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18/06/2024 | FRANCE | N°22/15689

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8a, 18 juin 2024, 22/15689


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8a



ARRÊT AU FOND

DU 18 JUIN 2024



N°2024/













Rôle N° RG 22/15689 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BKMI2







S.A.S. [4]





C/



CPAM DES [Localité 2]



































Copie exécutoire délivrée

le : 18/06/2024

à :



- Me Laurence LEVETTI, avocat au

barreau de MARSEILLE



- CPAM DES [Localité 2]

















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Pole social du Tribunal judiciaire de MARSEILLE en date du 24 Octobre 2022,enregistré au répertoire général sous le n° 17/05912.





APPELANTE



S.A.S. [4], demeurant [Adresse 1]



représentée par Me Laurence ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8a

ARRÊT AU FOND

DU 18 JUIN 2024

N°2024/

Rôle N° RG 22/15689 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BKMI2

S.A.S. [4]

C/

CPAM DES [Localité 2]

Copie exécutoire délivrée

le : 18/06/2024

à :

- Me Laurence LEVETTI, avocat au barreau de MARSEILLE

- CPAM DES [Localité 2]

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du Tribunal judiciaire de MARSEILLE en date du 24 Octobre 2022,enregistré au répertoire général sous le n° 17/05912.

APPELANTE

S.A.S. [4], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Laurence LEVETTI de l'AARPI LEVETTI ET CASTEL, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

CPAM DES [Localité 2], demeurant [Adresse 3]

dispensée en application des dispositions de l'article 946 alinéa 2 du code de procédure civile d'être représentée à l'audience

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Mai 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Benjamin FAURE, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Emmanuelle TRIOL, Présidente

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Monsieur Benjamin FAURE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Aurore COMBERTON.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 18 Juin 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 18 Juin 2024

Signé par Mme Emmanuelle TRIOL, Présidente et Mme Aurore COMBERTON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

M.[W] [H], employé par la SAS [4], a été victime d'un accident du travail le 30 novembre 2016. Alors qu'il déchargeait une benne, un élément heurtait son genou gauche.

Il a produit, le 1er décembre 2016, un certificat médical initial faisant état d'une contusion du genou gauche.

Le 16 décembre 2016, la caisse primaire d'assurance maladie des [Localité 2] (CPAM) a décidé de prendre en charge l'accident de M.[W] [H] au titre de la législation professionnelle.

L'état de santé de M.[W] [H] a été déclaré consolidé sans séquelles au 22 septembre 2017 suivant décision de la CPAM du 3 novembre 2017.

Le 22 septembre 2017, la SAS [4] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale des [Localité 2] aux fins de voir ordonner une expertise sur la durée de l'arrêt de travail de M.[W] [H] en contestant la présomption d'imputabilité au travail des arrêts et soins postérieurs à l'accident de l'intéressé.

Le 1er janvier 2019, la procédure a été transférée au pôle social du tribunal de grande instance de Marseille en application de la loi du 18 novembre 2016.

Par jugement du 24 octobre 2022, le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille a :

déclaré recevable le recours de la SAS [4] ;

débouté la SAS [4] de ses demandes ;

déclaré opposable à la SAS [4] l'ensemble des soins et arrêts de travail jusqu'au 22 septembre 2017 pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels et prescrits à M.[W] [H] à la suite de l'accident de travail dont il a été victime le 30 novembre 2016 ;

laissé les dépens à la charge de la SAS [4] ;

Pour débouter la SAS [4], les premiers juges ont estimé que cette dernière ne rapportait la preuve d'aucun élément médical nouveau de nature à démontrer que les arrêts de travail, prestations et soins prescrits à son salarié résultaient d'une cause étrangère.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 23 novembre 2022, la SAS [4] a relevé appel de l'entier jugement dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas contestées.

EXPOSE DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Dans ses conclusions, soutenues oralement à l'audience du 7 mai 2024, auxquelles il est expressément référé, la SAS [4] demande l'infirmation du jugement et l'organisation d'une expertise.

Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir que :

la CPAM doit justifier de l'intégralité des arrêts de travail ;

il existe une discordance entre la durée de l'arrêt de travail initialement prescrit et celle effective d'arrêt de toute activité ;

M.[W] [H] a tendance à tromper sciemment, dans son intérêt financier, les organismes et intervenants qu'il utilise à son profit ;

M.[W] [H] a été pris en charge par la CPAM au titre du risque maladie à compter du 23 septembre 2017, ce qui est en lien avec le présent litige ;

Dispensée de comparaître sur le fondement de l'article 946 alinéa 2 du code de procédure civile, la CPAM, dans ses conclusions régulièrement communiquées à la partie adverse le 18 avril 2024, auxquelles il est expressément référé, demande la confirmation du jugement et la condamnation de l'appelante à lui payer 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle expose que :

la présomption d'imputabilité au travail des soins et arrêts de travail n'est pas subordonnée à la production par la caisse de la preuve d'une continuité des symptômes et soins jusqu'à la date de consolidation ;

aucune pièce médicale n'est produite par l'appelante pour convaincre la cour d'organiser une expertise médicale ;

l'existence d'un état antérieur ne permet pas d'écarter la prise en charge au titre d'un accident du travail, un état antérieur pouvant être révélé ou exacerbé par le fait traumatique constitutif de l'accident du travail ;

MOTIFS

Sur la présomption d'imputabilité au travail des arrêts et soins postérieurs à l'accident de travail de M.[W] [H]

Il résulte de la combinaison des articles 1353 du code civil et L. 411-1 du code de la sécurité sociale que la présomption d'imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, dès lors qu'un arrêt de travail a été initialement prescrit ou que le certificat médical initial d'accident du travail est assorti d'un arrêt de travail, s'étend à toute la durée d'incapacité de travail précédant soit la guérison complète, soit la consolidation de l'état de la victime, et qu'il appartient à l'employeur qui conteste cette présomption d'apporter la preuve contraire.

