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12/06/2024 | FRANCE | N°22/02103

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-8, 12 juin 2024, 22/02103


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-8



ARRÊT AU FOND

DU 12 JUIN 2024



N° 2024/ 279







N° RG 22/02103



N° Portalis DBVB-V-B7G-BI3FR







S.E.L.A.R.L. [F] [S] & Associés



C/



[L] [A] [M]



[Z] [W] [C] épouse [A] [M]

























Copie exécutoire délivrée le :



à :





Me Romain CHERFILS




>Me Céline TREGAN

















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal judiciaire de NICE en date du 06 Janvier 2022 enregistrée au répertoire général sous le n° 20/02333.





APPELANTE



S.E.L.A.R.L. XAVIER HUERTAS & Associés

prise en la personne de Me Xavier HUERTAS, administrateur judiciaire...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-8

ARRÊT AU FOND

DU 12 JUIN 2024

N° 2024/ 279

N° RG 22/02103

N° Portalis DBVB-V-B7G-BI3FR

S.E.L.A.R.L. [F] [S] & Associés

C/

[L] [A] [M]

[Z] [W] [C] épouse [A] [M]

Copie exécutoire délivrée le :

à :

Me Romain CHERFILS

Me Céline TREGAN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal judiciaire de NICE en date du 06 Janvier 2022 enregistrée au répertoire général sous le n° 20/02333.

APPELANTE

S.E.L.A.R.L. XAVIER HUERTAS & Associés

prise en la personne de Me Xavier HUERTAS, administrateur judiciaire ès qualités d'administrateur provisoire du syndicat des copropriétaires [Adresse 4], nommé à ses fonctions par ordonnance rendue sur requête par Monsieur le Président du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 06 avril 2017, dans le cadre de l'article 29-1 de la loi du 10 juillet 1965

représentée par Me Romain CHERFILS, membre de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée et plaidant par Me Marine CHARPENTIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, ayant pour avocat plaidant Me Philippe MARIN, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

Monsieur [L] [A] [M]

né le 25 Novembre 1966 à CAP VERT, demeurant [Adresse 1]

Madame [Z] [W] [C] épouse [A] [M]

née le 23 Février 1971 à CAP VERT, demeurant [Adresse 1]

représentés et plaidant par Me Céline TREGAN, membre de l'AARPI KTZ & ASSOCIES, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Avril 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Philippe COULANGE, Président

Madame Céline ROBIN-KARRER, Conseillère

Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Maria FREDON.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Juin 2024.

ARRÊT

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Juin 2024, signé par Monsieur Philippe COULANGE, Président et Madame Maria FREDON, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE ANTÉRIEURE

Les époux [L] [A] [M] et [Z] [C] sont propriétaires des lots n° 423, 790 et 948 de l'état descriptif de division de l'ensemble immobilier dénommé [Adresse 4], situé [Adresse 2].

L'administration de cette copropriété a été successivement assurée :

- jusqu'au 30 septembre 2014, par le cabinet [Adresse 3],

- du 30 septembre 2014 au 6 avril 2017, par le cabinet [B] (société SMGI),

- et à compter du 6 avril 2017 par Maître Xavier HUERTAS, administrateur judiciaire désigné en qualité d'administrateur provisoire par ordonnance du président du tribunal de grande instance de Nice en application de l'article 29-1 de la loi du 10 juillet 1965.

Les comptes du syndicat n'ayant pas été approuvés depuis de nombreuses années, Maître [S] a obtenu la désignation d'un expert-comptable en la personne de M. [J] [G] afin notamment de l'aider à établir les comptes des exercices écoulés, de mettre à jour l'ensemble des comptes individuels des copropriétaires, et de faire éventuellement ressortir toute anomalie ou faute de gestion susceptible d'engager la responsabilité des précédents syndics.

Sur la base de deux rapports d'expertise certifiant la régularité des comptes au 30 juin 2020, l'administrateur provisoire a pris en lieu et place de l'assemblée générale des copropriétaires une série de résolutions approuvant les comptes des exercices 2004/2005 à 2019/2020, ainsi que les budgets prévisionnels des exercices 2020/2021 et 2021/2022, puis a entrepris de recouvrer les charges demeurées impayées.

C'est ainsi que, par exploits d'huissier du 15 juin 2020, Maître [S] a assigné les époux [A] [M] à comparaître devant le tribunal judiciaire de Nice pour les entendre condamner à payer la somme de 3.858,30 € au titre du solde débiteur de leur compte arrêté au 23 avril 2020, la créance ayant été ramenée en cours de procédure à la somme de 2.086,07 € suivant nouveau décompte actualisé au 1er janvier 2021, outre 2.000 € à titre de dommages-intérêts.

