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25/04/2024 | FRANCE | N°22/13732

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8a, 25 avril 2024, 22/13732


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8a



ARRÊT AU FOND

DU 25 AVRIL 2024



N°2024/













Rôle N° RG 22/13732 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BKFJ3







[D] [U]-[V]





C/



CPAM DES BOUCHES DU RHONE



































Copie exécutoire délivrée

le : 25/04/2024

à :





- Me Juliette GOLDMA

NN, avocat au barreau de MARSEILLE



- CPAM DES BOUCHES DU RHONE















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Pole social du Tribunal judiciaire de Marseille en date du 22 Septembre 2022,enregistré au répertoire général sous le n° 18/02277.





APPELANTE



Madame [D] [U]-[V], demeurant [Adresse 1]



compara...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8a

ARRÊT AU FOND

DU 25 AVRIL 2024

N°2024/

Rôle N° RG 22/13732 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BKFJ3

[D] [U]-[V]

C/

CPAM DES BOUCHES DU RHONE

Copie exécutoire délivrée

le : 25/04/2024

à :

- Me Juliette GOLDMANN, avocat au barreau de MARSEILLE

- CPAM DES BOUCHES DU RHONE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du Tribunal judiciaire de Marseille en date du 22 Septembre 2022,enregistré au répertoire général sous le n° 18/02277.

APPELANTE

Madame [D] [U]-[V], demeurant [Adresse 1]

comparante en personne, assistée de Me Juliette GOLDMANN de la SELARL SELARL GOLDMANN, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

CPAM DES BOUCHES DU RHONE, demeurant [Adresse 3]

représentée par Mme [N] [H] en vertu d'un pouvoir spécial

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Mars 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Emmanuelle TRIOL, Présidente, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Emmanuelle TRIOL, Présidente

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Monsieur Benjamin FAURE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Aurore COMBERTON.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 Avril 2024.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 Avril 2024

Signé par Mme Emmanuelle TRIOL, Présidente et Mme Aurore COMBERTON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Mme [D] [U]-[V], salariée en qualité de directrice de l'Association [2], a déclaré avoir été victime d'un accident du travail le 8 novembre 2017. Le 13 novembre 2017, l'employeur a adressé à la Caisse Primaire Centrale d'Assurance Maladie des Bouches-du-Rhône (dite ensuite la CPCAM) une déclaration d'accident du travail puis a émis des réserves sur la matérialité du fait accidentel dénoncé par la salariée.

Suite à instruction, la CPCAM a notifié à l'assurée un refus de prise en charge de l'accident déclaré au titre de la législation sur les risques professionnels.

Mme [U]-[V] a alors saisi la commission de recours amiable de la caisse, laquelle a confirmé la décision de la CPCAM.

Le 22 mai 2018, Mme [D] [U]-[V] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches-du-Rhône de sa contestation de la décision du 12 juin 2018 de la commission de recours amiable de la CPCAM des Bouches-du-Rhône.

Par jugement contradictoire du 22 septembre 2022, le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille a :

- rejeter la contestation de Mme [U]-[V] de la décision de la commission de recours amiable de la CPCAM,

- dit que la décision a pour effet de confirmer la position adoptée par la commission,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- dit n'y avoir lieu de statuer sur les dépens.

Le tribunal a, en effet, considéré que la salariée ne présentait pas d'éléments suffisants pour démontrer des faits dommageables survenus au temps et sur le lieu du travail en lien avec l'activité professionnelle.

Par déclaration électronique du 14 octobre 2022, Mme [U]-[V] a relevé appel du jugement.

EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions n°3 dûment notifiées à la partie adverse, développées au cours de l'audience et auxquelles elle s'est expressément référée pour le surplus, l'appelante demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de :

- annuler la décision de refus de prise en charge de la CPCAM,

- en conséquence, dire que l'arrêt maladie du 9 novembre 2017 sera pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels,

- condamner la CPCAM aux dépens et à lui verser la somme de 3 000 euros, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, l'appelant fait valoir que le fait accidentel à l'origine de la lésion est l'entretien qu'elle a eu avec Mme [I], présidente de l'Association, le 7 novembre 2017, au cours duquel elle a appris que des accusations de harcèlement moral et maltraitance envers des salariés et des stagiaires étaient proférées à son encontre.

Elle explique que cet entretien a déclenché le syndrome anxio-dépressif.

Elle critique la décision de la commission de recours amiable qui a considéré qu'elle ne justifiait pas d'un fait anormal.

Elle se fonde sur les attestations de Mmes [L] et [J] pour établir le caractère soudain de la lésion.

Elle souligne qu'elle bénéficie de la présomption d'imputabilité de l'accident au travail.

Par conclusions visées à l'audience, dûment notifiées à la partie adverse et auxquelles elle s'est expressément référée, l'intimée demande à la cour de confirmer le jugement entrepris et de débouter l'appelante de ses demandes.

L'intimée réplique, au visa des dispositions de l'article L 411-1 du code de la sécurité sociale, que les circonstances de l'accident ne sont pas renseignées dans la déclaration d'accident de travail.

Elle expose que la lésion consistant en une dépression peut relever de la législation en matière de maladies professionnelles et que le fait que cette dépression soit qualifiée de soudaine dans le certificat médical initial ne prouve pas le caractère soudain nécessaire à caractériser un accident du travail.

Elle se réfère à l'enquête réalisée pour souligner que les éléments du dossier décrivent une situation correspondant à des conditions normales de travail. Elle affirme que la salariée ne démontre pas la matérialité du fait accidentel. Elle souligne que les dernières attestations produites, rédigées par Mmes [L] et [J] ne l'établissent pas davantage.

