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13/06/2024 | FRANCE | N°23/13657

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 13 juin 2024, 23/13657


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4



ARRÊT AU FOND

DU 13 JUIN 2024



N° 2024/









Rôle N° RG 23/13657 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BMDNC







[I] [U]





C/



La MAIF -

S.A. MACIF COMMERÇANTS ET INDUSTRIELS DE











Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Agnès ERMENEUX



Me Eric TARLET



Me Thierry TROIN








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Décision déférée à la Cour :



Ordonnance du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de MARSEILLE en date du 26 Septembre 2023 enregistrée au répertoire général sous le n° 19/06541.





APPELANT



Monsieur [I] [U]

né le 03 Septembre 1964 à [Localité 12], demeurant [Adresse 8]

représent...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRÊT AU FOND

DU 13 JUIN 2024

N° 2024/

Rôle N° RG 23/13657 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BMDNC

[I] [U]

C/

La MAIF -

S.A. MACIF COMMERÇANTS ET INDUSTRIELS DE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Agnès ERMENEUX

Me Eric TARLET

Me Thierry TROIN

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de MARSEILLE en date du 26 Septembre 2023 enregistrée au répertoire général sous le n° 19/06541.

APPELANT

Monsieur [I] [U]

né le 03 Septembre 1964 à [Localité 12], demeurant [Adresse 8]

représenté par Me Agnès ERMENEUX de la SCP SCP ERMENEUX - CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Fabien DUPIELET de la SELARL DUPIELET-REYMOND, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Léa AZAÏS, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEES

La MAIF - MUTUELLE ASSURANCE INSTITUTEUR FRANCE

, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Eric TARLET de la SCP LIZEE- PETIT-TARLET, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

S.A. MACIF

, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Thierry TROIN de la SELARL BENSA & TROIN AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de NICE substituée par Me Alexandra PAULUS, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Véronique MÖLLER, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Inès BONAFOS, Présidente

Mme Véronique MÖLLER, Conseillère

M. Adrian CANDAU, Conseiller

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Mai 2024, prorogé au 13 Juin 2024.

ARRÊT

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

La SAS MONOPRIX exploite un supermarché dans des locaux situés [Adresse 2] à [Localité 12], parcelle cadastrée [Cadastre 10] A [Cadastre 5].

Une partie des locaux techniques et chambre froide du supermarché est située au rez-de-chaussée et au sous-sol d'un immeuble de 3 étages situé [Adresse 7] sur la parcelle cadastrée [Cadastre 10] A [Cadastre 4]. Cet immeuble appartient à la société immobilière IBERIA, filiale du groupe Monoprix.

En 2001, cet immeuble a fait l'objet d'une division en 2 volumes identifiés 1000 et 2000 : le lot 1000 comprenant le rez-de-chaussée (hors cage d'escalier) et le sous-sol, plus un étage en élévation à l'arrière du bâtiment dans l'ancienne cour, le lot 2000 comprenant les étages 1 à 3.

Par acte authentique en date du 30 décembre 2002, la SARL SOCIETE IMMOBILIERE IBERIA a vendu le lot 2000 à la SCI PEOPLE.

Monsieur [I] [U] est propriétaire de l'immeuble voisin du [Adresse 9].

Le 16 juin 2011, la ville de [Localité 12] a pris un arrêté de péril sur l'immeuble du [Adresse 7] sur la base d'un rapport d'urgence établi par Monsieur [G], en raison de dommages structurels affectant notamment la façade de l'immeuble.

La SARL SOCIETE IMMOBILIERE IBERIA et la SCI PEOPLE ont réalisé des travaux d'urgence et ont mandaté le bureau d'études STRUCTURES & BETON, qui a indiqué dans un rapport du 8 septembre 2011 que la fragilisation et l'affaissement des fondations de l'immeuble résultait au moins pour partie d'une fuite d'eau située au niveau de la liaison entre les immeubles du 5 et du 7 rue du village.

La SCI PEOPLE a fait assigner la SAS MONOPRIX devant le juge des référés.

