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15/04/2024 | FRANCE | N°22/07830

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8b, 15 avril 2024, 22/07830


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8b



ARRÊT AU FOND

DU 15 AVRIL 2024



N°2024/













Rôle N° RG 22/07830 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJPSB







E.U.R.L. [5]





C/



URSSAF PACA



[Z] [J]









































Copie exécutoire délivrée

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E.U.R.L. [5]<

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URSSAF PACA

Madame [Z] [J]















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Pole social du TJ de marseille en date du 05 Mai 2022, enregistré au répertoire général sous le n° 16/03366.





APPELANTE



E.U.R.L. [5], demeurant [Adresse 4]



représentée par Me Maud ANDRIEUX, avocat au barreau de MARSEILLE





INTIME



URSSAF PAC...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8b

ARRÊT AU FOND

DU 15 AVRIL 2024

N°2024/

Rôle N° RG 22/07830 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJPSB

E.U.R.L. [5]

C/

URSSAF PACA

[Z] [J]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

E.U.R.L. [5]

URSSAF PACA

Madame [Z] [J]

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du TJ de marseille en date du 05 Mai 2022, enregistré au répertoire général sous le n° 16/03366.

APPELANTE

E.U.R.L. [5], demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Maud ANDRIEUX, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIME

URSSAF PACA, demeurant [Adresse 1]

représenté par Mme [X] [H] (Inspectrice du contentieux) en vertu d'un pouvoir spécial

PARTIE INTERVENANTE

Madame [Z] [J], demeurant [Adresse 2]

non comparante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 Février 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre

Madame Isabelle PERRIN, Conseiller

Monsieur Benjamin FAURE, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Anne BARBENES.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Avril 2024.

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 15 Avril 2024

Signé par Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre et Madame Anne BARBENES, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Par lettre d'observations en date du 5 juin 2015, faisant référence au procès-verbal n°13-056/2015 en date du 5 juin 2015 adressé au procureur de la République, l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur [l'URSSAF] a notifié à l'entreprise Option latine [la cotisante] un redressement d'une part pour travail dissimulé avec verbalisation-dissimulation d'emploi salarié : redressement forfaitaire, et d'autre part portant annulation des réductions Fillon, d'un montant total de 6 594 euros outre une majoration de redressement complémentaire pour infraction de travail dissimulé de 955 euros, et ce au titre de l'année 2015.

Après échange d'observations, l'URSSAF a ensuite notifié à la cotisante une mise en demeure en date du 22 septembre 2015 d'un montant total de 8 035 euros dont 6 593 euros de cotisations outre 955 euros de majorations de redressement et 487 euros de majorations de retard.

Après rejet le 10 décembre 2015 par la commission de recours amiable, la cotisante a saisi le 19 février 2016 un tribunal des affaires de sécurité sociale.

Par jugement en date du 5 mai 2022, le tribunal judiciaire de Marseille, pôle social, après avoir déclaré le recours recevable, a :

* déclaré régulière en la forme la lettre d'observations du 5 juin 2015,

* confirmé la décision de la commission de recours amiable du 10 décembre 2015,

* confirmé le redressement ayant donné lieu à la mise en demeure du 22 septembre 2015 pour le paiement de la somme totale de 8 035 euros,

* rejeté les prétentions de la cotisante,

* condamné la cotisante à payer à l'URSSAF la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamné la cotisante aux dépens.

La cotisante a relevé appel dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas discutées, en formalisant un premier appel par R.P.V.A le 31 mai 2022 (11h06), lequel a été enregistré sous la référence 22/7830 et un second appel également par R.P.V.A le 31 mai 2022 (15h00), qui a été enregistré sous la référence 22/07831.

Par ordonnance en date du 29 septembre 2022 du magistrat chargé d'instruire, la procédure RG 22/7831 a été jointe à celle portant le numéro 22/7830.

Par acte du commissaire de justice en date du 26 janvier 2024, l'URSSAF a fait assigner Mme [Z] [J] en intervention forcée.

