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17/05/2024 | FRANCE | N°19/17925

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 17 mai 2024, 19/17925


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3



ARRÊT AU FOND



DU 17 MAI 2024



N° 2024/ 76





RG 19/17925

N° Portalis DBVB-V-B7D-BFGJY







SA LA POSTE





C/



[O] [V]















Copie exécutoire délivrée le 17.05.2024 à :



-Me Caroline DALLEST, avocat au barreau de MARSEILLE



- Me Cassien robin LECCIA, avocat au barreau de MARSEILLE































Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MARSEILLE en date du 24 Octobre 2019





APPELANTE



SA LA POSTE, demeurant [Adresse 4] - [Localité 3]



représentée par Me Caroline DALLEST de la SELARL 45 AVO...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 17 MAI 2024

N° 2024/ 76

RG 19/17925

N° Portalis DBVB-V-B7D-BFGJY

SA LA POSTE

C/

[O] [V]

Copie exécutoire délivrée le 17.05.2024 à :

-Me Caroline DALLEST, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Cassien robin LECCIA, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MARSEILLE en date du 24 Octobre 2019

APPELANTE

SA LA POSTE, demeurant [Adresse 4] - [Localité 3]

représentée par Me Caroline DALLEST de la SELARL 45 AVOCATS, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Julien CREMONA, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

Madame [O] [V], demeurant [Adresse 2] - [Localité 1]

représentée par Me Cassien robin LECCIA, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Janvier 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, chargée du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre

Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant

Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Avril 2024, délibéré prorogé en raison de la survenance d'une difficulté dans la mise en oeuvre de la décision au 17 Mai 2024.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE

Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Mai 2024

Signé par Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS- PROCEDURE-PRETENTIONS DES PARTIES

Mme [O] [V] a été embauchée par contrat de travail à durée indéterminée du 5 octobre 1998, par la Poste devenue une société anonyme et en dernier lieu occupait la fonction d'agent de production niveau I-3 au PIC de [Localité 5].

Le contrat de travail a été suspendu pour maladie à compter du 14 août 2015.

Convoquée le 17 juillet 2015 à un entretien préalable au licenciement prévu le 31 juillet suivant, la salariée a été licenciée pour faute grave par lettre recommandée du 19 octobre 2015.

Suivant requête du 29 juillet 2017, Mme [V] a saisi le conseil de prud'hommes de Marseille, en contestation de son licenciement.

Selon jugement du 24 octobre 2019, le conseil de prud'hommes, en sa formation de départage, a statué ainsi :

Requalifie le licenciement pour faute grave en un licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Condamne la société LA POSTE à payer à Mme [V] les sommes suivantes :

- 3.692 € bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 369 € à titre de congés payés afférents,

- 18.002,26 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il a débouté les parties de leurs autres demandes et condamné l'employeur aux dépens.

Le conseil de la société a interjeté appel par déclaration du 17 juillet 2019.

Dans ses dernières écritures transmises au greffe par voie électronique le 2 janvier 2020, la société demande à la cour de :

« INFIRMER le jugement rendu par le Juge départiteur près le CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE MARSEILLE du 24 octobre 2014, en ce qu'il a :

- Requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse,

- Condamné LA POSTE a verser à Madame [V] les sommes suivantes :

3.692 € bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

369 € à titre de congés payés afférents,

18.002,26 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de Procédure Civile.

Dit que ces sommes porteront intérets à compter du présent jugement jusqu'à parfait paiement,

Condamné LA POSTE aux entiers dépens de la procédure,

Débouté LA POSTE de sa demande de condamnation de Madame [V] au paiement de la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

En conséquence,

CONSTATER que le licenciement pour faute grave notifié le 19 octobre 2015 à Madame [V] repose sur une faute grave et est parfaitement fondé, justifié et proportionné,

DEBOUTER Madame [O] [V] de l'intégralité de ses demandes fin et conclusions,

Reconventionnellement,

CONDAMNER Madame [O] [V] à verser à LA POSTE la somme de 2.000€ sur le fondement de l'article 700 du code de Procédure Civile et aux entiers dépens. »

