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06/06/2024 | FRANCE | N°23/08159

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-7, 06 juin 2024, 23/08159


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7



ARRÊT AU FOND

DU 06 JUIN 2024



N°2024/242













Rôle N° RG 23/08159 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLPMG



JONCTION AU RG 23/08228



S.C.I. JADE





C/



Syndicat des copropriétaires LE PHOENIX

















Copie exécutoire délivrée le :

à :





Me Gilles ALLIGIER





Me Maud DAVAL-GUEDJ

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Décision déférée à la Cour :



Ordonnance du Juge de la mise en état de GRASSE en date du 19 Mai 2023 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 22/00366.





APPELANTE



Intimée dans le RG 23/08228



S.C.I. JADE représentée par son gérant en exercice domicilié audit siège en cet...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7

ARRÊT AU FOND

DU 06 JUIN 2024

N°2024/242

Rôle N° RG 23/08159 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLPMG

JONCTION AU RG 23/08228

S.C.I. JADE

C/

Syndicat des copropriétaires LE PHOENIX

Copie exécutoire délivrée le :

à :

Me Gilles ALLIGIER

Me Maud DAVAL-GUEDJ

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du Juge de la mise en état de GRASSE en date du 19 Mai 2023 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 22/00366.

APPELANTE

Intimée dans le RG 23/08228

S.C.I. JADE représentée par son gérant en exercice domicilié audit siège en cette qualité, demeurant [Adresse 6]

représentée par Me Gilles ALLIGIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assistée de Me Jean-louis DAVID, avocat au barreau de GRASSE substitué par Me David CHABBAT, avocat au barreau de GRASSE, plaidant

INTIME

Appelant dans le RG 23/08228

Syndicat des copropriétaires LE PHOENIX représenté par son syndic en exercice le Cabinet GTS IMMOBILIER lui-même poursuites et diligences de son représentant légal en exercice y domicilié , demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Cécile COSTIERA-GIAMARCHI, avocat au barreau de NICE substituée par Me Clara DRISSET-SAMARDZIJA, avocat au barreau de NICE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Mars 2024 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre, et Madame Carole MENDOZA, Conseillère, chargées du rapport.

Madame Carole MENDOZA, Conseillère, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre

Madame Carole MENDOZA, Conseillère,

Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Juin 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Juin 2024.

Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

La SCI JADE est copropriétaire depuis le 05 mars 1999 des lots 34, 36, 37 et 41 au sein d'une copropriété LE PHOENIX, située [Adresse 3].

Les lots 34, 36 et 37, à destination de parkings, ont été agencés et transformés en locaux commerciaux.

Par jugement du 29 octobre 2021, le tribunal judiciaire de Grasse a annulé la résolution 7 de l'assemblée générale du 14 janvier 2020 selon laquelle elle acceptait la proposition de la SCI JADE au titre de l'officialisation du changement de destination des parkings en locaux commerciaux et acceptait que cette SCI acquiert les parties communes et s'acquitte des frais de géomètre pour un montant de 5000 euros.

Par acte du 20 janvier 2022, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 5] a fait assigner la SCI JADE aux fins essentiellement de la voir condamner, à ses frais exclusifs et sous astreinte, à remettre en état les lots 34, 36 et 37 dans leur état antérieur de parkings, à cesser toute affectation commerciale, à supprimer les raccordements aux colonnes d'eaux usées, parties communes, à remettre en état les parties communes annexées dans leur état d'origine, à savoir le hall d'entrée de l'immeuble côté avenue des Oliviers et à les lui restituer, à procéder au retrait des plaques professionnelles apposées à l'entrée de l'immeuble et à remettre en état la façade extérieure.

La SCI JADE a soulevé la prescription des demandes du syndicat des copropriétaires.

Par ordonnance contradictoire du 19 mai 2023, le juge de la mise en état de Grasse a :

- jugé irrecevable comme prescrite l'action du syndicat des copropriétaires LE PHOENIX tendant à la condamnation de la société JADE à remettre en état les lots 34 36 et 37 dans leur état antérieur à usage de parkings,

- jugé irrecevable comme prescrite l'action du syndicat des copropriétaires LE PHOENIX tendant

à la condamnation de la société JADE à supprimer les raccordements aux colonnes d'eaux usées, parties communes,

- jugé irrecevable comme prescrite l'action du syndicat des copropriétaires LE PHOENIX tendant à la condamnation de la société JADE à supprimer les plaques professionnelles apposées en façade de l'immeuble,

- rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription opposée par la société JADE à la demande de remise en état et de restitution du hall de l'immeuble.

- écarté des débats la pièce12-4 de la société JADE.

- jugé qu'il était incompétent pour trancher la question de l'application d'une prescription acquisitive, ce moyen relevant de l'appréciation du tribunal statuant au fond.

- condamné le syndicat des copropriétaires LE PHOENlX à payer à la société JADE la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles.

- jugé que les dépens de l'incident suivront ceux de l'instance au fond.

- renvoyé le dossier à la mise en état du 16 novembre 2023 à 14 heures.

Le premier juge, s'appuyant notamment sur le procès-verbal d'assemblée générale des copropriétaires du 22 octobre 1981, a relevé que la copropriété était informée de l'utilisation en bureaux des parking du rez-de-chaussée. Il a estimé que la SCI n'était pas fondée à revendiquer détenir un droit acquis sur la destination de ses lots, puisque la résolution votée en octobre 1981 ne portait que sur une contribution complémentaire de ces lots aux charges, en raison de la modification de leur utilisation. Il a souligné que l'assemblée générale n'avait pas donné l'autorisation au propriétaire des lots de modifier leur destination.

