La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/06/2024 | FRANCE | N°21/07955

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-1, 14 juin 2024, 21/07955


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-1



ARRÊT AU FOND

DU 14 JUIN 2024



N° 2024/173



Rôle N° RG 21/07955 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHRDT







[P] [D]





C/



S.A.S. ACA PROVENCE











Copie exécutoire délivrée

le :



14 JUIN 2024



à :



Me Pierre-philippe COLJE de la SELARL DEFEND & ADVISE - AVOCATS, avocat au barreau d'ALPES DE HAUTE-PROVENCE



Me Carole RAFFERMI, a

vocat au barreau de GRASSE





















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de DIGNE-LES-BAINS en date du 03 Mai 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 18/00080.





APPELANTE
...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-1

ARRÊT AU FOND

DU 14 JUIN 2024

N° 2024/173

Rôle N° RG 21/07955 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHRDT

[P] [D]

C/

S.A.S. ACA PROVENCE

Copie exécutoire délivrée

le :

14 JUIN 2024

à :

Me Pierre-philippe COLJE de la SELARL DEFEND & ADVISE - AVOCATS, avocat au barreau d'ALPES DE HAUTE-PROVENCE

Me Carole RAFFERMI, avocat au barreau de GRASSE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de DIGNE-LES-BAINS en date du 03 Mai 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 18/00080.

APPELANTE

Madame [P] [D], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Pierre-philippe COLJE de la SELARL DEFEND & ADVISE - AVOCATS, avocat au barreau d'ALPES DE HAUTE-PROVENCE

INTIMEE

S.A.S. ACA PROVENCE, demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Carole RAFFERMI, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Avril 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Emmanuelle CASINI, Conseillère, chargée du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre

Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseillère

Mme Emmanuelle CASINI, Conseillère

Greffier lors des débats : Monsieur Kamel BENKHIRA

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Juin 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Juin 2024

Signé par Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre et Monsieur Kamel BENKHIRA, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Madame [P] [D] a été embauchée en qualité de femme de chambre par la société ACA PROVENCE qui exploite un établissement d'hôtel restaurant sous l'enseigne [4] à [Localité 3], sous contrat d'usage 'extra' les 9 février 2018 (horaires de 6h30 à 15h), 10 février 2018 (horaires de 6h30 à 14h30) et 11 février 2018 (horaires de 6h30 à 14h30) pour une durée totale de 21,30 heures, moyennant une rémunération de 10,00 euros bruts de l'heure.

Madame [P] [D] a ensuite été engagée le 12 février 2018 par cette même société en qualité d'employée polyvalente niveau 1 échelon 1 à temps partiel sous contrat à durée déterminée d'un jour, en remplacement de Madame [L] [U] salariée absente pour cause de maladie, à compter 13 février 2018 à 8H00, moyennant la rémunération de 10,00 euros bruts l'heure, le contrat de travail prévoyant que Madame [D] aurait à travailler le lundi de 10h00 à 14h30, le vendredi de 6h30 à 14h30, le samedi et le dimanche de 6h30 à 15h00.

Madame [D] a travaillé pour la société ACA PROVENCE jusqu'au 25 février 2018 inclus.

L'employeur lui a remis le 14 mars 2018 ses documents de fin de contrat datés du 25 février 2018, soit un reçu pour solde de tout compte, un certificat de travail mentionnant son emploi du 13 au 25 février 2018, une attestation Pôle emploi faisant état de la fin d'un contrat à durée déterminée à temps partiel ayant couru du 13 au 25 février 2018 période pendant laquelle la salariée aurait travaillé 59,04 heures moyennant la rémunération brute de 744,62 euros, un bulletin de salaire d'un montant de 744,62 euros bruts et 539,57 euros nets pour 59,04 heures travaillées du 13 au 25 février 2018 outre un avantage en nature de repas, une indemnité de fin de mission et une indemnité de congés payés, ainsi qu'un chèque de salaire.

Madame [D] a indiqué à l'employeur que les heures effectuées au titre du contrat d'usage 'extra' entre le 9 et le 11 février 2018 n'apparaissaient pas sur son bulletin de salaire.

Mme [D] contestant avoir apposé sa signature sur le document remis à l'audience prud'homale par l'employeur intitulé 'contrat à durée déterminée du 13 février 2018", le conseil de prud'hommes de Digne les Bains a, suivant jugement avant dire droit du 14 octobre 2019, ordonné une expertise en écritures aux frais avancés de la SAS ACA PROVENCE.

Le rapport d'expertise de Mme [K], graphologue expert en écriture près la cour d'appel d'Aix en Provence, a été déposé le 13 novembre 2020 et conclut ainsi '.L'observation sous agrandissement, la comparaison détaillée et illustrée de la mention manuscrite et de la signature apposées sur la

photocopie de la dernière page du contrat de travail litigieux du 13/02/2018 avec les écrits et signatures de comparaison de [P] [D] (figurant sur treize documents de comparaison) ont révélé des divergences et des tracés qui nous paraissent fortement être l'objet de falsifications et d'imitations.'