Aux termes de ses dernières conclusions transmises au greffe par voie électronique le 7 mars 2022, Mme [V] demande à la cour de :

«INFIRMER lejugement entrepris

DIRE et JUGER que le licenciement de Madame [V] et sans cause réelle et sérieuse

CONDAMNER LA POSTE à lui payer les sommes suivantes :

- 3.692 € correspondant à une indemnité de préavis de 2 mois

- 369 € au titre des congés payés sur préavis

- 18.463,60 € au titre de l'indemnité légale de licenciement

- 44.312 € au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, correspondant à 2 ans de salaires

- Et 3.000 € au titre de l'article 700 du CPC

A DEFAUT, LA COUR CONFIRMERA LE JUGEMENT EN SES CONDAMNATIONS ET Y AJOUTERA UNE CONDAMNATION AU TITRE DE L'ARTICLE 700 DU CPC A HAUTEUR DE 3.000 €»

Pour l'exposé plus détaillé des prétentions et moyens des parties, il sera renvoyé, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions des parties sus-visées.

MOTIFS DE L'ARRÊT

Sur la rupture du contrat de travail

A titre liminaire, la cour rappelle que la salariée ne peut se prévaloir des dispositions de l'article L.1226-9 du code du travail et que contrairement à ce qu'elle affirme de façon péremptoire, l'arrêt pour maladie non professionnelle ne fait pas obstacle au prononcé d'un licenciement pour faute sérieuse, telle que retenue par le conseil de prud'hommes.

A- Sur la procédure disciplinaire

Après avoir reçu un rapport quant aux faits reprochés et envisageant un licenciement pour faute grave, l'employeur a convoqué la salariée à un entretien préalable au licenciement au cours duquel elle était présente et assistée.

Conformément aux dispositions conventionnelles, il a sollicité l'avis de la commission consultative paritaire (CCP) lequel a été recueilli le 6 octobre 2015 (partage de voix), étant précisé que Mme [V], informée de ses droits, n'a pas consulté son dossier et ne s'est pas présentée devant l'assistante sociale sollicitée.

En conséquence, sans critique de la salariée sur ce déroulement, il convient de dire que Mme [V] a bénéficié des garanties de fond, instaurées par les dispositions de la convention commune La Poste-France Telecom.

B- Sur les motifs du licenciement

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée du préavis.

L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

Les premiers juges ont retranscrit dans son intégralité la lettre de licenciement, dont il résulte qu'il est reproché à Mme [V] :

« - un non respect des règles de prévenance en matière d'arrêt de travail pour maladie

- un non respect des consignes

- une désorganisation du service.»

1- La société fait valoir d'une part que la salariée ne s'est pas présentée sur son lieu de travail le 15 juin 2015 sans adresser la moindre explication ou justification, qu'elle a ensuite était absente à compter du 19 juin 2015 mais n'a adressé un arrêt de travail que le 24 juin, reçu par la société le 25 juin 2015, le tout en infraction avec le règlement intérieur et en situation de récidive, comme ayant fait l'objet d'un rappel réglementaire le 4 novembre 2014.

La salariée objecte que la lettre de licenciement est imprécise quant aux absences concernées, indique avoir informé par téléphone de son absence, mais reconnaît l'envoi tardif.

Elle reproche à l'employeur de ne donner que des extraits du règlement intérieur, précisant que la convention collective ne prévoit rien sur les délais de prévenance.

En application de l'article L. 1232-6 du code du travail, la motivation de la lettre de licenciement fixe les limites du litige.

La cour constate que si des dates précises ont été données lors de l'entretien préalable, la lettre de licenciement ne les reprend pas et ne fait pas référence au règlement intérieur.

Dès lors, c'est à tort que les premiers juges ont dit que «l'absence de Mme [V] du 15 au 24 juin 2015 s'avère bien injustifiée» alors que ni ce motif ni les dates ne sont reproduites dans la lettre de licenciement, étant précisé en outre que l'employeur ne produit pas le règlement intérieur, dont il ne cite les articles 20 & 21 que dans ses écritures.

