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10/06/2024 | FRANCE | N°24/00801

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Rétention administrative, 10 juin 2024, 24/00801


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE



CHAMBRE 1-11, Rétention Administrative





ORDONNANCE

DU 10 JUIN 2024



N° 2024/801



N° RG 24/00801 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BNE3F













Copie conforme

délivrée le 10 Juin 2024 par courriel à :

-l'avocat

-le préfet

-le CRA

-le JLD/TJ

-le retenu

-le MP



















Décision déférée à la Cour :



Ordonnance rend

ue par le Juge des libertés et de la détention de [Localité 5] en date du 9 juin 2024 à 12h10.







APPELANT



Monsieur [D] ou [D] [J]

né le 2 juillet 1998 à [Localité 6] (99)

de nationalité algérienne, actuellement au CRA de [Localité 5] -

comparant en personne, assis...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

CHAMBRE 1-11, Rétention Administrative

ORDONNANCE

DU 10 JUIN 2024

N° 2024/801

N° RG 24/00801 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BNE3F

Copie conforme

délivrée le 10 Juin 2024 par courriel à :

-l'avocat

-le préfet

-le CRA

-le JLD/TJ

-le retenu

-le MP

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de [Localité 5] en date du 9 juin 2024 à 12h10.

APPELANT

Monsieur [D] ou [D] [J]

né le 2 juillet 1998 à [Localité 6] (99)

de nationalité algérienne, actuellement au CRA de [Localité 5] -

comparant en personne, assisté de Me Maëva LAURENS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, avocat choisi

INTIMÉ

Monsieur le Préfet des Alpes-Maritimes

Avisé et non représentée

MINISTÈRE PUBLIC

Avisé et non représenté

******

DÉBATS

L'affaire a été débattue en audience publique le 10 juin 2024 devant M. Laurent SEBAG, Conseiller à la cour d'appel délégué par le premier président par ordonnance, assisté de Mme Carla D'AGOSTINO, Greffier,

ORDONNANCE

Réputée contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 10 juin 2024 à 15h15,

Signée par M. Laurent SEBAG, Conseiller et Mme Carla D'AGOSTINO, Greffier,

PROCÉDURE ET MOYENS

Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;

Vu l'arrêté portant obligation de quitter le territoire national pris le 8 novembre 2023 par le préfet des Alpes-Maritimes, notifié le même jour à 13H30 ;

Vu la décision de placement en rétention prise le 22 avril 2024 par le préfet des Alpes-Maritimes, notifiée le même jour à 19H05;

Vu l'ordonnance du 9 juin 2024 rendue par le Juge des libertés et de la détention de [Localité 5] décidant le maintien de Monsieur [D] ou [D] [J] dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ;

Vu l'appel interjeté le 9 juin 2024 à 12H23 par Monsieur [D] ou [D] [J] ;

Monsieur [D] ou [D] [J] a comparu et a été entendu en ses explications. Il déclare 'Je m'appelle [J] [D]. J'ai trop mal monsieur. Je n'ai pas de suivi au CRA. Les infirmières oublient parfois de me donner les médicaments'.

Son avocat a été régulièrement entendu. Il conclut à l'infirmation de l'ordonnance attaquée en ce que la rétention porte atteinte à l'accès aux soins de son client et constitue ainsi, un comportement contraire aux dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme. A titre subsidiaire, son conseil demande à la cour d'inviter l'administration à faire voir son client par un kinésithérapeute.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La recevabilité de l'appel contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention n'est pas contestée et les éléments du dossier ne font pas apparaître d'irrégularité.

Il est donc recevable.

Sur le moyen tiré du défaut d'accès aux soins

En application de l'article 3 de la CESDH, nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. Cet article impose à l'Etat de protéger l'intégrité physique des personnes privées de libert, notamment par l'administration des soins médicaux requis. les soins dispensés en milieu carcéral doivent être appropriés, c'est-àdire d un niveau comparable à celui que les autorités de l'Etat se sont engagées à fournir à l'ensemble de la population.

En application de l'article L. 744-4 du Ceseda, l'étranger placé en rétention est informé dans les meilleurs délais qu'il bénéficie, dans le lieu de rétention, du droit de demander l'assistance d'un interprète, d'un conseil et d'un médecin, et qu'il peut communiquer avec son consulat et toute personne de son choix. Ces informations lui sont communiquées dans une langue qu'il comprend.

Il est constant que l'office du juge judiciaire s'étend au contrôle de l'effectivité de l'exercice des droits qui sont reconnus à l'étranger.

L'article R 744-14 du CESEDA dispose que dans les conditions prévues aux articles R. 744-6 et R. 744-11, des locaux et des moyens matériels adaptés permettent au personnel de santé de donner des consultations et de dispenser des soins dans les centres et locaux de rétention.

Les conditions dans lesquelles les établissements de santé interviennent au bénéfice des personnes retenues, en application de l'article L. 6111-1-2 du code de la santé publique, sont précisées par voie de convention passée entre le préfet territorialement compétent et un de ces établissements selon des modalités définies par arrêté conjoint du ministre chargé de l'immigration, du ministre chargé des affaires sociales et du ministre chargé de la santé. Pour les centres de rétention administrative, cet arrêté précise notamment les conditions de présence et de qualification des personnels de santé ainsi que les dispositions sanitaires applicables en dehors de leurs heures de présence au centre.

En application de l'article R 744-18 CESEDA, pendant la durée de leur séjour en rétention, les étrangers sont hébergés et nourris à titre gratuit. Ils sont soignés gratuitement. S'ils en font la demande, ils sont examinés par un médecin de l'unité médicale du centre de rétention administrative, qui assure, le cas échéant, la prise en charge médicale durant la rétention administrative.

