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13/06/2024 | FRANCE | N°19/14979

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 13 juin 2024, 19/14979


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4



ARRÊT AU FOND

DU 13 JUIN 2024



N° 2024/













N° RG 19/14979 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BE5VI







[C] [Z]





C/



Société MAIF



























Copie exécutoire délivrée



le :



à :



Me Willi SCHWANDER





Me Eric TARLET



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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 19 Septembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 17/05849.



APPELANT



Monsieur [C] [Z]

né le [Date naissance 1] 1982 à [Localité 4], demeurant [Adresse 3]



représenté par Me Willi SCHWANDER de l'ASSOCIAT...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRÊT AU FOND

DU 13 JUIN 2024

N° 2024/

N° RG 19/14979 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BE5VI

[C] [Z]

C/

Société MAIF

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Willi SCHWANDER

Me Eric TARLET

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 19 Septembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 17/05849.

APPELANT

Monsieur [C] [Z]

né le [Date naissance 1] 1982 à [Localité 4], demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Willi SCHWANDER de l'ASSOCIATION ASSOCIATION ARRIVAT - SCHWANDER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

Compagnie MAIF vient aux lieu & droit de la Compagnie FILIA-MAIF, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Eric TARLET de la SCP LIZEE- PETIT-TARLET, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE (avocat postulant) et plaidant par Me Emeric DESNOIX de la SELARL SELARLU DESNOIX, avocat au barreau de TOURS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Véronique MÖLLER, Conseillère, chagée du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Inès BONAFOS, Présidente

Mme Véronique MÖLLER, Conseillère

M. Adrian CANDAU, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Patricia CARTHIEUX.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Mai 2024, prorogé au 13 juin 2024.

ARRÊT

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Le 30 septembre 2016, Monsieur [C] [Z] a acheté un véhicule AUDI A7 SPORTBACK BI-TDI, immatriculé [Immatriculation 6], au prix 40.000€ TTC. Il a assuré ce véhicule auprès de la société FILIA-MAIF.

Le même jour, le véhicule, alors conduit par Monsieur [Y] [A], a été impliqué dans un accident de la circulation.

Monsieur [Z] a immédiatement déclaré ce sinistre à la société FILIA-MAIF, qui l'a enregistré sous le n° F 16 0255190 H.

Une expertise a été diligentée 14 octobre 2016 par la société EXPERT AUTOMOBILES ainsi qu'une expertise contradictoire en présence d'un Huissier de Justice, laquelle s'est tenue le 28 octobre 2016.

Le 22 décembre 2016, la société FILIA-MAIF a fait savoir à Monsieur [Z] qu'elle n'avait pas vocation à intervenir dans cette affaire dans la mesure où l'accident avait eu lieu avant l'heure à compter de laquelle la garantie était applicable et qu'en conséquence, le véhicule n'était pas assuré au moment des faits.

Par ordonnance en date du 4 avril 2017, le Juge des Référés du Tribunal de grande instance d'AIX EN PROVENCE a considéré qu'il n'était pas contestable que le véhicule était assuré au moment des faits et a ordonné une réouverture des débats afin de savoir si le véhicule accidenté était réparable ou s'il avait été remplacé.

Par ordonnance en date du 13 juin 2017, le Juge des Référés du Tribunal de grande instance d'AIX EN PROVENCE a notamment condamné la SA FILIA MAIF à payer à [C] [Z] la somme provisionnelle de 36.646,49€ avec intérêts au taux légal à compter du 8 mars 2017 outre la somme de 800€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 06 octobre 2017, la société FILIA-MAIF a été autorisée à consigner la somme de 38.000€ auprès de la Caisse des Dépôts et Consignations.

Le 26 juillet 2017, la société FILIA-MAIF a interjeté appel distinctement des deux ordonnances de référé.

Par arrêt en date du 05 juillet 2018, la Cour d'Appel d'AIX EN PROVENCE a notamment confirmé l'ordonnance de référé du 4 avril 2017, sauf en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à provision concernant un préjudice moral et financier, confirmé l'ordonnance du 13 juin 2017 en toutes ses dispositions, et a condamné la SA FILIA MAIF à verser à M. [Z] une provision de 7.000€ à valoir sur le préjudice résultant de l'immobilisation de son véhicule outre la somme de 2.000€ sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Parallèlement, par acte d'huissier en date du 3 octobre 2017, [C] [Z] a assigné en indemnisation la société FILIA-MAIF devant le Tribunal de grande instance d'AIX EN PROVENCE.