Suivant jugement en date du 3 mai 2021, le conseil de prud'hommes de Digne les Bains :

DIT que la pièce numéro 5 produite par la SAS ACA PROVENCE est irrecevable,

REJETTE de la liste des documents fournis par l'employeur, le contrat de travail établi en date du 13 février 2018, la signature ayant été falsifiée,

DIT qu'aucun contrat de travail à durée déterminée n'a lié les parties entre le 14 février 2018 et le 25 février 2018,

CONDAMNE la SAS ACA PROVENCE à verser à Madame [D] la somme de 49,60 euros brut, outre indemnités de congés payés d'un montant de 4,96 euros brut, outre indemnités de fin de contrat de 4,96 euros brut, au titre d'arriéré de salaire,

CONDAMNE la SAS ACA PROVENCE à verser à Madame [D] au titre d'heures de pause la somme de 10 euros brut, outre l'indemnité de congés payés d'un montant de 1euro brut outre l'indemnité de fin de contrat d'un montant de 1 euro brut,

DÉBOUTE Madame [D] de sa demande de versement de la somme de 4 707,54 euros au titre de l 'indemnité pour travail dissimulé,

REQUALIFIE la relation contractuelle entre la SAS ACA PROVENCE et Madame [D] en contrat à durée indéterminée à temps partiel en date du 14 février 2018,

CONDAMNE la SAS ACA PROVENCE à verser à Madame [D] une indemnité de requalification d'un montant de 1.091,99 euros bruts,

DIT que la rupture du contrat de travail de Madame [D] et la SAS ACA PROVENCE est abusive et irrégulière,

DIT que la rupture du contrat de travail de Madame [D] et la SAS ACA PROVENCE n'est pas brutale et vexatoire,

CONDAMNE la SAS ACA PROVENCE à verser à Madame [P] [D], une indemnité compensatrice de préavis égale à huit jours de salaire la somme de 340 euros bruts, outre indemnité compensatrice de congés payés de 34 euros bruts, outre indemnité de fin de contrat de 34 euros brut,

CONDAMNE la SAS ACA PROVENCE à verser à Madame [D] la somme de 400 euros bruts à titre d'indemnité pour licenciement abusif,

CONDAMNE la SAS ACA PROVENCE à verser à Madame [D] la somme de 400 euros bruts à titre d'indemnité pour licenciement irrégulier,

DÉBOUTE Madame [D] de sa demande de versement par la SAS ACA PROVENCE de la somme de 2.500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire,

CONDAMNE la SAS ACA PROVENCE à verser à Madame [D] la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

REJETTE la SAS ACA PROVENCE de sa demande de versement de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

REJETTE la demande Madame [D] de prise en charge par la SAS ACA PROVENCE des frais qu'elle sera contrainte d'engager pour obtenir l'exécution par la SAS ACA PROVENCE du jugement à intervenir,

VU que la provision n'a pu être encaissé dans les délais,

DIT que le chèque Numéro 0000553 de la Banque Populaire en date du 19 décembre 2019 sera restitué à la SAS ACA PROVENCE à la notification du présent jugement,

Dit que la partie défenderesse, la SAS ACA PROVENCE, devra prendre à sa charge les frais d'expertise d'un montant de 1200.00 euros (Mille deux cent euros) directement entre les mains de l'expert Madame [K] [F] née [E], [Adresse 2], et devront être réglés à compter de la notification du présent jugement,

ACCORDE l'exécution provisoire du présent jugement en ce qui concerne les frais d'expertise,

DÉBOUTE Madame [D] de sa demande d'ordonner l'exécution provisoire du jugement,

DIT que la décision n'est pas de droit revêtue de l'exécution provisoire.

Suivant déclaration du 28 mai 2021, Madame [D] a interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 17 septembre 2021, Mme [P] [D] demande à la cour de :

DEBOUTER la SAS ACA PROVENCE de toutes ses demandes tant principales que subsidiaires ou reconventionnelles,

REFORMER le jugement entrepris en ce qu'il :

- l'a déboutée de sa demande de versement de la somme de 4.707,54 euros au titre de l'indemnité pour travail dissimulé,

- a requalifié la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée à temps partiel en date du 14 février 2018,

- a dit que la rupture du contrat de travail n'est pas brutale et vexatoire,

-a condamné la SAS ACA PROVENCE à lui verser la somme de seulement 400 euros bruts à titre d'indemnité pour licenciement abusif et de seulement 400 euros bruts à titre d'indemnité pour licenciement irrégulier,

-l'a déboutée de sa demande de versement par la SAS ACA PROVENCE de la somme de 2 500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire,

- a condamné la SAS ACA PROVENCE à lui verser la somme de seulement 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté sa demande de prise en charge des frais qu'elle sera contrainte d'engager pour obtenir l'exécution par la SAS ACA PROVENCE du jugement prud'homal,