Il a jugé que l'action du syndicat des copropriétaires avait pour objet de mettre un terme à toute affectation commerciale des lots et qu'il s'agissait ainsi d'une action tendant à faire respecter le règlement de copropriété. Il a noté que le syndicat des copropriétaires ne démontrait pas qu'un mur, constituant une partie commune, aurait été supprimé ou modifié. Il a estimé que la demande de remise en état des lots de parkings était distincte de celle en restitution du hall d'immeuble. Il a conclu à la prescription de la demande, avec un point de départ de la prescription fixé au 22 octobre 1981.

Il a fait observer que l'action en suppression de raccordements sur les colonnes communes d'eaux usées, action en suppression de travaux non autorisés, affectant les parties communes, est une action personnelle, qui est prescrite, le point de départ étant fixé au 20 janvier 1992, date des travaux sur les lots pour qu'ils deviennent des locaux commerciaux et à laquelle la copropriété a connu ou aurait dû connaître ces faits lui permettant d'agir.

Il a jugé prescrite la demande de suppression des plaques professionnelles apposées en façades en indiquant que cette action, qui tend à la suppression d'ouvrages dénués d'autorisation régulière, affectant l'aspect de l'immeuble, se prescrit par cinq ans, le point de départ de la prescription devant être fixée au 20 novembre 2009, date du début d'activité de l'exploitant du local litigieux.

Il a enfin indiqué que la demande du syndicat des copropriétaires de restitution du hall de l'immeuble, transformé et servant d'entrée et de salle de soins d'un salon de coiffure s'analysait en une action réelle soumise à un délai trentenaire, avec un point de départ de prescription du 20 janvier 1992, date d'achèvement des travaux, correspondant à la date à laquelle la copropriété a connu ou aurait dû connaître l'appropriation de la partie commune. Il a estimé que les attestations produites par la SCI JADE selon laquelle le hall d'entrée était utilisé à titre privatif avant cette date n'étaient pas suffisamment précises. Il a écarté des débats une attestation ne répondant pas aux exigences de l'article 202 du code de procédure civile. Il en a conclu que cette demande n'était pas prescrite.

Il a relevé n'être pas compétent pour statuer sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription acquisitive soulevée par la SCI JADE, au motif qu'il s'agissait d'un moyen tenant au fond du droit.

Par déclaration du 20 juin 2023, la SCI JADE a relevé appel de cette décision en ce qu'elle rejette la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande du syndicat des copropriétaires au titre de la remise en état et de la restitution du hall, en ce qu'elle écarte des débats la pièce 12-4 et en ce que le juge de la mise en état s'est estimé incompétent pour trancher la question de l'application d'une prescription acquisitive.

Par déclaration du 21 juin 2023, le syndicat des copropriétaires a relevé appel de cette décision en ce qu'elle l'a condamné à verser la somme de 1000 euros au titre des frais irrépétibles et en ce qu'elle a estimé irrecevables pour être prescrites ses demandes de condamnation de la SCI JADE :

- à remettre en état les lots 34, 36 et 37 à usage de parkings,

- à supprimer les raccordements aux colonnes d'eaux usées,

- à supprimer les plaques professionnelles en façade de l'immeuble.

Les affaires ont été enrôlées sous le numéro RG 23.08159 et RG 23.08228.

Les parties ont conclu à la même date et de la même manière dans les deux dossiers.

Par conclusions notifiées sur RPVA le 14 mars 2024 auxquelles il convient de se référer, la SCI JADE demande à la cour :

- d'écarter des débats le constat de commissaire de justice dressé par Maître [J] du 28 février 2024 produit par le Syndicat des copropriétaires de la [Adresse 5] en sa pièce

n° 11.

- de confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a :

* jugé irrecevable comme prescrite l'action du syndicat des copropriétaires le PHENIX tendant à la condamnation de la société JADE à remettre en état les lots 34, 36 et 37 dans leur état antérieur à usage de parkings ;

* jugé irrecevable comme prescrite l'action du syndicat des copropriétaires le PHENIX tendant à la condamnation de la société JADE à supprimer les raccordements aux colonnes d'eaux usées, parties communes ;

*jugé irrecevable comme prescrite l'action du syndicat des copropriétaires LE PHENIX tendant à la condamnation de la société JADE à supprimer les plaques professionnelles apposées en façade de l'immeuble

*condamné le syndicat des copropriétaires LE PHENIX à payer à la SCI JADE la somme de 1.000€ au titre des frais irrépétibles, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

- d'infirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a :

* rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription opposées par la société JADE à la demande de remise en état et de restitution du hall de l'immeuble ;

* écarté des débats la pièce 12-4 de la société JADE ;

Et statuant à nouveau,

Sur la demande de remise dans leur état d'origine les lots privatifs

- de juger que l'action personnelle du Syndicat des copropriétaires de la [Adresse 5],

représenté par son Syndic en exercice est prescrite.