Par conclusions n°3 remises par voie électronique le 26 janvier 2024, reprises oralement à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, la cotisante sollicite la réformation du jugement et demande à la cour, statuant à nouveau, à titre principal d'annuler le redressement.

A titre infiniment subsidiaire, elle lui demande de juger que les sommes redressées ne peuvent être supérieures à un montant de 230.64 euros.

En tout état de cause, elle sollicite la condamnation de l'URSSAF au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Par conclusions réceptionnées par le greffe le 18 janvier 2024, soutenues oralement à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, l'URSSAF sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a validé le redressement opéré par la lettre d'observations du 5 juin 2015 et demande à la cour, statuant à nouveau de :

* constater que les causes du litige sont désormais soldées,

* condamner la cotisante à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Bien que régulièrement assignée par acte de commissaire de justice en date du 26 janvier 2024, pour l'audience du 28 février 2024, dans le cadre d'un procès-verbal dressé dans les formes de l'article 659

du code de procédure civile, Mme [Z] [J] n'y a pas comparu ni été représentée, étant précisé que l'URSSAF a justifié contradictoirement, ainsi que demandé sur l'audience, de l'envoi par le commissaire de justice de la lettre recommandée avec avis de réception prescrite à peine de nullité, dont les mentions postales établissent qu'elle a été expédiée le 26 janvier 2014, et que sa destinataire est inconnue à l'adresse.

MOTIFS

Pour déclarer régulière en la forme la lettre d'observations et confirmer le redressement ayant donné lieu à une mise en demeure du 22 septembre 2015 pour le paiement de la somme totale de 8 035 euros, les premiers juges ont retenu que les dispositions de l'article R.133-8 du code de la sécurité sociale applicables au moment des faits, ont été modifiées en septembre 2017 et ne prévoient nullement la nullité de la lettre d'observations pour défaut de signature par le directeur de l'organisme, qu'aucun grief n'est rapporté par la cotisante, que le défaut de justification du consentement préalable des personnes auditionnées est sans incidence, la lettre d'observations se basant sur les constatations du procès-verbal de constatation de l'inspecteur du recouvrement et des propos rapportés par les personnes présentes afin de connaître leur identité, adresse et fonction dans le cadre d'un contrôle conjoint police-URSSAF, où il était constaté quatre personnes se trouvant en situation de travail dont une n'était pas déclarée, et que la notion d'entraide amicale concernant Mme [J] doit être écartée, étant en action de travail, dans une entreprise commerciale, en occupant un vrai poste de serveur préexistant d'un salarié absent.

Enfin, ils ont jugé justifié le recours à l'évaluation forfaitaire justifié, en l'absence d'éléments contraires apportés par la cotisante, ainsi que le redressement portant sur les réductions Fillon résultant du constat d'un travail dissimulé.

Exposé des moyens des parties :

La cotisante soutient que la procédure de contrôle initiée est fondée sur les dispositions de l'article R.133-8 du code de la sécurité sociale, pour s'inscrire dans le cadre de la lutte contre le travail illégal, avec procès-verbal de travail dissimulé adressé au procureur de la République, le contrôle étant inopiné et non point un contrôle d'assiette. Elle en tire pour conséquence que la lettre d'observations est irrégulière, faute d'avoir été signée par le directeur de l'URSSAF. Elle ajoute que l'argument retenu par les premiers juges tenant à l'abrogation le 25 septembre 2017 de l'article R.133-8 du code de la sécurité sociale est inopérant, la procédure diligentée étant antérieure à celle-ci, et que les dispositions de cet article visent notamment à garantir les droits de la personne contrôlée, compte tenu des droits exorbitants dont dispose l'URSSAF dans le cadre de ces contrôles.

Elle invoque en second lieu l'irrégularité du contrôle, soulignant que le procès-verbal de travail dissimulé, qui ne lui a été communiqué que le 5 octobre 2021, repose exclusivement sur les 'auditions' intervenues le 27 mai 2015, sans faire mention que les personnes auditionnées ont donné leur consentement préalable et explicite exigé par l'article L.8271-6-1 du code du travail, alors que ce consentement constitue une garantie de fond attachée aux droits de la défense dont le non-respect vicie nécessairement le procès-verbal des agents de contrôle ainsi que le redressement fondé sur leurs déclarations.

