée comme suit :

SONT EXCLUES :

LES PERTES D'EXPLOITATION, LORSQUE, A LA DATE DE LA DECISION DE FERMETURE, AU MOINS UN AUTRE ETABLISSEMENT, QUELLE QUE SOIT SA NATURE ET SON ACTIVITE, FAIT L'OBJET, SUR LE MEME TERRITOIRE DEPARTEMENTAL QUE CELUI DE L'ETABLISSEMENT ASSURE, D'UNE MESURE DE FERMETURE ADMINISTRATIVE, POUR UNE CAUSE IDENTIQUE.

L'assuré fait valoir que cette clause doit être réputé non écrite voire nulle comme non conforme aux dispositions régissant la légalité des clauses d'exclusion de garantie.

Sur la conformité de la clause litigieuse aux dispositions de l'article L112-4 du code des assurances

L'article L112-4 du code des assurances prévoit que les clauses des polices édictant des nullités, des déchéances ou des exclusions ne sont valables que si elles sont mentionnées en caractères très apparents.

L'assureur fait valoir que cette demande nouvelle en appel est irrecevable en vertu de l'article 910-4 du code de procédure civile.

Toutefois, il ne s'agit pas d'une demande nouvelle mais d'un fondement nouveau dans le but que soit déclarée non écrite la clause d'exclusion de garantie tout comme le moyen initial fondé sur les dispositions de l'article L113-1 du code des assurances.

L'article 563 du code de procédure civile prévoit que pour justifier en appel les prétentions qu'elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves.

L'article 565 du CPC énonce qu'une prétention n'est pas nouvelle lorsqu'elle tend « aux mêmes fins » que celles invoquées en première instance.

L'article 566 du code de procédure civile prévoit que les parties ne peuvent soumettre à la cour d'appel de nouvelles prétentions, sauf à ce que celles-ci soient l'accessoire, la conséquence ou le complément de celles soumises au premier juge.

En outre la demande nouvelle tendant à faire écarter les prétentions adverses est recevable (ass. com., 15 fév. 2023, n°21-20.283)

Par voie de conséquence, l'argument nouveau relatif au caractère non suffisamment apparent de la clause d'exclusion est recevable.

La clause litigieuse est rédigée en caractères majuscules et est insérée dans la police d'assurance immédiatement à la suite de la définition de la garantie perte d'exploitation suite à la fermeture administrative dont elle se détache nettement du fait de l'emploi de lettres capitales.

Ainsi, la définition de la garantie et la clause restrictive sont distinctes et s'enchaînent permettant une lecture continue des éléments contractuels régissant la garantie perte d'exploitation suite à une fermeture administrative de l'établissement.

Si d'autres exclusions de garantie citées par l'assurée dans ses conclusions sont mentionnées en caractères gras, dans un cadre coloré, à l'inverse de celle-ci, elles ne sont pas en lettres capitales et rien n'oblige l'assureur à employer les mêmes éléments d'écritures rendant très apparents une clause dans toute la police.

Par voie de conséquence, la clause limitant la garantie perte d'exploitation suite à la fermeture administrative à la seule hypothèse d'une fermeture isolée de l'établissement est conforme aux dispositions exigeant que les clauses restrictives de garantie soient rédigées en caractères très apparents.

Sur la vocation de la clause litigieuse à s'appliquer :

L'assuré fait valoir qu'il n'est pas démontré que la clause litigieuse ait vocation à s'appliquer au cas d'espèce de la fermeture de l'établissement à l'initiative de l'administration par une décision d'application générale.

L'assureur fait valoir que s'agissant d'une demande nouvelle, elle est irrecevable.

L'article 565 du CPC énonce qu'une prétention n'est pas nouvelle lorsqu'elle tend « aux mêmes fins » que celles invoquées en première instance.

L'article 566 du code de procédure civile prévoit que les parties ne peuvent soumettre à la cour d'appel de nouvelles prétentions, sauf à ce que celles-ci soient l'accessoire, la conséquence ou le complément de celles soumises au premier juge.