Par jugement en date du 19 septembre 2019, le Tribunal de grande instance d'AIX EN PROVENCE a :

-prononcé la nullité du contrat d'assurance ;

-débouté Monsieur [C] [Z] de toutes ses prétentions ;

-condamné Monsieur [C] [Z] à payer à la Société Anonyme FILIA-MAIF, en remboursement des provisions versées (outre, les intérêts et dépens des procédures en référé), la somme de 49.653,46€ avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

-condamné Monsieur [C] [Z] à payer à la Société Anonyme FILIA-MAIF, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, une indemnité de 2.000€ avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

-ordonné l'exécution provisoire ;

-débouté Monsieur [C] [Z] du surplus de ses demandes ;

-condamné Monsieur [C] [Z] aux dépens et autorise leur distraction au profit de Maître Eric TARLET.

Le Tribunal a retenu, sur le fondement des dispositions de l'article L.121-15 du Code des assurances que le risque était déjà réalisé (à savoir l'accident du véhicule) lorsque le contrat litigieux avait été formé si bien que celui-ci devait être déclaré nul pour défaut d'aléa.

Par déclaration en date du 25 septembre 2019, Monsieur [Z] a interjeté appel de ce jugement en ce qu'il :

PRONONCE la nullité du contrat d'assurance ;

DEBOUTE Monsieur [C] [Z] de toutes ses prétentions ;

CONDAMNE Monsieur [C] [Z] à payer à la Société Anonyme FILIA-MAIF, en remboursement des provisions versées (outre, les intérêts et dépens des procédures en référé), la somme de 49.653,46€ avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

CONDAMNE Monsieur [C] [Z] à payer à la Société Anonyme FILIA-MAIF, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, une indemnité de 2.000€ avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

ORDONNE l'exécution provisoire ;

DEBOUTE Monsieur [C] [Z] du surplus de ses demandes ;

CONDAMNE Monsieur [C] [Z] aux dépens et autorise leur distraction au profit de Maître Eric TARLET.

***

Par ordonnance d'incident en date du 1er avril 2021, le conseiller de la mise en état a dit n'y avoir lieu à radiation de l'affaire sur le fondement de l'article 524 du Code de procédure civile.

***

Les parties ont exposé leur demande ainsi qu'il suit, étant rappelé qu'au visa de l'article 455 du code de procédure civile, l'arrêt doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens :

Par conclusions notifiées le 3 octobre 2019, [C] [Z] demande à la Cour de :

Vu les conditions générales et particulières du contrat d'assurance,

Vu les articles 1134, 1315 du Code civil dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016,

Vu les articles 515, 696, 699 et 700 du Code de Procédure Civile,

INFIRMER le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance d'AIX EN PROVENCE, le 19 septembre 2019 (RG n°17/05849) aux termes duquel il a :

PRONONCE la nullité du contrat d'assurance ;

DEBOUTE Monsieur [C] [Z] de toutes ses prétentions ;

CONDAMNE Monsieur [C] [Z] à payer à la Société Anonyme FILIA-MAIF, en remboursement des provisions versées (outre, les intérêts et dépens des procédures en référé), la somme de 49.653,46€ avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

CONDAMNE Monsieur [C] [Z] à payer à la Société Anonyme FILIA-MAIF, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, une indemnité de 2.000€ avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

ORDONNE l'exécution provisoire ;

DEBOUTE Monsieur [C] [Z] du surplus de ses demandes ;

CONDAMNE Monsieur [C] [Z] aux dépens et autorise leur distraction au profit de Maître Eric TARLET,

STATUER A NOUVEAU

DECLARER Monsieur [C] [Z] recevable et bienfondé en l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

DIRE ET JUGER que l'accident de la circulation survenu le 30 septembre 2016 mettant en cause le véhicule immatriculé [Immatriculation 6] doit être garanti par la société FILIA-MAIF

EN CONSEQUENCE CONDAMNER la société FILIA MAIF à garantir Monsieur [Z] de toutes les conséquences financières consécutives à l'accident de la circulation dans lequel son véhicule terrestre à moteur AUDI A7 SPORTBACK BI-TDI, immatriculé [Immatriculation 6] a été impliqué dans l'accident de la circulation survenu le 30 septembre 2016.