- de juger irrecevable le Syndicat des copropriétaires en son action à son encontre

Sur la demande de restitution des parties dites communes

I A titre principal

- de juger que, dans l'hypothèse où l'empiétement allégué par le Syndicat des copropriétaires de la [Adresse 5], représenté par son Syndic en exercice existerait, celui-ci serait la conséquence de travaux autorisés par l'assemblée générale et que l'action tendant à la suppression de ce prétendu empiétement est donc de nature personnelle soumise à un délai de prescription quinquennale.

En conséquence,

- de juger que l'action personnelle du syndicat des copropriétaires de la [Adresse 5],

représenté par son Syndic en exercice, est prescrite.

-de juger irrecevable le Syndicat des copropriétaires LE PHENIX, représenté par son Syndic en

exercice en son action à son encontre

Dans l'hypothèse où la Cour infirmerait l'Ordonnance déférée en ce qu'elle considérerait que le moyen tiré de la prescription acquisitive ou usucapion, relèverait de sa compétence,

- de juger qu'elle bénéficie de la prescription acquisitive sur les lots objet de l'assignation,

En conséquence,

- de juger que le syndicat des copropriétaires LE PHENIX n'a ni intérêt ni qualité à agir et, à tout le moins, est infondé pour formuler des demandes sur des biens qui ne lui appartiennent plus.

II. A titre subsidiaire,

- de juger que l'action réelle du syndicat des copropriétaires de la [Adresse 5], représenté par son Syndic en exercice, est prescrite.

- de juger irrecevable le Syndicat des copropriétaires LE PHENIX, représenté par son Syndic en

exercice en son action à l'encontre de la SCI JADE.

En toute hypothèse,

- de condamner le Syndicat des copropriétaires de la [Adresse 5], représenté par son

Syndic en exercice, à lui payer à la SCI JADE la somme de 7.500 € au titre des frais irrépétibles, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

- de débouter le Syndicat des copropriétaires de la [Adresse 5], représenté par son

Syndic en exercice de toutes demandes, fins et prétentions contraires aux présentes.

Elle indique qu'il faudra écarter la pièce 11 de son adversaire puisque le président du tribunal judiciaire de Grasse, par décision du 13 mars 2024, a rétracté l'ordonnance sur requête autorisant la désignation d'un expert et dit nulles les constatations faites par le commissaire de justice.

Elle expose que l'action du syndicat des copropriétaires, qui tend à obtenir le respect du règlement de copropriété s'agissant de l'usage des lots privatifs de la SCI JADE, est une action personnelle soumise à un délai de prescription quinquennale.

Elle fait valoir que les copropriétaires ont eu connaissance du changement de destination des lots de parking en bureaux commerciaux dès le 22 octobre 1981 et l'ont accepté dans le cadre du vote d'une résolution d'une assemblée générale du 22 octobre 1981, en contrepartie du paiement d'une somme forfaitaire de charges supplémentaire de 1.000 F, somme payée au syndicat depuis l'année 1981. Elle conteste le fait qu'il s'agirait d'une action réelle au motif que cette demande serait incluse dans la demande tendant à la restitution d'une partie commune qu'elle aurait prétendument annexée. Elle en conclut que l'action du syndicat, prescrite, est irrecevable.

Elle soutient avoir acheté les lots en l'état et n'avoir effectué aucun empiétement sur les parties communes. Elle déclare que le changement de destination des lots 34, 36 et 37 à usage de parking en locaux commerciaux, et les travaux subséquents, ont été autorisés par l'assemblée générale des copropriétaires en date du 22 octobre 1981. Elle fait observer que s'il existe un empiétement sur les parties communes, celui-ci est la conséquence de travaux autorisés par cette assemblée générale. Elle en déduit que l'action tendant à la suppression de l'empiétement allégué est de nature personnelle et soumise à une délai de prescription quinquennale. Elle conclut que cette action, prescrite, est irrecevable.

Elle estime bénéficier d'une prescription acquisitive sur les lots, objet de l'assignation, si la cour devait considérer que ce moyen relève de sa compétence. Elle en conclut que le syndicat des copropriétaires n'a ni intérêt, ni qualité à agir et qu'il est en tout état de cause infondé à former des demandes sur des biens qui ne lui appartiennent plus.

Subsidiairement, elle soulève la prescription de l'action du syndicat des copropriétaires, même si celle-ci s'analysait en une action réelle. Elle fait état de l'accord de l'assemblée générale du 22 octobre 1981 pour voir changer la destination des lots à usage de parking en locaux commerciaux et autoriser les travaux subséquents. Elle précise justifier de témoignage permettant de constater qu'une société COMETE exerçait son activité au sein des locaux aménagés au rez-de-chaussée de l'immeuble dans les années 1980 et fait état d'un procès-verbal d'assemblée générale du 20 février 1989 qui démontre la réunion des associés de cette société dans ces mêmes locaux. Elle affirme que le syndicat des copropriétaires a eu connaissance, dès les années 1980 et, a minima, dès le 20 février 1989, de l'édification de locaux commerciaux au rez-de chaussée en lieu et place des parkings. Elle ajoute démontrer que les lots ont été conçus à usage de commerces dès la construction de l'immeuble, puisqu'il existait un conduit d'extraction d'air destiné à l'usage de cuisines.

Par conclusions notifiées par RPVA le 08 mars 2024 auxquelles il convient de se reporter, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le Phenix demande à la cour :

- d'infirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a :

*jugé irrecevable comme prescrite l'action du syndicat des copropriétaires LE PHENIX tendant à la condamnation de la société JADE à remettre en état les lots 34, 36 et 37 dans leur état antérieur à usage de parkings.

