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12/04/2024 | FRANCE | N°19/03688

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 12 avril 2024, 19/03688


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3



ARRÊT AU FOND



DU 12 AVRIL 2024



N° 2024/ 67



RG 19/03688

N° Portalis DBVB-V-B7D-BD4QW







[B] [G]





C/



Association HOME SERVICES

























Copie exécutoire délivrée le 12 Avril 2024 à :



-Me Inès MADYAN, avocat au barreau de MARSEILLE



- Me Christine SOUCHE-MARTINEZ, avocat au barreau de MA

RSEILLE



























Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MARSEILLE en date du 31 Janvier 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 16/01692.





APPELANTE



Madame [B] [G]

(bénéficie d'une...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 12 AVRIL 2024

N° 2024/ 67

RG 19/03688

N° Portalis DBVB-V-B7D-BD4QW

[B] [G]

C/

Association HOME SERVICES

Copie exécutoire délivrée le 12 Avril 2024 à :

-Me Inès MADYAN, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Christine SOUCHE-MARTINEZ, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MARSEILLE en date du 31 Janvier 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 16/01692.

APPELANTE

Madame [B] [G]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/7400 du 12/07/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE), demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Inès MADYAN, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Jean-Paul GUEYDON, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

Association HOME SERVICES, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié es qualités audit siège [Adresse 2]

représentée par Me Christine SOUCHE-MARTINEZ, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Janvier 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre

Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant

Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Agnès BAYLE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Avril 2024.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Avril 2024

Signé par Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

Mme [B] [G] était engagée par l'association Home Service Marseille en qualité d'aide à domicile, selon contrat à durée déterminée à temps partiel du 31 août 2000 au 31 octobre 2000.

La convention collective nationale applicable était celle de l'aide, de l'accompagnement, des soins et services à domicile.

La relation Contractuelle s'est poursuivie à compter du 1er décembre 2000 selon contrat à durée indéterminée à temps partiel et plusieurs avenants ont modifié la durée mensuelle de travail.

La modulation du temps de travail était instaurée par l'avenant du 30 mai 2007 et le 27 décembre 2007, le temps de travail de la salariée était fixé à 151,67 heures, avec effet au 1er janvier 2008.

Le contrat de travail de la salariée a été suspendu pour congé maternité du 9 juillet 2009 au 20 janvier 2010 et à la reprise de son emploi, l'avenant du 3 février 2010 a fixé, sur sa demande, la durée mensuelle moyenne de travail à 76 h dans le cadre de la modulation.

Ensuite, Mme [G] a été congé parental d'août 2011 jusqu'au 31 août 2012.

A compter du 1er septembre 2012, selon avenant du 31 août 2012, la durée mensuelle de travail est passée à 95 heures, puis par avenant du 29 novembre 2012 à 120 heures.

La salariée a été en arrêt pour accident de travail du 4 janvier 2013 au 5 janvier 2014.

Lors de la visite de reprise du 17 janvier 2014, elle était déclarée apte avec réserves, puis le médecin du travail indiquait le 7 février 2014 « apte avec réserves, sans port de charge, pas de postures, rachis penché en avant, à revoir dans 24 mois ».

La salariée a été en arrêt pour maladie à compter du 17 février 2014.

Le 3 juillet 2014, la CPAM des Bouches-du-Rhône lui notifiait un refus de prise en charge d'une maladie au titre de la législation relative aux risques professionnels.

La salariée était reconnue travailleur handicapé par décision du 7 mai 2015 de la MDPH des Bouches-du-Rhône.

Lors de la visite de reprise du 7 janvier 2016 à, le médecin du travail mentionnait une inaptitude au poste et le 25 janvier 2016, confirmait ce constat, avec l'indication suivante « pourrait travailler assise avec fauteuil adapté (appui lombaire) avec les restrictions émises sur la fiche de visite du 7 janvier 2013 (ne peut maintenir la station debout, soulever une charge même minime, effectuer des efforts avec le membre supérieur droit, s'accroupir, se mettre à genoux)».

Mme [G] était convoquée le 13 février 2016 à un entretien préalable à une mesure de licenciement, fixé au 23 février 2016. Elle était licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement par courrier du 25 mars 2016.

Mme [G] saisissait le 7 juillet 2016 le conseil de prud'hommes de Marseille en contestation du licenciement et en paiement de diverses sommes.