La présomption d'imputabilité est une présomption simple, que l'employeur, même s'il n'a pas contesté le caractère professionnel du sinistre, peut renverser en démontrant la preuve contraire, telle que l'existence d'une cause totalement étrangère.

En l'espèce, M.[W] [H], employé par la SAS [4], a déclaré avoir été victime d'un accident du travail le 30 novembre 2016 à 15h00. Il a déclaré cet accident à son employeur le 1er décembre 2016 et a produit un certificat médical du docteur [G] faisant état d'une contusion du genou gauche en date du 1er décembre 2016. Un arrêt de travail lui a été prescrit à compter du 1er décembre 2016 et jusqu'au 3 décembre 2016 lequel a ensuite été prolongé jusqu'au 22 septembre 2017. Ainsi que les décomptes d'indemnités journalières versés aux débats le mettent en évidence, il a bénéficié du service continu d'indemnités journalières du 1er décembre 2016 au 22 septembre 2017, date de sa consolidation. En contemplation de ces éléments et des principes rappelés ci-dessus, la CPAM n'a pas à produire aux débats l'intégralité des arrêts de travail de M.[W] [H] contrairement à ce que soutient l'appelante.

Si la SAS [4] soutient qu'il existe une incohérence médicale flagrante entre le certificat médical initial, qui met en exergue une contusion du genou, et le certificat médical final, qui fait état d'une fracture, la cour observe que le siège de la lésion est le même et qu'une fracture peut très bien survenir à l'occasion d'une contusion du genou et n'être révélée qu'après des examens plus approfondis qu'une consultation initiale.

La SAS [4] ne verse à la procédure aucun élément médical. Les seuls documents de nature à étayer ses allégations consistent en deux courriers adressés à la CPAM les 23 février et 16 août 2017. La cour relève que ces courriers ne comprennent aucun argumentaire médical et se bornent à critiquer de façon générale la durée de l'arrêt de travail de M.[W] [H].

De la même manière, si la SAS [4] se prévaut de pièces échangées lors de l'instance l'ayant opposé à M.[W] [H] devant le conseil des prud'hommes de Martigues qui démontrent que l'intéressé a été, de nouveau, pris en charge par la CPAM à compter du 23 septembre 2017 et indemnisé par Pôle Emploi du 4 décembre 2017 au 5 juin 2018, aucun élément de la procédure ne démontre, contrairement aux assertions de l'appelante, que cette nouvelle prise en charge a été décidée en raison de l'atteinte au genou de M.[W] [H]. Bien au contraire, les attestations de paiement des indemnités journalières font état, à compter du 23 septembre 2017, d'une maladie alors que, jusqu'à la date de consolidation de M.[W] [H] le 22 septembre 2017, elles évoquaient explicitement l'accident du travail du 30 novembre 2016.

Le moyen tiré de la vénalité de M.[W] [H] est inopérant pour renverser la présomption d'imputabilité telle qu'évoquée ci-dessus et n'est fondé sur aucune pièce.

Le moyen relatif à l'état antérieur de M.[W] [H] n'étant pas soutenu par la SAS [4], la cour n'a pas à répondre aux développements de la CPAM sur ce point.

En conséquence, la SAS [4] échoue à détruire la présomption d'imputabilité au travail des arrêts et soins postérieurs à l'accident de travail dont M.[W] [H] a été victime. Les premiers juges seront approuvés en ce qu'ils ont déclaré opposable à la SAS [4] l'ensemble des soins et arrêts de travail jusqu'au 22 septembre 2017 pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels et prescrits à M.[W] [H] à la suite de l'accident de travail dont il a été victime le 30 novembre 2016.

Sur la demande d'expertise

Selon l'article 146 du code de procédure civile, 'une mesure d'instruction ne peut être ordonnée sur un fait que si la partie qui l'allègue ne dispose pas d'éléments suffisants pour le prouver.En aucun cas une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l'administration de la preuve.'

En l'état de la carence probatoire de la SAS [4] à détruire la présomption d'imputabilité, la cour estime que l'appelante ne rapporte pas la preuve d'une difficulté d'ordre médical et n'est pas convaincue qu'une mesure d'expertise soit nécessaire à la résolution du litige.

C'est la raison pour laquelle le jugement sera confirmé.

Sur les demandes accessoires et les dépens

La SAS [4] succombe à la procédure et doit être condamnée aux dépens.

L'équité commande de condamner la SAS [4] à payer à la CPAM la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme, en ses dispositions soumises à la cour, le jugement rendu le 24 octobre 2022 par le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille,

Y ajoutant,

Condamne la SAS [4] aux dépens,

Condamne la SAS [4] à payer à la CPAM la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8a
Numéro d'arrêt : 22/15689
Date de la décision : 18/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 24/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-18;22.15689 ?
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