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23/05/2024 | FRANCE | N°22/12390

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-7, 23 mai 2024, 22/12390


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7



ARRÊT AVANT DIRE DROIT

DU 23 MAI 2024



N° 2024/ 222









Rôle N° RG 22/12390 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BKAQP







[H] [J]





C/



S.A. CABOT SECURISATION EUROPE LIMITED VENAT AUX DROITS DE BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE



























Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Laurane FREGOS

I







Me Sylvain DAMAZ

















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal d'Instance de MENTON en date du 27 Novembre 2018 enregistrée au répertoire général sous le n° 1118454.





APPELANT



Monsieur [H] [J], demeurant [Adresse 2]



représenté par Me Lauran...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7

ARRÊT AVANT DIRE DROIT

DU 23 MAI 2024

N° 2024/ 222

Rôle N° RG 22/12390 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BKAQP

[H] [J]

C/

S.A. CABOT SECURISATION EUROPE LIMITED VENAT AUX DROITS DE BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Laurane FREGOSI

Me Sylvain DAMAZ

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal d'Instance de MENTON en date du 27 Novembre 2018 enregistrée au répertoire général sous le n° 1118454.

APPELANT

Monsieur [H] [J], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Laurane FREGOSI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Cécile BAILLY, avocat au barreau de DIJON

INTIMEE

S.A. CABOT SECURITISATION EUROPE LIMITED VENANT AUX DROITS DE BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE en vertu d'un acte de cession de créances en date du 26/07/2021, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Sylvain DAMAZ de l'AARPI ADSL, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Carole MENDOZA, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre

Madame Carole MENDOZA, Conseillère

Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Mai 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Mai 2024.

Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte d'huissier du 03 septembre 2018, la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, qui se prévalait d'impayés au titre d'un crédit souscrit le 10 novembre 2015 par M.[J], a fait assigner ce dernier aux fins de le voir condamner à lui verser la somme de 9107, 99 euros avec intérêts au taux de 5,69% à compter du 07 février 2017, outre une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement réputé contradictoire du 27 novembre 2018, le tribunal d'instance de Menton a :

- dit recevable la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE en ses demandes

- condamné M.[H] [J] à payer à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 8587, 33 euros avec intérêts au taux de 5,69% à compter du 07 février 2017, outre la somme de 100 euros au titre de l'indemnité légale,

- rejeté la demande de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE au titre des frais irrépétibles,

- condamné M.[J] aux dépens,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Le premier juge a estimé recevable l'action en paiement formée par le prêteur en fixant le premier incident de paiement non régularisé au 05 septembre 2016.

Il a fixé le montant de la créance du prêteur.

Le jugement a été signifié le 05 mars 2019 par procès-verbal de recherches infructueuses.

Par déclaration du 15 septembre 2022, M.[J] a relevé appel de tous les chefs de cette décision, sauf en ce qu'elle a rejeté la demande de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société CABOT SECURITISATION EUROPE LIMITED, disant venir aux droits de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, a constitué avocat.

Par conclusions notifiées par RPVA le 11 janvier 2023 auxquelles il convient de se reporter, M.[J] demande à la cour :

- de déclarer son appel recevable,

- d'infirmer le jugement rendu en toutes ses dispositions,

*statuant à nouveau,

- de déclarer nulle la signification du jugement du 27 novembre 2018,

- de déclarer son appel recevable,

- de débouter la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de ses demandes,

subsidiairement,

- de débouter la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de ses demandes.

Il soulève la nullité de la signification du jugement déféré au motif que cette décision a été signifiée à une adresse qui n'a jamais été la sienne. Il souligne qu'il était domicilié depuis 2016 à une adresse connue de différents organismes. Il en conclut que son appel n'est pas fait hors délai et qu'il est recevable.

Pour les mêmes raisons, il estime que la cour doit infirmer le jugement déféré.

Subsidiairement, il sollicite le rejet des demandes adverses en indiquant qu'il a été victime d'une usurpation d'identité. Il fait valoir n'avoir jamais été détenteur de la carte d'identité délivrée le 14 septembre 2015 produite au débat et qu'il n'est pas détenteur d'un permis de moto. Il relève que son ex-compagne lui a dérobé son passeport le 30 août 2014.

Par conclusions notifiées par RPVA le 06 mars 2024 auxquelles il convient de se référer, la SA CABOT SECURITISATION EUROPE LIMITED disant venir aux droits de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE demande à la cour :

- de déclarer l'appel de M.[J] irrecevable,

- de débouter M.[J] de sa demande de nullité de l'assignation et de la signification du jugement,

- de constater qu'elle vient aux droits de la société PARIBAS PERSONAL FINANCE,

- de confirmer le jugement déféré,

- de dire que la déchéance du terme est régulièrement acquise,

*subsidiairement :

- de prononcer la résolution du contrat de prêt,

*en tout état de cause :

- de débouter M.[J] de ses demandes,

- de condamner M.[J] à lui verser la somme de 9107, 99 euros avec intérêts au taux conventionnel et assortie des différents frais,

- de condamner M.[J] à lui verser la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner M.[J] aux dépens.