Par ordonnance en date du 20 janvier 2012 une expertise judiciaire a été ordonnée et confiée à Monsieur [H]. Par ordonnances successives, cette mesure a été rendue commune et opposable à la Communauté Urbaine Marseille Provence Métropole, la Société d'Exploitation du Réseau d'Assainissement de [Localité 12] (SERAMM), Monsieur [U] et la SAM MACIF.

Le rapport de l'expert a été déposé le 27 octobre 2016.

Par acte d'huissier en date du 29 mai 2019, la SARL SOCIETE IMMOBILIERE IBERIA et la SAS MONOPRIX ont fait assigner devant le Tribunal de grande instance de Marseille la SCI PEOPLE en vue de voir statuer sur la charge et la répartition du coût des travaux de reprise de l'immeuble du [Adresse 7] entre la SARL SOCIETE IMMOBILIERE IBERIA et la SCI PEOPLE.

Le 24 juin 2019, un nouvel arrêté de péril grave et imminent afférant à l'immeuble du [Adresse 7] a été pris par la ville de [Localité 12].

Par acte d'huissier en date du 23 juillet 2019, la SARL SOCIETE IMMOBILIERE IBERIA et la SAS MONOPRIX ont donné assignation à la SCI PEOPLE, la SERAMM, la Métropole AIX-MARSEILLE PROVENCE et Monsieur [I] [U] devant les juges des référés qui, par ordonnance du 2 août 2019, a désigné Monsieur [L] en qualité d'expert.

Ce dernier a déposé son rapport le 30 juillet 2020.

Par acte d'huissier en date du 27 juillet 2021 la SCI PEOPLE a fait assigner Monsieur [I] [U] et la SERAMM devant le Tribunal de grande instance de MARSEILLE.

Par ordonnance du 2 novembre 2021, la procédure a été jointe à l'affaire principale.

Par acte d'huissier en date du 26 septembre 2021, la SARL SOCIETE IMMOBILIERE IBERIA et la SAS MONOPRIX ont appelé en cause Monsieur [I] [U] et la SERAMM.

Par ordonnance en date du 1er février 2022 cette affaire a été jointe à l'affaire principale.

Par acte d'huissier en date du 29 septembre 2022, [I] [U] a fait assigner devant le Tribunal judiciaire de Marseille ses assureurs successifs : la SA MAIF et la SAM MACIF.

Par ordonnance en date du 28 février 2023 cette procédure a été jointe à l'affaire principale.

Par ordonnance en date du 26 septembre 2023, le Juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de MARSEILLE :

- Rejetons l'exception d'incompétence soulevée par la SA SERAMM,

- Déclarons le présent tribunal compétent pout statuer sur les demandes formulées à l'encontre de la SA SERAMM,

- Déclarons prescrites les demandes formulées par Monsieur [I] [U] à l'encontre de la SA MAIF et de la SAM MACIF,

- Enjoignons à chacune des parties d'assister à une séance d'information sur la médiation,

- Disons que les parties seront convoquées par les soins de Madame [E] [O], [Adresse 11], [Courriel 13], dès réception de la présente ordonnance,

- Donnons au médiateur désigné :

. D'expliquer aux parties le principe, le but et les modalités d'une mesure de médiation,

. De recueillir par écrit le consentement ou leur refus de cette mesure,

. Lui fixons un délai de 2 mois pour ce faire,

- Disons que le médiateur transmettra au Tribunal les décisions écrites prises par chacune d'elle sur la proposition de médiation,

- Rappelons que la présence de toutes les parties à cette réunion est obligatoire en application des dispositions de l'article 22-1 de la loi du 8 février 1995 modifié par l'article 3 de la loi du 23 mars 2019 et que la présence des avocats, auxquels il est possible de donner mandat pour prendre position sur l'instauration d'une médiation, est recommandée,

- Rappelons que cette réunion d'information est gratuite et que la médiation éventuellement mise en 'uvre par la suite peut, sous condition de ressources, être prise en charge par l'aide juridictionnelle,

