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14/06/2024 | FRANCE | N°24/00820

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Rétention administrative, 14 juin 2024, 24/00820


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE



CHAMBRE 1-11, Rétention Administrative





ORDONNANCE

DU 14 JUIN 2024



N° 2024/820



N° RG 24/00820 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BNGU2













Copie conforme

délivrée le 14 Juin 2024 par courriel à :

-l'avocat

-le préfet

-le CRA

-le JLD/TJ

-le retenu

-le MP



















Décision déférée à la Cour :



Ordonnance rend

ue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 13 Juin 2024 à 13h49.







APPELANT



Monsieur [A] [L]

né le 14 Mai 1993 à [Localité 7] (Algérie) (99)

de nationalité Algérienne

Comparant, assisté de Maître Margaux SBLANDANO, avocat au barreau d'Ai...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

CHAMBRE 1-11, Rétention Administrative

ORDONNANCE

DU 14 JUIN 2024

N° 2024/820

N° RG 24/00820 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BNGU2

Copie conforme

délivrée le 14 Juin 2024 par courriel à :

-l'avocat

-le préfet

-le CRA

-le JLD/TJ

-le retenu

-le MP

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 13 Juin 2024 à 13h49.

APPELANT

Monsieur [A] [L]

né le 14 Mai 1993 à [Localité 7] (Algérie) (99)

de nationalité Algérienne

Comparant, assisté de Maître Margaux SBLANDANO, avocat au barreau d'Aix-en-Provence, commis d'office, et de Madame [W] [O], interprète en langue arabe, inscrite sur la liste des experts de la cour d'appel d'Aix-en-Provence;

INTIMÉ

MONSIEUR LE PRÉFET DES BOUCHES-DU-RHÔNE

Représenté par Monsieur [S] [Y];

MINISTÈRE PUBLIC

Avisé et non représenté;

******

DÉBATS

L'affaire a été débattue en audience publique le 14 Juin 2024 devant M. Guillaume KATAWANDJA, Conseiller à la cour d'appel délégué par le premier président par ordonnance, assisté de Mme Himane EL FODIL, Greffière.

ORDONNANCE

Contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 14 Juin 2024 à 15h30,

Signée par M. Guillaume KATAWANDJA, Conseiller, et Mme Himane EL FODIL, Greffière.

PROCÉDURE ET MOYENS

Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;

Vu l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français pris le 09 février 2024 par le préfet des Bouches-du-Rhône, notifié à Monsieur [A] [L] le 15 février 2024 à 15h30 ;

Vu la décision de placement en rétention prise le 13 mai 2024 par le préfet des Bouches-du-Rhône notifiée à Monsieur [A] [L] le14 mai 2024 à 9h00;

Vu l'ordonnance du 13 Juin 2024 rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE décidant le maintien de Monsieur [A] [L] dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée maximale de 30 jours;

Vu l'appel interjeté le 13 Juin 2024 à 16h00 par Monsieur [A] [L] ;

Monsieur [A] [L] a comparu et a été entendu en ses explications. Il déclare : 'Je ne me souviens pas de mes date et lieu de naissance. Je n'ai pas d'adresse en France. Lorsque l'OQTF a été prononcée, je n'ai pu quitter le territoire car il y avait le covid. Je ne suis pas Algérien même si j'ai été reconnu. J'ai fait appel car il y a beaucoup de bagarres dans le centre de rétention. Je veux respecter l'obligation de quitter le territoire si je sors mais j'ai des problèmes avec l'Algérie. Cela fait 17 ans que je suis en France et je suis malade.Je demande pardon. Je suis très fatigué. J'ai été deux fois en détention et maintenant en centre de rétention.'

Son avocate a été régulièrement entendue. Elle sollicite l'infirmation de l'ordonnance déférée et la remise en liberté du retenu ou, à défaut, son assignation à résidence. A ces fins, elle fait valoir que le préfet n'a pas accompli les diligences nécessaires à l'exécution de la mesure d'éloignement, estimant qu'il n'existe pas de perspective d'éloignement. Elle soutient enfin que l'état de santé mentale de l'appelant est incompatible avec la rétention.

Le représentant de la préfecture a été régulièrement entendu. Il déclare: 'Monsieur est ressortissant algérien. Un laissez-passer a été réclamé le 14 mai puis, le 21 mai et le 12 juin mais sans retour des autorités algériennes. Nous avons un vol de prévu le 28 juin, nous sommes donc en attente du retour du consulat algérien. Nous n'avons pas de document concernant son état de santé.'