Elle fait état de l'irrecevabilité de l'appel de M.[J] et conteste la nullité de la signification du jugement déféré.

Elle déclare que M.[J], qui ne justifie d'aucune usurpation d'identité, est de mauvaise foi. Elle indique qu'il s'est acquitté de plusieurs échéances du prêt. Elle relève que le RIB donné lors de la souscription du prêt est le sien.

Elle fait état de sa qualité à agir, puisqu'elle est cessionnaire de la créance détenue par la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à l'encontre de M.[J].

Elle soutient la régularité de la déchéance du terme. Subsidiairement, elle sollicite la résolution du prêt.

Elle fait état de sa créance.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 07 mars 2024.

MOTIVATION

Sur la recevabilité de l'appel

Selon l'article 914 du code de procédure civile, les parties soumettent au conseiller de la mise en état, qui est seul compétent depuis sa désignation et jusqu'à la clôture de l'instruction, leurs conclusions, spécialement adressées à ce magistrat, tendant à :

- prononcer la caducité de l'appel ;

- déclarer l'appel irrecevable et trancher à cette occasion toute question ayant trait à la recevabilité de l'appel ; les moyens tendant à l'irrecevabilité de l'appel doivent être invoqués simultanément à peine d'irrecevabilité de ceux qui ne l'auraient pas été ;

- déclarer les conclusions irrecevables en application des articles 909 et 910 ;

- déclarer les actes de procédure irrecevables en application de l'article 930-1 ;

Les parties ne sont plus recevables à invoquer devant la cour d'appel la caducité ou l'irrecevabilité après la clôture de l'instruction, à moins que leur cause ne survienne ou ne soit révélée postérieurement. Néanmoins, sans préjudice du dernier alinéa du présent article, la cour d'appel peut, d'office, relever la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel ou la caducité de celui-ci.

La société CABOT SECURITISATION EUROPE LIMITED, disant venir aux droits de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, ne justifie pas d'une cause d'irrecevabilité de l'appel survenue ou révélée postérieurement à la clôture de l'affaire. Elle n'a pas soulevé l'irrecevabilité de l'appel de M.[J] en raison de sa tardiveté devant le conseiller de la mise en état; elle n'est plus recevable à le faire devant la cour.

Dès lors, sa demande tendant à voir déclarer l'appel de M.[J] irrecevable est elle-même irrecevable. L'appel de ce dernier sera donc étudié par la cour.

Sur la demande d'infirmation du jugement déféré au motif dela nullité de l'acte introductif d'instance

Selon l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Dans son dispositif, M.[J] sollicite l'infirmation du jugement déféré et non l'annulation.

Dans sa discussion, il fait état de la nullité de l'acte introductif d'instance, sans en tirer les conséquences juridiques qui s'imposent, à savoir l'annulation du jugement déféré.

La cour n'est toutefois pas saisie par une telle demande mais par une demande tendant à voir infirmer le jugement déféré.

Dès lors, la cour n'a pas à s'interroger sur la validité ou non de l'acte introductif d'instance.

Sur la créance de la société CABOT SECURITISATION EUROPE LIMITED

M.[J] ne discute pas la qualité à agir de la société CABOT SECURITISATION EUROPE LIMITED disant venir aux droits de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE.

Le vol allégué par M.[J] de son passeport n'a pas de conséquence sur l'action en paiement formée par la société CABOT SECURITISATION EUROPE LIMITED.

Selon l'article 287 du code de procédure civile, si l'une des parties dénie l'écriture qui lui est attribuée ou déclare ne pas reconnaître celle qui est attribuée à son auteur, le juge vérifie l'écrit contesté à moins qu'il ne puisse statuer sans en tenir compte. Si l'écrit contesté n'est relatif qu'à certains chefs de la demande, il peut être statué sur les autres.

M.[J] évoque une usurpation d'identité et déclare n'avoir jamais détenu la pièce d'identité dont la copie est fournie par le cessionnaire de l'emprunteur. Il apparaît toutefois que la signature apposé sur le contrat de prêt contracté le 10 novembre 2015, fait au nom de M.[H] [J], correspond à la signature de ce dernier portée sur le procès-verbal d'une plainte qu'il avait faite à l'encontre de son ex-compagne, le 30 août 2014, dans le cadre d'un conflit sur une non-représentation d'enfant.

Dès lors, il convient de considérer que le crédit a bien été signé par M.[J]. Le prêteur disposait en outre de la pièce d'identité et du RIB de ce dernier.