Par jugement du 31 janvier 2019, le conseil de prud'hommes, en sa formation de départage, a statué comme suit :

« Dit que le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement de [B] [G] par l'association Home Services est valablement fondé ;

Déboute [B] [G] de l'ensemble de ses demandes formulées à l'encontre de l'association Home -Services ;

Condamne [B] [G] à verser à l'association Home Services la somme de 947,31 euros en remboursement de la somme indûment perçue ;

Dit n'y avoir lieu à faite application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

Condamne [B] [G] aux entiers dépens de la présente procédure ;

Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires».

Par acte du 4 mars 2019, le conseil de la salariée a interjeté appel de cette décision.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique, le 30 novembre 2023, Mme [G] demande à la cour de :

« Infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 31 janvier 2019 par le Juge Départiteur du Conseil de Prud'hommes de Marseille et de condamner l'intimée au paiement :

- au titre de rappel sur salaire et accessoires dus à Mme [G] pour la période du 6 juillet 2013 au 29 mars 2016, la somme brute de 10 714,52 € plus les congés payés afférents de 1 071,45 € et de dire et juger qu'aucune somme n'a été indûment perçue par la salariée ;

- au titre des dommages et intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de Travail sur le fondement de l'article L 1221-2 du code du travail, la somme de 5.000,00 € ;

- au titre du travail dissimulé en application des dispositions de l'article L 8221-1 et suivant du Code du Travail à la somme 9 478,32 € ;

- au titre du licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse sur le fondement des anciens articles L 1226-2 et suivants de ce chef au paiement de la somme de 30.000,00 €, ainsi qu'au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis de deux mois, de 3.159,44 € plus congés payés afférents de 315,95€;

- de prononcer une astreinte de 100,00€ par jour de retard, passé le délai de dix jours à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, pour la délivrance des bulletins de salaires ainsi que d'une attestation Pôle Emploi rectifiée sur la base d'un temps complet et conformes à la loi ;

- de la somme de 2 000,00€ à verser au conseil de l'appelante, au titre des frais irrépétibles engagés pour l'instance, et non compris dans les dépens, en application de l'article 700 du Code civil et de l'article 37 de la loi de 1991, à la condition que ce dernier renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

- des entiers dépens ».

Dans ses dernières écritures communiquées au greffe par voie électronique le 20 septembre 2023, l'association Home Service Marseille demande à la cour de :

« Prononcer la péremption de l'instance,

Accueillir la fin de non-recevoir tirée de l'inobservation du délai d'appel par Madame [G] et déclarer sa demande en appel irrecevable pour tardiveté,

En tout état de cause,

Confirmer le jugement de départage du 31 janvier 2019 du Conseil de prud'hommes de Marseille en ce qu'il a :

Dit que le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement de Madame [G] est valablement fondé,

Débouté Madame [G] de l'ensemble de ses demandes formulées à l'encontre de l'association Home Services,

Condamné Madame [G] à verser à l'association Home Services la somme de 947,31 € en remboursement de la somme indûment perçue,

Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

Dire et Juger que l'association Home Services n'a nullement modifié unilatéralement le contrat de travail de Madame [G], la salariée ayant consenti et signé les différents avenants mentionnés,

En conséquence,

Débouter Madame [G] de l'ensemble de ses demandes à ce titre.

Dire et Juger que Madame [G] n'est nullement fondée à solliciter un rappel sur remboursement des cotisations mutuelles prélevées,

En conséquence,

Débouter Madame [G] de cette demande,

Sur le licenciement pour inaptitude de Madame [G]

Dire et Juger que l'association HOME SERVICES a rempli l'ensemble de ses obligations, notamment en matière de recherche de reclassement et qu'ainsi le licenciement pour inaptitude de Madame [G] est totalement fondé,

En conséquence,

Débouter Madame [G] de l'ensemble de ses demandes à ce titre,

A titre reconventionnel,

Constater que Madame [G] a indûment perçu la somme de 947,31 euros,

En conséquence,

Condamner Madame [G] à rembourser à l'association Home Services la somme de 947,31 euros,

En tout état de cause,

Condamner Madame [G] au paiement d'une somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens ».

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs écritures susvisées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I) Sur la procédure

A titre liminaire, la cour constate que l'appelante ne remet pas en cause le débouté de sa demande au titre du remboursement de la mutuelle, elle est réputée en application de l'article 954 dernier alinéa du code de procédure civile, s'être appropriée les motifs du jugement.