Ne s'agissant pas d'une prétention nouvelle mais d'une prétention tendant aux mêmes fins que celles invoquées précédemment à savoir le défaut de fondement du refus de l'assureur de garantir le sinistre en raison de la même clause d'exclusion, cet argument est recevable devant la cour de renvoi qui statue en l'espèce après cassation intégrale de son premier arrêt.

L'assurée fait valoir que dans des contrats similaires tel que la police multirisque de l'hôtellerie, l'assureur a exclu expressément la garantie des pertes d'exploitation consécutives à une fermeture collective dans une même région ou sur le plan national.

Elle précise que dans le présent contrat, si l'assureur entend exclure la fermeture collective, l'emploi d'une périphrase « ...AU MOINS UN AUTRE ETABLISSEMENT, QUELLE QUE SOIT SA NATURE ET SON ACTIVITE, FAIT L'OBJET, SUR LE MEME TERRITOIRE DEPARTEMENTAL QUE CELUI DE L'ETABLISSEMENT ASSURE, D'UNE MESURE DE FERMETURE ADMINISTRATIVE ' » relève d'une rédaction peu claire, ce que n'a pu entériner la cour de cassation par son arrêt du 1er décembre 2022.

La clause ne peut donc avoir pour objet que d'exclure la garantie en cas de pluralité de décisions de fermeture individuelle, ce qui n'est pas le cas de la fermeture suite à l'arrêté du 15 mars 2020 édictant l'interdiction d'ouverture au public des établissements de restauration.

La fermeture administrative objet du litige étant collective, les conditions de la clause de non garantie ne sont pas réunies.

Toutefois le segment de phrase « ...AU MOINS UN AUTRE ETABLISSEMENT, QUELLE QUE SOIT SA NATURE ET SON ACTIVITE, FAIT L'OBJET, SUR LE MEME TERRITOIRE DEPARTEMENTAL QUE CELUI DE L'ETABLISSEMENT ASSURE, D'UNE MESURE DE FERMETURE ADMINISTRATIVE ' » ne peut être qualifié de périphrase de l'expression « une fermeture collective d'établissements » dans la mesure où il n'est pas exclusif de plusieurs fermetures simultanées ou successives alors que la fermeture collective d'établissements  porte sur une seule  décision formelle de fermeture applicable à plusieurs établissements .

La phrase employée a pour objet les fermetures administratives d'un autre établissement du même département pour une raison identique définie par l'extension perte d'exploitation consécutive à une fermeture administrative sans distinguer les fermetures par l'effet de décisions individuelles ou d'une décision collective.

Par voie de conséquence le segment de phrase « ...AU MOINS UN AUTRE ETABLISSEMENT, QUELLE QUE SOIT SA NATURE ET SON ACTIVITE, FAIT L'OBJET, SUR LE MEME TERRITOIRE DEPARTEMENTAL QUE CELUI DE L'ETABLISSEMENT ASSURE, D'UNE MESURE DE FERMETURE ADMINISTRATIVE ' » ne peut être considéré comme excluant la vocation de la clause litigieuse à s'appliquer à une fermeture de plusieurs établissements par une décision administrative unique.

Cette demande doit être rejeté.

Sur la conformité de la clause aux dispositions de l'article L113-1 du code des assurances

L'article L113-1 du code des assurances dispose que les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré sont à la charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police.

Ce texte implique que pour être opposable à l'assuré, la portée ou l'étendue de la clause d'exclusion de garantie doit être claire, précise, sans ambigüité et sans incertitude afin que celui-ci puisse déterminer le périmètre de la non garantie et si, de ce fait, l'assurance proposée correspond à ses attentes et est conforme à l'intérêt de l'entreprise.

La jurisprudence en déduit que lorsqu'elle est sujette à interprétation, une clause d'exclusion de garantie ne peut être considérée comme formelle et limitée.

