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17/06/2024 | FRANCE | N°24/00837

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Rétention administrative, 17 juin 2024, 24/00837


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE



CHAMBRE 1-11, Rétention Administrative





ORDONNANCE

DU 17 JUIN 2024



N° 2024/837



N° RG 24/00837 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BNHFS













Copie conforme

délivrée le 17 Juin 2024 par courriel à :

-l'avocat

-le préfet

-le CRA

-le JLD/TJ

-le retenu

-le MP



















Décision déférée à la Cour :



Ordonnance rend

ue par le Juge des libertés et de la détention de NICE en date du 15 Juin 2024 à 13h19.







APPELANT



X se disant Monsieur [E] [S]

né le 03 Octobre 2000 à [Localité 6] (TUNISIE)

de nationalité Tunisienne



Comparant, assisté de Maître Jean-Baptiste GOBAILLE, avocat au...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

CHAMBRE 1-11, Rétention Administrative

ORDONNANCE

DU 17 JUIN 2024

N° 2024/837

N° RG 24/00837 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BNHFS

Copie conforme

délivrée le 17 Juin 2024 par courriel à :

-l'avocat

-le préfet

-le CRA

-le JLD/TJ

-le retenu

-le MP

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de NICE en date du 15 Juin 2024 à 13h19.

APPELANT

X se disant Monsieur [E] [S]

né le 03 Octobre 2000 à [Localité 6] (TUNISIE)

de nationalité Tunisienne

Comparant, assisté de Maître Jean-Baptiste GOBAILLE, avocat au barreau d'Aix-en-Provence, commis d'office, et de Madame [G] [N], interprète en langue arabe, inscrite sur la liste des experts de la cour d'appel d'Aix-en-Provence;

INTIMÉ

MONSIEUR LE PRÉFET DES ALPES-MARITIMES

Représenté par Mme [R] [D];

MINISTÈRE PUBLIC

Avisé et non représenté;

******

DÉBATS

L'affaire a été débattue en audience publique le 17 Juin 2024 devant M. Guillaume KATAWANDJA, Conseiller à la cour d'appel délégué par le premier président par ordonnance, assisté de M. Corentin MILLOT, Greffier.

ORDONNANCE

Contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 17 Juin 2024 à 15h26,

Signée par M. Guillaume KATAWANDJA, Conseiller, et M. Corentin MILLOT, Greffier.

PROCÉDURE ET MOYENS

Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;

Vu l'arrêté portant obligation de quitter le territoire national pris le 29 mai 2024 par le préfet des Alpes-Maritimes, notifié à X se disant Monsieur [E] [S] le même jour à 10h10 ;

Vu la décision de placement en rétention prise le 12 juin 2024 par le préfet des Alpes-Maritimes notifiée à X se disant Monsieur [E] [S] le même jour à 18h30;

Vu l'ordonnance du 15 Juin 2024 rendue par le Juge des libertés et de la détention de NICE décidant le maintien de X se disant Monsieur [E] [S] dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée maximale de 28 jours ;

Vu l'appel interjeté le 15 Juin 2024 à 22h29 par Me Patricia COHEN, avocate de X se disant Monsieur [E] [S];

X se disant Monsieur [E] [S] a comparu et a été entendu en ses explications. Il déclare:

'Je n'ai pas d'adresse en France. Monsieur, je sais que je vais quitter la France, il me faut un peu d'argent avant de quitter la France. Je vais aller où je n'ai même pas de sous pour acheter un ticket de train. Je vous promets que je vais quitter la France. Je ne peux pas sortir comme ça, je vais aller où ' Je n'ai pas de carte d'identité ni de passeport. J'ai fait appel de la décision du JLD car j'étais avec un ami, il a volé, il a été libéré, il a squatté la maison, il a commis des dégradations et c'est moi qui suis au centre et pas lui. Je veux travailler un peu puis je quitte la France. Pour vous répondre, j'ai de la famille en Tunisie, maman, papa et mon frère. Je n'ai qu'une famille lointaine en France. Je suis arrivé en France il y a 3 mois directement à [Localité 7].Non, je ne suis pas blasé. On ne m'a pas donné les papiers de l'OQTF. J'ai téléphoné à l'avocat pour faire un recours mais il m'a dit que sans l'ordonnance je ne pouvais pas.'

