COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-1
ARRÊT AU FOND
DU 14 JUIN 2024
N° 2024/166
Rôle N° RG 21/06161 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHLBO
[F] [B]
C/
[D] [V]
Copie exécutoire délivrée
le :
14 JUIN 2024
à :
Me Fabien BOUSQUET de la SARL ATORI AVOCATS, avocat au barreau de MARSEILLE
Me Amelle GUERCHI, avocat au barreau de MARSEILLE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 02 Avril 2021 enregistré au répertoire général sous le n° F20/00794.
APPELANT
Monsieur [F] [B] représentant légal de l'entreprise Destock Fruits et légumes Plombières
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/009264 du 03/12/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'AIX-EN-PROVENCE), demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Fabien BOUSQUET de la SARL ATORI AVOCATS, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIME
Monsieur [D] [V]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/009264 du 03/12/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle d'AIX-EN-PROVENCE), demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Amelle GUERCHI, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Avril 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre, chargée du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre
Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseillère
Mme Emmanuelle CASINI, Conseillère
Greffier lors des débats : Monsieur Kamel BENKHIRA
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Juin 2024.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Juin 2024.
Signé par Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre et Monsieur Kamel BENKHIRA, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Faisant valoir qu'il avait été embauché le 12 octobre 2019 en qualité de vendeur par l'entreprise Destock Fruits et Légumes Plombières, sans qu'aucun contrat ne soit signé, que son employeur avait procédé à la déclaration unique d'embauche auprès de l'Urssaf le 16 octobre 2019 et l'avait agressé le 19 octobre 2019, qu'il se trouvait en arrêt de travail pour accident du travail, qu'il n'avait pas été réglé de son salaire du 12 au 19 octobre 2019 et sollicitant la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur et sa condamnation au paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire, M. [D] [V] a saisi le conseil de prud'hommes de Marseille le 9 juin 2020 d'une requête dirigée à l'encontre de M. [F] [B] représentant légal de l'entreprise Destock Fruits et légumes Plombières dont le siège social était situé [Adresse 1].
Par jugement du 2 avril 2021 notifié à M. [B] [F] le 09 avril 2021, le conseil de prud'hommes de Marseille a :
- ordonné la résiliation du contrat de travail de M. [V] et M. [B] aux torts exclusifs de l'employeur M. [F] [B];
- dit qu'elle produira les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse;
- condamné M. [F] [B] au paiement des sommes suivantes:
- 410,51 € de rappel de salaire du 12 au 19 octobre 2019 outre 41,05 € de congés payés afférents;
- 1.539,42 € d'indemnité compensatrice de préavis outre 153,94 € de congés payés afférents;
- 288,64 € d'indemnité légale de licenciement;
- 1.539,42 € de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;
- 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
- ordonné la remise des documents suivant le présent jugement:
- bulletins de salaire du 12 au 27 juillet 2020
- solde de tout compte;
- attestation pôle emploi;
- débouté les parties de leurs autres demandes.
M. [F] [B] a relevé appel de ce jugement le 26 avril 2021 par déclaration adressée au greffe par voie électronique.
Par acte d'huissier de justice du 21 juin 2021, il a fait signifier à M. [D] [V] cette déclaration d'appel par application de l'article 902 du code de procédure civile.
Maître [W] s'est constituée pour le compte de M. [V] le 21 juin 2021.
Par ordonnance du 21 juin 2021, le magistrat de la mise en état a enjoint les parties à assister à une séance d'information sur la médiation programmée au 6 septembre 2021 à laquelle aucune d'elle ne s'est présentée.
Aux termes de ses conclusions d'appelant remise au greffe et notifiées à l'intimé par voie électronique le 23 juillet 2021 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens soutenus, M. [F] [B] demande à la cour de :
Réformer la décision
- débouter M. [V] de l'intégralité de ses demandes;
- le condamner au paiement de la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [V] n'a pas conclu et n'a communiqué aucune pièce.
La clôture de l'instruction a été ordonnée le 4 avril 2024.
SUR CE :
La cour rappelle qu'en l'absence de conclusions de l'intimé, elle ne fait droit à la demande de l'appelant que dans la mesure où elle l'estime régulière recevable et bien fondée.
M. [F] [B] soutient qu'il s'est vu signifier le 26 avril 2021 le jugement entrepris le condamnant à payer diverses sommes à M. [V] à titre de rappel de salaire, d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité légale de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, qu'il a compris que M. [V] prétendait qu'il l'avait engagé le 12 octobre 2019 dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée de vendeur, que celui-ci avait été victime d'une agression de la part de son employeur et qu'il avait saisi le conseil de prud'hommes le 9 juin 2020 indiquant par la suite avoir été licencié le 27 juillet 2020 par son employeur or, ce jugement ne peut qu'être infirmé dans la mesure où s'il a eu effectivement une activité commerciale dans les fruits et légumes, il justifie avoir cessé celle-ci courant 2017 de sorte qu'il n'est pas et n'a jamais été l'employeur de M. [D] [V] ne l'ayant ni embauché, ni violenté, ni licencié.