-l'a déboutée de sa demande d'ordonner l'exécution provisoire du jugement du conseil de prud'hommes,

-dit que la décision n'est pas de droit revêtue de l'exécution provisoire,

STATUANT A NOUVEAU,

- condamner la SAS ACA PROVENCE à lui verser une indemnité pour travail dissimulé d'un montant de 4.707,54 euros (nets),

- requalifier en contrat à durée indéterminée à temps partiel la relation contractuelle ayant existé entre les parties à compter du 9 février 2018,

- subsidiairement requalifier la relation contractuelle de travail en contrat à durée indéterminée à temps complet dès le 12 février 2018,

- très subsidiairement confirmer le jugement et donc requalifier la relation contractuelle de travail en contrat à durée indéterminée à temps partiel à compter du 14 février 2018.

- dire que la rupture du contrat de travail par la SAS ACA PROVENCE est un licenciement abusif et irrégulier mais aussi brutal et vexatoire,

-condamner la SAS ACA PROVENCE à lui verser à titre d'indemnité pour licenciement abusif, la somme 1.091,99 euros bruts,

-condamner l'employeur à lui verser la somme de 1.500 euros pour licenciement irrégulier,

-condamner ce dernier à lui verser la somme de 2.500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire,

-condamner l'employeur à prendre en charge tous les frais qu'elle sera contrainte d'engager pour obtenir l'exécution par la SAS ACA PROVENCE du jugement de première instance et/ou de l'arrêt à intervenir,

Y AJOUTANT :

Condamner la SAS ACA PROVENCE à lui verser la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais non compris dans les dépens de première instance outre la somme de 3.500 euros au titre de ses frais non compris dans les dépens de l'instance d'appel,

Condamner l'employeur aux entiers dépens de l'instance d'appel.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 18 mai 2022, la société ACA PROVENCE demande à la cour de :

CONFIRMER le jugement du conseil des prud'hommes du 3 mai 2021 en ce qu'il a :

Débouté Madame [D] de ses demandes au titre du travail dissimulé,

Débouté la salariée de ses demandes au titre du caractère brutal et vexatoire de la rupture,

L'a déboutée de ses demandes au titre du paiement de l'heure de pause,

L'a déboutée de sa demande de mettre à sa charge les frais d'exécution du jugement,

INFIRMER le jugement du Conseil des Prud'hommes du 3 mai 2021 des autres chefs,

Statuant à nouveau sur ces chefs :

DIRE que la société ACA PROVENCE ne doit que 3,33 euros bruts au titre de l'arriéré de salaire et 0,33 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés,

DÉBOUTER Madame [D] de sa demande au titre de la requalification du contrat de travail,

Subsidiairement,

DIRE que la requalification est à compter du 14 février 2018 et sur un temps partiel,

CONSTATER que Madame [D] n'apporte aucun élément de preuve relatif à un quelconque préjudice subi,

DEBOUTER Madame [D] de l'intégralité de ses demandes indemnitaires à ce titre.

Reconventionnellement,

CONDAMNER Madame [D] au paiement de 3.000 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile.

La procédure a été clôturée suivant ordonnance du 11 avril 2024.

MOTIFS DE L'ARRET

Sur l'exécution du contrat de travail

Sur la requalification du contrat de travail

Mme [P] [D] demande à la cour de réformer le jugement entrepris et de requalifier en contrat à durée indéterminée à temps partiel la relation contractuelle ayant existé entre les parties à compter du 9 février 2018 ou subsidiairement requalifier la relation contractuelle de travail en contrat à durée indéterminée dès le 12 février 2018 à temps complet ou très subsidiairement requalifier la relation contractuelle de travail en contrat à durée indéterminée à temps partiel à compter du 14 février 2018.

La salariée fait valoir que l'employeur ne pouvait valablement l'employer les 9, 10 et 11 février 2018 sous contrat d'usage 'extra' en tant que femme de chambre dans la mesure où son contrat ne comporte pas la définition précise de son motif, et le CDD d'usage n'était pas justifié par l'existence d'éléments concrets et précis établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi, s'agissant d'un emploi de femme de chambre exerçant dans un hôtel, de sorte que ce contrat doit être requalifié en contrat à durée indéterminée .

Elle indique également avoir continué à travailler le 12 février 2018 sans contrat de travail écrit alors qu'à cette date, d'une part, son contrat d'usage d'extra était censé être parvenu à son terme et d'autre part, son contrat à durée déterminée à effet du 13 février, n'avait pas encore commencé.

Madame [D] ajoute avoir également travaillé du 13 au 25 février 2018 alors que le contrat de travail à durée déterminée en date du 12 février 2018 ne devait durer que la journée du 13 février; qu'en tout état de cause, ce contrat conclu pour le remplacement d'une salariée absente, faute de terme précis, devait être conclu pour une durée minimale comme le prévoit le dernier alinéa de l'article L1242-7 du code du travail et le 3° de l'article L1242-12 de ce même code.