Son avocat a été régulièrement entendu. Il sollicite l'infirmation de l'ordonnance déférée et la remise en liberté du retenu. A cette fin, il invoque plusieurs moyens de nullité. D'abord, il fait valoir que les droits de la garde à vue ont été notifiés tardivement à l'appelant. Ensuite, il soutient que l'avis au procureur de la République du placement en garde à vue est également tardif, pour être intervenu à 22h00, ajoutant qu'aucun mail d'avis n'est joint à la procédure. Il reproche en outre à la préfecture de ne pas avoir vérifié si X se disant Monsieur [E] [S] avait bien déposé une demande d'asile en Italie, comme il l'a soutenu en audition. Il expose aussi que les date et heure de fin de garde à vue sont incertaines, ni l'officier de police judiciaire, ni l'appelant n'ayant signé le procès-verbal de notification de fin de garde à vue. Il indique de plus que le délai de transfert de 36 minutes entre le commissariat de police et le centre de rétention de [Localité 7] est excessif, alors que les deux bâtiments se trouvent sur le même site. Il argue encore du défaut de signature par l'étranger du document de notification de la mesure d'éloignement le 12 juin 2024, ce qui équivaut à un défaut de notification de la mesure d'éloignement. Il invoque aussi la tardiveté de l'avis au procureur de la République du placement en rétention. Enfin, il soutient que l'arrêté portant obligation de quitter le territoire notifié le 29 mai 2024 à l'appelant ne lui a pas été remis en copie, de sorte qu'il n'a pas pu contester cet acte administratif.

La représentante de la préfecture a été régulièrement entendue. Elle déclare: 'Sur la notification tardive, l'interpellation a eu lieu à 21H10, les co-auteurs ont besoin d'un interprète, le temps de trouver, de faire déplacer un interprète, un certain délai s'écoule. Vu qu'il y a un co-auteur, on lui a notifié ses droits en amont, en l'espèce, avant Monsieur [S], ce n'est pas un délai tardif. Sur l'avis au procureur de la mesure de GAV: le parquet est avisé à 22H, ce n'est pas considéré comme étant tardif. Sur la demande d'asile en Italie, il déclare être rentré en Italie et avoir fait une demande d'asile qui n'est pas finie, cela n'empêche pas Monsieur d'être placé, il doit apporter une preuve des démarches entreprises. Nous interrogerons la borne en fonction des preuves avancées. Sur la notification de fin de GAV, on voit sur le PV que la GAV a fini à 18H22, il est mentionné que Monsieur a refusé de signer la fin de GAV. Nous n'avons pas sa signature car il refuse de signer. La signature dactylographiée du fonctionnaire n'est pas obligatoire car il peut signer électroniquement et joindre une attestation de conformité. Sur le trajet vers le CRA: La GAV se termine à 18H22, son placement lui est notifié à la suite puis il est envoyé au CRA, les formalités se terminent à 18H55, la retenue n'est pas arbitraire. Sur la notification du placement en rétention et de l'OQTF, l'interprète qui est toujours la même notifie de 18H22 à 18H30 pour lui expliquer la décision. Le fonctionnaire, l'interprète signent. Monsieur ne signe pas sur la notification mais il est indiqué qu'il a refusé de signer ses droits, il a tout refusé de signer. Il y a bien une notification de ses droits qui est faite. Sur l'avis à parquet tardif du placement en rétention, la notification est faite au parquet 5 minutes après. Sur l'OQTF qui n'est pas remise au moment de la signature, il a refusé de signer encore une fois, elle peut être contestée mais devant le TA.'

MOTIFS DE LA DÉCISION

1) Sur la recevabilité de l'appel

Aux termes des dispositions de l'article R743-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), 'L'ordonnance du juge des libertés et de la détention est susceptible d'appel devant le premier président de la cour d'appel, dans les vingt-quatre heures de son prononcé, par l'étranger, le préfet de département et, à Paris, le préfet de police. Lorsque l'étranger n'assiste pas à l'audience, le délai court pour ce dernier à compter de la notification qui lui est faite. Le délai ainsi prévu est calculé et prorogé conformément aux articles 640 et 642 du code de procédure civile.

Le ministère public peut interjeter appel de cette ordonnance selon les mêmes modalités lorsqu'il ne sollicite pas la suspension provisoire.'

Selon les dispositions de l'article R743-11 alinéa 1 du CESEDA, 'A peine d'irrecevabilité, la déclaration d'appel est motivée. Elle est transmise par tout moyen au greffe de la cour d'appel qui l'enregistre avec mention de la date et de l'heure.'