L'URSSAF réplique que les dispositions de l'article R.133-8 du code de la sécurité sociale sont d'interprétation stricte et que lorsqu'elle opère un redressement à la suite d'un contrôle inopiné effectué par l'un de ses inspecteurs au titre de la recherche des infractions constitutives de travail dissimulé, elle agit à des fins de recouvrement dans le cadre de la mission qui lui est dévolue par l'article L.243-7 du code de la sécurité sociale, ce qui rend inapplicable l'article R.133-8 précité.

Elle soutient que le fait que l'inspecteur du recouvrement diligente un contrôle inopiné en vue de la recherche des infractions de travail dissimulé ne suffit pas à entraîner l'application de l'article R.133-8 du code de la sécurité sociale et que la situation de travail dissimulé a été appréciée sur les constatations de l'inspecteur du recouvrement lors du contrôle inopiné du 27 mars 2015 et que selon l'alinéa 4 de l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale, seul applicable en l'espèce, les agents en charge du contrôle peuvent interroger les personnes rémunérées, sans qu'il soit requis de dresser un procès-verbal d'audition.

Réponse de la cour :

Selon l'article L.243-7 du code de la sécurité sociale, pris dans sa rédaction applicable issue de la loi 2014-1554 du 22 décembre 2014, le contrôle de l'application des dispositions du présent code par les employeurs, personnes privées ou publiques y compris les services de l'Etat autres que ceux mentionnés au quatrième alinéa et, dans le respect des dispositions prévues à l'article L.133-6-5, par les travailleurs indépendants ainsi que par toute personne qui verse des cotisations ou contributions auprès des organismes chargés du recouvrement des cotisations du régime général est confié à ces organismes. Le contrôle peut également être diligenté chez toute personne morale non inscrite à l'organisme de recouvrement des cotisations de sécurité sociale en qualité d'employeur lorsque les inspecteurs peuvent faire état d'éléments motivés permettant de présumer, du fait d'un contrôle en cours, que cette dernière verse à des salariés de l'employeur contrôlé initialement une rémunération, au sens de l'article L.242-1. Les agents chargés du contrôle sont assermentés et agréés dans des conditions définies par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale. Ces agents ont qualité pour dresser en cas d'infraction aux dites dispositions des procès-verbaux faisant foi jusqu'à preuve du contraire. Les unions de recouvrement les transmettent, aux fins de poursuites, au procureur de la République s'il s'agit d'infractions pénalement sanctionnées.

Les organismes chargés du recouvrement des cotisations du régime général sont également habilités dans le cadre de leurs contrôles à vérifier l'assiette, le taux et le calcul des cotisations destinées au financement des régimes de retraites complémentaires obligatoires mentionnés au chapitre Ier du titre II du livre IX pour le compte des institutions gestionnaires de ces régimes, des cotisations et contributions recouvrées pour le compte de l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage par les organismes mentionnés aux c et e de l'article L.5427-1 du code du travail et des cotisations destinées au financement des régimes mentionnés au titre Ier du livre VII du présent code. Le résultat de ces vérifications est transmis aux dites institutions aux fins de recouvrement. (...)

L'article R.243-59 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable issue du décret 2013-1007 du 3 décembre 2013, dispose que tout contrôle effectué en application de l'article L.243-7 est précédé de l'envoi par l'organisme chargé du recouvrement des cotisations d'un avis adressé à l'employeur ou au travailleur indépendant par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception, sauf dans le cas où le contrôle est effectué pour rechercher des infractions aux interdictions mentionnées à l'article L. 8221-1 du code du travail. Cet avis fait état de l'existence d'un document intitulé "Charte du cotisant contrôlé" présentant au cotisant la procédure de contrôle et les droits dont il dispose pendant son déroulement et à son issue, tels qu'ils sont définis par le présent code. Il précise l'adresse électronique où ce document, dont le modèle est fixé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, est consultable, et indique qu'il est adressé au cotisant sur sa demande.