Par ailleurs, Madame [D] rappelle qu'elle a toujours contesté avoir par la suite signé un contrat de travail en date du 13 février 2018 censé couvrir la période du 14 au 25 février 2018, ayant porté plainte pour faux dès qu'elle en a eu connaissance et l'expert en écriture ayant confirmé le fait que sa signature avait été imitée. Elle estime qu'alors que la relation de travail s'est poursuivie au delà du terme d'un jour prévu au contrat, le contrat de travail doit être requalifié en contrat à durée indéterminée en application de l'article L1243-11 alinéa 1 du code du travail.

La SAS ACA PROVENCE demande à la cour d'appel à titre principal, de réformer la décision du conseil des Prud'hommes en ce qu'il a requalifié la relation de travail en contrat à durée indéterminée et à titre subsidiaire, de confirmer les limitations posées par le conseil des prud'hommes à cette requalification, soit à temps partiel à compter du 14 février 2018.

Elle soutient qu'en application de l'article L1242-2 du code du travail, elle était parfaitement autorisée à conclure un contrat d'usage, exerçant dans le domaine d'activité de l'hôtellerie restauration visé aux dispositions de l'article D 1242-1 du code du travail. Elle estime que, conformément à la décision rendue par la cour de cassation dans un arrêt de 2006, la requalification ne peut être encourue sous prétexte que le caractère temporaire de l'emploi n'a pas été établi, alors que l'article 14 de la convention collective des hôtels et cafés restaurants permet le recours successifs aux contrats d'usage pour des emplois par nature temporaire et qu'en l'espèce Mme [D] a pu valablement être employée, pour une seule mission en qualité d'extra pour 3 jours en qualité de femme de chambre en raison d'un besoin spécifique et temporaire.

S'agissant de la journée du lundi 12 février 2018, l'employeur prétend qu'il est trompé dans les dates et qu'il était prévu que Mme [D] travaille dès ce jour là et non à compter du 13 février 2018, ce qui résulte du contrat écrit lui même qui mentionne les horaires de la salariée le lundi de 10h à 14h30. Il ajoute qu'il s'agissait d'un contrat visant à permettre le remplacement temporaire d'une salariée absente; que dans ce cas, le contrat de travail est conclu pour une durée minimale et qu'il a pour terme la fin de la période d'absence du salarié remplacé; qu'en l'espèce, s'il prévoit la durée minimale d'un jour, le contrat de travail fait bien mention d'un planning hebdomadaire, ce qui permet de confirmer que son objet était de couvrir la période d'absence de Mme [U] qu'elle qu'en soit sa durée. L'employeur indique à ce titre que cette salariée, a été embauchée suivant contrat à durée déterminée jusqu'au 10 mars 2018 pour 31 heures par semaine; qu'elle a été arrêtée pour maladie à compter du 7 février 2018 prolongé jusqu'au 11 mars 2018, la relation de travail de Mme [D] pour la remplacer était donc bien couverte par un contrat de travail jusqu'à cette date, mais s'est terminé de façon prématurée le 25 février 2018.

***

Aux termes des dispositions de l'article L1242-2du code du travail 'Sous réserve des dispositions de l'article L1242-3, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas suivants : (...) 3° Emplois à caractère saisonnier, dont les tâches sont appelées à se répéter chaque année selon une périodicité à peu près fixe, en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs ou emplois pour lesquels, dans certains secteurs d'activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois (...)'

L'article D1242-1 du code du travail prévoit qu'en application du 3° de l'article L1242-2, les secteurs d'activité dans lesquels des contrats à durée déterminée peuvent être conclus pour les emplois pour lesquels il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois sont les suivants : (...)4° L'hôtellerie et la restauration, les centres de loisirs et de vacances(')'.

L'article 14 de la Convention collective nationale des hôtels, cafés restaurants (HCR) du 30 avril 1997 évoque les conditions d'emploi des extra et des saisonniers comme suit : '1.L'emploi d'extra qui, par nature, est temporaire est régi par les dispositions légales en vigueur. Un extra est engagé pour la durée nécessaire à la réalisation de la mission. Il peut être appelé à être occupé dans un établissement quelques heures, une journée entière ou plusieurs journées consécutives dans les limites des durées définies par l'article 21-2 c'

Enfin, il résulte des dispositions de l'article L1242-1 du code du travail qu''un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise' et des dispositions de l'article L1242-2 de ce même code que « Sous réserve des dispositions de l'article L. 1242-3, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire (...)'.

Le contrat d'usage dit « d'extra », doit être établi par écrit et comporter la définition précise de son motif.

Il doit être justifié par l'existence d'éléments concrets et précis établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi, la seule qualification conventionnelle de " contrat d'extra " n'établit pas qu'il peut être conclu dans le secteur de l'hôtellerie-restauration des contrats à durée déterminée d'usage successifs pour ce type de contrats, pour tout poste et en toute circonstance (Soc. 24.09.2008, pourvoi n°06/43.529).