Les défendeurs ont opposé la prescription de l'action en recouvrement des charges échues avant le 15 juin 2015, conclu au rejet du surplus des demandes du syndicat, et formé des demandes reconventionnelles en restitution d'un trop perçu et en paiement de dommages-intérêts en raison de la dépréciation de leurs lots.

Par jugement rendu le 6 janvier 2022, le tribunal a :

- rejeté la fin de non-recevoir fondée sur la prescription,

- condamné les époux [A] [M] à payer la somme de 793,40 € au titre des charges de copropriété restant dues au 1er janvier 2021, outre les intérêts au taux légal à compter de l'assignation et la somme de 100 € à titre de dommages-intérêts,

- débouté les époux [A] [M] de leurs demandes reconventionnelles,

- et condamné les défendeurs aux dépens, ainsi qu'au paiement d'une somme de 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le syndicat des copropriétaires a interjeté appel de cette décision le 11 février 2022.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses conclusions récapitulatives notifiées le 7 septembre 2022, le syndicat des copropriétaires, représenté par son administrateur provisoire Maître [F] [S], exerçant désormais dans le cadre de la SELARL [S] & ASSOCIÉS, reproche au tribunal d'avoir réduit le montant de sa créance au motif qu'aucun élément ne permettait de confirmer que le compte des époux [A] [M] présentait un solde débiteur de 4.290,43 € à la date de la reprise des comptes de l'ancien syndic le 5 mai 2017, et d'avoir retenu le solde débiteur de 2.997,76 € existant au 30 septembre précédent. Il produit en cause d'appel deux notes rédigées par l'expert [G] en réponse à l'argumentation du premier juge et aux moyens développés par les intimés.

Il produit un nouveau relevé de compte actualisé au 11 avril 2022, faisant apparaître une créance de 1.336,35 €.

Il critique également la décision entreprise quant au montant des dommages-intérêts et de l'indemnité pour frais irrépétibles qui lui ont été alloués.

Il demande à la cour d'infirmer le jugement déféré et, statuant à nouveau, de condamner les époux [A] [M] à lui payer :

- 1.336,35 € au titre du solde débiteur de leur compte arrêté au 11 avril 2022,

- 2.000 € à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive,

- 1.500 € au titre des frais irrépétibles exposés en première instance,

- 2.500 € au titre de ceux exposés en appel,

- et les entiers dépens.

Par conclusions notifiées le 28 juillet 2022, les époux [A] [M] réitèrent en premier lieu la fin de non-recevoir fondée sur la prescription quinquennale édictée par l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965, faisant valoir que, l'action du syndicat étant fondée sur les conclusions du rapport d'expertise de M. [G] qui leur a été signifié le 15 juin 2020 en même temps que l'assignation, l'administrateur provisoire ne peut réclamer paiement des charges échues avant le 15 juin 2015.

Sur le fond, ils contestent la méthode utilisée par l'expert pour certifier les comptes, et en déduisent que la créance revendiquée par le syndicat ne revêt aucun caractère certain.

Ils soutiennent d'autre part que cette créance n'est pas exigible car l'approbation des comptes aurait été prononcée par l'administrateur provisoire sans recueillir l'avis préalable et régulier du conseil syndical.

Ils considèrent au contraire qu'ils ont trop versé la somme de 3.231,88 €.

Ils forment en conséquence appel incident, et demandent à la cour de débouter Maître [S] de l'intégralité de ses prétentions et de le condamner ès-qualités à leur payer :

- 3.231,88 € en restitution d'un trop perçu sur les charges,

- 2.000 € à titre de dommages-intérêts en réparation de la dépréciation de leurs lots du fait de la mauvaise gestion de la copropriété,

- 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 2 avril 2024, et l'affaire fixée à plaider à l'audience du 16 avril 2024.

Le 5 avril 2024, les intimés ont notifié des conclusions aux fins de révocation de l'ordonnance de clôture en raison de la constitution d'un nouveau conseil, et l'appelant s'y est opposé par conclusions notifiées le 12 avril.

DISCUSSION

Sur la demande de révocation de l'ordonnance de clôture :

En vertu de l'article 803 du code de procédure civile, l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue, la constitution d'avocat postérieurement à la clôture ne constituant pas en soi une cause de révocation.

En l'espèce, les dernières conclusions de l'appelant ont été notifiées le 7 septembre 2022, et l'avis de fixation a été adressé aux parties le 6 décembre 2023, de sorte que les intimés ont disposé du temps nécessaire pour se mettre en état avant le prononcé de la clôture. Aucune cause grave ne s'étant révélée postérieurement, la demande de révocation doit être rejetée.

Sur la fin de non-recevoir fondée sur la prescription :

Suivant l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965, les dispositions de l'article 2224 du code civil relatives au délai de prescription et à son point de départ sont applicables aux actions personnelles entre un copropriétaire et le syndicat.