MOTIFS DE LA DÉCISION

1) Sur la recevabilité de l'appel

Aux termes des dispositions de l'article R743-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), 'L'ordonnance du juge des libertés et de la détention est susceptible d'appel devant le premier président de la cour d'appel, dans les vingt-quatre heures de son prononcé, par l'étranger, le préfet de département et, à Paris, le préfet de police. Lorsque l'étranger n'assiste pas à l'audience, le délai court pour ce dernier à compter de la notification qui lui est faite. Le délai ainsi prévu est calculé et prorogé conformément aux articles 640 et 642 du code de procédure civile.

Le ministère public peut interjeter appel de cette ordonnance selon les mêmes modalités lorsqu'il ne sollicite pas la suspension provisoire.'

Selon les dispositions de l'article R743-11 alinéa 1 du CESEDA, 'A peine d'irrecevabilité, la déclaration d'appel est motivée. Elle est transmise par tout moyen au greffe de la cour d'appel qui l'enregistre avec mention de la date et de l'heure.'

L'ordonnance querellée a été rendue le 13 juin 2024 à 13h49 et notifiée à Monsieur [A] [L] à ces mêmes date et heure. Ce dernier a interjeté appel le même jour à 16h00 en adressant au greffe de la cour une déclaration d'appel motivée. Son recours sera donc déclaré recevable.

2) Sur le moyen tiré du défaut de diligences de l'autorité préfectorale

L'article 15 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil en date du 16 décembre 2008 rappelle:

'1. À moins que d'autres mesures suffisantes, mais moins coercitives, puissent être appliquées efficacement dans un cas particulier, les États membres peuvent uniquement placer en rétention le ressortissant d'un pays tiers qui fait l'objet de procédures de retour afin de préparer le retour et/ou de procéder à l'éloignement, en particulier lorsque:

a)

il existe un risque de fuite, ou

b)

le ressortissant concerné d'un pays tiers évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d'éloignement.

Toute rétention est aussi brève que possible et n'est maintenue qu'aussi longtemps que le dispositif d'éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise.

(...)

4. Lorsqu'il apparaît qu'il n'existe plus de perspective raisonnable d'éloignement pour des considérations d'ordre juridique ou autres ou que les conditions énoncées au paragraphe 1 ne sont plus réunies, la rétention ne se justifie plus et la personne concernée est immédiatement remise en liberté.

Selon les dispositions de l'article L742-4 du CESEDA, 'Le juge des libertés et de la détention peut, dans les mêmes conditions qu'à l'article L. 742-1, être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants :

1° En cas d'urgence absolue ou de menace pour l'ordre public ;

2° Lorsque l'impossibilité d'exécuter la décision d'éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l'intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l'obstruction volontaire faite à son éloignement ;

3° Lorsque la décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison :

a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l'exécution de la décision d'éloignement ;

b) de l'absence de moyens de transport.

L'étranger peut être maintenu à disposition de la justice dans les conditions prévues à l'article L. 742-2.

Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d'une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas soixante jours.'

Aux termes de l'article L741-3 du CESEDA, 'Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet.'

Il appartient au juge des libertés et de la détention, en application de l'article L. 741-3 du CESEDA de rechercher concrètement les diligences accomplies par l'administration pour permettre que l'étranger ne soit maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. Cela induit, sauf circonstances insurmontables, la production de pièces par l'administration qui établissent ces diligences, en fonction de la situation de l'étranger.

En l'espèce, il importe de relever que l'appelant a été reconnu comme ressortissant algérien le 20 mars 2024 par les services Interpol d'[Localité 4], soit avant son placement en rétention. En outre, l'autorité préfectorale justifie de la saisine du consulat d'Algérie par mail du 14 mai 2024 à 15h36, soit le jour du placement en rétention, aux fins de délivrance d'un laissez-passer. Le 15 mai, elle a sollicité un routing de vol vers l'Algérie, qu'elle a adressé aux autorités algériennes le 23 mai. Faute de délivrance des documents de voyage, le préfet a demandé un nouveau routing le 7 juin, avant de relancer le consulat d'Algérie par mail du 12 juin à 11 h28. Ces démarches constituent des diligences en vue de l'exécution de la mesure d'éloignement, étant au demeurant rappelé qu'aucune disposition légale n'impose au préfet de relancer l'autorité étrangère à l'égard de laquelle il ne dispose d'aucun pouvoir de contrainte.

Enfin, il ne saurait être soutenu à ce stade, après à peine trente jours de rétention, qu'il n'existe pas de perspective d'éloignement, alors que la durée légale maximum de la mesure est de trois mois et que l'autorité étrangère a été dûment interrogée.

Le moyen soulevé n'est donc pas fondé.