CONDAMNER la société FILIA MAIF à payer à Monsieur [Z] la somme de 36 649,49 Euros TTC, correspondant au coût de réparation de son véhicule

CONDAMNER la société FILIA MAIF à payer à Monsieur [Z] la somme de 450 Euros, destinée à couvrir le préjudice de l'immobilisation du véhicule durant sa réparation.

CONDAMNER la société FILIA MAIF à payer à Monsieur [Z] au titre de la privation de jouissance d'un véhicule, la somme de 21 990 Euros.

CONDAMNER la société FILIA MAIF à payer à Monsieur [Z] en réparation de tous ses tracas judiciaires, la somme de 10.000 Euros à titre de dommages et intérêts.

CONDAMNER la société FILIA MAIF à payer à Monsieur [Z] en réparation de son préjudice moral, la somme de 8 000 Euros à titre de dommages et intérêts.

DIRE que l'ensemble des condamnations sera assorti des intérêts au taux légal calculés à compter de la délivrance de la présente assignation.

DEBOUTER la société FILIA MAIF de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions

CONDAMNER la société FILIA-MAIF à payer à [C] [Z] la somme de 8 000,00 Euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

CONDAMNER enfin la société FILIA-MAIF aux entiers dépens sur le fondement des dispositions de l'article 696 du Code de Procédure Civile et DIRE qu'ils pourront être recouvrés par Maître Willi SCHWANDER, Avocat postulant, dans les conditions de l'article 699 dudit code.

[C] [Z], par ses dernières conclusions notifiées le 7 juin 2021 maintient ses prétentions initiales et élève à 15.000€ le montant de la somme demandée au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Il fait principalement valoir qu'il est incontestable que son véhicule était assuré tous risques à la date du sinistre, les garanties ayant pris effet le 30 septembre 2016 à 00h en l'absence de toute stipulation contraire et non pas à 14h03 comme le soutient la société d'assurance. Il considère que l'absence d'aléa tenant au fait qu'il aurait eu connaissance de l'accident avant la souscription du contrat n'est pas démontrée et expose qu'il a procédé à la demande d'assurance avant l'heure de cet accident. Il considère que les conditions d'acquisitions du véhicule ne sont pas contestables et qu'elles sont en outre sans conséquence sur la mise en 'uvre de la garantie et qu'en tout état de cause, il était bien le propriétaire de ce véhicule au moment de l'accident. Monsieur [Z] fait valoir que la MAIF invoque vainement les dispositions de l'article L561-1 du Code monétaire et financier qui ne sont pas de nature à l'exonérer de ses obligations.

Monsieur [Z] reproche ainsi au jugement attaqué d'avoir inversé la charge de la preuve en annulant le contrat d'assurance dès lors que la société FILIA MALIF ne rapporte pas la preuve de l'absence d'aléa et souligne le fait qu'il n'avait aucune connaissance de l'accident au moment de sa souscription du contrat.

Il conclut enfin sur le chiffrage de ses différents postes de préjudice.

La société d'assurance mutuelle MAIF, venant aux droits de la Compagnie FILIA-MAIF, par conclusions notifiées le 7 juin 2021 demande à la Cour de :

VU les articles 1101, 1242 alinéa 1er et 1231-1 du Code civil

VU la Jurisprudence susvisée

VU les présentes écritures recevables et bien fondées

VU l'intervention de la Compagnie MAIF au lieu & place de la Compagnie FILIA-MAIF, en

application de la décision n° 2020-C-37 du 7 octobre 2020 de l'autorité de contrôle prudentiel et de résolution, laquelle a approuvé le transfert par voie de fusion-absorption du portefeuille de contrats, avec les droits et obligations qui s'y rattachent, de la société FILIA MAIF (SIREN: 341 672 681), dont le siège social est situé à [Adresse 7], à la mutuelle assurance des instituteurs de France (SIREN: 775 709 702), dont le siège social est situé à la même adresse (décision publiée au Journal officiel en date du 31 décembre 2020)

ET EN CONSEQUENCE

À TITRE PRINCIPAL

CONFIRMER le Jugement rendu par le Tribunal de grande instance d'AIX-EN-PROVENCE en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat d'assurance pour défaut d'aléa

DEBOUTER Monsieur [C] [Z] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires aux présentes

CONFIRMER le Jugement rendu par le Tribunal de grande instance d'AIX-EN-PROVENCE en ce qu'il a condamné Monsieur [C] [Z] au remboursement des provisions versées pour la somme totale de 49.653,46 € avec intérêts au taux légal à compter du jugement contesté