En ce qui concerne la clause de garantie des pertes financières précitée offerte par AXA à sa clientèle  ,même si les conditions d'application de la clause limitant l'étendue de la garantie  ont généré un contentieux important , si AXA a transigé avec une partie de ses assurés,  si les clauses de cette nature ont suscité une réflexion sur la qualité de rédaction des polices d'assurance notamment par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution , si de ce fait l'assureur a pu vouloir en modifier les termes s'agissant des contrats à venir et si une solution différente a pu être retenue dans d'autres pays voisins s'agissant de polices d'assurance équivalentes(Royaume Uni), la cour de cassation a jugé que la clause litigieuse  de cette police répondait aux critères définis par le texte précité et sa jurisprudence.

La plupart des cours d'appel saisies sur renvoi lui ont emboîté le pas.

Dans l'arrêt du 1er décembre 2022 concernant le présent litige ,la Cour de cassation relève que s'agissant d'un contrat prévoyant la garantie des pertes d'exploitation en cas de fermeture administrative consécutive à certaines causes qu'elle énumère, dont l'épidémie, est formelle la clause qui exclut ces pertes d'exploitation de la garantie, lorsque, à la date de la décision de fermeture, au moins un autre établissement, quelles que soient sa nature et son activité, fait l'objet, sur le même territoire départemental, d'une mesure de fermeture administrative, pour une cause identique ;

Elle ajoute que n'a pas pour effet de vider la garantie de sa substance la clause qui exclut de la garantie des pertes d'exploitation consécutives à la fermeture administrative de l'établissement assuré, pour plusieurs causes qu'elle énumère, dont l'épidémie, lorsque, à la date de la décision de fermeture, au moins un autre établissement, quelles que soient sa nature et son activité, fait l'objet, sur le même territoire départemental, d'une mesure de fermeture administrative, pour une cause identique à l'une de celles énumérées.

La jurisprudence retient ainsi que le risque couvert par la garantie est la fermeture administrative pouvant avoir plusieurs causes expressément mentionnées, un meurtre, un suicide, une épidémie, une maladie contagieuse, une intoxication et non le risque épidémie et que la clause d'exclusion portant sur la fermeture administrative édictée à l'égard de plusieurs établissements n'a pas pour effet de vider la garantie de sa substance et reste formelle et limitée.

La garantie contractuelle objet du litige couvre ainsi les hypothèses de la fermeture du seul établissement exploité par la SARL BERAHA dans le département des Bouches du Rhône en raison de la survenance d'un meurtre, d'un suicide, d'une épidémie, d'une maladie contagieuse, d'une intoxication.

La clause conditionnant la garantie à l'absence de fermeture par l'autorité administrative d'autres établissements du même département pour une cause identique est limitée en ce qu'elle ne fait pas obstacle à la garantie de la fermeture administrative de l'établissement pour les autres causes qu'une épidémie.

La jurisprudence décide ainsi que s'agissant de la fermeture administrative pour cause d'épidémie, le fait que la garantie contractuelle porte sur la fermeture par l'autorité administrative du seul établissement exploité par la SARL BERAHA dans le territoire de l'intégralité du département urbanisé des Bouches du Rhône en raison d'une épidémie ne vide pas la garantie de sa substance.

Dans un arrêt du 21 septembre 2023 n°21/25921, la cour de cassation statuant sur le moyen suivant lequel il est illusoire qu'une fermeture administrative liée à une épidémie, s'agissant d'une maladie contagieuse se propageant à une population étendue, puisse ne concerner qu'un unique établissement et relevant que l'assureur ne cite aucun cas de fermeture administrative isolée suite à une propagation par contagion mais uniquement des cas d'intoxications par des produits corrompus ou causées par un manque d'hygiène ou d'entretien, a maintenu que la garantie couvrant le risque de pertes d'exploitation consécutives, non à une épidémie, mais à une fermeture administrative ordonnée à la suite d'une maladie contagieuse, d'un meurtre, d'un suicide, d'une épidémie ou d'une intoxication, de sorte que l'exclusion considérée, qui laissait dans le champ de la garantie les pertes d'exploitation consécutives à une fermeture administrative liée à ces autres causes ou survenue dans d'autres circonstances que celles prévues par la clause d'exclusion, n'avait pas pour effet de vider la garantie de sa substance.