*jugé irrecevable comme prescrite l'action du syndicat des copropriétaires LE PHENIX tendant à la condamnation de la société JADE à supprimer les raccordements aux colonnes d'eaux usées, parties communes.

*jugé irrecevable comme prescrite l'action du syndicat des copropriétaires LE PHENIX tendant à la condamnation de la société JADE à supprimer les plaques professionnelles apposées en façade de l'immeuble.

*condamné le syndicat des copropriétaires LE PHENIX à payer à la société JADE la somme de 1.000 € au titre des frais irrépétibles.

- de confirmer l'ordonnance déférée en ce le juge de la mise en état :

* a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription opposée par la Société JADE à la demande de remise en état et de restitution du hall de l'immeuble

*a écarté des débats la pièce n°12-4 à savoir l'attestation de M.et Mme [E]

*s'est déclaré incompétent pour trancher la question de l'application d'une prescription acquisitive, ce moyen relevant de l'appréciation du Juge du fond,

Statuant à nouveau,

- de débouter la SCI JADE de l'intégralité de ses demandes,

- de juger que l'action du Syndicat des copropriétaires LE PHENIX est une action réelle soumise à la prescription trentenaire et qu'elle n'est donc pas prescrite en ce qu'il est sollicité la remise en état des lieux dans leur origine emportant restitution des parties communes, à savoir :

- la remise en état des lots 34, 36 et 37 et remise en état du mur, partie commune, séparant le lot n°34 et le lot n°33 et remise en état du mur, partie commune, séparant les caves des lots n°34 et 36 avec l'emplacement de parking R8 du lot n°34 ;

- la suppression des raccordements sauvages sur les colonnes d'eaux usées, partie commune ;

- le retrait des plaques professionnelles apposées par les locataires de la SCI JADE sur la façade de l'immeuble [Adresse 5] et remise en état de la façade extérieure de l'immeuble côté Avenue des Oliviers.

A titre principal

- de juger que le point de départ de la prescription trentenaire ne peut être antérieur au 20 novembre 2009 pour les actions réelles tendant à solliciter la remise en état des lots 34, 36 et 37 et remise en état du mur séparant les lots 33 et 34, la suppression des raccordements sur les colonnes d'eaux usées et la suppression des plaques professionnelles apposées en façades par les locataires de la SCI JADE.

A titre subsidiaire

- de juger que le point de départ de la prescription trentenaire ne peut être antérieur au 5 mars 1999 pour les actions réelles tendant à solliciter la remise en état des lots 34, 36 et 37 et remise en état du mur séparant les lots 33 et 34, la suppression des raccordements sur les colonnes d'eaux usées et la suppression des plaques professionnelles apposées en façades par les locataires de la SCI JADE.

A titre infiniment subsidiaire

- de juger que le point de départ de la prescription trentenaire ne peut être antérieur au 20 janvier 1992 pour les actions réelles tendant à solliciter la remise en état des lots 34, 36 et 37 et remise en état du mur séparant les lots 33 et 34, la suppression des raccordements sur les colonnes d'eaux usées et la suppression des plaques professionnelles apposées en façades par les locataires de la SCI JADE.

En tout état de cause

- de débouter la SCI JADE de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- de juger que l'action réelle du Syndicat des copropriétaires LE PHENIX, soumise à la prescription trentenaire, n'est pas prescrite , l'assignation ayant été délivrée le 20 janvier 2022.

- de condamner la SCI JADE à verser, en cause d'appel, au Syndicat des copropriétaires LE PHENIX la somme de 4.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

- de condamner la SCI JADE aux entiers dépens de première instance et d'appel, ceux d'appel étant distraits au profit de la SCP COHEN-GUEDJ, sur sa due affirmation de droit.

Il conteste toute prescription de ses demandes tendant :

- à la remise en état par la SCI JADE des lots 34, 36 et 37 dans leur état antérieur à usage de parkings,

- à la suppression, par la SCI JADE, des raccordements aux colonnes d'eaux usées, parties communes

- à la suppression, par la SCI JADE, des plaques professionnelles apposées en façade de l'immeuble.

Il indique que la SCI JADE s'est appropriée des parties communes dont elle revendique l'acquisition par la prescription acquisitive. Il déclare que l'annexion de ces parties communes a été faite par la suppression de murs ou la création d'ouverture.

Il soutient que l'ensemble de ses demandes s'analyse en une action réelle qui obéit à une prescription trentenaire.

Il déclare que les lots 36 et 37 ainsi qu'une partie du lot 34 ont été réunis en un seul lot et que ces derniers sont occupés par un salon de coiffure et un institut de beauté. Il fait état de la suppression d'un mur, partie commune.

Il fait observer que le salon de coiffure a annexé des parties communes, à savoir le hall de l'entrée de l'immeuble situé du côté de l'avenue des Oliviers, qui lui servent, pour partie, de salle de soins, et pour partie, de hall d'entrée avec un porche d'entrée. Il indique que son action en restitution des parties communes est une action réelle, dont le point de départ de prescription est le 20 janvier 1992, date d'achèvement des travaux, qui n'est pas prescrite.