Sur l'inobservation du délai d'appel

L'association soutient que le délai d'appel n'a pas été respecté par la salariée puisque le jugement a été notifié par le greffe le 31 janvier 2019 et présenté à Mme [G] le 1er février 2019, que le délai d'appel expirait nécessairement le 1er mars 2019, la déclaration d'appel formalisée le 4 mars 2019 étant sans équivoque tardive.

La salariée conteste les dates indiquées par l'intimée, précisant avoir réceptionné ledit jugement le 7 février 2019 et avoir régulièrement diligenté son appel 4 mars 2019, soit trois jours avant le terme du délai, expirant le 7 mars 2019.

En application des dispositions de l'article 538 code de procédure et R. 1461-1 du code du travail le délai d'appel est d'un mois à compter de la notification du jugement.

En vertu des dispositions de l'article 669 du code de procédure civile « la date de réception de la notification faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception est celle qui est apposée par l'administration des postes lors de la remise de la lettre à son destinataire ».

Par ailleurs, les dispositions de l'article 641 du code de procédure civile indiquent « lorsqu'un délai est exprimé en mois ou en années, ce délai expire le jour du dernier mois ou de la dernière année qui porte le même quantième que le jour de l'acte, de l'événement, de la décision ou de la notification qui fait courir le délai ».

En l'espèce, le jugement a été notifié aux parties le 31 janvier 2019 mais n'a été réceptionné par la salariée que le 7 février 2019 (pièce appelante 12-1 /attestation de notification), de sorte que l'appelante avait jusqu'au 7 mars 2019 pour former appel.

La déclaration d'appel ayant été faite le 4 mars 2019, la fin de non recevoir doit êre rejetée.

Sur la péremption

L'association soulève la péremption d'instance estimant qu'aucune diligence n'a été accomplie par la salariée entre le 6 mai 2020, date de communication des conclusions responsives et récapitulatives et le 2 mars 2023, date de communication du troisième jeu de conclusions de l'appelante.

La salariée conteste la péremption d'instance puisque le 14 décembre 2020 la cour a demandé aux parties de lui faire savoir sous quinzaine si elles s'opposaient à une décision sans audience, que le 28 décembre 2020 le conseil de l'appelante a répondu que sa cliente s'y opposait et que le 19 décembre 2022, moins de deux ans plus tard, la cour a adressé aux parties un avis de clôture de fixation des plaidoiries pour l'audience du 21 mars 2023.

En vertu des dispositions de l'article 386 du code de procédure civile « l'instance est périmée lorsque aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans ».

La cour constate que l'historique du dossier ne permet pas de retenir la péremption, et ce d'autant que la Cour de cassation a assoupli les conditions d'accès au juge en opérant le 7 mars 2024 (pourvoi 21-23230) un revirement de sa jurisprudence puisqu'elle a considéré « qu'une fois que les parties ont accompli toutes les charges procédurales leur incombant, la péremption ne court plus à leur encontre, sauf si le conseiller de la mise en état fixe un calendrier ou leur enjoint d'accomplir une diligence particulière ».

Dès lors, la cour constate que la péremption n'est pas acquise.

II) Sur l'exécution du contrat de travail

1. Sur le rappel de salaire pour la période du 6 juillet 2013 au 25 mars 2016

La salariée soutient que l'association a modifié unilatéralement son contrat de travail et réclame, sur le fondement de l'avenant du 24 décembre 2007 qui a fixé un temps plein, un rappel de salaire correspondant à une différence de 31,67 heures par mois par rapport aux 120 heures prévues sur le dernier avenant de 2012.

Elle conteste avoir signé les avenants des 31 août et 29 novembre 2012 et en demande le rejet en raison des anomalies relevées, au motif que la signature figurant sur ces documents est une mauvaise imitation de sa propre signature.

Elle estime en conséquence qu'aucune somme n'a été indûment perçue.

L'association objecte que la salariée a été placée en arrêt de travail pour accident du travail du 4 janvier 2013 au 5 janvier 2014 de manière continue, puis à compter du 17 février 2014, sans jamais reprendre son emploi jusqu'à son licenciement.

Elle souligne que la salariée n'a été présente que du 6 janvier 2014 au 14 février 2014, soit un mois et 10 jours pendant laquelle elle a effectivement travaillé et indique également que la salariée n'a jamais contesté les avenants, ni leur signature en temps utile et que le tampon de l'association placé différemment ne peut laisser supposer qu'il s'agisse d'un faux.