Il appartient au juge de rechercher si, pour l'emploi considéré, il est effectivement d'usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée.

En l'espèce, la cour relève que la SAS ACA PROVENCE, qui ne conteste pas exploiter un établissement hôtelier ouvert toute l'année, a embauché Madame [P] [D] sous contrat d'usage 'extra' pour occuper un poste de femme de chambre, poste qui ne peut correspondre à un emploi 'temporaire' par nature dans un hôtel et pour lequel il ne serait pas d'usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée.

Au contraire, il s'agit d'un poste permanent lié à l'activité principale de l'entreprise employeur, qui est la location de chambres à usage des clients.

En outre, il convient de constater qu'aucun motif de recours à un contrat à durée déterminée n'est précisé au contrat litigieux (contrat d'extra du 9 février 2018).

L'article L1245-1 du code du travail précise qu'est réputé à durée indéterminée, tout contrat de travail conclu, notamment en méconnaissance des dispositions des articles L1242-1 et L1242-2 du code du travail.

Aussi, nonobstant le fait que le contrat d'usage 'extra' pouvait être autorisé dans le secteur de l'hôtellerie et peu important le fait qu'un seul contrat extra ait été signé du 9 au 11 février 2018, l'employeur ne contestant pas que la relation de travail s'est poursuivie de manière continue du 12 au 25 février 2018 inclus, la cour constate que le contrat de travail du 9 février 2018 ne correspondait pas à un emploi 'temporaire' dans l'entreprise et ne comportait aucun motif du recours au contrat à durée déterminée, en violation des dispositions des articles L1242-1 du code du travail et l'article L1242-2 du même code précités, de sorte qu'il doit être requalifié en contrat à durée indéterminée à compter du 9 février 2018.

L'appelante ne soutenant pas à titre principal, que la relation de travail était une relation à temps complet, le contrat de travail sera requalifié en contrat à durée indéterminée à temps partiel.

La décision du conseil de prud'hommes sera infirmée sur le point de départ de la requalification.

Sur les rappels de salaires

Sur les heures complémentaires

En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments, après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties. Dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures complémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

En l'espèce, Madame [D] soutient que la société ACA PROVENCE reste lui devoir un arriéré de salaire correspondant à des heures complémentaires effectuées du 12 au 25 février 2018 puisque la société lui a payé 59h04 alors qu'elle a travaillé à son service pendant 64h00 tel qu'il résulte du tableau récaputulatif horaire versé aux débats. Elle souligne qu'il résulte du registre individuel du travail produit par l'employeur qu'elle a en tout état de cause travaillé au moins 63h25 hors temps de pause.

Elle produit :

-son bulletin de salaire pour la période du 12 au 25 février 2018 duquel il résulte que l'employeur a rémunéré 59h04 (soit 539,57 euros nets)

-un tableau comparatif mentionnant le décompte journalier des heures réalisées durant la période du 12 au 25 février 2018 inclus (soit 64h00) avec le registre produit par l'employeur (pièce 8).

Madame [D] produit des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'elle prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur d'y répondre.

La SAS ACA PROVENCE fait valoir qu'entre le 12 et le 25 février 2018, Mme [D] devait effectuer, selon son contrat, 29,30 heures par semaine, soit 59 heures sur les deux semaines; que le planning qu'elle a elle même rempli pendant ses deux semaines de travail à l'hôtel [4] versé aux débats fait état de 59h25 et que la salariée ne justifie pas des 64 heures qu'elle prétend avoir travaillé.

L'employeur produit les plannings de travail de Madame [D] du 12 février 2018 au 25 février 2018 (pièce n°8) desquels il résulte que Madame [D] aurait effectué 63h25 de travail effectif .

La cour observe d'une part, qu'il ne peut être fait référence, pour déterminer les horaires contractuels de travail, au contrat de travail à durée déterminée du 12 février 2018, lequel ne prévoyait qu'une seule journée de travail le 13 février 2018, ni référence au contrat de travail produit par l'employeur du 13 au 25 février 2019, argué de faux et pour lequel l'expert graphologue a conclu que la signature de l'appelante avait été imitée.

D'autre part, il convient de relever que le planning des périodes de travail versé aux débats par la société ACA PROVENCE ne comporte pas la signature de Mme [D] et qu'il n'est donc pas conforme à l'article 21 de la convention collective applicable, qui impose la tenue d'un registre individuel des périodes de travail réellement effectuées, émargé par l'employeur et le salarié, au moins une fois par semaine.

Alors qu'il lui incombe de mettre en place un système permettant de mesurer de manière objective la durée de travail de ses salariés, la société ACA PROVENCE n'est pas en mesure de justifier du nombre d'heures effectivement accomplies par Mme [D] au sein de son entreprise.