Il explique par ailleurs que la SCI JADE a subdivisé son lot 34 et aménagé une cuisine pour un restaurant jouxtant celui-ci et formant le lot 33, qui n'appartient pas à la SCI. Il en déduit qu'elle a donc nécessairement supprimé un mur ou créé une ouverture sur le mur, partie commune, séparant une partie du lot 34 du lot 33. Il conteste la motivation du premier juge qui a indiqué qu'il existait dès l'origine de l'immeuble des ouvertures permettant de communiquer entre les lots 33 et 34. Il estime que le changement d'affectation des lots en locaux commerciaux emporte appropriation des parties communes, et ce, postérieurement à l'acquisition des lots par la SCI JADE.

Il indique que cette SCI s'est raccordée sans autorisation sur les colonnes d'alimentation et d'évacuation des eaux usées, parties communes, pour l'exploitation du restaurant (lot n° 34) et du salon de coiffure (lots 36, 37 et pour partie 34).

Il soutient que ses demandes de remise en état de lots dans leur état antérieur de parking, de suppression des raccordements aux colonnes d'eaux usées et de suppression des plaques professionnelles sont englobées dans son action réelle de restitution des parties communes et que sa demande de remise en état suppose également la remise en état du mur séparant le lot 33 et le lot 34. Il déclare que les raccordements aux colonnes d'eaux usées emportent appropriation des parties communes, action soumise à la prescription trentenaire. Il conteste le fait que les raccordements existeraient depuis la création de l'immeuble.

Il relève que la SCI JADE a modifié l'aspect extérieur de l'immeuble, côté avenue des Oliviers, en apposant des plaques professionnelles, sans autorisation.

Il argue de la contradiction de la motivation du premier juge qui estime prescrite l'action en retrait des plaques professionnelles mentionnant le nom de l'enseigne du salon de coiffure sur la façade de l'immeuble mais non prescrite l'action en remise en état et restitution du hall d'entrée de l'immeuble, alors même que les demandes sont liées.

Il relate que les copropriétaires n'ont jamais donné leur accord pour un changement d'affectation des lots 34, 36 et 37 lors de l'assemblée générale du 22 octobre 1981.

Il affirme que les parties communes n'avaient pas été annexées en 1981 et en veut pour preuve un acte modificatif de division de 1983, duquel il ressort que la quote-part des parties communes afférentes aux lots 34, 36 et 37 n'a pas été modifiée.

Il soutient que lorsque la SCI JADE a acquis ses lots en 1999, les parties communes n'avaient toujours pas été annexées. Il déclare qu'aucune pièce produite par la SCI JADE ne permet de déterminer la date réelle du changement d'affectation des lots en locaux commerciaux ni la date réelle d'appropriation des parties communes. Il expose que les attestations produites sont de complaisance, incohérentes, approximatives et mensongères. Il note démontrer que le point de départ de la prescription trentenaire doit être fixé au 20 novembre 2009, date du début de l'exploitation du salon de coiffure, étant précisé qu'il n'a découvert que récemment l'existence de raccordement sauvages sur les canalisations d'eaux usées. Il évoque des raccordements effectués tant par la société qui exploite le salon de coiffure et l'institut de beauté que par la cuisine qui occupe une partie du lot 34. Il relève que la cuisine évoquée dans l'acte de vente de la SCI JADE n'est pas celle qui existe actuellement.

Subsidiairement, il déclare que le point de départ du délai de prescription doit être fixé au 05 mars 1999, date d'acquisition du bien par la SCI JADE. Il relève que l'acte de vente de cette dernière reprend la même désignation des lots 34, 36 et 37 que l'acte modificatif à l'état descriptif de division des 20 et 21 décembre 1982 et 23 mars 1983. Il ajoute que cet acte ne mentionne pas la réunion d'une partie du lot 34 avec le lot 33 par l'ouverture d'un mur et de l'annexion du hall d'entrée de l'immeuble, partie commune, séparant le lot 35 appartenant à Mme [P] aux lots 34, 36 et 37.

Très subsidiairement, il sollicite la fixation du point de départ du délai de prescription à la date d'achèvement des travaux, soit le 20 janvier 1992.

L'ordonnance de clôture a été prononcée dans les deux affaires le 20 mars 2024.

MOTIVATION

Les parties ont relevé appel de la même décision. Il convient en conséquence d'ordonner la jonction des procédures.

Il convient d'écarter des débats la pièce 11 du syndicat des copropriétaires, en raison de l'ordonnance de rétractation du 13 mars 2024.

****

A titre liminaire, les demandes des parties tendant à voir la cour "juger" ne constituant pas des prétentions au sens des articles 4, 5, 31 et 954 du Code de procédure civile mais des moyens ou arguments au soutien des véritables prétentions, il n'y a pas lieu de statuer sur celles-ci.

Enfin, selon l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif. La SCI JADE avait, dans sa déclaration d'appel, formé un recours contre le chef de la décision qui estime que le juge de la mise en état est incompétent pour traiter de la question de la prescription acquisitive. Elle ne sollicite pas l'infirmation de ce chef de décision dans le dispositif de ses dernières conclusions, se contentant d'indiquer, au titre des demandes d'infirmation 'le rejet de la fin de non-recevoir tirée de la prescription opposée par la société JADE à la demande de remise en état et de restitution du hall de l'immeuble' et 'le fait d'avoir écarté des débats la pièce 12-4 de la société JADE'. Elle ajoute, dans le dispositif de ses conclusions: 'dans l'hypothèse où la cour infirmerait l'ordonnance (...)en ce qu'elle considère que le moyen tiré de la prescription acquisitive ou usucapion relèverait de sa compétence, juger que la SCI JADE bénéficie de la prescription acquisitive', ce qui ne vaut pas une demande d'infirmation.

