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30/05/2024 | FRANCE | N°22/14761

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8a, 30 mai 2024, 22/14761


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8a



ARRÊT AU FOND

DU 30 MAI 2024



N°2024/.





Rôle N° RG 22/14761 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BKI3T







[B] [H] épouse [N]



C/



CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE

MALADIE DES BOUCHES-DU-RHÔNE































Copie exécutoire délivrée

le :

à :



- Me Pierre GUASTALLA



-

CPCAM

















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Pôle social du Tribunal Judiciaire de Marseille en date du 06 Juillet 2022,enregistré au répertoire général sous le n° 18/02292.





APPELANTE



Madame [B] [H] épouse [N], demeurant [Adresse 1]



(bénéficie d'une aide juridictio...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8a

ARRÊT AU FOND

DU 30 MAI 2024

N°2024/.

Rôle N° RG 22/14761 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BKI3T

[B] [H] épouse [N]

C/

CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE

MALADIE DES BOUCHES-DU-RHÔNE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me Pierre GUASTALLA

- CPCAM

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pôle social du Tribunal Judiciaire de Marseille en date du 06 Juillet 2022,enregistré au répertoire général sous le n° 18/02292.

APPELANTE

Madame [B] [H] épouse [N], demeurant [Adresse 1]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/006754 du 26/10/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE),

représentée par Me Pierre GUASTALLA, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE DES BOUCHES-DU-RHÔNE, demeurant [Adresse 2]

non comparante, dispensée en application des dispositions de l'article 946 alinéa 2 du code de procédure civile d'être représentée à l'audience

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Avril 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Benjamin FAURE, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Mme Emmanuelle TRIOL, Présidente

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Monsieur Benjamin FAURE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Séverine HOUSSARD.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Mai 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 30 Mai 2024

Signé par Mme Emmanuelle TRIOL, Présidente et Mme Séverine HOUSSARD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Mme [B] [H] épouse [N] a sollicité la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie déclarée le 17 novembre 2017 auprès de la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône (CPCAM) sur la base d'un certificat médical initial du 27 juin 2017 établi par le docteur [Y] faisant état d'une tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l'épaule gauche (tableau de maladie professionnelle n°57).

Le 22 janvier 2018, la CPCAM a informé Mme [B] [H] épouse [N] de son refus de la prendre en charge au titre de la législation professionnelle dans la mesure où, à la date de première constatation médicale, elle ne justifiait pas de droits ouverts pour la prise en charge du risque professionnel.

Le 1er mars 2018, Mme [B] [H] épouse [N] a saisi la commission de recours amiable.

Le 17 mai 2018, Mme [B] [H] épouse [N] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches-du-Rhône se prévalant de la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable.

Le 12 juin 2018, la commission de recours amiable a rejeté la demande de Mme [B] [H] épouse [N].

Le 1er janvier 2019, l'affaire a été transférée au pôle social du tribunal de grande instance de Marseille en application de la loi du 18 novembre 2016.

Par jugement du 6 juillet 2022, le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille a débouté Mme [B] [H] épouse [N] de ses demandes de reconnaissance de la maladie déclarée le 17 novembre 2017 et d'expertise. Il a laissé à la charge de Mme [B] [H] épouse [N] les dépens de l'instance.

Les premiers juges ont estimé que :

le moyen tiré du caractère insuffisant de la motivation de la décision de la caisse était inopérant;

la première constatation de la maladie devait être fixée au 27 juin 2017, date à laquelle l'intéressée n'était plus exposée au risque depuis plus de six mois et n'était plus couverte au titre du risque professionnel puisqu'elle avait été admise au bénéfice de la CMU;

Par déclaration électronique du 7 novembre 2022, Mme [B] [H] épouse [N] a relevé appel du jugement, dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas contestées, cette dernière ayant été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle le 26 octobre 2022 consécutivement à sa demande du 3 août 2022.

EXPOSE DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Dans ses conclusions, soutenues oralement à l'audience du 9 avril 2024, auxquelles il est expressément référé, Mme [B] [H] épouse [N] sollicite l'infirmation du jugement et :

l'annulation des décisions de la commission de recours amiable ;

à titre principal, la prise en charge de sa pathologie sur le fondement de la législation professionnelle ;

à titre subsidiaire, l'organisation d'une expertise ;

la condamnation de la CPAM à lui payer 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir que :

la décision de rejet est irrégulière pour insuffisance de motivation ;

la date de première constatation médicale doit être fixée au 9 janvier 2015 ;

la description de ses conditions de travail confirme l'imputabilité de la maladie;

à la date de première constatation médicale du 9 janvier 2015, elle était encore en arrêt maladie dans le cadre de son activité salariée ;

Dispensée de comparaître sur le fondement de l'article 946 alinéa 2 du code de procédure civile, la CPCAM, dans ses conclusions régulièrement communiquées à la partie adverse le 29 mars 2024, auxquelles il est expressément référé, demande la confirmation du jugement entrepris.

Elle expose que :

la décision de rejet est parfaitement motivée ;

la date de première constatation médicale doit être fixée au 27 juin 2017;

à la date de première constatation médicale du 27 juin 2017, Mme [B] [H] épouse [N] était affiliée à l'assurance maladie au titre de la couverture maladie universelle de telle façon qu'elle ne pouvait bénéficier que de la prise en charge des seuls frais de santé au titre de la maladie et de la maternité ;

à la date de première constatation médicale du 27 juin 2017, Mme [B] [H] épouse [N] avait cessé d'être exposée au risque depuis trois ans ;

Mme [B] [H] épouse [N] ne démontre pas qu'elle remplissait la condition relative à la liste limitative des travaux fixés par le tableau de maladie professionnelle n° 57;

MOTIFS

Sur la demande de Mme [B] [H] épouse [N] relative aux décisions de la commission de recours amiable

Si Mme [B] [H] épouse [N] conclut sur le sort des décisions de la commission de recours amiable, la juridiction du contentieux de la sécurité sociale n'a ni à infirmer, ni à confirmer lesdites décisions.

En effet, l'objet du présent litige est la décision initialement prise par cet organisme, le rejet par la commission de recours amiable de la contestation de celle-ci ayant pour unique conséquence d'ouvrir la voie d'un recours juridictionnel.

Sur la régularité de la décision de refus de prise en charge du 22 janvier 2018 émanant de la CPCAM

Selon le 4e alinéa de l'article R.441-14 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, 'la décision motivée de la caisse est notifiée, avec mention des voies et délais de recours par tout moyen permettant de déterminer la date de réception, à la victime ou ses ayants droit, si le caractère professionnel de l'accident, de la maladie professionnelle ou de la rechute n'est pas reconnu, ou à l'employeur dans le cas contraire. Cette décision est également notifiée à la personne à laquelle la décision ne fait pas grief.'

Il ressort de la décision du 22 janvier 2018 émanant de la caisse que le refus de prise en charge de Mme [B] [H] épouse [N] est intervenu en raison de l'absence de droits ouverts, au profit de l'intéressée, au titre de la législation relative aux risques professionnels. Cette décision vise expressément la demande de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie déclarée par Mme [B] [H] épouse [N] au titre de la tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l'épaule gauche ainsi que le tableau de maladie professionnelle n° 57.

Si Mme [B] [H] épouse [N] estime que cette motivation est insuffisante, ce que ne considère pas la cour, il est à observer que le défaut ou le caractère insuffisant ou erroné de la motivation de la décision de la caisse, à le supposer établi, permet seulement à son destinataire d'en contester le bien-fondé devant le juge sans condition de délai (Cass, 2e civ, 12 mars 2015, pourvoi n° 13-25.599).

C'est donc à tort que Mme [B] [H] épouse [N] sollicite l'annulation de cette décision comme l'ont estimé les premiers juges.

Sur la demande de prise en charge de la maladie de Mme [B] [H] épouse [N] au titre de la législation professionnelle

En vertu de l'article L.461-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, 'les dispositions du présent livre sont applicables aux maladies d'origine professionnelle sous réserve des dispositions du présent titre. En ce qui concerne les maladies professionnelles, la date à laquelle la victime est informée par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle est assimilée à la date de l'accident.

Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.

Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime.

Peut être également reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d'un taux évalué dans les conditions mentionnées à l'article L. 434-2 et au moins égal à un pourcentage déterminé.

Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents, la caisse primaire reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. La composition, le fonctionnement et le ressort territorial de ce comité ainsi que les éléments du dossier au vu duquel il rend son avis sont fixés par décret. L'avis du comité s'impose à la caisse dans les mêmes conditions que celles fixées à l'article L. 315-1.

Les pathologies psychiques peuvent être reconnues comme maladies d'origine professionnelle, dans les conditions prévues aux quatrième et avant-dernier alinéas du présent article. Les modalités spécifiques de traitement de ces dossiers sont fixées par voie réglementaire.'