Ainsi, la cour à la conviction que l'appelante a effectué les heures complémentaires qu'elle dit avoir accompli, dont le montant sera évalué à la somme de 49,60 euros bruts, outre la somme de 4,96 bruts au titre des congés payés afférents.

La décision du conseil de prud'hommes sera confirmée de ce chef.

En revanche, la relation de travail étant requalifiée en contrat à durée indéterminée, la somme de 4,96 euros à valoir sur l'indemnité de fin de contrat, n'est pas due.

La décision du conseil de prud'hommes sera infirmée de ce chef.

Sur les temps de pauses

Madame [D] sollicite la condamnation de l'employeur à lui verser une somme de 10 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect de ses temps de pause pendant l'exécution de son contrat d'extra du 9 au 11 février 2018. Elle fait valoir que l'employeur a fini par convenir qu'elle avait effectué trois heures complémentaires soit, 24h30 au lieu de 21h30 mais en prétendant que dans ces 24h30 avaient été inclus les temps de pause représentant une heure par jour. N'ayant pas bénéficié des temps de pause auxquels elle avait droit, elle sollicite réparation.

La société ACA PROVENCE ne développe pas d'argumentation à ce sujet en cause d'appel.

***

L'article L. 3121-16 du code du travail impose au moins vingt minutes consécutives de pause pour six heures consécutives de travail quotidien.

L'employeur ayant rémunéré le temps de pause comme du travail effectif, il en résulte que Mme [D] n'a pas bénéficié des temps de pause auxquels elle avait droit, (soit 3 fois 20 minutes =1heure) durant la période du 9 au 11 février 2018.

Il convient de faire droit à sa demande et condamner l'employeur à lui verser la somme de 10 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice en résultant.

La décision du conseil de prud'hommes sera infirmée de ce chef.

Sur l'indemnité de requalification

L'article L1245-2 alinéa 2 du code du travail dispose que 'Lorsque le conseil de prud'hommes fait droit à la demande du salarié, il lui accorde une indemnité, à la charge de l'employeur, ne pouvant être inférieure à un mois de salaire. Cette disposition s'applique sans préjudice de l'application des dispositions du titre III du présent livre relatives aux règles de rupture du contrat de travail à durée indéterminée'.

Cette indemnité doit être calculée selon la dernière moyenne de salaire mensuel et, en l'espèce, sur la base du salaire reconstitué au moyen du rappel de salaire alloué à Madame [D].

Au vu de la requalification de son contrat de travail en contrat à durée indéterminée, et au regard du rappel de salaire octroyé, il y a lieu de condamer la société ACA PROVENCE à payer à Madame [D] une indemnité de requalification d'un montant de 1.042,39 + 49,60 euros =1.091,99 euros bruts.

La décision conseil de prud'hommes sera confirmée de ce chef

Sur le travail dissimulé

Madame [D] demande à la cour de réformer la décision du conseil de prud'hommes et, statuant à nouveau, de condamner la SAS ACA PROVENCE à lui verser une indemnité pour travail dissimulé d'un montant de 4.707,54 euros (nets). Elle fait valoir que l'employeur a omis dans un premier temps de rémunérer sur le bulletin de salaire qui lui a été remis le 11 mars 2018, la période comprise entre le 9 et le 11 février 2018 durant laquelle elle a pourtant effectivement travaillé (contrat d'extra) et qu'il ne peut se retrancher derrière l'erreur de son comptable, lequel utilise les données que l'employeur lui a transmises. Mme [D] indique encore avoir travaillé le 12 février 2018 de 10h00 à 14h00 sans contrat de travail et sans avoir été déclarée préalablement. Enfin, elle allègue le fait que l'employeur l'a faite travailler pour la période du 14 au 25 février 2018, sans contrat de travail ni DPAE.

L'employeur soutient qu'il n'a jamais eu l'intention de dissimuler l'embauche et le travail de Madame [D]. Il déclare avoir effectué les deux déclarations préalables à l'embauche (DPAE) de la salariée, et produit la synthèse des DSN mensuelles à l'URSSAF correspondant à son emploi salarié. Il ajoute que l'appelante a finalement reçu les bulletins de salaire correspondant aux périodes travaillées du 9 au 11 février (contrat d'extra) et du 13 au 25 février 2018.

***

Aux termes de l'article L8221-5-2° et 3° du code du travail, ' Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur : (')

2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.'

En l'espèce, il est constant que la société ACA PROVENCE a initialement remis à Mme [D] un bulletin de paie ne comportant pas les heures effectuées par la salariée durant la période du 9 au 11 février 2018, l'employeur ayant fini par régulariser la situation, suite aux réclamations de la salariée, en adressant par courrier du 5 septembre 2018 à l'avocat de Mme [D], un bulletin de salaire correspondant à cette période ainsi qu'un chèque d'un montant de 205,84 euros.