- Rappelons qu'il l'inexécution de l'injonction de rencontrer le médiateur désigné sans motif légitime et susceptible de constituer un défaut de diligence justifiant une radiation du dossier ou qu'elle pourra constituer l'un des critères de l'équité, lors de l'appréciation par le juge des demandes formées sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Dans l'hypothèse où les parties donneraient leur accord à la médiation ainsi proposée :

- Désignons Madame [E] [O] pour y procéder et dit qu'elle pourra commencer immédiatement les opérations de médiation ; dis qu'en cas de besoin, elle pourra s'adjoindre un co médiateur à charge d'en aviser le tribunal,

- Disons que cette désignation est faite pour 3 mois à compter de la date de la première réunion de médiation tenue effectivement,

- Disons que les séances de médiation se dérouleront dans les locaux professionnels du médiateur ou en tout autre lieu convenu avec les parties,

- Disons que le médiateur informera le tribunal de tout incident affectant le pont déroulement de la médiation, dans le respect de la confidentialité de rigueur en la matière,

- Disons qu'au terme de la médiation, le médiateur informera le tribunal, soit que les parties sont parvenus à un accord, soit qu'elles n'y sont pas parvenues, sans davantage de précisions,

- Rappelons que si une mesure de médiation était entamée, la juridiction resterait saisie pendant le cours de la médiation

- Fixons à 1600€ le montant de la provision à valoir sur la rémunération du médiateur et disons qu'elle sera répartie en 4 parts égales entre :

. la SARL SOCIETE IMMOBILIERE IBERIA et la SAS MONOPRIX,

. la SCI PEOPLE,

. Monsieur [I] [U],

. La SA SERAMM,

- Disons que chaque partie devra se libérer de la somme qui lui incombe, entre les mains du médiateur, avant la date de la première réunion à peine de caducité de la désignation du médiateur,

- Disons que dans le cas d'une médiation longue ou de frais élevés exposés, notamment de déplacements, le médiateur pourra soumettre au juge, aussitôt qu'elle apparaîtra justifiée, avec l'accord des parties, une demande tendant à la fixation d'un complément de rémunération,

- Disons que le complément de rémunération ainsi fixé sera consigné entre les mains du médiateur,

- Disons qu'en cas de difficulté, la rémunération du médiateur sera fixée par le tribunal, à la demande du médiateur, par une ordonnance de taxe,

- Dispensons les parties éventuellement bénéficiaires de l'aide juridictionnelle de ce règlement par application de l'article 22 alinéa 3 de la loi 2019-222 du 23 mars 2019 et disons qu'il sera procédé à la rétribution du médiateur et de l'avocat conformément aux dispositions de l'article 111-1 de la loi n° 2020- 1721 du 29 décembre 2020 et des dispositions du décret 2020-1717 du 28 décembre 2020 portant application de la loi 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et relatif à l'aide juridictionnelle et à l'aide à l'intervention de l'avocat dans les procédures non juridictionnelles,

- Condamnons Monsieur [I] [U] à payer sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile :

. 800€ à la SA MAIF,

. 800€ à la SAM MACIF,

- Rejetons l'ensemble des autres demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,

- Disons que les dépenses de l'incident suivront le sort de l'affaire au fond.

Par déclaration en date du 6 novembre 2023, Monsieur [I] [U] a formé appel de cette décision à l'encontre de la SAM MACIF et de la SA MAIF en ce qu'elle a :

- déclaré prescrites les demandes formulées par Monsieur [I] [U] à l'encontre de la S.A. MAIF et de la SAM MACIF,

- condamné Monsieur [I] [U] à payer sur le fondement de l'article 700 du C.P.C. la somme de 800 euros à la S.A. MAIF et la somme de 800 euros à la SAM MACIF.