L'article 4 de l'arrêté du 17 décembre 2021 relatif à la prise en charge sanitaire des personnes retenues dans les centres de rétention administrative prévoit que chaque unité médicale du centre de rétention comprend des temps de : médecins, infirmiers, pharmaciens, psychologues, secrétaires médicaux. Elle peut comprendre également, en fonction de la capacité d'accueil du centre, de sa localisation, de la population accueillie, des problématiques médicales rencontrées, notamment des temps de : sages-femmes, chirurgiens-dentistes. L'accès à un psychiatre est assuré y compris en dehors des situations d'urgence.

La composition, la quotité de travail des différentes catégories de professionnels intervenant au sein de l'unité médicale du centre de rétention administrative et les périodes de présence et, le cas échéant, les périodes d'astreinte sont fixées par la convention mentionnée à l'article 14.

Il découle de l'application constante de ces dispositions que le droit effectif aux soins est assuré dès lors que l'étranger a au centre de rétention la disposition de vacations médicales quotidiennes, d'une permanence infirmière et d'une astreinte téléphonique le dimanche. Le juge doit donc y faire référence dans ses décisions.

Un accès aux soins est présumé s'il est établi que le centre de rétention dispose d'un service médical comprenant une permanence infirmière. S'il est avisé dès son arrivée au centre de la possibilité de demander à rencontrer un médecin, l'étranger concerné est réputé mis en mesure d'exercer ses droits. Il appartient à l'intéressé de prouver qu'il n'a pas été à même d'accéder au service médical ou à des soins appropriés.

Par l'ordonnance contestée, le premier juge indique que n'est pas démontrée une quelconque incompatibilité avec la rétention, pas même issue du dernier certificat médical du Dr [I], l'intéressé pouvant reprendre des soins kinésithérapiques après la mise en oeuvre du routing prévu le 16 juin prochain à 11h30.

En l'espèce, il est constant que le retenu produit ce nouveau certificat médical du 7 juin 2024 qualifiant désormais l'entorse de grave et plus de bénigne comme à son arrivée aux urgences pour la traiter le 1er juin dernier.

Ce même médecin précise que les soins de kinésithérapie ne sont pas accessibles pendant la période de rétention, ce qui est confirmé par le Dr [I] dans son courriel de réponse à Me LAURENS du 4 juin à 12h30.

Il résulte donc des éléments ci-dessus qu'aucune consultation avec un kinésithérapeute n'est organisée au centre de rétention ou à l'hôpital pour le retenu alors que le médecin urgentiste avait prescrit la nécessité d'un tel suivi dès le 1er juin dernier.

Il résulte des éléments précités que Monsieur [J] n'a pas eu accès aux soins kinésithérapiques, pourtant préconisés par le médecin urgentiste en premiers soins.

Il n'a pas fait l'objet d'une évaluation ultérieure de son état au sein du centre de rétention par la suite.

Mais il ne justifie cependant pas, comme l'a pertinemment relevé le premier juge aux termes de l'ensemble des pièces médicales produites, d'une incompatibilité de son état de santé avec la mesure de rétention.

A cet égard, si le problème d'accès aux soins est patent, le retenu appelant ne démontre pas le grief consécutif puisqu'aucune des pièces médicales produites ne s'avance sur les conséquences du non suivi kinésithérapique, que son conseil présume comme ayant des conséquences certaines sur sa non-mobilité future.

Au vu de ces éléments, il convient de confirmer l'ordonnance attaquée en l'absence de grief établi, mais également d'inviter l'administration, comme l'a demandé l'intéressé à titre subsidiaire, à organiser dans les meilleurs délais, et sous 48 heures au maximum, une prise en charge d'un contrôle kinésithérapique de l'étranger, ne serait-ce que pour s'assurer que l'éventuelle aggravation de son état n'est pas devenue incompatible avec sa rétention.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par décision réputée contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,

Confirmons l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de [Localité 5] en date du 9 juin 2024 ;

Y ajoutant,

Invitons l'administration à mettre en place dans les meilleurs délais, et au maximum dans un délai de 48 heures maximum, une prise en charge d'un contrôle kinésithérapique de l'étranger, ne serait-ce que pour s'assurer que l'éventuelle aggravation de son état n'est pas devenue incompatible avec sa rétention ;

Disons qu'à défaut il sera mis fin à la mesure de rétention.

Les parties sont avisées qu'elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d'Etat ou de la Cour de cassation.

Le greffier Le président

Reçu et pris connaissance le :

Monsieur [D] ou [D] [J]

né le 2 juillet 1998 à [Localité 6] (99)

de nationalité algérienne

Assisté d'un interprète

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11, Rétentions Administratives

Palais Verdun , bureau 443

Téléphone : [XXXXXXXX02] - [XXXXXXXX03] - [XXXXXXXX01]

Courriel : [Courriel 4]

Aix-en-Provence, le 10 juin 2024

À

- Monsieur le préfet des Alpes-Maritimes

- Monsieur le directeur du centre de rétention administrative de Marseille

- Monsieur le procureur général

- Monsieur le greffier du Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE

- Maître Maeva LAURENS

NOTIFICATION D'UNE ORDONNANCE

J'ai l'honneur de vous notifier l'ordonnance ci-jointe rendue le 10 juin 2024, suite à l'appel interjeté par :

Monsieur [D] ou [D] [J]

né le 2 juillet 1998 à [Localité 6] (99)

de nationalité algérienne

Je vous remercie de m'accuser réception du présent envoi.

Le greffier,

VOIE DE RECOURS

Nous prions Monsieur le directeur du centre de rétention administrative de bien vouloir indiquer au retenu qu'il peut se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Rétention administrative
Numéro d'arrêt : 24/00801
Date de la décision : 10/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-10;24.00801 ?
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