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07/06/2024 | FRANCE | N°23/13999

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-2, 07 juin 2024, 23/13999


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambres sociales

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 1]









Chambre 4-2

N° RG 23/13999 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BMEUO

Ordonnance n° 2024/M044





APPELANT



Monsieur [H] [I], demeurant [Adresse 5]



représenté par Me Thomas RAMON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE













INTIMEES



S.A.R.L. ROHRER FRANCE Prise en la personne de son représentant légal domic

ilié en cette qualité audit siège, demeurant [Adresse 4]



représentée par Me Emmanuelle DUGUÉ-CHAUVIN, avocat au barreau de ROUEN substitué par Me Laurent LACAZE de la SCP JF JOURDAN - PG WATTECAMPS ET ASSOCIÉS, avocat au...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambres sociales

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Chambre 4-2

N° RG 23/13999 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BMEUO

Ordonnance n° 2024/M044

APPELANT

Monsieur [H] [I], demeurant [Adresse 5]

représenté par Me Thomas RAMON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEES

S.A.R.L. ROHRER FRANCE Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Emmanuelle DUGUÉ-CHAUVIN, avocat au barreau de ROUEN substitué par Me Laurent LACAZE de la SCP JF JOURDAN - PG WATTECAMPS ET ASSOCIÉS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

SAS ARCELORMITTAL MEDITERRANNEE Représentée en la personne de ses représentants légaux domic

iliés ès qualité au siège social sis, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Sébastien BADIE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

ORDONNANCE D'INCIDENT

Nous, Marianne FEBVRE, présidente de chambre suppléante et en qualité de magistrat chargée de la mise en état de la Chambre 4-2 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, assistée de Cyrielle GOUNAUD, Greffier,

Vu les articles 138, 142, 907, 914 et 916 du code de procédure civile,

Vu la déclaration d'appel de M. [H] [I] contre le jugement rendu le 19 octobre 2023 par le conseil de prud'hommes de Martigues qui l'a débouté de sa demande de requalification de sa démission en une prise d'acte de la rupture aux torts de l'employeur, de ses demandes indemnitaires dirigées contre la société Rohrer France ainsi que de ses demandes en paiement de rappels de salaire pour heures supplémentaires et de dommages et intérêts pour violation de son droit au repos quotidien et de la durée légale de travail formée à l'encontre de la société Rohrer France et de la société Arcelormittal Méditerranée dont il demandait la condamnation solidaire,

Vu ses premières conclusions au fond en date du 16 janvier 2024,

Vu ses conclusions d'incident en date du 19 janvier 2024 par lesquelles l'appelant nous demande de :

- enjoindre à la société Arcelormittal Méditerranée, subsidiairement à la société Rohrer France, la communication, sous peine d'une astreinte définitive d'un montant de 500 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir, de l'ensemble des relevés de la badgeuse du site d'Arcelormittal situé à [Localité 6] correspondant à son temps de présence et ce depuis qu'il a commencé à travailler sur le site que ce soit en qualité de travailleur intérimaire ou en qualité d'ouvrier employé par la société Rorher France,

- condamner solidairement ces deux sociétés au paiement de la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,

Vu la convocation des parties le 22 janvier 2024 pour l'audience d'incidents de mise en état du 27 mars 2024,

Vu les conclusions sur incident transmises par voie électronique le 25 mars 2024 pour la société Arcelormittal Méditerranée qui nous demande de rejeter la demande dirigée à son encontre et de condamner M. [I] à lui payer une indemnité de 5.000 € au titre de ses frais irrépétibles ainsi qu'aux dépens,

Vu les conclusions sur incident notifiées le même jour pour la société Rohrer France, aux fins de rejet des demandes de son ancien salarié et de condamnation de ce dernier au paiement d'une indemnité de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

A l'issue de l'audience d'incidents, les parties ont été avisées que la décision était mise en délibéré pour être prononcée le 31 mai 2024 par mise à disposition au greffe. Elles ont été informées par le greffe du prorogé de ce délibéré au 7 juin 2024.

Pour un plus ample exposé du litige, il y a lieu de se référer à la procédure ainsi qu'aux écritures transmises et communiquées régulièrement et contradictoirement.

Sur quoi,

A moins qu'il n'ait été fait application de l'article 905 du code de procédure civile - ce qui n'est pas le cas en l'espèce -, l'affaire est instruite sous le contrôle d'un magistrat de la chambre à laquelle elle a été distribuée dans les conditions prévues aux articles aujourd'hui codifiés sous les numéros 780 à 807 du code de procédure civile (instruction devant le juge de la mise en état).

Il est admis que le conseiller de la mise en état a, en vertu de ses pouvoirs propres, l'obligation de veiller au déroulement loyal de la procédure ainsi qu'à la ponctualité de l'échange des conclusions et de la communication de pièces. Il peut notamment adresser des injonctions aux avocats et il exerce tous les pouvoirs nécessaires à la communication, à l'obtention et à la production des pièces.

Dans ce cadre, il peut enjoindre à une partie ou ordonner à un tiers de produire des pièces par application des articles 132 et 138 du code de procédure civile.