***

Les parties ont exposé leur demande ainsi qu'il suit, étant rappelé qu'au visa de l'article 455 du code de procédure civile, l'arrêt doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens :

Par conclusions notifiées le 21 décembre 2023, [I] [U] demande à la Cour de :

Vu les articles 75 et 789 du code de procédure civile,

Vu l'article 1104 du code civil

Vu l'article l 124- 3 du code des assurances

- JUGER l'appel interjeté par Monsieur [I] [U] recevable et bien-fondé

- REFORMER l'ordonnance du juge de la mise en état du 26 septembre 2023 en ce qu'elle a :

. déclaré prescrites les demandes formulées par Monsieur [I] [U] à l'encontre de la SA MAIF et de la SAM MACIF,

. condamné Monsieur [I] [U] à payer sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 800€ à la SA MAIF et la somme de 800€ à la SAM MACIF ;

Statuant à nouveau,

- JUGER que les actions intentées par Monsieur [I] [U] à l'encontre de la MAIF et de la MACIF ne sont pas frappés de prescription et sont recevables,

- JUGER que les actions ouvertes au tiers lésé, et notamment aux sociétés IBERIA et MONOPRIX sont recevables,

- REJETER les fins de non-recevoir soulevées par la MAIF et la MACIF,

- CONDAMNER solidairement la MAIF et la MACIF à payer à Monsieur [U] la somme de 2.000€ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- CONDAMNER solidairement encore là MAIF et la MACIF aux entiers dépens de la présente instance.

Par conclusions récapitulatives notifiées le 11 mars 2024, [I] [U] maintient ses prétentions initiales et demande en outre à la Cour de :

- JUGER que les sociétés MACIF et MAIF ont fait preuve d'une grande mauvaise foi à l'égard de Monsieur [U], l'induisant volontairement en erreur, faisant ainsi échec à leur droit de se prévaloir de la prescription,

- CONDAMNER solidairement la MAIF et la MACIF à payer à Monsieur [U] la somme de 3.000€ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

A l'appui de ses prétentions, il fait valoir que le juge de la mise en état a retenu une prescription de son action à l'encontre des assurances sans fixer le point de départ de ce délai de prescription ; que sa responsabilité n'a été recherchée qu'à compter des assignations qui lui ont été délivrées le 27 juillet 2021 et le 26 septembre 2021 ; qu'il ne pouvait pas, avant cette date, mettre en cause ses assureurs et qu'il était donc recevable à le faire au mois de septembre 2022. Il reproche à la MAIF et la MACIF leur mauvaise foi dans le cadre de ce dossier et à un manquement à leur devoir de conseil et d'information, l'induisant en erreur sur les démarches à accomplir et en lui faisant croire que leur mise en cause n'était pas nécessaire.

[I] [U] reproche également au juge de la mise en état de ne pas avoir statué sur l'action ouverte aux tiers lésés et soutient que par application des dispositions de l'article L124-3 du Code des assurances, les société IBERIA et MONOPRIX disposent d'une action directe contre ses assureurs la MAIF et la MACIF.

La SA MACIF, par conclusions notifiées le 21 décembre 2023, demande à la Cour de :

Vu l'article 789 du Code de Procédure Civile,

Vu l'article 122 du Code de Procédure Civile,

Vu l'article L.114-1 du Code des Assurances,

- CONFIRMER l'Ordonnance rendue par le Tribunal Judiciaire de MARSEILLE le 26 septembre 2023.

- DEBOUTER tout demandeur à l'encontre de la MACIF.

- CONDAMNER Monsieur [U] à payer à la MACIF la somme de 1 800 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi que les entiers dépens.

Elle fait valoir que la décision du juge de la mise en état doit être confirmée et que les procédures engagées en vue de voir reconnaître la responsabilité de [I] [U] auraient dû conduire ce dernier à régulariser une assignation à son encontre. Elle considère que le point de départ de la prescription biennale peut être une action en référé expertise même si son objet n'est pas de mettre directement en cause la responsabilité civile de l'assuré ; que [I] [U] a été mis en cause dans le cadre d'un référé expertise le 23 juillet 2019 et qu'il aurait dû assigner son assureur avant le 23 juillet 2021. Elle ajoute qu'elle oppose une prescription quinquennale aux tiers au contrat, question devant être jugée prochainement par le juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de MARSEILLE.