L'ordonnance querellée a été rendue le 15 juin 2024 à 13h19. X se disant Monsieur [E] [S] a interjeté appel le 15 juin 2024 à 22h29 en adressant au greffe de la cour, par l'intermédiaire de son avocate, une déclaration d'appel motivée. Son recours sera donc déclaré recevable.

2) Sur le moyen tiré de la notification tardive des droits de la garde à vue

Aux termes des dispositions de l'article 63-1 du code de procédure pénale, 'La personne placée en garde à vue est immédiatement informée par un officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire, dans une langue qu'elle comprend, le cas échéant au moyen du formulaire prévu au treizième alinéa :

1° De son placement en garde à vue ainsi que de la durée de la mesure et de la ou des prolongations dont celle-ci peut faire l'objet ;

2° De la qualification, de la date et du lieu présumés de l'infraction qu'elle est soupçonnée d'avoir commise ou tenté de commettre ainsi que des motifs mentionnés aux 1° à 6° de l'article 62-2 justifiant son placement en garde à vue ;

3° Du fait qu'elle bénéficie :

-du droit de faire prévenir un proche et son employeur ainsi que, si elle est de nationalité étrangère, les autorités consulaires de l'Etat dont elle est ressortissante, et, le cas échéant, de communiquer avec ces personnes, conformément à l'article 63-2 ;

-du droit d'être examinée par un médecin, conformément à l'article 63-3 ;

-du droit d'être assistée par un avocat, conformément aux articles 63-3-1 à 63-4-3 ;

-s'il y a lieu, du droit d'être assistée par un interprète ;

-du droit de consulter, dans les meilleurs délais et au plus tard avant l'éventuelle prolongation de la garde à vue, les documents mentionnés à l'article 63-4-1 ;

-du droit de présenter des observations au procureur de la République ou, le cas échéant, au juge des libertés et de la détention, lorsque ce magistrat se prononce sur l'éventuelle prolongation de la garde à vue, tendant à ce qu'il soit mis fin à cette mesure. Si la personne n'est pas présentée devant le magistrat, elle peut faire connaître oralement ses observations dans un procès-verbal d'audition, qui est communiqué à celui-ci avant qu'il ne statue sur la prolongation de la mesure ;

-du droit, lors des auditions, après avoir décliné son identité, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire.

Si la personne est atteinte de surdité et qu'elle ne sait ni lire, ni écrire, elle doit être assistée par un interprète en langue des signes ou par toute personne qualifiée maîtrisant un langage ou une méthode permettant de communiquer avec elle. Il peut également être recouru à tout dispositif technique permettant de communiquer avec une personne atteinte de surdité.

Si la personne ne comprend pas le français, ses droits doivent lui être notifiés par un interprète, le cas échéant après qu'un formulaire lui a été remis pour son information immédiate.

Mention de l'information donnée en application du présent article est portée au procès-verbal de déroulement de la garde à vue et émargée par la personne gardée à vue. En cas de refus d'émargement, il en est fait mention.

En application de l'article 803-6, un document énonçant ces droits est remis à la personne lors de la notification de sa garde à vue.'

Il résulte de la disposition susvisée que le délai imparti à l'officier de police judiciaire pour notifier les droits de la garde à vue court à compter de sa présentation devant lui.

En l'espèce, il résulte de la procédure que X se disant Monsieur [E] [S] a été interpellé le 10 juin 2024 à 21h15 au [Adresse 4] à [Localité 7], par le Brigadier de police [Y] [M], agent de police judiciaire. Le même jour à 21h40, l'intéressé sera présenté au Brigadier Major de police [C] [J], officier de police judiciaire, qui le placera en garde à vue du chef de vol aggravé à la même heure. C'est donc à compter de cette heure que doit s'apprécier le délai nécessaire à la notification des droits. L'officier de police judiciare les notifiera à l'intéressé par le truchement de Mme [K] [X], interprète en langue arabe, le même jour à 21H45, soit cinq minutes après le placement en garde à vue, ce qui ne saurait sérieusement être considéré comme tardif.

Le moyen sera donc rejeté.

3) Sur le moyen tiré de l'avis tardif au procureur de la République du placement en garde à vue

Selon les dispositions de l'article 63 I du code de procédure pénale, 'Seul un officier de police judiciaire peut, d'office ou sur instruction du procureur de la République, placer une personne en garde à vue. Dès le début de la mesure, l'officier de police judiciaire informe le procureur de la République, par tout moyen, du placement de la personne en garde à vue. Il lui donne connaissance des motifs justifiant, en application de l'article 62-2, ce placement et l'avise de la qualification des faits qu'il a notifiée à la personne en application du 2° de l'article 63-1. Le procureur de la République peut modifier cette qualification ; dans ce cas, la nouvelle qualification est notifiée à la personne dans les conditions prévues au même article 63-1.'