En vertu des dispositions de l'article 9 du code de procédure civile « il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention ».

En l'espèce, la salariée produit les deux avenants du 31 août 2012 et du 29 novembre 2012, sans sa signature, signés par le représentant de l'association avec le tampon de Home Services (pièces appelante 5 et 6).

L'association produit de son côté les deux mêmes avenants signés par la salariée ainsi que par le représentant de l'association avec le tampon de Home Services.

Si la signature du représentant de l'association est différente sur les documents de l'appelante, la signature de la salariée sur les avenants versés aux débats par l'association correspond à celle apposée sur les précédents avenants, notamment celui du 24 décembre 2007, ainsi que sur ses courriers des 5 janvier 2010, 20 et 30 janvier 2013. Il en est de même pour la signature du directeur, M. [X] [C] et des tampons qui y sont apposés (pièces intimée 6, 7, 21 et 22).

En tout état de cause, il appartenait à la salariée qui conteste sa signature de solliciter du conseiller de la mise en état ou de la cour une vérification d'écriture, ce qu'elle ne fait pas, de sorte qu'elle ne peut contester sa signature en l'état des éléments précités, alors que l'association par courrier du 28 février 2013 en réponse à sa contestation du temps de travail lui indiquait : « Quant à votre temps de travail, il n'a pas été arrêté de façon arbitraire, Madame [I] ayant à chaque reprise sollicité votre accord » (pièce intimée 6-2).

La salariée ne démontre donc pas la modification unilatérale de son contrat de travail.

En conséquence, c'est à juste titre que le premier juge l'a déboutée de sa demande de rappel de salaire et de ses accessoires s'agissant de la délivrance des bulletins de salaire, attestation pôle emploi rectifiée et astreinte pour la période du 6 juillet 2013 au 29 mars 2016.

Le jugement entrepris est confirmé sur ce point.

2. Sur l'exécution fautive du contrat de travail et le travail dissimulé

La salariée soutient qu'elle disposait d'un temps complet alors qu'elle n'était payée qu'à temps partiel, et que le paiement incomplet constitue un travail dissimulé sanctionné d'une indemnité minimale de six mois de salaire.

Elle estime avoir subi un préjudice matériel en raison de la prise en compte dans les caisses sociales d'un salaire faussement minoré et d'un préjudice moral du fait de se trouver dans une situation financière extrêmement préoccupante.

L'association réplique que le fait de ne pas respecter le contrat n'est pas constitutif d'une infraction de travail dissimulé, que les pièces versées aux débats ne démontrent pas la réalité d'une prétendue infraction du travail dissimulé, ni même d'une intention frauduleuse, que l'unique courrier de la salariée de 2013 ne fait aucunement état d'une prétendue exécution fautive et déloyale de l'employeur et qu'à la lecture de cet échange, il est relevé que l'employeur a porté à la connaissance de la salariée les lettres de répudiation de ses clients.

La réparation d'un préjudice résultant d'un manquement de l'employeur à l'exécution de bonne foi du contrat de travail suppose que le salarié qui s'en prétend victime produise en justice les éléments de nature à établir, d'une part la réalité du manquement et d'autre part, l'existence et l'étendue du préjudice en résultant.

Selon l'article L 8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié, le fait soit de se soustraire intentionnellement à la déclaration préalable à l'embauche, soit de se soustraire à l'obligation d'établir un bulletin de paie ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli

Le travail dissimulé n'est donc caractérisé que s'il est établi que l'employeur a agi de manière intentionnelle, le caractère intentionnel ne pouvant résulter du seul défaut de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paie.

La cour n'a pas retenu la modification unilatérale de contrat de travail, de sorte que les dispositions du dernier avenant du 29 novembre 2012 prévoyant une durée de travail de 120 heures s'appliquaient à la salariée.

Par ailleurs l'attestation de salaire transmise à la sécurité sociale suite à l'accident de travail ( pièce 13 appelante), ne permet pas d'établir, ni de caractériser l'intention frauduleuse visée par les dispositions de l'article L.8221-5 du code du travail.

Le courrier de la salariée du 30 janvier 2013 (pièce appelante 6-3) qui conteste les lettres de répudiation des clients et qui lui fait penser à du « harcèlement moral » n'établit pas de manquement de la part de l'association, alors qu'aucun agissement de harcèlement moral précis et circonstancié n'est évoqué et que celui-ci n'est pas invoqué en tant que tel dans les conclusions.