Or la fermeture administrative pour laquelle l'assurée demande la garantie de l'assureur résulte d'un arrêté du 14 mars 2020 édictant l'interdiction pour les restaurants et débits de boissons de l'ensemble du territoire et donc de l'intégralité du département des Bouches du Rhône d'accueillir du public du 15 mars 2020 au 15 avril 2020, prorogée jusqu'au 2 juin 2020 par décret du 14 avril 2020 puis d'un décret  n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire.

Par voie de conséquence, il y a lieu de réformer sur ce point le jugement du tribunal de commerce d'Aix-en-Provence en application de la jurisprudence susvisée.

Sur l'application des dispositions des articles 1169 et 1170, 1108 et 1143 du code civil

L'assureur se prévaut de l'irrecevabilité de ces demandes qualifiées de nouvelles.

L'assuré se prévaut des dispositions des articles susvisés pour évoquer le caractère abusif de la clause de limitation de la garantie des pertes d'exploitation du fait de la fermeture de son commerce en raison d'une épidémie à l'unique hypothèse où la fermeture est limitée à son seul établissement à l'exclusion d'autres établissements.

L'article 565 du CPC énonce qu'une prétention n'est pas nouvelle lorsqu'elle tend « aux mêmes fins » que celles invoquées en première instance.

L'article 566 du code de procédure civile prévoit que les parties ne peuvent soumettre à la cour d'appel de nouvelles prétentions, sauf à ce que celles-ci soient l'accessoire, la conséquence ou le complément de celles soumises au premier juge.

Ne s'agissant pas d'une prétention nouvelle mais d'une prétention tendant aux mêmes fins que celles invoquées précédemment à savoir le défaut de fondement du refus de l'assureur de garantir le sinistre en raison de la même clause d'exclusion, cet argument est recevable devant la cour de renvoi qui statue en l'espèce autrement composée après cassation intégrale de son premier arrêt.

L'article 1108 du code civil prévoit que le contrat est commutatif lorsque chacune des parties s'engage à procurer à l'autre un avantage qui est regardé comme l'équivalent de celui qu'elle reçoit.

Il est aléatoire lorsque les parties acceptent de faire dépendre les effets du contrat quant aux avantages et aux pertes qui en résulteront, d'un évènement incertain.

Le contrat d'assurance est un contrat aléatoire comme l'indiquait expressément l'ancien article 1964 du code civil repris par l'article 1108 sans désigner spécifiquement des contrats particuliers.

L'article 1143 du code civil dispose qu'il y a également violence lorsqu'une partie, abusant de l'état de dépendance dans lequel se trouve son cocontractant à son égard, obtient de lui un engagement qu'il n'aurait pas souscrit en l'absence d'une telle contrainte et en tire un avantage manifestement excessif.

L'article 1169 du code civil dispose qu'un contrat est nul lorsqu'au moment de sa formation la contrepartie convenue au profit de celui qui s'engage est illusoire ou dérisoire.

Ces dispositions concernent les conditions de l'adhésion au contrat et son équilibre dans son ensemble et non celui d'une clause.

L'assuré ne rapporte pas la preuve de violence, d'abus de dépendance à l'égard de l'assureur dont il connaissait les pratiques et y avait adhéré puisque le présent contrat succède à un précédent souscrit auprès du même assureur ;

Il ne démontre pas davantage un déséquilibre de l'économie du contrat au désavantage de l'assuré.

L'article 1170 suivant prévoit que toute clause qui prive de sa substance l'obligation essentielle du débiteur est non écrite.

Au titre de l'extension de garantie perte d'exploitation, l 'obligation essentielle de l'assureur est la garantie des pertes d'exploitation ayant pour origine une maladie contagieuse, un meurtre, un suicide, une épidémie ou une intoxication.