Il doit cependant à la fois se conformer à la fois à l'article 11 du code de procédure civile qui limite le pouvoir conféré au juge d'ordonner la production de pièces par l'existence d'un motif légitime tenant soit au respect de la vie privée - sauf si la mesure s'avère nécessaire à la protection des droits ou liberté d'autrui - soit au secret professionnel, et au droit de la preuve en droit du travail qui impose - lorsqu'il s'agit d'éléments portant atteinte à la vie personnelle d'un salarié - de vérifier que cette production est nécessaire à l'exercice de ce droit et que l'atteinte est proportionnée au but poursuivi.

En l'espèce, M. [I] qui en a été débouté par le bureau de conciliation et d'orientation du conseil des prud'hommes de Martigues par une décision du 6 décembre 2021 nous demande d'enjoindre à la société Arcelormittal Méditerranée - tiers à la relation de travail - de produire les relevés de la badgeuse du site qu'elle exploite à [Localité 6] depuis qu'il a commencé à travailler sur le site en qualité de travailleur intérimaire puis d'ouvrier employé par la société Rorher France.

Subsidiairement, il demande qu'il soit enjoint à cette dernière de produire les relevés de son propre dispositif de pointage.

Il expose que - comme en attestent plusieurs de ses collègues de travail - il a effectué des heures supplémentaires non payées lorsqu'il a travaillé sur le site d'Arcellormittal à [Localité 6], d'abord comme intérimaire puis en contrat à durée indéterminée, pour le compte de la société Rohrer France dont le système de pointage est défaillant.

Il se prévaut des décisions prises notamment par la Cour de justice de l'Union européenne relative à l'exercice du droit de la preuve et fait valoir que le contrôle des entrées et sorties des employés sur le site n'entre pas dans le champ d'application de la réglementation relative au traitement des données personnelles, si bien que la société Arcellormittal Méditerranée se devait de conserver les données relatives à la gestion des autorisations d'accès et à la localisation de la présence des salariés sur le site.

Il fait également valoir que la communication des relevés sollicitée est indispensable pour lui permettre de démontrer qu'il a effectué des heures supplémentaires qui n'ont jamais été réglées et que cette production d'éléments de preuve est également proportionnée au but poursuivi, soit la défense de son intérêt légitime à la reconnaissance des heures de travail effectuées.

Pour autant, outre le fait qu'il adresse ses demandes 'à la cour' dans la partie discussion de ses écritures (cf. page 10, par. 7 et page 11, dernier par.), le salarié demandeur à l'incident ne justifie pas que la société Arcelormittal Méditerranée a l'obligation de conserver - pour combien de temps et dans quel but ' - l'ensemble des enregistrements de tous les salariés accédant au site de [Localité 6].

La société Arcelormittal Méditerranée qui le conteste justifie que le badge d'accès de M. [I] sur son site, classé 'Sévéso' eut égard aux dangers qu'il représente pour la santé et la sécurité des personnes, a été verrouillé le 12 août 2021 en raison d'un délai supérieur à trois mois d'inactivité (le dernier passage de l'intéressé datant du 3 février 2021) et qu'eu égard à la réglementation relative au traitement des données personnelles nominatives, elle n'a pas la possibilité de conserver les relevés de ses systèmes plus de trois mois s'agissant de la gestion des autorisations d'accès au site, et de deux mois pour la localisation de la présence des salariés sur le site. Les données relatives au contrôle des entrées et sorties ne peuvent donc être conservées plus de trois mois et les données 'par département' qui concerne la localisation du personnel présent sur le site ne sont pas conservées plus de deux mois.

S'agissant du dispositif d'enregistrement de la société Rohrer France, la demande n'est pas cohérente avec les motifs invoqués par le salarié qui souligne au contraire que ce dispositif était défaillant.

Au demeurant, le salarié ne justifie pas que cette production est nécessaire à l'exercice de ce droit et que l'atteinte est proportionnée au but poursuivi, au regard des règles de preuve en matière d'heures supplémentaires résultant notamment des arrêts rendus le 24 janvier 2024 par la chambre sociale de la Cour de cassation (sur les pourvois portant les n° 21-23.325, 22-20.905, 22-16.033, 22-16.858, 22-19.533, 22-10.532, 22-17.917) et dont il découle que le juge du fond a l'interdiction formelle de faire peser la charge de la preuve des heures supplémentaires sur le salarié qu'il ne peut débouter de ses demandes lorsque l'employeur ne produit pour sa part aucun élément concernant le décompte de la durée de son travail.

M. [I] qui succombe supportera les dépens de l'incident. En revanche, l'équité et la situation économique des parties commandent de dire n'y avoir pas lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice des sociétés Rohrer France et Arcelormittal Méditerranée s'agissant dess frais irrépétibles qu'elles ont exposés et qui ne sont pas compris dans ces dépens.

PAR CES MOTIFS,

- Rejetons l'incident de communication de pièces présenté le 19 janvier 2024 par M.[H] [I] ;

- Disons n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamnons M. [H] [I] aux éventuels dépens de l'incident.

Fait à Aix-en-Provence, le 07 Juin 2024

Le greffier Le magistrat de la mise en état


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-2
Numéro d'arrêt : 23/13999
Date de la décision : 07/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-07;23.13999 ?
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