Il importe de rappeler que l'heure de début de la garde à vue, pour l'application de la disposition susvisée, s'entend de l'heure de présentation à l'officier de police judiciaire.

Comme il a déjà été indiqué, la décision de placement en garde à vue a été prise par le Brigadier Major de police [C] [J], officier de police judiciaire, le 10 juin 2024 à 21h40. Le procureur de la République a été avisé de la mesure le même jour à 22h00, soit vingt minutes après le placement en garde à vue. L'avis n'est donc pas tardif. Si la procédure ne comporte pas de mail adressé par l'officier de police judiciaire au procureur de la République, le procès-verbal établi le 10 juin 2024 à 22h00 par M. [J] suffit à établir la réalité de cette diligence, le procès-verbal faisant foi jusqu'à preuve contraire.

Le moyen sera donc rejeté.

4) Sur le moyen tiré du défaut de vérification par la préfecture quant au dépôt par l'étranger d'une demande d'asile

Les dispositions de l'article 17 du règlement UE n°603/13 du 26 juin 2013 relatif à la création d'Eurodac pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l'application efficace du règlement UE n°604/2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de proteciton internationale dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, prévoient qu' 'En vue de vérifier si un ressortissant de pays tiers ou un apatride séjournant illégalement sur son territoire n'a pas auparavant introduit une demande de protection internationale dans un autre Etat membre, un Etat membre peut transmettre au système central les donnés dactyloscopiques relatives aux empreintes digitales qu'il peut avoir relevées sur un tel ressortissant de pays tiers ou apatride, âgé de 14 ans au moins, ainsi que le numéro de référence attribué par cet Etat membre.'

Il sera observé à titre liminaire que le moyen invoqué ne constitue pas une exception de nullité mais un moyen de fond critiquant les diligences de l'autorité préfectorale en vue de l'exécution de la mesure d'éloignement.

Si la consultation de la borne EURODAC permet à l'administration de s'assurer de la réalité du dépôt d'une demande d'asile dans un Etat européen, cette consultation ne constitue qu'une simple faculté pour l'autorité préfectorale et non une obligation. Or, il ne saurait en l'espèce être reproché au préfet de ne pas avoir consulté ladite borne, dans la mesure où l'appelant ne produit aucun document, tel un récépissé, établissant la réalité de ses dires quant au dépôt d'une demande de protection internationale en Italie.

Le moyen sera donc rejeté.

5) Sur le moyen tiré de l'incertitude des date et heure de fin de garde à vue

Selon les dispositions de l'article 801-1 du code de procédure pénale, 'I. - Tous les actes mentionnés au présent code, qu'il s'agisse d'actes d'enquête ou d'instruction ou de décisions juridictionnelles ou de toute autre pièce de la procédure, peuvent être établis ou convertis sous format numérique.

Le dossier de la procédure peut être intégralement conservé sous format numérique, dans des conditions sécurisées, sans nécessité d'un support papier.

Lorsque ces actes sont établis sous format numérique et que les dispositions du présent code exigent qu'ils soient signés, ils font l'objet, quel qu'en soit le nombre de pages et pour chaque signataire, d'une signature unique sous forme numérique, selon des modalités techniques qui garantissent que l'acte ne peut plus ensuite être modifié. Ces actes n'ont pas à être revêtus d'un sceau.

II. - Ne sont pas applicables au dossier de procédure numérique les dispositions du présent code :

1° Procédant à une distinction entre les actes originaux et leurs copies ;

2° Prévoyant la certification conforme des copies ;

3° Relatives au placement sous scellés, y compris sous scellés fermés, des documents, contenus multimédia ou données dès lors qu'ils sont versés au sein de ce dossier.

III. - Les modalités d'application du présent article sont précisées par voie réglementaire.'

Aux termes des dispositions de l'article D589-2 du même code, 'Constituent des procédés de signature sous forme numérique au sens du troisième alinéa du I de l'article 801-1 la signature électronique et la signature manuscrite recueillie sous forme numérique.

Lorsqu'il n'est pas exigé que le signataire soit identifié personnellement au sein de l'acte, est assimilé à un procédé de signature sous forme numérique le cachet électronique.