À TITRE SUBSIDIAIRE

DECLARER que Monsieur [C] [Z] n'apporte pas la preuve de la propriété, à son bénéfice, du véhicule AUDI A7 SPORT BACK TDI immatriculé [Immatriculation 6], condition de mobilisation de la garantie « dommages au véhicule »

DECLARER que Monsieur [C] [Z] n'apporte pas la preuve de l'origine des fonds utilisés pour la prétendue acquisition du véhicule AUDI A7 SPORT BACK TDI immatriculé CV678-SB

DECLARER que Monsieur [C] [Z] n'apporte pas la preuve de ce que Monsieur [Y] [A] serait titulaire d'un permis de conduire valide

DEBOUTER Monsieur [C] [Z] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires aux présentes.

À TITRE TRES SUBSIDIAIRE

DIRE ET JUGER satisfactoires, le cas échéant, les sommes qui pourraient être dues par la Compagnie MAIF et précisément :

Limiter toute indemnisation au titre des réparations du véhicule à la somme de 36.494,49€

Limiter toute indemnisation au titre de l'immobilisation du véhicule à la somme de 210 € sauf à ce que Monsieur [C] [Z] ne s'engage à faire réaliser les réparations dans un garage partenaire de la Compagnie MAIF, soit la somme de 210€.

Rejeter tout indemnisation des prétendus préjudices de privation de jouissance, dommages et intérêts et préjudice moral en l'absence de faute de la Compagnie MAIF

EN TOUT ETAT DE CAUSE

DECLARER toutes demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires aux présentes, irrecevables, en tous cas mal fondées, et les rejeter

CONDAMNER Monsieur [C] [Z] à verser à la Compagnie MAIF la somme de 10.000€ sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de 1ère instance et d'appel, dont distraction au profit de Maître Eric TARLET, Avocat aux offres de droit.

Elle fait valoir que le contrat d'assurance souscrit par un assuré qui a connaissance de la réalisation d'un sinistre est nul et qu'elle a bien rapporté la preuve de ce défaut d'aléa au moment de la conclusion du contrat. Elle considère que Monsieur [Z] ne peut pas prétendre à une rétroactivité de la garantie au 30 septembre à 00h alors qu'un contrat souscrit après réalisation du sinistre ne peut qu'être nul et que le jugement attaqué ne peut donc qu'être confirmé.

Subsidiairement, elle expose qu'il existe un doute sur la propriété du véhicule par Monsieur [Z], condition de mise en 'uvre de la garantie, ce véhicule ayant de surcroît fait l'objet de cessions multiples ; elle souligne le fait que deux factures d'achat sont produites et comportent des dates différentes et que les conditions de paiement n'établissent pas la propriété. Elle invoque également le fait, à titre très subsidiaire, que Monsieur [Z] ne rapporte pas la preuve de l'origine des fonds qui ont permis d'acheter le véhicule et qu'elle est donc fondée à se prévaloir des dispositions de l'article L561-1 et suivants du Code monétaire et financier pour refuser d'indemniser ce sinistre et cela en application de la réglementation relative à a lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme.

Très subsidiairement, la MAIF conclut enfin sur la limitation des préjudices subis par Monsieur [Z].

L'affaire a été clôturée par ordonnance en date du 12 février 2024 et appelée en dernier lieu à l'audience du 26 mars 2024.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la demande principale d'application du contrat d'assurance :

En application des dispositions de l'article L121-15 du Code des assurances, « L'assurance est nulle si, au moment du contrat, la chose assurée a déjà péri ou ne peut plus être exposée aux risques.

Les primes payées doivent être restituées à l'assuré, sous déduction des frais exposés par l'assureur, autres que ceux de commissions, lorsque ces derniers ont été récupérés contre l'agent ou le courtier ».

 

En application de cet article, le contrat d'assurance, par nature aléatoire, ne peut pas porter sur un risque que l'assuré sait déjà réalisé. S'agissant du risque qui se réalise le jour de la prise d'effet de la garantie, celui-ci est couvert par le contrat d'assurance dès lors que la société d'assurances ou son représentant a accepté de couvrir ce risque avant qu'il ne se réalise.

En l'espèce, il est acquis que le contrat d'assurance applicable au véhicule sinistré a été souscrit par Monsieur [Z] le 30 septembre 2016. Selon les relevés d'écran informatique produits par la MAIF le contrat relatif à Monsieur [Z] désigné Conditions Particulières VAM + Plénitude SVR-Plénitude ' [Immatriculation 5] a été créé et terminé le 30 septembre 2016 à 14h03.