La société d'assurances MAIF, par ses dernières conclusions notifiées le 1er mars 2024 demande à la Cour de :

Vu l'article L.114-1 du Code des Assurances,

- PRONONCER l'irrecevabilité de l'action de Monsieur [U] à l'encontre de la MAIF compte tenu de la prescription entre le 23 juillet 2019 et l'assignation introductive d'instance du 29 septembre 2022.

- DEBOUTER Monsieur [U] de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;

- CONFIRMER l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

- CONDAMNER Monsieur [U] à la somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance distraits au profit de la SCP LIZEE PETIT TARLET sur son offre de droit.

La MAIF soutient également que [I] [U] ayant été assigné en référé expertise le 23 juillet 2019, il était prescrit à l'encontre de son assureur à compter du 23 juillet 2021, d'autant qu'il ne pouvait ignorer les risques de recherche de responsabilité compte tenu de l'historique de ce dossier. Elle fait valoir que l'assignation en référé expertise constitue bien un point de départ du délai de prescription, date qui a été expressément retenue par le juge de la mise en état ; elle considère qu'aucune attitude fautive ne peut lui être reprochée et que l'action relative aux tiers lésés n'appartient pas à [I] [U].

L'affaire a fait l'objet d'une fixation à bref délai en application de l'article 905 du Code de procédure civile selon avis donné aux parties le 20 novembre 2023 et a été appelée en dernier lieu à l'audience du 13 mars 2024.

En cours de délibéré, par soit-transmis aux avocats en date du 30 mai 2024, il a été demandé aux parties de bien vouloir adresser à la Cour l'assignation en référé du 23 juillet 2019 que les sociétés IBERIA et MONOPRIX ont fait délivrer à Monsieur [U], pièce mentionnée dans les écritures des parties mais non produite.

Cette pièce a été communiquée le 31 mai 2024 par le Conseil de Monsieur [U].

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la prescription :

Par application des dispositions de l'article L114-1 du Code des assurances, " Toutes actions dérivant d'un contrat d'assurance sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance (').

Quand l'action de l'assuré contre l'assureur a pour cause le recours d'un tiers, le délai de la prescription ne court que du jour où ce tiers a exercé une action en justice contre l'assuré ou a été indemnisé par ce dernier ".

Au sens de cet article, le point de départ de la prescription biennale de l'action appartenant à l'assuré pour réclamer la garantie de l'assureur se situe au jour où cet assuré a eu connaissance de la réalisation du risque de nature à entraîner le jeu de la garantie. De surcroit, il doit être considéré qu'une action en référé est une action en justice au sens de l' article L. 114-1, alinéa 3 précité.

En l'espèce, les assureurs sollicitent la confirmation de la décision attaquée en ce qu'elle a fixé le point de départ de la prescription de l'action de [I] [U] à leur encontre au 23 juillet 2019.

La MACIF et la MAIF qui ont successivement assuré l'immeuble de [I] [U] font valoir que ce dernier a été assigné en référé expertise le 23 juillet 2019 sur demande de la SCI PEOPLE.

Il ressort des pièces produites que le 27 juillet 2021 que la SCI PEOPLE a en effet donné assignation à [I] [U] devant le Tribunal judiciaire de MARSEILLE en vue d'obtenir notamment la condamnation de celui-ci, in solidum avec la SERAMM, à la relever et garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre dans le cadre de l'instance principale n°19/06541.

Selon cet acte, le 23 juillet 2019, les sociétés IBERIA et MONOPRIX ont effectivement délivré une assignation en référé d'heure à heure à la SCI PEOPLE, [I] [U], la SERAMMA, au Syndicat des copropriétaires du [Adresse 6] et à la METROPOLE AIX MARSEILLE PROVENCE.

Le débat porte sur la reconnaissance de cet acte du 23 juillet 2019 en tant que point de départ du délai de prescription de [I] [U] pour agir contre ses assureurs. Cette dénonce avec appel en garantie devant la juridiction de MARSEILLE délivrée le 23 juillet 2019 visait à obtenir:

- " D'une part, la condamnation de la SCI PEOPLE à laisser réaliser les travaux d'urgence sur l'immeuble du [Adresse 7], tels que décrits dans la notice descriptive des travaux de sécurisation, au frais avancé de la société MONOPRIX et pour le compte de qui il appartiendra, et ce sous astreinte de 1.000€ par jour de blocage des travaux nécessaire sou du passage,

- D'autre part la désignation d'un expert judiciaire ".