Ainsi, selon offre préalable acceptée le 10 novembre 2015, la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a consenti à M.[J] un crédit affecté à l'acquisition d'un cyclomoteur de type TMAX moyennant la somme de 10.083 euros, remboursable en 36 mensualités de 311,41 euros, au taux débiteur nominal de 5,69% l'an.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 11 janvier 2017, le prêteur a mis en demeure M.[J] d'avoir à lui régler la somme de 1815,66 euros au titre des échéances impayées, dans un délai de 10 jours, à peine de déchéance du terme.

Le prêteur a prononcé la déchéance du terme par lettre recommandée du 07 février 2017.

Aux termes de l'article L 311-52 du code de la consommation, dans sa version applicable à un crédit souscrit le 10 novembre 2015, les actions en paiement doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. Cet événement est notamment caractérisé par le premier incident de paiement non régularisé.

Selon l'article 125 du code de procédure civile, les fins de non-recevoir doivent être relevées d'office lorsqu'elles ont un caractère d'ordre public.

Par ailleurs, l'article L 311-9 du code de la consommation dans sa version applicable à un contrat signé le 10 novembre 2015, énonce qu'avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur. Le prêteur consulte le fichier prévu à l'article L. 333-4, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné à l'article L. 333-5, sauf dans le cas d'une opération mentionnée au 1 de l'article L. 511-6 ou au 1 du I de l'article L. 511-7 du code monétaire et financier.

Selon les dispositions de l'article L 311-48 du même code, dans sa version applicable, lorsque le prêteur n'a pas respecté les obligations fixées aux articles L. 311-8 et L. 311-9, il est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge (...) .L'emprunteur n'est tenu qu'au seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n'a pas été déchu. Les sommes perçues au titre des intérêts, qui sont productives d'intérêts au taux de l'intérêt légal à compter du jour de leur versement, sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.

La Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE, 4e ch., 18 décembre 2014, aff. C-449/13 CA Consumer Finance SA c/ Ingrid B et autres) a précisé le sens et la portée d'obligation de vérification de la solvabilité de l'emprunteur par le prêteur dans un arrêt préjudiciel : « l'article 8, paragraphe 1, de la directive 2008/48 doit être interprété en ce sens, d'une part, qu'il ne s'oppose pas à ce que l'évaluation de la solvabilité du consommateur soit effectuée à partir des seules informations fournies par ce dernier, à condition que ces informations soient en nombre suffisant et que de simples déclarations de celui-ci soient accompagnées de pièces justificatives, et, d'autre part, qu'il n'impose pas au prêteur de procéder à des contrôles systématiques des informations fournies par le consommateur. »

La société CABOT SECURITISATION EUROPE LIMITED ne produit pas au débat l'historique du crédit; des pièces produites, il n'apparaît pas que le prêteur a consulté le FICP ni qu'il ait vérifié la solvabilité de l'emprunteur par des pièces justificatives.

Il convient en conséquence d'ordonner la réouverture des débats et la révocation de l'ordonnance de clôture afin d'inviter la société CABOT SECURITISATION EUROPE LIMITED à verser au débat l'historique du crédit et d'inviter les parties à conclure sur la recevabilité de l'action en paiement du cessionnaire ainsi que sur l'éventuelle déchéance du droit aux intérêts contractuels.

Il convient de surseoir à statuer sur la demande de paiement formée par la société CABOT SECURITISATION EUROPE LIMITED et sur la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que sur la demande de M.[J] tendant à voir rejeter les demandes adverses.

Il y a lieu de surseoir à statuer sur les dépens.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant par arrêt mixte contradictoire, par mise à disposition au greffe,

DÉCLARE irrecevable la demande de la société CABOT SECURITISATION EUROPE LIMITED tendant à voir déclarer irrecevable l'appel formé par M.[H] [J],

CONSTATE que M.[H] [J] ne sollicite pas l'annulation du jugement déféré,

ORDONNE la réouverture des débats et la révocation de l'ordonnance de clôture,

INVITE la société CABOT SECURITISATION EUROPE LIMITED à produire un historique du crédit conclu avec M.[H] [J],

INVITE les parties à conclure sur l'éventuelle forclusion de l'action en paiement de la société CABOT SECURITISATION EUROPE LIMITED et sur l'éventuelle déchéance du droit aux intérêts contractuels de la société CABOT SECURITISATION EUROPE LIMITED,

SURSOIT à statuer sur la demande de paiement formée par la société CABOT SECURITISATION EUROPE LIMITED et sur sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que sur la demande de M.[J] tendant à voir rejeter les demandes adverses,

RENVOIE à l'audience du 19 septémbre 2024 à 9 heures salle 5 Palais Monclar,

SURSOIT à statuer sur les dépens.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-7
Numéro d'arrêt : 22/12390
Date de la décision : 23/05/2024
Sens de l'arrêt : Renvoi

Origine de la décision
Date de l'import : 29/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-23;22.12390 ?
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