Pour prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail à durée indéterminée et faire droit aux demandes de M. [V], le conseil de prud'hommes a motivé sa décision ainsi qu'il suit:
'En l'espèce, M. [V] a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail le 20 avril 2020. Le 27 juillet 2020 l'employeur lui a notifié un licenciement pour faute grave. Il convient d'examiner la demande de résiliation judiciaire en premier.
Sur le manquement à l'obligation de sécurité du salarié: l'agression physique:
En l'espèce, M. [V] expose les faits auprès du commissariat de police du [Localité 2] le procès-verbal est rédigé en ces termes:
'Le 19/10/2019 vers 11h00 je me trouvais sur mon lieu de travail au [Adresse 1], j'ai eu un différend avec mon employeur M. [B] [Z], il m'a demandé de démissionner, je lui ai répondu que je refusais et je lui ai dit qu'il m'avait fait commencer à travailler pour la société Destock Plombières le 12/10/2019 et sur la déclaration d'emploi de l'Urssaf il m'a déclaré le 15/10/2019.
M. [B] a commencé à s'énerver contre moi et il m'a bousculé violemment en me frappant avec les poings fermés au niveau de mon thorax j'ai failli tombé sur la chaussée.
Je suis alors parti et me suis rendu au service de médecine d'urgence de l'hôpital [4]. Il m'a délivré un certificat avec une ITT de deux jours.'
Un certificat médical d'accident du travail a été délivré à M. [V] à compter du 19/10/2019 puis des prolongations ont suivi jusqu'au 03/02/2020 mentionnant la finalité du motif d'accident du travail.
M. [V] porte de nouveau plainte le 15/11/2019 car il déclare être harcelé par son patron ainsi que la comptable de l'entreprise 'Destockage de Plombière' et un autre agent afin qu'il retire sa plainte contre son employeur.
L'employeur ayant gravement manqué à son obligation de sécurité de résultat, la résiliation du contrat aux torts de l'employeur M. [B] est justifiée.'
Or, M. [F] [B] produit aux débats un extrait Kbis contenant les mentions suivantes:
'[B] [F] dirigeant de
Destock Fruits et Légumes Plombières - [Adresse 1]
- n° Siren : 808 821 847
- n° Siret 808 821 847 00023
Entreprise individuelle
Activité : commerce de fruits et légumes en magasin spécialisé
Entrepreneur individuel
0 salarié
Date de création : 01/01/2015
Radié du greffe de Marseille le 18 août 2017"
dont il se déduit qu'à la période du 12 au 19 octobre 2019 sonentreprise individuelle Destock Fruits et Légumes Plombières [Adresse 1] n'était plus en activité depuis le 18 août 2017.
La cour relève également d'une part que le dépôt de plainte de M. [V] pour violences volontaires tel que rappelé par la juridiction prud'homale est dirigé à l'encontre de M. [Z] [B] et non de M. [F] [B], d'autre part à l'examen des sept pièces jointes à la requête introductive d'instance du 22 mai 2020 figurant dans le dossier de première instance adressé par le conseil de prud'hommes à la cour que la déclaration préalable à l'embauche de M. [V] auprès de l'Urssaf mentionne en tant qu'employeur une SARL Destock Plombières dont la raison sociale comme le n° de siret 81465103000011 sont différents de ceux figurant sur l'extrait Kbis produit par l'appelant, que la lettre recommandée du 15 novembre 2019 adressée par 'Destock Plombières' à M. [V] l'informant de 'Documents à sa disposition' est signée de M. [Z] [B] ; que la citation à comparaître devant le Bureau de conciliation du 3 novembre 2020 a été délivrée le 18 août 2020 à M. [F] [B] par remise à domicile (à M. [B] [Z], frère du signifié) et qu'enfin ainsi que l'a rappelé la juridiction prud'homale, M. [F] [B] a constamment contesté être l'employeur du salarié ayant adressé à la juridiction prud'homale une lettre recommandée avec accusé de réception datée du 10 février 2021 rédigée ainsi qu'il suit : 'M. Je vous indique que je n'ai jamais employé M. [D] [V] et je ne sais pas pourquoi ce Monsieur me fait un procès. Je vais consulter un avocat et vous prie de reporter l'affaire pour que je puisse m'organiser'.
Les dénégations de M. [F] [B] étant confortées par les éléments ci-dessus évoqués établissant que l'employeur de M. [V] n'était pas l'entreprise individuelle Destock Fruits et Légumes Plombières représentée par M. [F] [B] mais une SARL Destock Plombières dont le gérant se prénommait [Z] ou [Z] [B] c'est à tort que la juridiction prud'homale a considéré que M. [F] [B] était l'employeur de M. [V] et ainsi l'auteur des violences volontaires infligées le 19 octobre 2019 à ce dernier de sorte qu'il convient d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de débouter M. [D] [V] de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail et de ses demandes salariales et indemnitaires subséquentes.
Il y a lieu de condamner M. [D] [V] aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés comme en matière juridictionnelle, M. [F] [B] étant débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile et en matière prud'homale,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Statuant à nouveau et y ajoutant :
Déboute M. [D] [V] de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail et de ses demandes salariales et indemnitaires subséquentes.
Condamne M. [D] [V] aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés comme en matière juridictionnelle.
Déboute M. [F] [B] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE