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13/06/2024 | FRANCE | N°19/16375

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 13 juin 2024, 19/16375


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4



ARRÊT AU FOND

DU 13 JUIN 2024



N° 2024/







Rôle N° RG 19/16375 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFB2Z







Syndicat des copropriétaires RESIDENCE [Adresse 6]





C/



Société LLOYD'S INSURANCE COMPANY

Société ABACOM IMMOBILIER

Compagnie d'assurances AXA FRANCE IARD

Société FRE.CO.SUD













Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Paul-victor BONAN



Me Sandra JUSTON



Me Serge BERTHELOT





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal d'Instance d'ANTIBES en date du 05 Septembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 11-18-0009.





APPELANTE



Syndica...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRÊT AU FOND

DU 13 JUIN 2024

N° 2024/

Rôle N° RG 19/16375 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFB2Z

Syndicat des copropriétaires RESIDENCE [Adresse 6]

C/

Société LLOYD'S INSURANCE COMPANY

Société ABACOM IMMOBILIER

Compagnie d'assurances AXA FRANCE IARD

Société FRE.CO.SUD

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Paul-victor BONAN

Me Sandra JUSTON

Me Serge BERTHELOT

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal d'Instance d'ANTIBES en date du 05 Septembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 11-18-0009.

APPELANTE

Syndicat des copropriétaires RESIDENCE [Adresse 6]

Représenté par son syndic en exercice le Cabinet COGESTIA

, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Paul-victor BONAN, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Lydia BOUBENNA, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEES

Société LLOYD'S INSURANCE COMPANY

venant aux droits de Lloyd's FRANCE (SA LLOYD'S DE LONDRES

, demeurant [Adresse 5]

défaillante

SCCV ABACOM IMMOBILIER

, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Valérie GINET de la SCP GINET - TRASTOUR, avocat au barreau de GRASSE

Compagnie d'assurances AXA FRANCE IARD

prise en sa qualité d'assureur RCP de la Société FRE.CO.SUD.

, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Serge BERTHELOT, avocat au barreau de GRASSE

Société FRE.CO.SUD

, demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Serge BERTHELOT, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 09 Avril 2024 en audience publique devant la cour composée de :

Madame Inès BONAFOS, Présidente

Mme Véronique MÖLLER, Conseillère

M. Adrian CANDAU, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Juin 2024.

ARRÊT

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

La copropriété [Adresse 6] est située [Adresse 1]. La société SCCV ABACOM a entrepris des travaux sur le terrain mitoyen à cette copropriété, cela dans le cadre d'une opération de promotion immobilière.

Soutenant que ces travaux avaient entraîné une série de désordres (notamment du fait de la destruction d'un mur séparatif) qui n'ont pas pu trouver de solution amiable, le Syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 6] a donné assignation à la société ABACOM en référé devant le Tribunal de grande instance de Grasse qui, par ordonnance en date du 15 décembre 2014, a confié une expertise à Monsieur [O] [T]. Ce dernier a remis son rapport le 26 août 2016.

La partie du litige relative à la destruction du mur a donné lieu à un engagement sur une voie amiable. En revanche, les parties ne sont pas parvenues à s'entendre au sujet de salissures occasionnées sur la façade de l'immeuble le [Adresse 6] par des projections de ciment.

Par acte d'huissier en date du 19 novembre 2018, le Syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 6] a donné assignation à la société ABACOM devant le Tribunal d'instance d'ANTIBES en vue d'obtenir sa condamnation au paiement des frais de remise en état rendus nécessaires par ces désordres.

Par acte d'huissier en date du 20 décembre 2018, la SCCV ABACOM IMMOBILIER a donné assignation devant ce même Tribunal d'instance à la SAS FRE. CO. SUD (gros-'uvre), la société COVEA RISK, la société de TERRASSEMENTS TARDIEU (démolition et terrassement) et la SMABTP, sociétés intervenues sur le chantier de construction, ainsi que leurs assureurs.

Par jugement en date du 5 septembre 2019, le Tribunal d'instance d'ANTIBES :

- CONSTATE que le syndicat des copropriétaires justifie d'un pouvoir d'agir en justice donné par l'assemblée générale des copropriétaires de la résidence [Adresse 6] en date du 28 juin 2018,

- DECLARE recevable l'action en justice du syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 6],

- CONSTATE qu'en cours de procédure d'expertise, la société FRE.CO.SUD a reconnu sa responsabilité et a proposé de mettre fin aux désordres de salissure de façade de la résidence du [Adresse 6],

- En conséquence, DECLARE ABUSIVE l'action en justice du syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 6] à l'encontre de la société ABACOM devant le Tribunal d'instance d'Antibes,

- DEBOUTE le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 6] de son action,

- DIT n'y avoir lieu à appel en garantie,

- CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 6] à payer à chacune des parties, la société ABACOM, à la société FRE.CO.SUD et à l'assureur AXA France IARD la somme de 800€ en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- DIT n'y avoir lieu au prononcé de l'exécution provisoire du présent jugement,

- DEBOUTE les parties du surplus de leur demande,

- CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 6] aux dépens de l'instance.

Par déclaration en date du 22 octobre 2019, le Syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 6] a formé appel contre cette décision en ce qu'elle a :

- Déclaré abusive l'action en justice du syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 6] à l'encontre de la société ABACOM devant le Tribunal d'Instance d'ANTIBES

- Débouté le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 6] de son action

- Dit n'y avoir lieu à appel en garantie

- Condamné le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 6] à payer à chacune des parties, la société ABACOM, à la société FRE CO SUD et à l'assureur AXA FRANCE IARD la somme de 800€ en application de l'article 700 du CPC.

- Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire Débouté les parties du surplus de leurs demandes

- Condamné le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 6] aux dépens,

L'appelant sollicite que la Cour d'appel infirme la décision dont appel et statue de la manière suivante :

- Déclarer la demande de syndicat des copropriétaires [Adresse 6] recevable et bien fondée, et en conséquence :

- Condamner la Société Anonyme ABACOM à lui payer la somme de 5.760 euros en principal, assortie des intérêts au taux légal à compter du jour de la demande ;

- Condamner la Société Anonyme ABACOM à lui payer la somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

- Condamner la Société Anonyme ABACOM à payer au syndicat des copropriétaires [Adresse 6], la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamner solidairement la société FRECOSUD et la compagnie d'assurance AXA à verser au syndicat des copropriétaires [Adresse 6] la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du CPC.

- Condamner la Société anonyme ABACOM aux entiers dépens, comprenant le montant des frais d'expertise de Monsieur [T] et les frais d'Assignation en référé pour un montant total de 4.368,28 €.

***

Les parties ont exposé leur demande ainsi qu'il suit, étant rappelé qu'au visa de l'article 455 du code de procédure civile, l'arrêt doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens :

Par conclusions notifiées le 28 octobre 2019, le Syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 6] demande à la Cour de :

Vu les articles 1382 et suivants du Code Civil

- Infirmer la décision dont appel.

- Débouter ABACOM, FRECOSUD et AXA de toutes leurs demandes.

- Déclarer la demande de syndicat des copropriétaires [Adresse 6] recevable et bien fondée, et en conséquence :

- Condamner la Société Anonyme ABACOM à lui payer la somme de 5.760 euros en principal, assortie des intérêts au taux légal à compter du jour de la demande ;

- Condamner la Société Anonyme ABACOM à lui payer la somme de 2.000€ à titre de dommages et intérêts ;

- Condamner la Société Anonyme ABACOM à payer au syndicat des copropriétaires [Adresse 6], la somme de 3.000€ en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamner solidairement la société FRECOSUD et la compagnie d'assurance AXA à verser au syndicat des copropriétaires [Adresse 6] la somme de 2.000€ en application de l'article 700 du CPC.

- Condamner la Société anonyme ABACOM aux entiers dépens, comprenant le montant des frais d'expertise de Monsieur [T] et les frais d'Assignation en référé pour un montant total de 4.368,28€.

Par ses dernières conclusions notifiées le 29 mars 2022, le Syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 6] maintient ses prétentions.

Il fait valoir que dans le cadre des travaux réalisés par la société ABACOM, un mur séparatif a été détruit et n'a pas été reconstruit, ce litige étant toujours en cours de règlement amiable avec le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble en copropriété CORAZUR ; qu'en outre des désordres affectant les façades ont été commis dont le coût de remise en état s'élève à 5.760€. Il soutient que la décision attaquée est contraire à la règle jurisprudentielle selon laquelle on ne peut pas imposer à la victime d'obtenir une réparation en nature et qu'il est donc en droit de solliciter une réparation pécuniaire. Il précise que les relations entre ABACOM et la société FRECOSUD ne lui sont pas opposables.

La SCCV ABACOM IMMOBILER, par conclusions notifiées le 31 octobre 2022 demande à la Cour de :

- Vu le jugement rendu le 5 décembre 2019 par le Tribunal d'instance d'Antibes,

- Au visa des dispositions de l'ancien article 1382 du code civil, et de l'actuel article 1240 du code civil,

- Vu la proposition amiable d'intervention de la société FRE.CO.SUD début 2010,

- Vu les pièces produites,

- Vu la police responsabilité civile et souscrite auprès des LLOYD'S,

- Vu le contrat tout risque chantier souscrit auprès des LLOYD'S,

A titre principal,

- PRONONCER l'absence de fautes de nature délictuelle de la société ABACOM IMMOBILER à l'égard du SDC [Adresse 6], celle-ci n'ayant réalisé pour sa part aucun travaux sur le chantier,

- CONFIRMER ainsi le jugement rendu le 5 septembre 2019 en toutes ses dispositions ;

- DEBOUTER en conséquence le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 6], de toutes ses demandes, fin et conclusions dirigées à l'encontre de la société ABACOM IMMOBILER.

A titre subsidiaire,

Vu les salissures en façade, seul grief allégué, conséquences exclusives des travaux exécutés par FRE.CO.SUD assurée auprès d'AXA,

- PRONONCER la seule responsabilité délictuelle de la société FRE.CO.SUD et la garantie due par son assureur AXA, s'agissant de dommages aux tiers ;

- PRONONCER à la mobilisation des garanties offertes par les LLOYD'S DE LONDRES assureur responsabilité civile professionnelle de la société ABACOM IMMOBILER et TOUS RISQUES CHANTIER ;

- CONDAMNER en conséquence, in solidum la SAS FRE.CO.SUD, la compagnie AXA et la compagnie LLOYD'S DE LONDRES à relever et garantir indemne de toute condamnation la société ABACOM IMMOBILER ;

- DEBOUTER la SAS FRE.CO.SUD et la Compagnie AXA de toutes leurs demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre d'ABACOM IMMOBILIER,

- CONDAMNER tous succombant à régler une indemnité de 3.000€ sur le fondement de l'article 700 du CPC et en tous les dépens de la présente instance, en ce compris les frais d'expertise judiciaire.

A l'appui de ses demandes, la SCCV ABACOM IMMOBILER fait valoir qu'elle n'a commis personnellement aucune faute de nature à engager sa responsabilité délictuelle et personnelle puisqu'elle n'avait en charge que la gestion administrative et financière de l'opération immobilière dénommée LE CORAZUR ; que sa responsabilité n'avait donc pas à être recherchée et que c'est contre la SAS FRE.CO.SUD que l'action avait lieu d'être engagée. Elle fait valoir que les tentatives amiables qui ont été engagées en vue de remédier aux désordres ont échoué du fait du comportement de la copropriété [Adresse 6] et que le refus opposé par cette dernière à une intervention amiable de la SAS FRE.CO.SUD était injustifié.

Subsidiairement, elle soutient que si la décision de première instance était reformée et qu'il était fait droit aux demandes présentées à son encontre, elle est fondée à former recours contre la SAS FRE.CO.SUD qui était en charge des travaux et qui est à l'origine des désordres occasionnés en façade, ainsi que son assureur AXA et également contre son propre assureur, la LLOYD'S DE LONDRES.

La société AXA France IARD et la SAS FRE.CO.SUD, par conclusions notifiées le 12 février 2020 demande à la Cour de :

Vu l'article 1241 du Code civil,

- METTRE HORS DE CAUSE la Société FRE.CO.SUD et son assureur la Compagnie AXA,

- DÉBOUTER la société ABACOM IMMOBILIER de son appel en garantie

- CONFIRMER le jugement rendu par le Tribunal d'instance d'Antibes le 5 septembre 2019,

SUBSIDIAIREMENT

- DIRE ET JUGER qu'en l'état des responsabilités civiles conjuguées des sociétés ABACOM et du syndicat des copropriétaires demandeur, la Cour procédera à une ventilation des responsabilités à hauteur d'un tiers pour chacune des parties visées.

ENFIN ET EN TOUT ÉTAT DE CAUSE

Vu les conditions générales et particulières de la police d'assurance de la compagnie AXA,

- DIRE ET JUGER que la Compagnie AXA est fondée à opposer à son assuré FRE.CO.SUD la franchise prévue au contrat à hauteur de 3 457,53 €.

- DEBOUTER le syndicat des copropriétaires de la résidence le [Adresse 6] de sa demande d'article 700 du CPC infondée et injustifiée,

- ORDONNER le partage des dépens et notamment des frais d'expertise dans la proportion de la ventilation des responsabilités proposée.

- CONDAMNER tout succombant à payer à la société FRECOSUD et à la compagnie AXA France la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.CONDAMNER tout succombant aux entiers dépens.

Elles font valoir qu'il y a lieu d'adopter les motifs du premier juge et se prévalent du fait qu'aucune demande n'est formulée à leur encontre. Subsidiairement, elles soutiennent que l'appel en garantie formé par la société ABACOM IMMOBILIER n'est pas fondé ; et que la société ABACOM exerçait bien la fonction de maître d''uvre sur le chantier ; qu'il lui appartenait donc d'organiser la réalisation des travaux de reprise auxquels la SAS FRE.CO.SUD a proposé de procéder ; que s'il devait y avoir lieu à condamner la société FRE.CO.SUD, un partage de responsabilité devrait être opéré entre elle, le SC de la résidence LE [Adresse 6] et la société ABACOM.

La Cie d'assurances LLOYD'S de LONDRES, régulièrement assignée par acte remis le 31 janvier 2020 à personne habilitée n'est pas intervenue en cause d'appel.

L'affaire a été clôturée à la date du 11 mars 2024 et appelée en dernier lieu à l'audience du 9 avril 2024.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la demande principale du Syndicat des copropriétaires :

Le Syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 6] demande à titre principal la condamnation de la société ABACOM à l'indemniser du préjudice résultant de la salissure des façades de sa résidence. Elle conclut en premier lieu à la recevabilité de sa demande, puis à son bienfondé.

. Sur la recevabilité de la demande :

Le premier juge a déclaré recevable l'action en justice du Syndicat des copropriétaires de la résidence du [Adresse 6], notamment en l'état de la régularité de son action en justice, conforme à l'autorisation qui lui a été donnée par l'assemblée général des copropriétaires le 28 juin 2018.

Cette solution n'est remise en cause par aucune des parties et il n'est pas sollicité d'infirmation de la décision quant à la recevabilité de l'action engagée par le Syndicat des copropriétaires.

Il n'y a donc pas lieu de statuer sur cette prétention.

. Sur le bienfondé de la demande :

Le Syndicat des copropriétaires fonde sa demande sur les dispositions de l'article 1382 du Code civil ; il considère qu'au vu des termes du rapport d'expertise de Monsieur [T], il apparaît que la société ABACOM a été négligente dans le suivi des travaux et que notamment, ces travaux ont laissé des traces de coulures sur les façades du bâtiment, le coût de remise en état s'élevant à 5.760€. Le Syndicat des copropriétaires considère que ses demandes sont à juste titre dirigées contre la société ABACOM en sa qualité de maître d''uvre et de maître d'ouvrage et que cette société ne peut pas s'exonérer de sa responsabilité aux motifs que les salissures litigieuses auraient été commises par la société FRECOSUD.

Elle reproche au jugement attaqué d'avoir méconnu la jurisprudence constante selon laquelle on ne peut pas imposer à la victime d'un préjudice une réparation en nature et que le premier juge a donc considéré à tort que l'action était abusive.

La SCCV ABACOM ne conteste pas la réalité des salissures qui ont affecté les murs de la résidence [Adresse 6]. Elle soutient en revanche qu'elle n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité délictuelle puisqu'elle n'a personnellement exécuté aucuns travaux ; qu'en effet, les salissures de façade sont la conséquence de projections de bétons imputables à la société FRECOSUD.

S'agissant du caractère abusif de la demande, c'est à juste titre que le Syndicat des copropriétaires se prévaut du fait qu'il n'y a pas lieu d'imposer à une victime qui n'y consent pas une réparation en nature ; qu'ainsi une demande de réparation par équivalent était justifiée en l'espèce. Il en résulte que la décision attaquée doit être infirmée en ce qu'elle a déclaré l'action du Syndicat des copropriétaires abusive.

En revanche, s'agissant de la responsabilité de la société de construction, il convient de rappeler que par application de l'article 1382 du Code civil, il appartient au tiers demandeur de rapporter la preuve d'une faute commise par le constructeur, d'un dommage et d'un lien de causalité entre la faute et le dommage.

En l'espèce, la qualité de maître d'ouvrage de la SCCV ABACOM n'est pas contestée, cette société ayant acquis en 2012 les parcelles sur lesquelles les travaux de construction ont été entrepris. S'agissant des désordres, ceux-ci sont constatée par l'expert [T] dans son rapport d'expertise qui relève les traces occasionnées par des projections de coulure de ciment sur les façades Sud et Nord, évènement imputable selon lui à une mauvaise surveillance dans l'exécution des travaux de ravalement. Il ressort précisément du rapport que la réalité de ce désordre n'a fait l'objet d'aucune contestation, la société ABACOM ayant proposé dans le cadre de l'expertise de faire disparaître toutes les traces. Le coût de cette intervention a été fixé à 5.760€ par référence aux devis qui ont été soumis à l'expert.

Les conclusions de l'expert ne permettent cependant pas de retenir l'existence d'une faute imputable à la SCCV. En effet, si l'expert retient que « les projections d'enduits sur les façades nord et Sud de l'immeuble [Adresse 6] ont été le résultat d'une mauvaise surveillance des travaux de ravalement », cela « en l'absence d'un homme de l'art responsable ou d'un coordinateur des travaux (') » (rapport p.23), ce défaut de surveillance n'est pas imputé à la SCCV ABACOM, étant rappelé qu'il n'est pas contesté que les travaux qui ont donné lieu à ces projections ont été exécutés par la société FRECOSUD à laquelle il revenait de prendre les précautions nécessaires pour prévenir un tel dommage. Dans le même sens, s'il est en effet relevé que « la coordination des travaux commandés par la société ABACOM n'a pas été efficace », il n'est pas démontré que ces éventuelles carences de la SCCV aient été la cause des projections de ciment sur la façade de la résidence [Adresse 6].

Ainsi, le Syndicat des copropriétaires ne démontre pas l'existence d'une faute justifiant l'engagement de la responsabilité de la SCCV ABACOM sur le fondement juridique dont elle se prévaut.

Il convient en conséquence de la débouter de l'ensemble de ses prétentions.

Le jugement en date du 5 septembre 2019 du Tribunal d'instance d'ANTIBES sera donc confirmé, sauf en ce qu'il a déclaré abusive l'action engagée par le Syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 6].

Sur les demandes annexes :

Compte tenu de la solution du litige, il convient de condamner le Syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 6] à payer à la SCCV ABACOM d'une part et à la société FRECOSUD et son assureur AXA d'autre part une somme de 2.000€ chacun au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Le Syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 6] sera condamné aux entiers dépens de l'instance comprenant le coût de l'expertise judiciaire.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement du Tribunal d'instance d'ANTIBES en date du 5 septembre 2019, sauf en ce qu'il a déclaré abusive l'action engagée par le Syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 6] ;

Statuant à nouveau,

Condamne le Syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 6] représenté par son Syndic en exercice le Cabinet COGESTIA à payer à la SCCV ABACOM IMMOBILIER une somme de 2.000€ et à la société AXA France IARD et la SAS FRE.CO.SUD une somme totale de 2.000€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne le Syndicat des copropriétaires de la copropriété [Adresse 6] représenté par son Syndic en exercice le Cabinet COGESTIA aux entiers dépens de l'instance comprenant le coût du rapport d'expertise judiciaire.

Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Madame Patricia CARTHIEUX, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 19/16375
Date de la décision : 13/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-13;19.16375 ?
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