Il résulte de la combinaison des articles L. 461-1, L. 461-2 et D. 461-1-1 du code de la sécurité sociale que la première constatation médicale de la maladie professionnelle exigée au cours du délai de prise en charge écoulé depuis la fin de l'exposition au risque concerne toute manifestation de nature à révéler l'existence de cette maladie, que la date de la première constatation médicale est celle à laquelle les premières manifestations de la maladie ont été constatées par un médecin avant même que le diagnostic ne soit établi et qu'elle est fixée par le médecin conseil (Cass, 2e civ, 11 mai 2023, 21-17.788).

En l'espèce, il ressort du colloque médico-administratif de maladie professionnelle du 28 décembre 2017 que le docteur [Z], médecin conseil, a fixé au 27 juin 2017 la date de première constatation médicale de la pathologie déclarée par l'appelante. La cour observe que la date du 27 juin 2017 correspond bien à celle déclarée par Mme [B] [H] épouse [N] dans sa demande de reconnaissance de maladie professionnelle du 17 novembre 2017 comme étant la date de première constatation médicale de la pathologie. La cour relève également que cette date figure de la même façon dans le certificat médical initial du docteur [Y] établi le 27 juin 2017.

Mme [B] [H] épouse [N] sollicite que cette date soit désormais fixée au 9 janvier 2015. À ce titre, le protocole d'affection de longue durée du 9 janvier 2015 fait état, comme l'ont souligné les premiers juges, d'une fracture du col huméral gauche et non d'une tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l'épaule gauche. L'impotence fonctionnelle décrite dans ce document est donc en relation exclusive avec une fracture et ne peut être considérée comme constituant les premières manifestations de la maladie dont l'appelante demande la prise en charge sur le fondement de la législation professionnelle.

Si le docteur [Y] a rédigé, en cause d'appel, un certificat médical du 16 janvier 2024 dans lequel il fait désormais référence à un début de tendinopathie de la coiffe des rotateurs de l'épaule gauche au 9 janvier 2015, la cour relève que cette précision n'avait pas été apportée dans le certificat qu'il avait lui-même rédigé le 27 juin 2017 dans lequel il affirmait sans aucun doute possible que la date de première constatation de la maladie était le 27 juin 2017 et non le 9 janvier 2015. En conséquence, la cour considère que la valeur probante de ce certificat médical doit être relativisée puisque, d'une part, il a été établi presque sept ans après la demande initiale de Mme [B] [H] épouse [N], et que, d'autre part, il contredit les premières constatations médicales de son auteur.

Dès lors, la cour estime que la date de première constatation de la maladie de Mme [B] [H] épouse [N] doit être fixée au 27 juin 2017 et non au 9 janvier 2015 comme le sollicite l'appelante.

Or, il est constant que, à la date du 27 juin 2017, Mme [B] [H] épouse [N] n'était plus exposée au risque depuis une durée supérieure à six mois compte tenu de sa cessation d'activité au 31 août 2014 et qu'elle était affiliée à l'assurance maladie au titre de la couverture maladie universelle et ne pouvait donc prétendre qu'à la prise en charge des seuls frais de santé au titre de la maladie ou de la maternité comme l'énonce l'article L.160-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige.

C'est donc à bon droit que les premiers juges ont débouté Mme [B] [H] épouse [N] de sa demande de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie déclarée le 17 novembre 2017, sans qu'il soit besoin de répondre aux moyens tirés des conditions de travail de l'intéressée, de la liste limitative des travaux qu'elle accomplissait et de la présomption d'origine professionnelle de sa pathologie.

Sur la demande d'expertise sollicitée à titre subsidiaire par Mme [B] [H] épouse [N]

Vu l'article 146 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Dans la mesure où Mme [B] [H] épouse [N] ne justifie pas qu'elle remplissait effectivement les conditions administratives d'ouverture des droits pour être prise en charge sur le fondement de la législation sur les risques professionnels, la cour n'est pas convaincue qu'une mesure d'expertise soit nécessaire à la résolution du litige. C'est à juste titre que cette demande a été écartée par les premiers juges.

Sur les dépens

Mme [B] [H] épouse [N] succombe à la procédure et doit être condamnée aux dépens qui seront recouvrés comme il est prévu en matière d'aide juridictionnelle.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme, en ses dispositions soumises à la cour, le jugement rendu le 6 juillet 2022 par le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille,

Y ajoutant,

Condamne Mme [B] [H] épouse [N] aux dépens qui seront recouvrés comme il est prévu en matière d'aide juridictionnelle.

Le greffier La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8a
Numéro d'arrêt : 22/14761
Date de la décision : 30/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-30;22.14761 ?
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