Toute personne, y compris celles concourant à la procédure au sens de l'article 11, peut recourir aux procédés mentionnés aux alinéas précédents.'

L'article A53-8 du même code dispose que 'Toute pièce de procédure sous format numérique peut, s'il y a lieu, être imprimée par les magistrats et agents de greffe qui les assistent, les services de la police nationale, les unités de la gendarmerie nationale, les fonctionnaires et agents exerçant des pouvoirs de police judiciaire, les services pénitentiaires ou de la protection judiciaire de la jeunesse afin d'être remise ou transmise sous format papier.

Les pièces ayant fait l'objet d'un procédé de signature sous forme numérique au sens de l'article D. 589-2 conservent leur valeur probante, après leur impression, s'il est joint une attestation unique indiquant qu'elles sont fidèles à leur version sous format numérique dont est détenteur le service mentionné au premier alinéa ou si chaque impression fait l'objet d'une mention certifiant sa fidélité par le service précité.'

Il est établi que les pièces de la procédure, dont le procès-verbal de fin de garde à vue, ont été signées sous la forme numérique, conformément aux dispositions de l'article 801-1 du code de procédure pénale. Le procès-verbal litigieux supporte ainsi la mention 'Signé électroniquement par [F] [I] 1038484", outre celle de Mme [K] [X], interprète en langue arabe. La procédure comprend en outre l'attestation de conformité visée à l'article A53-8 du code de procédure pénale. Enfin, le dernier paragraphe de ce document, précédant immédiatement la zone de signature, précise expressément que X se disant Monsieur [E] [S] a refusé de signer le document. Il y a donc lieu de considérer que le procès-verbal de fin de garde à vue a été valablement signé par l'officier de police judiciaire le 12 juin 2024 à 18h22 et effectivement porté à la connaissance de l'étranger, qui a exercé son droit de ne pas le signer.

Le moyen sera donc rejeté.

6) Sur le moyen tiré du délai de transfert excessif vers le centre de rétention administrative

Selon les dispositions de l'article L744-4 du CESEDA, 'L'étranger placé en rétention est informé dans les meilleurs délais qu'il bénéficie, dans le lieu de rétention, du droit de demander l'assistance d'un interprète, d'un conseil et d'un médecin, et qu'il peut communiquer avec son consulat et toute personne de son choix. Ces informations lui sont communiquées dans une langue qu'il comprend.

En cas de placement simultané en rétention d'un nombre important d'étrangers, la notification des droits mentionnés au premier alinéa s'effectue dans les meilleurs délais.

Les modalités selon lesquelles s'exerce l'assistance de ces intervenants sont précisées, en tant que de besoin, par décret en Conseil d'Etat.'

Selon les dispositions de l'article L743-12 du CESEDA, 'En cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, le juge des libertés et de la détention saisi d'une demande sur ce motif ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la mainlevée du placement ou du maintien en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter substantiellement atteinte aux droits de l'étranger dont l'effectivité n'a pu être rétablie par une régularisation intervenue avant la clôture des débats.'

Il est constant que les droits du retenu s'exercent au centre de rétention. Cependant, le juge judiciaire doit exercer un contrôle sur le délai de transfèrement jusqu'au centre de rétention afin de s'assurer de la possibilité pour l'étranger d'exercer ses droits dans des délais raisonnables, la suspension temporaire de ses droits devant être limitée dans le temps, proportionnée et ne devant pas s'apparenter à une privation de l'exercice des droits.

En l'espèce, il ressort des pièces de la procédure que la garde à vue de X se disant Monsieur [E] [S] a pris fin le 12 juin 2024 à 18h22. L'analyse de la copie du registre de rétention révèle qu'il est arrivé au centre de rétention de Nice le même jour à 18h55. Même si l'intéressé se trouvait en garde à vue au commissariat central de [Localité 7], ce délai de transfert de 33 minutes ne saurait être considéré comme excessif, compte tenu de la réalisation de formalités administratives nécessaires lors de la notification de fin de garde à vue et lors de l'arrivée de l'étranger au centre de rétention. Au demeurant, ce dernier ne précise pas le ou les droits dont l'exercice aurait été empêché en raison de ce délai de transfert.