Il est à noter qu'il existe une discordance entre la désignation du véhicule dans les documents émanant de la MAIF ([Immatriculation 6]) et dans les autres documents de la procédure ([Immatriculation 6]), sans qu'il soit contesté par les parties qu'il s'agit bien du même véhicule.

Selon le rapport de la société EXPERT AUTOMOBILES ASSOCIES en date du 14 avril 2017 mandaté par la MAIF, il apparaît que « au vu des constatations faites le jour de l'expertise contradictoire, nous pouvons affirmer que le dit véhicule a eu un accident de la circulation le 30/09/2016 à 13 heures vingt et une minutes et trente secondes », cette information ayant été obtenue par l'analyse des calculateurs du véhicule.

La MAIF se prévaut également d'un rapport d'enquête réalisé par la société Oi2R en qualité d'enquêteur de droit privé sur demande de l'assureur. Selon ce rapport, il est retenu que « M. [Z] a pris possession du véhicule AUDI au mois de juin 2016 et que celui-ci n'a donc pas été assuré par ses soins jusqu'au jour du sinistre. Il ne fait donc aucun doute que c'est le sinistre qui a motivé la souscription de l'assurance ». Ce rapport mentionne en outre que « le certificat de cession établi entre Monsieur [L] et Monsieur [C] [Z] daté du 30 septembre 2016 produit aux assurances MAIF est un document erroné puisque la déclaration de vente a été effectuée sur le site ANTS par la société [L] au profit de Monsieur [C] [Z] le 13 juillet 2016. Il en est de même de la seconde facture produite par M. [T] qu'il annonce sincère et véritable mais qui est impossible ». Il est à noter que si l'enquêtrice fait état de cette situation à la suite des entretiens réalisés avec les services ANTS, elle précise que « aucun document ne nous sera adressé pour des raisons de confidentialité ».

Pour justifier de ce qu'il ignorait l'existence de l'accident avant de souscrire le contrat d'assurance, Monsieur [Z] verse aux débats la facture d'acquisition du véhicule émise le 30 septembre 2016 par la société [L] (Monsieur [T]) d'un montant de 40.000€ TTC relatif à une AUDI A7 BI-TDI immatriculée [Immatriculation 6] de 149.340 kilomètres ainsi qu'une déclaration de cession établie avec cette même société à la même date.

Il est constant qu'une même facture de vente de ce véhicule avait été émise, comportant la date du 15 juin 2016 et un kilométrage de 147.000. Pour expliquer cette contradiction, Monsieur [Z] verse aux débats une attestations de Monsieur [T] datée du 20 mai 2019 dans laquelle ce dernier indique que la vente de ce véhicule a bien eu lieu le 30 septembre 2016 et que la réponse qui a été donnée à l'huissier dans le cadre de l'enquête était inexacte. L'accusé d'enregistrement de la déclaration de cession du véhicule mentionne comme date et heure de la cession le 30 septembre 2016 à 13h15.

Il produit également un récépissé de déclaration d'achat faisant état du fait que ledit véhicule a fait l'objet d'une vente le 1er juin 2016 par [O] [M] à la société [L], puis d'une nouvelle vente par Monsieur [B] [D] à nouveau à la société [L] le 7 juin 2016.

Une copie du certificat d'immatriculation est également versée aux débats avec la mention manuscrite « vendu le 30/09/2016 à 13h15 ». Le certificat d'immatriculation est cependant au nom de Madame [M].

Selon Monsieur [Z], les multiples cessions dont a fait l'objet le véhicule sont sans incidence sur la, mise en 'uvre de la garantie. Il explique que le véhicule était immatriculé au nom de Madame [M] le 18 mai 2016 et que cette dernière l'a vendu à Monsieur [D] qui l'a utilisé sans effectuer les formalités de cession, le laissant donc au nom de Madame [M] ; que Monsieur [D] a ensuite revendu le véhicule à la société [L] et que ces deux derniers ont effectué la déclaration de cession le 7 juin 2016 et régularisé celle du 1er juin 2016 et que c'est la raison pour laquelle, lors de la vente du 30 septembre 2016, le certificat d'immatriculation du véhicule était toujours au nom de Madame [M]. 