L'employeur ou le travailleur indépendant a le droit pendant le contrôle de se faire assister du conseil de son choix. Il est fait mention de ce droit dans l'avis prévu à l'alinéa précédent.

Les employeurs, personnes privées ou publiques, et les travailleurs indépendants sont tenus de présenter aux agents chargés du contrôle mentionnés à l'article L.243-7, dénommés inspecteurs du recouvrement, tout document et de permettre l'accès à tout support d'information qui leur sont demandés par ces agents comme nécessaires à l'exercice du contrôle.

Ces agents peuvent interroger les personnes rémunérées notamment pour connaître leurs nom et adresse ainsi que la nature des activités exercées et le montant des rémunérations y afférentes, y compris les avantages en nature.

A l'issue du contrôle, les inspecteurs du recouvrement communiquent à l'employeur ou au travailleur indépendant un document daté et signé par eux mentionnant l'objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifiée et la date de la fin du contrôle. (...)

Par applications cumulées des articles L.8271-1 et L.8271-1-2 du code du travail, les infractions constitutives de travail illégal sont recherchées et constatées dans la limite de leurs compétences respectives en matière de travail illégal, notamment par:

* les agents de contrôle de l'inspection du travail mentionnés à l'article L.8112-1,

* les officiers et agents de police judiciaire,

* les agents des impôts et des douanes,

* les agents des organismes de sécurité sociale et des caisses de mutualité sociale agricole agréés à cet effet et assermentés.

Dans sa rédaction applicable, issue du décret 2013-1107 du 3 décembre 2013, l'article R.133-8 du code de la sécurité sociale dispose que lorsqu'il ne résulte pas d'un contrôle effectué en application de l'article L.243-7 du présent code (...), tout redressement consécutif au constat d'un délit de travail dissimulé est porté à la connaissance de l'employeur ou du travailleur indépendant par un document daté et signé par le directeur de l'organisme de recouvrement, transmis par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception.

Ce document rappelle les références du procès-verbal pour travail dissimulé établi par un des agents mentionnés à l'article L.8271-7 du code du travail et précise la nature, le mode de calcul et le montant des redressements envisagés. Il informe l'employeur ou le travailleur indépendant qu'il a la faculté de présenter ses observations dans un délai de trente jours et de se faire assister par une personne ou un conseil de son choix.

A l'expiration de ce délai et, en cas d'observations de l'employeur ou du travailleur indépendant, après lui avoir confirmé le montant des sommes à recouvrer, le directeur de l'organisme de recouvrement met en recouvrement les sommes dues selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations de sécurité sociale.

Contrairement à ce qui a été retenu par les premiers juges, les dispositions précitées de l'article R.133-8 du code de la sécurité sociale sont applicables à la lettre d'observations datée du 5 juin 2015, la circonstance que ces dispositions aient été ultérieurement abrogées étant inopérante.

Dans son arrêt du 9 octobre 2014 (2e Civ., 13-16.110), la Cour de cassation a posé le principe de l'autonomie de la procédure de contrôle de droit commun de celle fondée sur les articles L.8271-1 et suivants du code du travail en jugeant que les dispositions de l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale ne sont pas applicables aux opérations ayant pour objet la recherche et la constatation d'infractions constitutives de travail illégal, engagées sur le fondement des articles L.8271-1 et suivants du code du travail.

En l'espèce, la lettre d'observations datée du 5 juin 2015, mentionne que l'objet du contrôle est la 'recherche des infractions aux interdictions de travail dissimulé mentionnées à l'article L.8221-1 du code du travail'.

Elle indique qu'elle est consécutive à'la vérification des législations de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires concernant les infractions aux interdictions mentionnées aux articles L.8221-1 et L.8221-2 du code du travail pour l'établissement sis [Adresse 3]' et que 'les observations communiquées ci-dessous résultent des infractions de travail dissimulé qui ont été constatées et qui font l'objet d'un procès-verbal n°13-056/2015 en date du 05/06/2015 adressé au procureur de la République'.