Le syndicat des copropriétaires ne forme pas d'appel incident sur ce point.

Dès lors, il convient de confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a estimé que le juge de la mise en état était incompétent pour trancher la question de l'application de la prescription acquisitive soulevée par la SCI JADE.

****

Selon l'état descriptif de division du 07 février 1977, inséré dans le règlement de copropriété, les lots 34, 36 et 37 acquis par la SCI JADE sont désignés comme des emplacements de parking.

Le lot 34 est ainsi évoqué dans l'état descriptif de division :

- un emplacement de parking pour cinq véhicules automobiles, avec deux accès à ces parkings, et une cave attenante à l'un d'eux, situés au nord-est de l'immeuble, et portant les numéros R2, R3, R4, R5, R6, R7 et R8 au plan du rez-de-chaussée

Le lot 34 est constitué désormais en partie d'un salon de coiffure et d'un salon d'essayage et de la cuisine d'un restaurant (sur R2 et R3), dont la salle de restauration est situé sur le lot 33 (désigné dans l'état descriptif de division comme un local à usage de magasin).

L'état descriptif de division des 20 et 21 décembre 1982 et 23 mars 1983 ne modifie pas la description de ces lots.

Le règlement de copropriété mentionne que les parties communes comprennent notamment (...):

- les fondations, les gros murs de façades et de refend, les murs pignons, mitoyens ou non (...)

- les tuyaux de chute et d'écoulement des eaux pluviales, ménagères et usées et du tout à l'égout, les conduits, prises d'airs, canalisations, colonnes montantes et descendantes d'eau, de gaz, d'électricité et de chauffage collectif (sauf toutefois les parties de ces canalisations se trouvant à l'intérieur de ces appartements ou des locaux dépendant et pouvant être affectées à l'usage exclusif de ceux-ci) (...)

- les vestibules et couloirs d'entrée, les escaliers, leurs cages et paliers (...)

Aux termes d'une assemblée générale ordinaire du 22 octobre 1981, a été discutée la résolution 6, intitulée 'mise en conformité des surfaces'; il était indiqué que les copropriétaires 'abordent ce sujet après que M.[C] -gérant de la SCI qui avait fait édifier l'immeuble -ait exposé la situation des parkings aménagés par leurs soins en bureaux, ceux-ci gardant toujours leur destination première, et ne pouvant en aucun cas obtenir le statut de locaux et pouvant éventuellement être revendus comme tels.

A/ Bureaux du rez-de-chaussée

Les copropriétaires reconnaissent d'autre part que l'édification de ces bureaux ne créent aucune nuisance. Cependant ceux-ci estiment qu'une quote part de charge plus importante devrait être supportée par ces bureaux. Après délibération animée, il est fait une proposition qui consiste à affecter à ces lots un forfait supplémentaire de 1000.00 F annuel sur les charges générales, cette proposition donnant satisfaction aux copropriétaires demandeurs est acceptée à l'unanimité'.

M.[R] a déposé le 17 août 1990 une demande de permis de construire dont l'objet était d'aménager un rez-de-chaussée en commerce ou 'artisanat'. L'arrêté municipal du 21 décembre 1990 qui accorde le permis de construire, pour une surface de 148 m², relève que le projet est un changement de destination de locaux à l'intérieur d'un bâtiment existant pour une destination nouvelle, celle de 'commerce'. Les travaux ont été achevés le 20 janvier 1992.

L'acte de vente du 05 mars 1999 de la SCI JADE mentionne qu'elle acquiert notamment les lots 34, 36 et 37, tous les trois désignés comme des emplacements de parking. Ce même acte précise:

- qu'aux termes d'un permis délivré par M.le maire de [Localité 7] le 21 décembre 1990, a été autorisé le changement de destination des locaux 'sus désignés'

-que le lot 34 consiste actuellement en un local à usage professionnel comprenant : deux bureaux autour d'un couloir central, une pièce à usage de cuisine et une pièce à usage de salle de réunion

-que les lots 35 et 36 constituent actuellement deux locaux à usage d'arrière-boutique du commerce 'la Terrine'.

La cour suppose qu'il s'agit en réalité du lot 37 et non du lot 35 puisqu'il est évoqué les lots sus-désignés.

La société ERIC MORGANTE COIFFURE a débuté son activité le 20 novembre 2009. L'entrée se fait par le 16 avenue des Oliviers.

Il ressort des plans produits au débat qu'il existe une entrée par l'avenue des Oliviers et une entrée par l'avenue du Général de Gaulle.

Il ressort des pièces produites que l'entrée sur l'avenue du Général de Gaulle se trouve au 872 de cette avenue et que l'entrée sur l'avenue des Oliviers se trouve au 16 de cette avenue; cette entrée donne sur une partie commune.

Il ressort également du plan établi par la société GEOTECH, géomètre expert, qu'il existait une ouverture entre le lot 34 et le 33.

Les copropriétaires n'ont jamais donné leur accord pour un changement d'affectation des lots 34, 36 et 37 lors de l'assemblée générale du 22 octobre 1981.