De plus, il résulte des éléments produits que l'employeur a effectué une déclaration préalable d'embauche le 12 février 2018 à 16h26 pour une embauche le 13 février 2018 à 8h00 alors qu'il est établi que Mme [D] a travaillé la journée du 12 février 2018 sans déclaration préalable (de 10h à 14h30) et sans contrat de travail, ainsi que du 14 au 25 février 2018, sans DPAE ni contrat de travail .

De même, la cour constate qu'alors qu'il ressort de l'échange de SMS versé aux débats (pièce 3 de la salariée) que Mme [D] réclamait encore le 19 février 2018 à Monsieur [Z] [M], gérant de la société ACA PROVENCE, qu'il lui remette un contrat de travail, l'employeur a sciemment produit en justice un contrat de travail couvrant la période du 14 au 25 février 2018 dont la signature de la salariée avait été contrefaite (cf expertise graphologique).

Ces éléments démontrent qu'il savait avoir fait travailler Madame [D] sans la déclarer et sans lui avoir fait signer de contrat de travail, ce qui caractérise l'intention de dissimuler l'activité salariée de l'appelante.

De même, il ne peut se retrancher derrière l'erreur de son comptable pour justifier la remise tardive à la salariée d'un bulletin de salaire ne comportant pas toutes les heures travaillées.

L'article L 8223-1 du code du travail prévoit qu'' En cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire'.

Pour la période concernée, le salaire net de Madame [D] reconstitué et après la régularisation opérée par l'employeur, s'élève à la somme de 539,57 + 205,84 + 38,68 = 784,09 euros.

L'indemnité forfaitaire due s'élève donc à la somme de 6 x 784,09 = 4.707,54 euros nets.

En conséquence, il y a lieu d'infirmer la décision du conseil de prud'hommes et de condamner la SAS ACA PROVENCE à verser à Mme [D] une indemnité égale à six mois de salaire pour travail dissimulé d'un montant de 4.707,54 euros nets.

Sur la rupture du contrat de travail

Sur les indemnités pour licenciement abusif et irrégulier

Madame [D] demande la confirmation du jugement du conseil de prud'hommes qui a dit que la rupture de son contrat de travail était abusive et irrégulière et sollicite l'augmentation des montants alloués par les premiers juges au titre du licenciement abusif, ainsi qu'au titre du licenciement irrégulier.

La société ACA PROVENCE conclut au débouté des demandes formulées par la salariée, indiquant que c'est de son propre chef que Madame [D] a informé la direction le 25 février 2018, qu'elle ne viendrait pas le lendemain. A titre subsidiaire, elle rappelle que, s'agissant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'article L1235-3 modifié par l'ordonnance du 22 septembre 2017, fait état d'une indemnité maximale d'un mois de salaire et ne mentionne pas d'indemnité minimale et fait valoir que la salariée ne justifie pas de son préjudice.

***

La relation de travail entre Mme [D] et la société ACA PROVENCE ayant été requalifiée en contrat à durée indéterminée et l'employeur ne rapportant pas la preuve que la salariée aurait démissionné de son emploi (par exemple par une lettre de démission claire et non équivoque), cette dernière ayant au contraire manifesté sa volonté de continuer à travailler pour l'employeur le 19 février 2018 (cf échange de SMS pièce 3), la rupture du contrat de travail, sans précision de motif, est abusive et s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

L'article L 1235-3 du code du travail modifié par l'ordonnance du 22 septembre 2017, applicable au présent litige, prévoit que si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, et en l'absence de réintégration de celui-ci dans l'entreprise, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés par un barème.

Il résulte de ce barème que, lorsque le licenciement est opéré par une entreprise employant habituellement plus de 11 salariés et que le salarié a moins d'un an d'ancienneté dans la société comme en l'espèce, l'indemnité doit être comprise entre 0 et 1 mois de salaire brut.

Compte tenu de son ancienneté dans l'entreprise au moment de la rupture du contrat de travail (moins d'un mois), de sa qualification, de sa rémunération mensuelle (1.091,99 euros bruts) et de l'absence de justification de sa situation professionnelle ou de chômage postérieure à la rupture, il y a lieu de confirmer la décision du conseil de prud'hommes qui a octroyé à Mme [D], une indemnité de 400 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La relation de travail ayant été requalifié en contrat à durée indéterminée et ayant pris fin le 25 février 2018, la société intimée aurait dû respecter la procédure de licenciement en convoquant la salariée à un entretien préalable avec assistance d'un conseiller et en lui notifiant une lettre de licenciement conformément aux dispositions de l'article L1232-2 à L1232-6 du code du travail.

Toutefois, il résulte des termes de l'article L1235-2 du code du travail que les indemnités prévues en cas de rupture dépourvue de motifs réels et sérieux ne se cumulent pas avec celles sanctionnant l'irrégularité des règles de forme.

Dès lors, il convient de débouter Mme [D] de sa demande d'indemnité pour licenciement irrégulier et d'infirmer la décision du conseil de prud'hommes de ce chef.