C'est par de justes motifs, adoptés par la cour, que le premier juge a considéré en l'espèce que le point de départ du délai de prescription de l'action en paiement se situait au 3 mai 2019, date de l'approbation des comptes par l'administrateur provisoire, laquelle avait eu pour effet de rendre certaine, liquide et exigible la totalité de la créance du syndicat.

Sur le moyen tiré de l'absence de consultation du conseil syndical :

Selon l'article 62-7 du décret du 17 mars 1967, lorsque l'administrateur provisoire est investi par le président du tribunal judiciaire de tout ou partie des pouvoirs de l'assemblée générale, il doit avant de prendre à ce titre les décisions qui lui paraissent nécessaires à l'accomplissement de sa mission, sauf urgence, recueillir l'avis du conseil syndical.

En l'espèce, toutes les résolutions écrites adoptées par Maître [S] portant approbation des comptes des exercices écoulés et des budgets prévisionnels des exercices à venir indiquent expressément qu'elles ont été prises après avoir recueilli l'avis des membres du conseil syndical, cette mention faisant foi jusqu'à la preuve contraire qui n'est pas rapportée par les intimés, pas plus que celle de l'irrégularité de la composition dudit conseil.

Sur le montant de la créance du syndicat :

Pour réduire la créance du syndicat, le premier juge a considéré qu'aucun élément du rapport d'expertise ne permettait de confirmer que le compte individuel des époux [A] [M] présentait un solde débiteur de 4.290,43 € à la date de la reprise de la comptabilité de l'ancien syndic le 5 mai 2017, et a retenu le solde débiteur de 2.997,76 € qui existait au 30 septembre précédent.

Il est produit en cause d'appel une note rédigée le 31 janvier 2022 par l'expert M. [G], dans laquelle celui-ci fait justement observer que le raisonnement du premier juge aboutit à occulter tous les mouvements comptables enregistrés entre les deux dates susdites. En outre, l'expert confirme que le compte présentait bien un solde débiteur de 4.290,43 € au 5 mai 2017 en détaillant les mouvements enregistrés au débit depuis le 30 septembre 2016.

D'autre part, il apparaît que les critiques formulées par les époux [A] [M] à l'encontre du rapport d'expertise reprennent pour l'essentiel les anomalies de la comptabilité de l'ancien syndic relevées par l'expert lui-même, et auxquelles celui-ci a apporté les corrections qui lui ont permis de certifier les comptes au 30 juin 2020, ainsi qu'il l'explique dans sa seconde note rédigée le 5 août 2022.

L'expert précise en outre qu'il a pointé et vérifié de manière exhaustive les comptes de chaque propriétaire, tandis que les époux [A] [M] ne rapportent pas la preuve d'autres paiements que ceux qui ont été enregistrés.

Enfin, les frais de recouvrement exposés par le syndicat, s'élèvant à 707,67 € sur la période comprise entre le 1er avril 2006 et le 13 mars 2017, doivent être mis à la charge des copropriétaires défaillants en application de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965.

Il convient en conséquence de faire droit à l'action en paiement du syndicat à hauteur de la somme de 1.336,35 € sur la foi du dernier relevé de compte actualisé au 11 avril 2022.

Par voie de conséquence, la demande reconventionnelle des époux [A] [M] tendant à la restitution d'un trop perçu doit être rejetée.

Sur les demandes en dommages-intérêts :

Si le préjudice subi par la collectivité des copropriétaires apparaît essentiellement imputable à la mauvaise gestion des précédents syndics, il reste que le refus des époux [A] [M] de s'acquitter de leur dette depuis la régularisation des comptes intervenue à l'initiative de l'administrateur provisoire doit être considéré comme fautif et a contribué à retarder l'assainissement de la situation financière de la copropriété. Il convient en conséquence de les condamner à payer la somme de 500 € à titre de dommages-intérêts.

En revanche, les intimés ne rapportent aucun élément de preuve relatif à la dépréciation de leur bien, et ne démontre pas davantage l'existence d'une faute imputable au syndicat ayant un lien de causalité avec le préjudice invoqué, de sorte que leur réclamation doit être rejetée.

Sur les frais du procès :

Les époux [A] [M], qui succombent à l'issue de l'instance, doivent être condamnés aux entiers dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'au paiement d'une somme de 2.000 € au titre de l'ensemble des frais irrépétibles exposés par le syndicat.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Rejette la demande de révocation de l'ordonnance de clôture,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir fondée sur la prescription, et débouté les époux [A] [M] de leurs demandes reconventionnelles,

L'infirme pour le surplus, et statuant à nouveau :

Condamne solidairement les époux [A] [M] à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 1.336,35 euros au titre du solde débiteur de leur compte de répartition de charges arrêté au 11 avril 2022,

Les condamne in solidum à payer la somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive,

Condamne les intimés aux entiers dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'à verser à l'appelant une somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-8
Numéro d'arrêt : 22/02103
Date de la décision : 12/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-12;22.02103 ?
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