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30/05/2024 | FRANCE | N°19/14712

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 30 mai 2024, 19/14712


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4



ARRÊT AU FOND

DU 30 MAI 2024



N° 2024/









Rôle N° RG 19/14712 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BE44G







[M] [L]





C/



Compagnie d'assurances SPHERIA VIE



























Copie exécutoire délivrée



le :



à :



Me Géraldine ADRAI-LACHKAR



Me Isabelle LE MERCIER<

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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de marseille en date du 20 Juin 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 17/12829.





APPELANT



Monsieur [M] [L]

, demeurant [Adresse 2] - [Localité 1]

représenté par Me Géraldine ADRAI-LACHKAR, avoca...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRÊT AU FOND

DU 30 MAI 2024

N° 2024/

Rôle N° RG 19/14712 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BE44G

[M] [L]

C/

Compagnie d'assurances SPHERIA VIE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Géraldine ADRAI-LACHKAR

Me Isabelle LE MERCIER

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de marseille en date du 20 Juin 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 17/12829.

APPELANT

Monsieur [M] [L]

, demeurant [Adresse 2] - [Localité 1]

représenté par Me Géraldine ADRAI-LACHKAR, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Cécile DESCHANEL, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

Compagnie d'assurances SPHERIA VIE

, demeurant [Adresse 3] - [Localité 4]

représentée par Me Isabelle LE MERCIER, avocat au barreau de MARSEILLE avocat postulant, et ayant pour avocat plaidant Me Nadia HADJ CHAIB CANDELLE -SELARL CABINET COUILBAULT, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Véronique MÖLLER, conseiller rapporteur chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Inès BONAFOS, Présidente

Mme Véronique MÖLLER, Conseillère

M. Adrian CANDAU, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Patricia CARTHIEUX.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Mai 2024.

ARRÊT

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Le 22 mars 2011, Monsieur [M] [L] a adhéré auprès de la société SPHERIA VIE au contrat d'assurances des emprunteurs PROTECTION CREDIT afin de garantir un prêt immobilier d'un montant de 155.192€ qui lui avait été accordé par l'établissement bancaire CREDIT DU NORD.

Monsieur [L] indique que le 31 juillet 2011, il a été victime d'un accident lors d'une chute d'échelle, subissant un traumatisme rachidien ayant impliqué une intervention chirurgicale et une hospitalisation de plus de 30 jours.

Monsieur [L] a été classé en invalidité 2ème catégorie au 1er février 2013.

A la suite de cet accident, Monsieur [L] a fait l'objet d'une première expertise médicale mise en 'uvre par la société SPHERIA VIE, expertise réalisée par le Dr [W] le 23 avril 2014, puis d'une seconde expertise réalisée par le Dr [V] le 18 octobre 2016.

La société SPHERIA VIE a notamment fait savoir à Monsieur [L] qu'au vu des conclusions des experts, il ne pouvait plus bénéficier de la garantie invalidité permanente totale qui suppose un taux d'invalidité supérieur à 66% déterminé à partir des éléments contractuels.

Contestant le refus de mise en 'uvre de la garantie des mensualités de son crédit immobilier, par acte d'huissier en date du 18 novembre 2017, Monsieur [M] [L] a donné assignation à la SA SPHERIA VIE devant le Tribunal de grande instance de MARSEILLE.

Par jugement en date du 20 juin 2019, ce Tribunal :

DEBOUTE Monsieur [M] [L] de l'ensemble de ses demandes ;

Condamne Monsieur [M] [L] à payer à la S.A. SPHERIA VIE la somme de 2.000€ sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

REJETTE toute autre demande,

CONDAMNE monsieur [M] [L] aux dépens.

Par déclaration en date du 19 septembre 2019, Monsieur [L] a formé appel contre cette décision à l'encontre de la société SPHERIA VIE en ce que le tribunal n'a pas :

Constaté que le TAUX invalidité de Mr [L] est supérieur à 66%

Constaté la renonciation de la compagnie à l'application de la règle de BALTHAZAR et à l'exclusion de garantie

Constaté qu'en tout état de cause, l'exclusion de garantie n'est pas applicable en raison de l'hospitalisation de plus de 30 jours de Mr [L].

Constaté la garantie de son assureur et ne l'a pas condamné à prendre en charge la totalité des mensualités soit la somme de 40.371,92 euros à parfaire.