Il se prévaut également du relevé d'appel de sa ligne portable sur laquelle il apparaît que des appels ont été émis le 30 septembre 2016 vers les services de la MAIF en vue de procéder à l'assurance du véhicule :

à 13h08 pour une durée de 5 minutes et 40 secondes

à 13h14 pour une durée de 7 minutes et 38 secondes,

à 13h27 pour une durée de 3 minutes et 58 secondes,

à 14h38 pour une durée de 9 minutes et 52 secondes.

Il considère que ces horaires d'appels démontrent qu'il a tenté de joindre la MAIF avant l'accident, et que ce dernier dans un temps si proche de la souscription du contrat est nécessairement une coïncidence.

En application de l'article L121-15 du Code des assurances, pour prononcer l'annulation d'un contrat au motif que le risque s'était déjà réalisé au moment de la souscription, il est nécessaire de démontrer que les parties avaient connaissance de cette réalisation au moment où elles ont contracté. 

Ainsi, des éléments mentionnés ci-dessus, il ressort que l'assurance souscrite auprès de la MAIF était effective à compter du 30 septembre 2016 à 14h03 alors que l'accident avait eu lieu le même jour à 13h21. Le véhicule accidenté avait été cédé à Monsieur [Z] le 15 juin 2016 (kilométrage de 147.000) selon la 1ère facture de CARS AND BIKE, date corrigée et fixée au 30 septembre 2016 selon la 2ème facture de [L] et l'attestation de Monsieur [T] confirmant que cette seconde date est la bonne. Il est à noter que l'attestation de Monsieur [T] n'explique pas l'existence d'une facture [L] en date du 15 juin 2016.

En tout état de cause, lors de la vente, le certificat de cession du véhicule était au nom de Madame [M] alors que selon les écritures de Monsieur [Z], cette dernière avait vendu le véhicule le 1er juin 2016 à Monsieur [D] qui, le 7 juin 2016, l'avait lui-même revendu à la société [L]. Il est à relever que ces cessions n'ont pas été suivies d'une actualisation du certificat d'immatriculation puisque ce certificat était toujours au nom de Madame [M] le 30 septembre 2016, alors que selon l'article R322-5 du Code de la route, un nouveau propriétaire d'un véhicule déjà immatriculé est tenu de faire établir un certificat d'immatriculation à son nom dans le mois qui suit la cession.

Ces irrégularités dans les opérations relatives aux véhicule ne permettent pas de considérer que Monsieur [Z] a contracté de bonne foi la police d'assurance auprès de la MAIF. En effet, l'émission d'une première facture de vente du véhicule en date du 15 juin 2016 n'a donné lieu à correction que suite à l'accident. En outre, selon la déclaration de cession la vente a eu lieu le 30 septembre 2016 à 13h15 avant d'être accidenté le même jour à 13h21, alors que :

la facture du 30 septembre 2016 mentionne un kilométrage de 149.340,

ce kilométrage n'est pas indiqué dans le certificat de cession,

le kilométrage était de 149.372 au moment de l'accident (soit une différence de 32 kilomètres en 6 minutes).

De ces éléments qui révèlent des irrégularités commises au moment de la vente à laquelle aucune date certaine ne peut être donnée (entre le 15 juin et le 30 septembre 2016), et de la concomitance entre l'accident et le moment de la souscription du contrat, il se déduit que Monsieur [Z] avait, lors de la souscription de ce contrat le 30 septembre 2016 à 14h, nécessairement eu connaissance de l'accident survenu 40 minutes plus tôt. Il en résulte qu'aucun aléa n'existait au moment de cette souscription. Il convient en conséquence de confirmer en toutes ses dispositions le jugement du Tribunal de grande instance d'AIX EN PROVENCE en date du 19 septembre 2019.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Compte tenu de la solution du litige, il convient de condamner Monsieur [C] [Z] à verser à la société d'assurances MAIF la somme de 2.000€ sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Monsieur [Z] sera également condamné aux entiers dépens de l'instance.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Statuant contradictoirement par mise à disposition au greffe, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement du Tribunal de grande instance d'AIX EN PROVENCE en date du 19 septembre 2019 ;

Y ajoutant,

Condamne Monsieur [C] [Z] à payer à la Société d'assurances MAIF la somme de 2.000€ sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne Monsieur [C] [Z] aux entiers dépens de l'instance.

Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Mme Patricia CARTHIEUX, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 19/14979
Date de la décision : 13/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-13;19.14979 ?
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