Au titre des constatations pour le redressement n°1:'travail dissimulé avec verbalisation-dissimulation d'emploi salarié: redressement forfaitaire', ce document mentionne: 'dans le cadre de notre mission de lutte contre le travail dissimulé, nous avons été amenés à effectuer, en partenariat des services de police du [Localité 6], une visite inopinée, le 27 mars 2015 à 23 heures 15 minutes, dans un restaurant à l'enseigne (...) puis détaille les constatations effectuées: 'à notre arrivée dans l'établissement quatre personnes se trouvent en situation de travail, deux personnes se trouvent derrière le comptoir du bar pour la préparation des boissons, une personne se trouve en salle pour la prise des commandes et le service des clients et une personne se trouve derrière la table de mixage pour l'animation de la soirée'.

Il y est précisé, qu'après avoir décliné leurs identités, l'objet du contrôle et examiné le registre unique du personnel, ils ont constaté qu'il n'y figure pas le nom de Mme [Z] [J], qui 'leur a déclaré travailler dans le restaurant à raison de deux à trois fois dans l'année et ce depuis 2013", et qu'après avoir quitté les lieux à 23h50, à l'interrogation du fichier des déclarations uniques d'embauche, ils ont constaté que 'Mme [J] a travaillé dans cet établissement du 22 février 2013 au 10 mars 2013 et ne fait plus partie depuis des effectifs'

Contrairement à ce que soutient l'URSSAF, cette lettre d'observations, comme le contrôle, se situent expressément et exclusivement dans le cadre de la recherche et la constatation d'infractions constitutives

de travail illégal, engagées sur le fondement des articles L.8271-1 et suivants du code du travail, auxquelles les dispositions de l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale ne sont pas applicables.

La circonstance que le contrôle inopiné ayant pour objet la recherche et la constatation d'infractions constitutives de travail illégal, ait été opéré conjointement avec des agents de l'URSSAF est sans incidence sur le cadre juridique du dit contrôle qui n'est pas en l'espèce un contrôle d'assiette.

La lettre d'observations ne fait que reprendre les constatations faites par l'inspecteur du recouvrement, conjointement avec des officiers ou agents de police judiciaire, et les déclarations des salariés recueillies lors du contrôle inopiné diligenté avec ces derniers, ayant pour objet la recherche et la constatation des infractions précitées, et le second chef de redressement 'annulation des réductions Fillon suite au constat de travail dissimulé' n'est que la conséquence du travail dissimulé verbalisé.

Il s'ensuit que la procédure de contrôle n'a pas été diligentée, contrairement à ce que soutient l'URSSAF, sur le fondement des articles L.243-7 et R.243-59 du code de la sécurité sociale, qu'elle ne vise pas.

Elle ne peut être fondée que sur les dispositions de l'article R.133-8 du code de sécurité sociale et à défaut de sa signature par le directeur de l'organisme de recouvrement, la lettre d'observations datée du 5 juin 2015 est affectée d'une irrégularité de fond, justifiant l'annulation du redressement, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice. (2e Civ., 7 septembre 2023, n°21.20657, 2e Civ., 9 octobre 2014, n°13-19493)

Par infirmation du jugement entrepris, la cour annule le redressement opéré par la lettre d'observations datée du 5 juin 2015, ainsi que la mise en demeure subséquente.

Succombant en ses prétentions, l'URSSAF doit être condamnée aux dépens, et ne peut utilement solliciter le bénéfice des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Il serait par contre inéquitable de laisser à la charge de la cotisante les frais qu'elle a été contrainte d'exposer pour sa défense dans le cadre du présent litige, ce qui justifie de lui allouer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

- Infirme le jugement entrepris en ses dispositions soumises à la cour,

Statuant des chefs infirmés et y ajoutant,

- Déboute l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur de l'ensemble de ses prétentions,

- Condamne l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur à payer à l'entreprise [5] la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur aux dépens.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8b
Numéro d'arrêt : 22/07830
Date de la décision : 15/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-15;22.07830 ?
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