7) Sur le moyen tiré du défaut de signature par l'étranger du récépissé de notification daté du 12 juin 2024 concernant la mesure d'éloignement

Le moyen invoqué est infondé. En effet, l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes en date du 12 juin 2024, comme son intitulé le rappelle, porte exécution de l'obligation de quitter le territoire prise à l'encontre de X se disant Monsieur [E] [S] le 29 mai 2024, et vaut placement en rétention de l'intéressé. En réalité, la mesure d'éloignement, fondant le placement en rétention est l'arrêté portant obligation de quitter le territoire en date du 29 mai 2024 émanant du préfet des Alpes-Maritimes, effectivement notifié au susnommé le même jour à 10h10, le document supportant la signature du fonctionnaire de police notificateur, de l' interprète en langue arabe présent et la mention du refus de signer de l'étranger.

Le moyen sera donc rejeté.

8) Sur le moyen tiré de l'absence de remise à l'étranger de l'arrêté portant obligation de quitter le territoire

Selon les dispositions de l'article 9 du code de procédure, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de ses prétentions.

Le paragraphe de l'arrêté du 29 mai 2024 portant obligation de quitter le territoire, relatif à la notification, comporte la mention 'Avec nous et en reçoit copie' suivie de celles du lieu de notification, des date et heure de celle-ci, des signatures de l'agent notificateur et de l'interprète et du refus de signer de l'étranger. Cette première mention, non rayée, établit la remise de l'acte administratif à X se disant Monsieur [E] [S].

Le moyen est donc inopérant.

9) Sur le moyen tiré de l'avis tardif au procureur de la République du placement de l'étranger en rétention

Selon les dispositions de l'article L744-8 du CESEDA, le procureur de la République est immédiatement informé de tout placement en rétention.

Les modalités de cette information ne sont pas précisées et elle peut donc être délivrée par tout moyen, y compris par téléphone, sans que l'OPJ ait à en justifier autrement que par l'affirmation d'y avoir procédé dans le temps prévu par la loi et par tel moyen de son choix.

Par ailleurs, il résulte de cette disposition qu'un seul procureur de la République doit être avisé de la mesure de rétention. Il peut s'agir du procureur de la République du lieu de la prise de décision de placement en rétention ou celui du lieu de la rétention, le juge devant rechercher à quel moment ce magistrat a effectivement été avisé.

En l'espèce, il résulte du procès-verbal établi par le Brigadier Chef de police [I], officier de police judiciaire, que le procureur de la République de Nice a été avisé du placement en rétention de X se disant Monsieur [E] [S] le 12 juin 2024 à 18h40. En outre, est jointe à la procédure la copie du mail en ce sens adressé au parquet de Nice à ces mêmes date et heure. La garde à vue ayant pris fin le 12 juin 2024 à 18h22, l'avis adressé au ministère public 18 minutes plus tard ne saurait être considéré comme tardif.

Le moyen sera donc écarté.

Aussi, l'ordonnance entreprise sera confirmée.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par décision contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,

Déclarons recevable l'appel formé par X se disant Monsieur [E] [S],

Rejetons les moyens soulevés,

Confirmons l'ordonnance du Juge des libertés et de la détention de NICE en date du 15 Juin

2024.

Les parties sont avisées qu'elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d'Etat ou de la Cour de cassation.

Le greffier Le président

Reçu et pris connaissance le :

X se disant Monsieur [E] [S]

né le 03 Octobre 2000 à [Localité 6] (TUNISIE)

de nationalité Tunisienne

assisté de , interprète en langue arabe.

Interprète

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11, Rétentions Administratives

Palais Verdun , bureau 443

Téléphone : [XXXXXXXX02] - [XXXXXXXX03] - [XXXXXXXX01]

Courriel : [Courriel 5]

Aix-en-Provence, le 17 Juin 2024

À

- Monsieur le préfet des Alpes-Maritimes

- Monsieur le directeur du centre de rétention administrative de [Localité 7]

- Monsieur le procureur général

- Monsieur le greffier du Juge des libertés et de la détention de NICE

- Maître Jean-Baptiste GOBAILLE

NOTIFICATION D'UNE ORDONNANCE

J'ai l'honneur de vous notifier l'ordonnance ci-jointe rendue le 17 Juin 2024, suite à l'appel interjeté par :

X se disant Monsieur [E] [S]

né le 03 Octobre 2000 à [Localité 6] (TUNISIE)

de nationalité Tunisienne

Je vous remercie de m'accuser réception du présent envoi.

Le greffier,

VOIE DE RECOURS

Nous prions Monsieur le directeur du centre de rétention administrative de bien vouloir indiquer au retenu qu'il peut se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Rétention administrative
Numéro d'arrêt : 24/00837
Date de la décision : 17/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-17;24.00837 ?
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