Elle explique encore que Mme [U]-[V] n'a pas été victime d'un accident du travail, le 8 novembre 2017 puisqu'elle a été indemnisée pour une affection de longue durée à compter du 9 novembre 2017.

MOTIVATION

Selon les dispositions de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise.

Dès lors qu'il est établi la survenance d'un évènement dont il est résulté une lésion aux temps et lieu de travail, celui-ci est présumé imputable aux travail, sauf pour celui qui entend le contester de rapporter la preuve qu'il provient d'une cause totalement étrangère au travail.

Le salarié doit d'abord établir autrement que par ses propres affirmations les circonstances exactes de l'accident et son caractère professionnel.  

La caisse a refusé la prise en charge de l'accident déclaré par Mme [U]-[V] au titre de la législation sur les risques professionnels au motif que la matérialité du fait accidentel n'était pas démontrée par la salariée.

Il revient donc à la juridiction d'analyser si les éléments produits par Mme [U]-[V] établissent qu'elle a subi un évènement soudain et brutal, le 8 novembre 2017 alors qu'elle se trouvait au temps et sur son lieu de travail.

L'appelante a précisé que l'accident se serait produit à la suite d'un entretien qu'elle a eu avec la présidente de l'Association dans laquelle elle travaillait, le 7 novembre 2017 vers 17 heures dans les locaux de l'établissement. Or, l'accident du travail est daté du 8 novembre 2017 alors que la rencontre avec la présidente de l'Association qui serait, aux dires de l'appelante, le fait générateur de la lésion psychique s'est déroulée le 7 novembre 2017. Il y a là une contradiction qui fragilise les allégations de l'appelante.

Le certificat médical initial du 9 novembre 2017 a fait état des éléments suivants: 'dépression soudaine suite à stress professionnel; anxiété profonde; amaigrissement de 10 % et insomnie'. Si cette pièce médicale atteste de l'existence d'une lésion dans l'état de santé de Mme [U]-[V], d'ailleurs non contestée par la caisse, pour autant les termes employés par le médecin ne corroborent pas le fait que la salariée aurait subi un évènement soudain. En effet, la dépression se caractérise par la présence d'une humeur dépressive ou d'une perte durable de la capacité à éprouver du plaisir ou de l'intérêt. Elle diffère du choc psychologique qui résulte d'un évènement traumatisant qui submerge la faculté que possède un individu à faire face aux émotions qu'il ressent lorsque celui-ci survient. Ensuite, la perte de poids de 10 % ne peut se produire sur une journée. De même, le phénomène d'insomnie se définit par un manque ou une mauvaise qualité du sommeil, ce qui suppose une certaine durée de ces symptômes.

Les attestations émanant des personnes qui ont travaillé avec Mme [U]-[V] le lendemain du prétendu fait accidentel font surtout état d'une fatigue de l'intéressée. Ainsi, M. [E] souligne 'des signes évidents de fatigue' chez l'appelante et mentionne qu'elle semblait préoccupée par la situation dans son établissement'. Mme [S] a témoigné que Mme [U]-[V] lui avait déclaré qu'elle était très fatiguée et qu'elle rencontrait des difficultés majeures sur son lieu de travail. M. [W] a également pu attester de ce que Mme [U]-[V] se plaignait elle-même de se trouver en burn-out. Ces témoignages contredisent les allégations de l'existence d'un accident du travail.

Seuls les propos relatés par Mmes [L] et [J] dans la lettre produite aux débats permettraient d'avérer que l'entretien du 7 novembre 2017 a généré chez la directrice de l'Association un comportement violent et inapproprié puisqu'il est relaté que Mme [U] s'est mise à genou, a parlé de suicide, était très énervée à la sortie de sa rencontre avec la présidente. Cependant, ce document est à considérer avec prudence puisqu'il a manifestement été écrit dans le cadre de la procédure de licenciement pour faute de la salariée. Au surplus, il est fragilisé par le fait que, comme remarqué précédemment, l'accident du travail est daté du 8 novembre 2017.

Il est ainsi avéré que Mme [U]-[V] échoue à prouver la matérialité d'un fait accidentel alors que l'enquête réalisée par la CPAM des Bouches-du-Rhône met également en échec la thèse de l'appelante au regard, en tout premier lieu, de l'audition de celle-ci qui reconnaît ceci: 'le 7 novembre 2017, je me suis rendue sur mon lieu de travail à 16 heures car je n'étais pas bien. J'avais envoyé un message le matin à la présidente pour lui signaler mon état de santé car je ne savais pas si j'allais être présente à l'entretien'. La présidente de l'Association et le chef-comptable ont ensuite pu affirmer à la caisse que l'entretien s'était déroulé dans des conditions normales, sans cris et sans manifestations physiques ou psychiques visibles de la directrice. Les éléments de l'enquête effectuée par la CPAM ont donc abouti à un rejet de prise en charge.

Enfin, la cour note avec intérêt que l'arrêt de travail initial et les arrêts de prolongation ont été gérés par la caisse au titre d'une affection longue durée, ce qui exclut tout accident du travail.

Faute de démontrer la matérialité du fait accidentel, Mme [U]-[V] ne peut, à juste titre, ni se prévaloir de la présomption d'imputabilité au travail de ses lésions, ni de ce que ces lésions psychiques et corporelles médicalement constatées ont été occasionnées par un accident du travail.

La cour ne peut qu'approuver la décision des premiers juges qui est donc confirmée en toutes ses dispositions.

Mme [U]-[V], qui succombe à l'instance, est condamnée aux entiers dépens et est déboutée de la demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions soumises à la cour,

Y ajoutant,

Condamne Mme [D] [U]-[V] aux dépens,

Déboute Mme [D] [U]-[V] de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8a
Numéro d'arrêt : 22/13732
Date de la décision : 25/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-25;22.13732 ?
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