[I] [U] soutient que sa responsabilité n'a été recherchée qu'à compter des assignations au fond du 27 juillet et du 26 septembre 2021 et qu'il n'a pas mis en cause ses assureurs précisément parce que sa responsabilité n'était pas recherchée aux termes de l'acte du 23 juillet 2019.

Cependant, selon l'article L114-1 alinéa 3 du Code des assurances, quand l'action de l'assuré contre l'assureur a pour cause le recours d'un tiers, le délai de la prescription biennale ne court que du jour où ce tiers a exercé une action en justice contre l'assuré ou a été indemnisé par ce dernier. Une assignation en référé en vue de la nomination d'un expert constitue une action en justice ; l'acte délivré le 23 juillet 2019 entre donc dans le champ de ces dispositions. Il en résulte que le premier juge a justement considéré que le point de départ de la prescription était cette assignation en référé du 23 juillet 2019.

S'agissant du comportement fautif que [I] [U] reproche aux intimées, s'il est constant qu'aux termes des courriers qui ont été échangés entre les parties, la MAIF et la MACIF ont indiqué à leur assuré qu'elles n'avaient pas à intervenir dans le litige qui était engagé à titre d'instance principale, les éléments produits ne caractérisent pas de la part des assureurs des agissements déloyaux ou de nature dolosive susceptibles d'engager leur responsabilité.

Il y a donc lieu de confirmer sur ce point la décision entreprise.

Sur les actions ouvertes au tiers lésé :

[I] [U] sollicite que soit reconnu le droit dont les sociétés IBERIA et MONOPRIX pourraient se prévaloir en qualité de tiers lésé sur le fondement de l'article L124-3 du Code des assurances. Il soutient que le juge de la mise en état n'a pas statué sur ce point.

Cependant, aux termes de l'ordonnance attaquée, le juge de la mise en état a considéré que :

" En l'espèce, il convient de constater que si la SARL SOCIETE IMMOBILIERE IBERIA, la SAS MONOPRIX et la SCI PEOPLE se défendent au sujet de la prescription de leur action directe à l'encontre de la SA MAIF et de la SAM MACIF, ces dernières ne soulèvent pas de fin de non recevoir à leur égard en l'absence de demande formulée à leur égard par ces parties.

Il n'y a pas lieu de statuer sur ce point, mais de constater cependant à toutes fins utiles que la date d'apparition des dommages peut être fixée au 16 juin 2011, date du premier arrêté de péril virgule et qu'aucune assignation n'a été délivrée par la SARL SOCIETE IMMOBILIERE IBERIA, la SAS MONOPRIX et la SCI PEOPLE à l'encontre de la SA MAIF et de la SAM MACIF et qu'à ce jour aucune demande n'a été formée leur encontre ".

Il en résulte d'une part que le premier juge s'est bien prononcé sur cette question du droit d'agir du tiers lésé et qu'en tout état de cause, [I] [U] n'est pas fondé à se prévaloir des droits qui concernent, le cas échéant, d'autres parties à la procédure.

Il convient en conséquence de confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance du juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de MARSEILLE en date du 26 septembre 2023.

Sur les demandes annexes :

Au vu de la solution du litige et de la situation économique des parties, l'équité commande de limiter à 500€ les sommes que [I] [U] devra payer à la SA MAIF et à la SAM MACIF.

Les dépens de l'instance d'appel seront laissés à la charge de [I] [U].

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme en toutes ses dispositions l'ordonnance du juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de MARSEILLE en date du 26 septembre 2023 ;

Y ajoutant,

Condamne [I] [U] à payer à la SA MAIF et la SAM MACIF la somme de 500€ chacune au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne [I] [U] aux entiers dépens de l'instance d'appel.

Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Madame Patricia CARTHIEUX, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 23/13657
Date de la décision : 13/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-13;23.13657 ?
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