Sur l'indemnité de préavis et les congés payés y afférent

Le licenciement étant sans cause réelle et sérieuse, la salariée a droit, compte tenu de son ancienneté inférieure à six mois et des dispositions de l'article 30.2 de la convention collective applicable dans l'entreprise (HCR), à une indemnité de préavis de 8 jours, soit la somme de 340 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 34 euros bruts au titre des congés payés y afférent.

La décision du conseil de prud'hommes sera confirmée de ce chef.

Sur les dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire

Madame [D] critique le jugement de première instance ayant rejeté sa demande. Elle expose qu'alors que l'employeur lui a expressément promis de l'embaucher, il a brutalement rompu le contrat de travail, ce qui rend la rupture vexatoire et lui a causé un préjudice d'autant plus grave qu'elle est dans une situation précaire. Elle sollicite la condamnation de la société ACA PROVENCE à l'indemnisation de son préjudice sur le fondement de l'article 1240 du code civil.

La société intimée conclut au rejet de cette demande, estimant que la salariée ne rapporte pas la preuve de son comportement fautif lors de la rupture, alors même que c'est elle qui a décidé de partir de son propre chef et qu'elle ne démontre pas le préjudice distinct du licenciement qui en serait résulté.

***

A l'appui de sa demande, Mme [D] produit l'échange de SMS avec son employeur le 19 février 2018 en ces termes :

Mme [D] :'Bonjour [Z], serait il possible de signer mon contrat pour demain ou vendredi car on vient de me contacter pour un contrat de 2 mois et plus. Je souhaiterais continuer avec vous tout en ayant une sûreté de ne pas refuser d'autre contrat inutilement. Merci de votre compréhension.'

M. [M] : 'Pas de souci [P] j'attend le comptable et le retour de [L] pour pouvoir vous faire le contrat mais ne vous faites pas de souci nous voulons aussi travailler avec vous pour toute la saison et plus.'

A défaut d'autres éléments permettant de connaître précisément les circonstances entourant la rupture du contrat de travail le 25 février 2018, ce seul échange de SMS n'est pas suffisant pour caractériser un comportement fautif imputable à l'employeur.

En outre, Madame [D] n'apporte aucun élément concernant le préjudice qui en serait résulté, distinct du licenciement proprement dit.

En conséquence, la cour confirme la décision du conseil de prud'hommes qui a débouté Mme [D] de sa demande de dommage et intérêt pour licenciement brutal et vexatoire.

Sur les intérêts

Les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation et les sommes allouées de nature indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter du jugement déféré pour les montants indiqués à son dispositif et à compter du présent arrêt, pour le surplus.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

L'équité commande de confirmer le jugement de première instance relativement aux frais irrépétibles et de condamner la société ACA PROVENCE à payer à Madame [P] [D] indemnité de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

L'employeur qui succombe, doit être tenu aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris le coût de l'expertise graphologique.

Sur la demande au titre des frais futurs d'exécution

La présente juridiction ne peut pas se prononcer sur le sort des frais de l'exécution forcée, lesquels sont régis par l'article L111-8 du code des procédures d'exécution et soumis, en cas de contestation, au juge de l'exécution.

La demande formée de ce chef sera en conséquence rejetée.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile et en matière prud'homale,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a :

Condamné la société ACA PROVENCE à payer à Mme [P] [D] les sommes suivantes :

-49,60 euros brut au titre du rappel d'heures complémentaires impayées, la somme de 4,96 euros au titre des congés payés y afférents

-1.091,99 euros bruts au titre de l'indemnité de requalification du contrat de travail

-340 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 34 euros bruts au titre des congés payés y afférent,

-400 euros au titre de l'indemnité pour licenciement abusif

-1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Débouté Mme [P] [D] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire et de sa demande de rappel d'heures complémentaires au titre de l'indemnité de fin de contrat.

L'infirme pour le surplus :

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :

Requalifie le contrat de travail conclu entre Mme [P] [D] et la société ACA PROVENCE en contrat à durée indéterminée à temps partiel à compter du 9 février 2018.

Condamne la société ACA PROVENCE à payer à Mme [P] [D] les sommes suivantes :

-10 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect des temps de pause,

-4.707,54 euros nets au titre de l'indemnité pour travail dissimulé.

Dit que les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation et les sommes allouées de nature indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter du jugement déféré pour les montants indiqués à son dispositif et à compter du présent arrêt, pour le surplus,

Rejette la demande formée par Mme [P] [D] au titre de l'indemnité pour licenciement irrégulier,

Condamne la société ACA PROVENCE à payer à Madame [P] [D] la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société ACA PROVENCE aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris le coût de l'expertise graphologique,

Rejette la demande formée par Mme [P] [D] au titre des frais futurs d'exécution.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-1
Numéro d'arrêt : 21/07955
Date de la décision : 14/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-14;21.07955 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award