Contrairement à ce qu'avance le syndicat des copropriétaires, les demandes qu'il formule ne peuvent s'intégrer dans une demande plus générale de restitution des parties communes. En effet, le raccordement non autorisé à des canalisations parties communes ne s'analyse pas en un empiétement sur une partie commune ou en une aliénation d'une partie commune; il s'agit de simples branchements de plomberie, qui s'analysent en des travaux. Par ailleurs, la situation de la cuisine établie sur une partie du lot 34, pour l'exploitation du restaurant dont la salle de restauration se situe sur le lot 33, n'est pas en lien avec l'empiétement sur les parties communes dont l'entrée se trouve avenue des Oliviers. Puis, comme l'indique en outre avec pertinence le premier juge, il n'est pas établi par le syndicat des copropriétaires qu'un mur constituant une partie commune aurait été supprimé ou modifié.

Dès lors, c'est à bon droit que le premier juge a étudié, en les scindant, les fins de non-recevoir tirées de la prescription :

- de la demande de remise en état des lots 34, 36 et 37

- de la demande de suppression des raccordements sur les colonnes communes d'eaux usées

- de la demande de suppression des plaques professionnelles apposées en façade

- de la demande de restitution des parties communes (hall de l'immeuble par l'entrée du 16 avenue des Oliviers)

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande de remise en état des lots 34, 36 et 37 dans leur état antérieur à usage de parkings.

Le syndicat de copropriétaires sollicite qu'il soit mis un terme à toute affectation commerciale de ces lots et que leur destination de parking soit rétablie; comme le relève le premier juge, il s'agit en conséquence d'une action tendant à faire respecter le règlement de copropriété. Cette action est une action personnelle.

Il est établi que l'assemblée des copropriétaires savait, dès l'assemblée générale du 22 octobre 1981, que ces lots avaient une destination autres que celle de parkings puisque les emplacements de parking étaient aménagés en bureaux.

Lorsque la société JADE a acquis les lots 34, 36 et 37 le 05 mars 1999, ces derniers n'étaient plus utilisés comme parkings. Dans son acte de vente, il était d'ailleurs indiqué qu'un permis de construire relatif à un projet de changement de destination avait été délivré le 21 décembre 1990 et que les lots 34, 36 et 37 étaient à usage professionnel et d'arrière-boutique (lots 36 et 37). Les travaux ont été terminés le 20 janvier 1992.

Le syndicat des copropriétaires ne démontre pas qu'entre le 22 octobre 1981 et le 20 janvier 1992, les lots sus-visés auraient retrouvés un usage de parking.

Dès lors, le point de départ du délai de la prescription de l'action personnelle du syndicat en remise en état les lots 34, 36 et 37 dans leur état antérieur à usage de parkings, doit être fixé au 22 octobre 1981.

Selon l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa version applicable depuis le 25 novembre 2018, les dispositions de l'article 2224 du code civil relatives au délai de prescription et à son point de départ sont applicables aux actions personnelles relatives à la copropriété entre copropriétaires ou entre un copropriétaire et le syndicat. Cet article dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Selon l'article 2222 du code civil, la loi qui allonge la durée d'une prescription ou d'un délai de forclusion est sans effet sur une prescription ou une forclusion acquise. Elle s'applique lorsque le délai de prescription ou le délai de forclusion n'était pas expiré à la date de son entrée en vigueur. Il est alors tenu compte du délai déjà écoulé.

En cas de réduction de la durée du délai de prescription ou du délai de forclusion, ce nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

Selon l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa version applicable au 22 octobre 1981, les actions personnelles nées de l'application de cette loi entre le syndicat des copropriétaires et un copropriétaires, se prescrivaient par dix ans.

Compte tenu de ces éléments et du fait que le point de départ du délai de prescription doit être fixé au 22 octobre 1981, l'action intentée le 20 janvier 2022 par le syndicat des copropriétaires est donc prescrite. L'ordonnance déférée sera confirmée sur ce point.

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande du syndicat des copropriétaires tendant à la suppression des raccordements sur les colonnes communes d'eaux usées et tendant à la suppression des plaques professionnelles

Le règlement de copropriété mentionne que les canalisations d'eaux sont des parties communes.

Il n'est justifié d'aucun accord d'une assemblée générale autorisant des raccordements pour lots appartenant à la SCI JADE.

Le syndicat des copropriétaires se plaint de raccordements non autorisés effectués par la SARL Eric Morgante Coiffure, locataire de la SCI JADE et de raccordements non autorisés dans la cuisine créée sur une partie du lot 34, jouxtant le lot 33.

Le raccordement non autorisé à des canalisations parties communes ne s'analyse pas en un empiétement sur une partie commune ou en une aliénation d'une partie commune; il s'agit de simples branchements de plomberie, qui s'analysent en des travaux.

L'action en suppression de ces raccordements est une action personnelle, dont la prescription obéit aux dispositions de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965.

Le point de départ du délai de prescription pour les raccordements effectués au sein des lots 34, 36 et 37, dont la partie est louée à la SARL Eric Morgante coiffure doit être fixé au 20 novembre 2009. Il en est de même pour les raccordements dénoncés sur la partie du lot 34 puisque le syndicat des copropriétaires fait valoir qu'il les a découverts concomitamment aux travaux entrepris dans le salon de coiffure de la SARL Eric Morgante.