Faute de précision, le grief n'est pas établi et dès lors la récidive ne pouvait être invoquée.

2- Concernant l'absence de respect des consignes, qualifiée d'insubordination, la salariée fait valoir qu'elle a simplement rappelé l'incompatibilité du poste désigné avec son handicap, invoque le fait que Mme [K] n'était pas son encadrante, relevant un changement imposé sans écrit et au mépris de sa santé.

L'opposition de Mme [V] à occuper un poste désigné par la personne chargée de son encadrement le 7 juillet 2015, n'était pas justifiée, la fiche d'aptitude de la médecine du travail du 23/10/2013 applicable ne portant aucune restriction concernant le tri des AR sur TPF, et la suivante du 10/07/2015, confirmant son aptitude sur ce type de tâche, expréssément mentionnée.

En consequence, le grief de non respect des consignes est établi.

3- La société se fonde sur les deux premiers griefs pour dire qu'ils ont généré nécessairement une désorganisation du service, invoquant également à l'appui dans la lettre de licenciement, des témoignages d'autres agents.

L'employeur n'apporte aux débats aucun élément concernant l'impact des absences de Mme [V] sur le service et aucune piece contemporaine du 7 juillet 2015, pour démontrer que l'attitude de la salariée ce jour précis a entraîné une désorganisation, ne pouvant se référer utilement à des attestations relatives à des faits de 2014, pour justifier du 3ème grief.

En l'état du seul grief retenu par la cour, il convient d'approuver les premiers juges d'avoir dit que le licenciement pour faute grave n'était pas justifié, l'employeur ne démontrant pas l'impossibilité de poursuivre le contrat même pendant le préavis.

La cour observe que la salariée avait reçu précédemment le 16 juillet 2014 un avertissement, non contesté, pour non respect des consignes données par son supérieur hiérarchique et comportement inadapté envers un collègue de travail, puis un blâme versé au dossier et infligé le 5 janvier 2015, non contesté également, pour refus d'aller sur un chantier et de suivre le responsable dans son bureau.

S'agissant de faits de même nature qui se sont reproduits, même s'ils ont été sanctionnés en leur temps, la requalification opérée par les premiers juges reposant sur une appréciation globale du comportement de la salariée, doit être confirmée.

Sur les conséquences financières du licenciement

Dans le cadre de son délibéré, la cour a constaté que comme en 1ère instance, l'employeur et la salariée n'ont pas présenté aux débats les bulletins de salaire ou l'attestation Pôle Emploi, pour permettre le calcul des indemnités de rupture.

Dans ses écritures, l'employeur demande à la cour de retenir un salaire de référence de 1 255,36 euros correspondant à un cumul brut sur 9 mois issu du bulletin de salaire de septembre 2015, reprochant au juge départiteur d'avoir retenu un salaire de 1 846,36 euros.

Au vu des bulletins de salaire transmis par La Poste le 11 avril 2024, sur demande de la cour, il convient de constater que sur les trois derniers mois, soit juillet, août et septembre 2015, le salaire de base était de 1 683,54 euros outre des avantages constants mensuels, portant le salaire de référence à 1 848,09 euros, de sorte que la somme visée par le premier juge à hauteur de 1 846,36 euros, comme figurant au demeurant sur le bulletin de salaire de septembre comme salaire retenu, doit être approuvée.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement sur la fixation des indemnités de rupture, étant précisé que la salariée n'a proposé aucun calcul pour justifier d'une somme plus ample au titre de l'indemnité de licenciement.

Sur les frais et dépens

L'appelante qui succombe au principal , doit s'acquitter des dépens de l'instance, être déboutée de sa demande faite sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à ce titre, condamnée à payer à Mme [V] la somme supplémentaire de 1 500 euros.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Confirme le jugement déféré,

Y ajoutant,

Condamne la société La Poste à payer à Mme [O] [V] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société La Poste aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-3
Numéro d'arrêt : 19/17925
Date de la décision : 17/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 26/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-17;19.17925 ?
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