Constaté la réticence abusive de la compagnie et ne l'a pas condamnée à verser la somme de 10.000 euros au titre du préjudice moral distinct ainsi qu'au titre de l'article 700 du CPC, en ce qu'il a débouté Mr [L] de ses demandes et l'a condamné aux entiers dépens et à 2.000 euros au titre de l'article 700 du CPC.

***

Les parties ont exposé leur demande ainsi qu'il suit, étant rappelé qu'au visa de l'article 455 du code de procédure civile, l'arrêt doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens :

Par conclusions notifiées le 15 novembre 2019, Monsieur [M] [L] demande à la Cour de :

Vu les articles 1104 et suivants du Code de procédure civile,

Vu la jurisprudence,

Vu les pièces versées aux débats,

Déclarer l'appel recevable et bien fondé,

CONSTATER que les deux infirmités sont indépendantes, et additionner les deux taux,

Ainsi rejeter l'application de la règle de BALTHAZAR,

En conséquence,

CONSTATER la garantie de son assureur et le condamner à prendre en charge la totalité des mensualités soit la somme de 40.371,92 euros à parfaire,

Entendre constater la réticence abusive de la compagnie et la condamner à verser la somme de 10 .000 euros au titre du préjudice moral distinct,

ENTENDRE ASSORTIR le jugement sollicité de l'exécution provisoire,

S'ENTENDRE CONDAMNER à payer au requérant la somme de 3.000€ au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont compris les frais d'expertise judiciaire.

A titre subsidiaire, si la Cour retient l'application de la règle de BALTHAZAR, constater que la compagnie a renoncé à s'en prévaloir et l'impact de la renonciation de la compagnie,

En conséquence, CONSTATER la garantie de son assureur et le condamner à prendre en charge la totalité des mensualités soit la somme de 40.371,92 euros à parfaire,

Entendre constater la réticence abusive de la compagnie et la condamner à verser la somme de 10.000 euros au titre du préjudice moral distinct,

ENTENDRE ASSORTIR le jugement sollicité de l'exécution provisoire,

S'ENTENDRE CONDMANER à payer au requérant la somme de 3.000€ au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont compris les frais d'expertise judiciaire.

A titre infiniment subsidiaire, si la Cour retient l'absence d'effet de la renonciation,

REJETER le calcul de la compagnie,

CONSTATER que le TAUX invalidité de Mr [L] est supérieur à 66% par le croisement des taux,

CONSTATER qu'en tout état de cause, l'exclusion de garantie n'est pas applicable en raison de l'hospitalisation de plus de 30 jours de Mr [L],

CONSTATER la garantie de son assureur et le condamner à prendre en charge la totalité des mensualités soit la somme de 40.371,92 euros à parfaire,

Entendre constater la réticence abusive de la compagnie et la condamner à verser la somme de 10.000 euros au titre du préjudice moral distinct,

ENTENDRE ASSORTIR le jugement sollicité de l'exécution provisoire,

S'ENTENDRE CONDAMNER à payer au requérant la somme de 3.000€ au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont compris les frais d'expertise judiciaire et d'appel.

Par conclusions responsives devant la Cour d'appel notifiées le 30 mars 2020, Monsieur [L] modifie partiellement la forme de ses prétentions et demande à la Cour de :

Vu les articles 1104 et suivants du Code de procédure civile,

Vu la jurisprudence,

Vu les pièces versées aux débats,

Déclarer l'appel recevable et bien fondé,

CONSTATER que les deux infirmités sont indépendantes, et additionner les deux taux,

Ainsi rejeter l'application de la règle de BALTHAZAR,

En conséquence,

CONSTATER la garantie de son assureur et le condamner à prendre en charge la totalité des mensualités soit la somme de 40.371,92 euros à parfaire,

Entendre constater la réticence abusive de la compagnie et la condamner à verser la somme de 10 .000 euros au titre du préjudice moral distinct,

ENTENDRE ASSORTIR le jugement sollicité de l'exécution provisoire,

S'ENTENDRE CONDAMNER à payer au requérant la somme de 3.000€ au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont compris les frais d'expertise judiciaire.

A titre subsidiaire, si la Cour retient l'application de la règle de BALTHAZAR, constater que la compagnie a renoncé à s'en prévaloir et l'impact de la renonciation de la compagnie,

En conséquence, CONSTATER la garantie de son assureur et le condamner à prendre en charge la totalité des mensualités soit la somme de 40.371,92 euros à parfaire,

Entendre constater la réticence abusive de la compagnie et la condamner à verser la somme de 10.000 euros au titre du préjudice moral distinct,

ENTENDRE ASSORTIR le jugement sollicité de l'exécution provisoire,

A titre infiniment subsidiaire en application du contrat, condamner la compagnie à verser à Mr [L] le remboursement des mensualités avec réduction proportionnelle du taux d'invalidité retenu par la compagnie,

S'ENTENDRE CONDAMNER à payer au requérant la somme de 3.000€ au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont compris les frais d'expertise judiciaire,

A titre infiniment subsidiaire, si la Cour retient l'absence d'effet de la renonciation,

REJETER le calcul de la compagnie,

CONSTATER que le TAUX invalidité de Mr [L] est supérieur à 66% par le croisement des taux,

CONSTATER qu'en tout état de cause, l'exclusion de garantie n'est pas applicable en raison de l'hospitalisation de plus de 30 jours de Mr [L],

CONSTATER la garantie de son assureur et le condamner à prendre en charge la totalité des mensualités soit la somme de 40.371,92 euros à parfaire,

Entendre constater la réticence abusive de la compagnie et la condamner à verser la somme de 10.000 euros au titre du préjudice moral distinct,

ENTENDRE ASSORTIR le jugement sollicité de l'exécution provisoire,

A titre infiniment subsidiaire en application du contrat, condamner la compagnie à verser à Mr [L] le remboursement des mensualités avec réduction proportionnelle du taux d'invalidité retenu par la compagnie,

S'ENTENDRE CONDAMNER à payer au requérant la somme de 3.000€ au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont compris les frais d'expertise judiciaire et d'appel.

A l'appui de ses demandes, Monsieur [L] fait valoir pour l'essentiel que son taux d'invalidité doit être retenu à hauteur de 70%, soit au-delà des 66% qui permettent, selon les dispositions du contrat, la prise en charge des mensualités du prêt dans leur totalité ; que l'exclusion de garantie dont se prévaut l'assureur n'est pas fondée en ce qu'il a été hospitalisé pendant plus de 30 jours et que l'assureur a renoncé à se prévaloir de cette exclusion.

Il fait valoir que la Cie d'assurances ne peut pas demander l'application de la règle de BLATHAZARD (méthode qui consiste, en la présence de taux d'infirmité multiples, à opérer leur croisement pour calculer le taux d'invalidité permanente totale) à laquelle elle a elle-même renoncé et compte tenu de la pluralité d'infirmités indépendantes les unes des autres impliquant une addition des taux. A l'appui de sa demande subsidiaire, il fait valoir que la Cie d'assurances a renoncé à se prévaloir de la non-application de la garantie pour exclusion ; qu'en tout état de cause, les taux d'incapacité retenus doivent conduire à faire droit à ses demandes.

La société SPHERIA VIE, par conclusions notifiées le 10 février 2020 demande à la Cour de :

CONFIRMER en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Marseille le 20 juin 2019

En conséquence,

DÉBOUTER Monsieur [L] de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de SPHERIA VIE

CONDAMNER Monsieur [L] à verser à la Société SPHERIA VIE la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

CONDAMNER Monsieur [L] aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de Maître Isabelle LE MERCIER, Avocat au Barreau de MARSEILLE.

A l'appui de ses prétentions, la société SPHERIA VIE fait valoir que l'application de la règle de BALTHAZARD qui permet de définir la capacité restante est admise ; qu'en l'espèce au vu des deux expertises qui ont été réalisées par les Dr [W] et [V], il n'y a pas eu d'approche globale des incapacités retenue de sorte qu'il n'y a pas lieu de procéder à l'addition des différents taux d'incapacité ; que selon l'application de la règle de BALTHAZARD, le taux d'incapacité fonctionnelle de Monsieur [L] est de 46% et le taux d'incapacité professionnelle est de 70%, ces taux ne lui permettant pas de bénéficier de la garantie invalidité permanente totale. La société d'assurances en déduit que la décision attaquée doit être confirmée.

A titre subsidiaire, elle fait valoir qu'elle n'a pas renoncé à l'application de la règle de BALTHAZARD et qu'elle n'a évoqué la non-application de cette règle qu'avant d'avoir connaissance du fait que la pathologie psychiatrique avait donné lieu à une hospitalisation de plus de 30 jours et qu'elle ne pouvait plus donner lieu à une exclusion de garantie ; qu'ayant eu connaissance de cette durée d'hospitalisation et du fait qu'en conséquence cette pathologie devait bien donner lieu à garantie, elle a donc fait application de la règle de BALTHAZARD.

L'affaire a été clôturée par ordonnance en date du 12 février 2024 et a été appelée en dernier lieu à l'audience du 26 mars 2024.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la demande principale :

Les parties se trouvent en l'état d'un contrat de « PROTECTION CREDIT » ayant pris effet le 22 mars 2011 et couvrant les risques décès, perte totale et irréversible d'autonomie (PTIA), incapacité temporaire totale (ITT) et invalidité permanente totale (IPT). Selon la notice d'information versée aux débats, en cas d'invalidité permanent totale « l'Assureur verse à l'organisme financier prêteur, tout ou partie des échéances du prêt garanties dès la date de consolidation de l'état d'invalidité et ce jusqu'à la date de liquidation des régimes de retraite de l'assuré et au plus tard jusqu'à son 65ème anniversaire ». Il est précisé que « le taux d'invalidité permanente total ou partiel est à la fois fonction du taux d'invalidité fonctionnelle et du taux d'invalidité professionnelle de l'assuré. Le taux d'invalidité fonctionnelle est établi de 0% à 100%. Il est apprécié en dehors de toute considération professionnelle et basée uniquement sur la diminution de la capacité physique ou mentale, consécutive à l'accident ou la maladie ('). Le taux d'invalidité professionnelle établi de 0% à 100%. Il est fixé par expertise. Il est apprécié en fonction du degré et de la nature de l'incapacité fonctionnelle par rapport à la profession exercée ».

Le 31 juillet 2011, Monsieur [L] a été victime d'un accident à son domicile et a fait l'objet d'un arrêt de travail ; l'accident a consisté en un trauma rachidien avec suites complexes consécutif à la chute d'une échelle. Il exerçait au moment de l'accident la profession de receveur de péage.

Il n'est pas contesté qu'en exécution de ce contrat d'assurance, la société SPHERIA VIE a versé à Monsieur [L] une somme de 19.855,35€ pour la période allant du 8 janvier 2012 au 7 novembre 2013, cela au titre de la prise en charge de la mensualité du crédit immobilier assuré par ce contrat.

Par courrier en date du 9 février 2017, l'assureur a indiqué à Monsieur [L] qu'au regard des résultats des opérations d'expertise, son état de santé ne relevait plus de la garantie incapacité à compter du 27 juin 2013, date de consolidation de son état de santé. Il était invoqué le fait que :

Les séquelles traumatiques occasionnées par l'accident étaient à l'origine d'une incapacité fonctionnelle de 10% et d'une incapacité professionnelle de 20%,

Que s'agissant de sa pathologie psychiatrique, le taux d'incapacité fonctionnelle retenu était de 40% et le taux d'incapacité professionnelle de 70%,

Que par application de la règle de Balthazard utilisée pour déterminer un taux global d'invalidité, le taux global d'invalidité fonctionnelle était fixé à 46% et le taux global d'invalidité professionnelle à 70% et que « le croisement de ces taux égal à 50%, n'entre pas dans le champ d'application de la garantie Invalidité Permanente Totale ».

Cette position est donc contestée par Monsieur [L]. Il soutient que les taux retenus doivent être additionnés et donc fixés à 50% d'incapacité fonctionnelle et 90% d'incapacité professionnelle, soit un taux d'invalidité moyen de 70% qui dépasse le seuil de prise en charge fixé à 66% par le contrat d'assurance. Il conclut en outre que la pathologie psychiatrique dont il souffre n'a pas à être exclue dès lors qu'il a été hospitalisé pendant plus de 30 jours à ce titre et que l'assureur a renoncé à se prévaloir de cette exclusion en appliquant la règle de Balthazard.

Sur l'application de la règle de Balthazard :

Monsieur [L] soutient que l'assureur a renoncé à l'application de cette règle ; que par ailleurs, en cas de pluralité d'infirmités indépendantes les unes des autres, le taux global d'invalidité est obtenu en additionnant différents taux d'invalidité de sorte que la règle de Balthazard ne s'applique pas.

La société SPHERIA VIE oppose que l'usage de cette règle est admis en jurisprudence et qu'elle consiste à opérer une synthèse de l'incapacité globale résultant de plusieurs infirmités.

La règle dite de Balthazard consiste en effet en une méthodologie visant à déterminer un taux d'incapacité global d'une personne souffrant de différentes lésions. En matière de maladie professionnelle, quand une même maladie emporte des lésions multiples sur différents membres qui intéressent une même fonction, la règle de Balthazard ne s'applique pas et les taux estimés pour chaque atteinte s'ajoutent.

Toutefois, en l'espèce, Monsieur [L] ne souffre pas d'incapacités consécutives à une maladie professionnelle, mais à des pathologies relevant du droit commun, en l'espèce un choc traumatique intervenu dans sa vie privée (chute d'une échelle) et un état dépressif réactionnel. En conséquence, il convient bien de déterminer le taux d'incapacité (résultant de cette atteinte physiologique et de ses répercussions psychiatriques) dont il est victime par application de la règle de Balthazard en définissant un taux global.

Monsieur [L] reproche à la société SPHERIA de retenir les taux de 70% et de 40% alors que l'application de la règle de Balthazard, doit selon lui conduire à retenir les taux de 56% et 76% qui, par leur croisement, permettent l'application des garanties sollicitées. Il ajoute que « le taux retenu doit être de 53% (10% de la capacité restante de 90% et ensuite (40x90) :100 ou 60-(60x10/100) ce qui permet de voir appliquer le tableau ».

Selon la société d'assurance, le calcul à opérer est le suivant :

L'incapacité fonctionnelle pour la pathologie psychiatrique est de 40%, soit une capacité restante de 60%,

L'incapacité fonctionnelle pour la pathologie orthopédique est de 10%, donc de 6%une fois appliqué à la capacité restante de 60%,

Le taux d'incapacité fonctionnelle est donc de 40 + 6 = 46%,

Le taux d'incapacité professionnelle à retenir est de 70%, soit le plus élevé,

Le croisement de ces taux est égal à 50% selon le tableau croisé figurant dans la notice d'information.

Or, le calcul opéré par la société SPHERIA VIE en classant les incapacités par ordre décroissant de leur taux et en prenant en compte le taux des incapacités supplémentaires proportionnelle à la validité restante, puis en retenant l'incapacité la plus grave pour l'intégralité du taux qui lui est applicable correspond à la méthodologie habituelle dans l'usage de la règle de Balthazard. Il convient donc de retenir ce calcul et de constater que selon le taux global qui en résulte, inférieur aux 66% prévus par le contrat, la garantie n'est pas acquise.

Sur la renonciation à la règle de Balthazard :

Pour soutenir que son assureur aurait renoncé à l'application de la règle de Balthazard, Monsieur [L] expose que l'assureur ne peut retenir, pour refuser la prise en charge une exclusion de garantie inapplicable alors qu'il a été hospitalisé plus de 30 jours ; que la garantie étant applicable, l'assureur ne saurait, dans un second temps, demander l'application de la règle de Balthazard à laquelle il a de surcroît renoncé dans un courrier officiel.

Il ne ressort cependant d'aucune des pièces versées à la procédure que la société SPHERIA VIE ait indiqué vouloir renoncer à l'application de la règle de Balthazard, de sorte que cette allégation de Monsieur [L] n'est pas corroborée.

En conséquence, il convient de confirmer la décision attaquée en ce qu'elle a débouté Monsieur [M] [L] de l'ensemble de ses prétentions.

Sur la demande de remboursement des mensualités :

Monsieur [L] demande la condamnation de la société SPHERIA VIE au remboursement des mensualités avec réduction proportionnelle du taux d'invalidité retenu par la compagnie.

Monsieur [L] n'apporte aucune justification à cette demande. Il convient en conséquence de l'en débouter.

Sur les demandes annexes :

Au vu de la solution du litige, Monsieur [L] sera débouté de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive.

Compte tenu de la situation économique respective des parties, l'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Monsieur [L] qui succombe sera condamné aux entiers dépens de l'instance d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement du Tribunal de grande instance de MARSEILLE en date du 20 juin 2019 ;

Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Mme Patricia CARTHIEUX, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 19/14712
Date de la décision : 30/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-30;19.14712 ?
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