Selon les mêmes règles que précédemment évoquées, alors que l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 dans sa version applicable le 20 novembre 2009 prévoit une prescription de 10 ans pour les actions personnelles entre un copropriétaire et un syndicat, les demandes tendant à enlever les raccordements sur le réseau d'évacuation des eaux usées dans le salon de coiffure et dans la cuisine située sur une partie du lot 34 sont prescrites. Il en est de même pour la mise en place des plaques professionnelles qui sont des travaux non autorisés sur des parties communes. Ces plaques professionnelles ont été posées lors du début de l'exploitation de la SARL Eric Morgante, si bien que le point de départ du délai de prescription doit être fixé au 20 novembre 2009.

L'ordonnance déférée sera confirmée sur ce point.

Sur la fin de non-recevoir tirée de prescription de la demande du syndicat des copropriétaires relatives à la restitution du hall d'immeuble.

La demande en restitution des parties communes est une action réelle dont la prescription extinctive est de trente ans.

Les mentions évoquées par l'article 202 du Code de procédure civile ne sont pas prescrites à peine de nullité. Il appartient au juge du fond d'apprécier souverainement si les attestations non conformes présentent des garanties suffisantes pour emporter sa conviction. L'attestation de M.et Mme [E], qui n'est pas accompagnée de leur pièce d'identité, ne présentent pas de garanties suffisantes pour emporter la conviction de la cour. Il n'y a pas lieu pour autant de l'écarter des débats. L'ordonnance déférée sera infirmée sur ce point.

Les attestations produites par la SCI JADE relatives à la société COMETE ne permettent pas de dire que cette société aurait empiété sur les parties communes revendiquées par le syndicat des copropriétaires.

En effet, il ressort des attestations produites que la société COMETE, constituée en décembre 1979, avait un établissement principal au [Adresse 4], au moins jusqu'en décembre 1993 (les attestations divergent sur ce point), et que l'accueil de la clientèle s'effectuait avenue des Oliviers. Cependant, aucune attestation n'indique que cette accueil s'effectuait au [Adresse 1]. Il ressort d'une attestation de M.[D] que le magasin de vente au comptoir était situé à l'angle de l'avenue du général de Gaulle et de l'avenue des Oliviers. Or, le 16 avenue des Oliviers ne se trouve pas à l'angle des deux immeubles. Il ressort des plans produits au débat que l'entrée du 16 avenue des Oliviers débouche sur une partie commune et qu'à la gauche de cette dernière se trouve le lot 35.

M.[V], gérant de la SCI TRAIT D'UNION, qui a vendu ses locaux à la SCI JADE, atteste, le 20 juillet 2023, s'être rendu sur place à la demande du gérant de la SCI JADE et déclare que les locaux professionnels sont tels qu'ils ont été vendus à la SCI JADE en 1999, hormis la décoration intérieure. Il relève que l'entrée principale se situe au [Adresse 1] et qu'ils se composent de deux bureaux, un à droite, un à gauche en entrant par un hall d'accueil et une grande zone ouverte et un petit local au fond à droite.

Comme l'indique avec pertinence le premier juge, le permis de construire délivré le 21 décembre 1990 autorisait un changement de destination pour 148 m² et le plan dressé par le géomètre-expert évoque une surface totale de 157,10 m². C'est à juste titre que le premier juge note qu'en considération de la surface du hall approprié, tel qu'il figure sur le plan correspondant à l'état d'origine, la SCI JADE avait inclus ce hall (partie commune) dans son acquisition. C'est à la date d'achèvement des travaux, soit le 20 janvier 1992, que doit être fixé le point de départ de la prescription; il s'agit de la date à laquelle le syndicat des copropriétaires a connu ou aurait dû connaître l'appropriation du hall, partie commune.

En conséquence, l'action intentée par le syndicat des copropriétaires en restitution des parties communes le 20 janvier 2022, n'est pas prescrite. L'ordonnance déférée sera confirmée sur ce point.

Sur les dépens et sur les frais irrépétibles

Le syndicat des copropriétaires est essentiellement succombant. Il sera condamné aux dépens de la présente procédure et débouté de sa demande au titre des frais irrépétibles.

L'ordonnance déférée sera confirmée en ce qu'elle a dit que les dépens de l'instance suivront le sort de l'instance au fond.

Pour des raisons tirées de l'équité, il convient de condamner le syndicat des copropriétaires à payer à la SCI JADE une indemnité au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

L'ordonnance déférée sera confirmée en ce qu'elle a condamnée le syndicat des copropriétaires à verser à la SCI JADE la somme de 1000 euros.

Le syndicat des copropriétaires sera en outre condamné à verser à la SCI JADE la somme de 1000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,

ORDONNE la jonction entre l'affaire RG 23.08159 et RG 23 08228,

ECARTE des débats la pièce 11 du syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 5],

CONFIRME l'ordonnance déférée sauf en ce qu'elle a écarté des débats la pièce 12-4 de la SCI JADE,

STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT

DIT n'y avoir lieu d'écarter des débats la pièce 12-4 de la SCI JADE,

REJETTE la demande du syndicat des copropriétaires de l'immeuble le PHOENIX au titre des frais irrépétibles d'appel

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le PHOENIX à verser à la SCI JADE la somme de 1000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l'immeuble le PHOENIX aux dépens de la présente instance.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-7
Numéro d'arrêt : 23/08159
Date de la décision : 06/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 12/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-06;23.08159 ?
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