La cour de cassation ayant jugé que la clause d'exclusion portant sur la fermeture administrative édictée à l'égard de plusieurs établissements n'a pas pour effet de vider la garantie de sa substance et reste formelle et limitée, il ne peut être retenue sans contradiction que par son étendue la clause prive de sa substance l'obligation essentielle de l'assureur.

Ce moyen ne peut donc être retenu au regard des dispositions de l'arrêt du 01 décembre 2022.

L'ensemble des moyens soulevés par l'assuré afin d'obtenir que soit réputé non écrite la clause d'exclusion de garantie suivante :

 SONT EXCLUES :

LES PERTES D'EXPLOITATION, LORSQUE, A LA DATE DE LA DECISION DE FERMETURE, AU MOINS UN AUTRE ETABLISSEMENT, QUELLE QUE SOIT SA NATURE ET SON ACTIVITE, FAIT L'OBJET, SUR LE MEME TERRITOIRE DEPARTEMENTAL QUE CELUI DE L'ETABLISSEMENT ASSURE, D'UNE MESURE DE FERMETURE ADMINISTRATIVE, POUR UNE CAUSE IDENTIQUE.

ne pouvant prospérer sans contradiction avec la jurisprudence de la cour de cassation appliquée par de nombreuses cour d'appel et spécifiquement avec l'arrêt du 1er décembre 2022 rendu dans le cadre du présent litige, la décision du tribunal de commerce de Marseille sera donc infirmée sur ce point.

Sur le moyen subsidiaire de la violation de son devoir d'information et de conseil par l'assureur

L'assureur se prévaut de l'irrecevabilité de ces demandes qualifiées de nouvelles.

L'assuré se prévaut de la violation du devoir d'information et de conseil de l'assureur pour établir le caractère abusif de la clause de limitation de la garantie des pertes d'exploitation du fait de la fermeture de son commerce en raison d'une épidémie à l'unique hypothèse où la fermeture est limitée à son seul établissement à l'exclusions d'autres établissements.

L'article 565 du CPC énonce qu'une prétention n'est pas nouvelle lorsqu'elle tend « aux mêmes fins » que celles invoquées en première instance.

L'article 566 du code de procédure civile prévoit que les parties ne peuvent soumettre à la cour d'appel de nouvelles prétentions, sauf à ce que celles-ci soient l'accessoire, la conséquence ou le complément de celles soumises au premier juge.

Ne s'agissant pas d'une prétention nouvelle mais d'une prétention tendant aux mêmes fins que celles invoquées précédemment à savoir le défaut de fondement du refus de l'assureur de garantir le sinistre en raison de la même clause d'exclusion, cet argument est recevable devant la cour de renvoi qui statue en l'espèce autrement composée après cassation intégrale de son premier arrêt.

L'assuré fait valoir que l'assureur est débiteur d'une obligation d'information et de conseil du souscripteur de la police d'assurance au moment de la conclusion du contrat, obligation particulièrement renforcée s'agissant des clauses obscures ou ambigües.

La cour de cassation retient que le professionnel de l'assurance a l'obligation de conseiller utilement le souscripteur du contrat sur l'étendue des garanties et d'attirer plus spécialement son attention sur les exclusions et limites qu'elles comportent.

Il résulte de la jurisprudence que l'assureur comme le courtier en assurance doivent d'une part informer le souscripteur de la police d'assurance y compris dans le cadre de son activité professionnelle de l'étendue des garanties qu'il propose, de ces tarifs et d'autre part veiller à l'adaptation des garanties aux risques décrits par le candidat à l'assurance.

Une clause de limitation de garantie doit avoir été portée à la connaissance de l'assuré au moment de son adhésion à la police ou dans le cadre d'un avenant au contrat pour lui être opposable.

Ensuite le manquement d'un assureur ne peut donner lieu qu'à l'allocation de dommages et intérêts et non entrainer l'inopposabilité à l'assuré de clauses du contrat (Civ.2. ' 8 février 2018, n° 16-27.495).