3) Sur le moyen tiré de l'incompatibilité de l'état de santé de l'étranger avec la rétention

En application de l'article L. 744-4 du Ceseda, l'étranger placé en rétention est informé dans les meilleurs délais qu'il bénéficie, dans le lieu de rétention, du droit de demander l'assistance d'un interprète, d'un conseil et d'un médecin, et qu'il peut communiquer avec son consulat et toute personne de son choix. Ces informations lui sont communiquées dans une langue qu'il comprend.

En application de l'article R 744-18 CESEDA, pendant la durée de leur séjour en rétention, les étrangers sont hébergés et nourris à titre gratuit. Ils sont soignés gratuitement. S'ils en font la demande, ils sont examinés par un médecin de l'unité médicale du centre de rétention administrative, qui assure, le cas échéant, la prise en charge médicale durant la rétention administrative.

Aux termes de l'article L741-4 du CESEDA, 'La décision de placement en rétention prend en compte l'état de vulnérabilité et tout handicap de l'étranger.

Le handicap moteur, cognitif ou psychique et les besoins d'accompagnement de l'étranger sont pris en compte pour déterminer les conditions de son placement en rétention.'

Selon les dispositions de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

En l'espèce, si M. [L] invoque l'incompatibilité de son état de santé mentale avec la rétention, il ne produit aucun document médical au soutien de ses dires, pas même un certificat du médecin du centre de rétention relatant d'éventuelles affections d'ordre psychiatrique.

Compte tenu de cette carence probatoire, le moyen sera rejeté.

4) Sur la mise en liberté et l'assignation à résidence

Selon les dispositions de l'article L743-13 alinéas 1 et 2 du CESEDA, 'Le juge des libertés et de la détention peut ordonner l'assignation à résidence de l'étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives.

L'assignation à résidence ne peut être ordonnée par le juge qu'après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d'un récépissé valant justification de l'identité et sur lequel est portée la mention de la décision d'éloignement en instance d'exécution.

Lorsque l'étranger s'est préalablement soustrait à l'exécution d'une décision mentionnée à l'article L. 700-1, à l'exception de son 4°, l'assignation à résidence fait l'objet d'une motivation spéciale.'

Aux termes des dispositions de l'article L741-3 du CESEDA, 'Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet.'

L'appréciation de l'opportunité d'accorder cette mesure, qui ne saurait non plus être automatique, suppose que les éléments de la procédure ne laissent pas apparaître un risque de non exécution de la mesure d'éloignement.

En l'espèce, Monsieur [A] [L] ne dispose pas d'un passeport original en cours de validité. De plus, il ne justifie d'aucun hébergement stable et effectif sur le territoire national.Surtout, il sera relevé que l'intéressé s'est déjà soustrait à deux précédents arrêtés portant obligation de quitter le territoire pris à son encontre les 15 août 2019 et 12 novembre 2020. Il a également méconnu les termes d'un arrêté portant assignation à résidence pris par le préfet des Bouches-du-Rhône le 24 décembre 2020, le susnommé n'ayant pas respecté son obligation de pointage.

Dès lors, faute de garanties de représentation, ses demandes de mise en liberté et d'assignation à résidence seront rejetées.

Aussi, l'ordonnance entreprise sera confirmée.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par décision contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,

Déclarons recevable l'appel formé par Monsieur [A] [L],

Rejetons les moyens soulevés,

Confirmons l'ordonnance du Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 13 Juin 2024.

Les parties sont avisées qu'elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d'Etat ou de la Cour de cassation.

Le greffier Le président

Reçu et pris connaissance le :

Monsieur [A] [L]

né le 14 Mai 1993 à [Localité 7] (Algérie) (99)

de nationalité Algérienne

assisté de , interprète en langue arabe.

Interprète

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11, Rétentions Administratives

[Adresse 8]

Téléphone : [XXXXXXXX02] - [XXXXXXXX03] - [XXXXXXXX01]

Courriel : [Courriel 5]

Aix-en-Provence, le 14 Juin 2024

À

- Monsieur le préfet des Bouches-du-Rhône

- Monsieur le directeur du centre de rétention administrative de [Localité 6]

- Monsieur le procureur général

- Monsieur le greffier du Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE

- Maître Margaux SBLANDANO

NOTIFICATION D'UNE ORDONNANCE

J'ai l'honneur de vous notifier l'ordonnance ci-jointe rendue le 14 Juin 2024, suite à l'appel interjeté par :

Monsieur [A] [L]

né le 14 Mai 1993 à [Localité 7] (Algérie) (99)

de nationalité Algérienne

Je vous remercie de m'accuser réception du présent envoi.

Le greffier,

VOIE DE RECOURS

Nous prions Monsieur le directeur du centre de rétention administrative de bien vouloir indiquer au retenu qu'il peut se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Rétention administrative
Numéro d'arrêt : 24/00820
Date de la décision : 14/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-14;24.00820 ?
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