L'assuré ne peut donc solliciter sur ce fondement une indemnité équivalente au montant de la garantie due au cas d'inopposabilité de la clause litigieuse.

En l'espèce, lors de la signature du contrat le 07/02/2014, l'assuré a reconnu avoir pris connaissance des conditions de garanties et des exclusions via la remise des conditions générales.

Mais ces conditions générales ne mentionnent pas la clause d'exclusion objet du litige puisqu'il s'agit d'une extension de la garantie perte d'exploitation figurant page 20 des dites conditions générales.

La garantie du fait des pertes d'exploitation en raison de la fermeture administrative de l'établissement est spécifiquement prévue par les conditions particulières (recto de la 4ème page).

L'assureur produit un document signé renseigné de manière partiellement manuscrite par la SARL BERAHA par lequel elle reconnaît le 07/02/2014 avoir disposé des informations nécessaires préalablement à la souscription du contrat n°1929382504.

Un courrier d'accompagnement du même jour se réfère à un projet en date du 10/01/2014 approuvé par l'assuré.

La clause d'exclusion objet du litige est expressément mentionnée dans les conditions particulières du contrat d'assurance signées par l'assurée ; elle  ne comporte pas de termes techniques de nature à justifier de faire des recherches ou de se rapprocher de sachant pour en déterminer le sens et la cour de cassation considère qu'elle est limitée et formelle, non susceptible d'interprétation et par voie de conséquence met le souscripteur  en mesure d'en  comprendre le fonctionnement concret , d'évaluer  sur le fondement de critères précis et intelligibles, ses conséquences économiques, son intérêt pour son entreprise.

Enfin ,les conditions particulières comportent en dernière ligne et donc au-dessus de la signature une mention indiquant que l'assuré reconnaît avoir été informé et avoir pris connaissance préalablement à la souscription du contrat d'assurance des informations particulières concernant le tarif et les conditions de garantie auprès du représentant de l'assureur.

Par voie de conséquence il ne peut être relevé une violation par l'assureur de son devoir d'information et de Conseil et ce moyen de l'assuré sera rejeté.

Il en résulte au final que la clause d'exclusion de garantie invoquée par l'assureur est conforme au droit positif et opposable à l'assuré .

La SA AXA France IARD demande que soit ordonnée la restitution des sommes qu'il a versées en vertu du jugement assorti de l'exécution provisoire,

Cependant le présent arrêt, infirmatif sur ce point, constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement, et les sommes devant être restituées portent intérêt au taux légal à compter de la signification, valant mise en demeure, de la décision ouvrant droit à restitution ; Il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu de statuer cette demande.

Il en est de même relativement à l'expertise ordonnée par le premier juge.

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

La décision du premier juge étant réformée au principal, il y a lieu de l'infirmer en ce qu'elle condamne la SA AXA France IARD aux dépens et alloue une somme de 2000 euros à la SARL BERAHA sur le fondement de l'article 700 du code de procédure.

A l'issue du litige, il convient ainsi de condamner la SARL BERAHA aux dépens et au paiement d'une somme de 2500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition au greffe :

Infirme le jugement du tribunal de commerce de Marseille du 15 octobre 2020 dans toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau,

Déboute la SARL BERAHA de sa demande d'indemnisation des sinistres perte d'exploitation du fait de la fermeture de l'établissement en application des mesures gouvernementales de protection contre la propagation de l'épidémie de COVID 19 formulée à l'encontre de son assureur la SA AXA France IARD.

Dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de restitution des sommes versées en vertu de l'exécution provisoire attachée au jugement déféré à la cour .

Condamne la SARL BERAHA à payer la somme de 2500 euros à la SA AXA France IARD en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la SARL BERAHA aux dépens de première instance et d'appel y compris les frais d'expertise, dont distraction au profit des avocats en ayant fait l'avance.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Juin 2024

Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Monsieur Achille TAMPREAU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 23/01969
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;23.01969 ?
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