Quant au compte rendu d'entretien réalisé suite à la convocation à la mesure de licenciement, celui-ci ne fait que retranscrire les échanges des parties, sans qu'il puisse en être tiré une quelconque inexécution fautive (pièce appelante 8-1).

La salariée n'établit pas de manquement fautif de la part de l'association constitutif d'une exécution déloyale, ni l'existence d'un travail dissimulé et aucun lien ne peut être fait avec le préjudice invoqué qui n'est pas justifié.

La cour confirme le jugement entrepris qui a débouté la salariée de ses demandes indemnitaires de ces chefs.

III) Sur le licenciement

La salariée soutient que l'association a manqué à son obligation de reclassement puisqu'il lui a été proposé tardivement un poste dépourvu de pertinence s'agissant de la surveillance d'une personne sur fauteuil roulant et atteinte de démence frontale.

Elle indique que le reclassement sur ce poste éloigné de 11 km de son domicile n'était pas possible, compte tenu de son état physique l'obligeant à marcher avec une béquille et à ne pas rester debout très longtemps, et le poste relevait des fonctions d'éducateur spécialisé.

Elle fait valoir que le périmètre de reclassement est également contestable, tous les établissements dont la liste n'a pas été communiquée, n'ayant pas été consultés.

Elle estime que toute la procédure de reclassement est biaisée dans la mesure où elle repose sur le faux travail à temps partiel.

L'association estime avoir rempli son obligation de reclassement de façon loyale et sérieuse dans la mesure où elle a recherché un poste compatible avec les prescriptions du médecin du travail, qu'elle s'est rapprochée à plusieurs reprises de ce dernier pour tenter de la reclasser dans un poste adapté et qu'il est justifié de recherches auprès de responsables d'agence et de différentes associations et que la proposition n'était pas tardive puisque le contrat de travail était toujours en cours.

Elle précise avoir consulté les délégués du personnel afin de solliciter leur avis sur les possibilités de reclassement envisageables et sur le licenciement pour inaptitude d'origine non professionnelle de la salariée.

Les dispositions de l'article L.1226-2 du code du travail dans sa rédaction antérieure à l'année 2017 applicable au litige, prévoient que : « lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.

Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise.

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail ».

L'obligation pesant sur l'employeur en vertu de ce texte lui impose ainsi de rechercher de manière concrète les possibilités de reclassement du salarié déclaré inapte à l'emploi précédemment occupé tant de l'entreprise que du groupe auquel elle appartient, en fonction des propositions du médecin du travail.

Cette recherche de reclassement doit être mise en 'uvre de façon loyale et personnalisée sur des postes disponibles et existants.

L'obligation qui pèse sur l'employeur est donc une obligation de moyen dite 'renforcée' et il appartient à l'employeur qui prétend s'être trouvé dans l'impossibilité d'effectuer un reclassement, d'en rapporter la preuve.

Il n'est apporté aux débats aucun élément nouveau permettant de remettre en cause les motifs exacts et pertinents du premier juge, lequel a constaté d'une part que le poste proposé, consistant à surveiller une personne déficiente mentale et à s'assurer qu'elle prendra bien ses repas et ses médicaments, était conforme aux restrictions médicales du médecin du travail, ne relevait pas de la compétence d'un éducateur spécialisé et aurait pu être exercé par la salariée, et d'autre part, qu'aucun autre poste en interne, compatible avec l'état de santé de la salariée, n'était disponible dans l'entreprise, considérant dès lors que l'employeur avait rempli de façon loyale et sérieuse son obligation de reclassement et que le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement était fondé.

La cour ajoute que :

- l'association a soumis dès le 2 février 2016 plusieurs postes au médecin du travail qui ne les a pas retenus en raison de l'état de santé de la salariée (déléguée commerciale, agent de développement, poste aménagé sur des prestations de préparation et aide à la prise de repas), l'absence de transmission du registre d'entrée et de sortie du personnel de l'association n'ayant aucune incidence sur la recherche effectuée par l'association en l'absence de poste administratif sédentaire disponible ;

- le médecin du travail, interrogé le 7 mars 2016 sur le poste envisagé auprès d'une personne handicapée, a validé ce poste le 15 mars 2016, précisant ' si le trajet pouvait se faire en position assise et si aucun effort n'était nécessaire'. Dès lors, la proposition de reclassement faite par courrier du 16 mars 2016, évoquée également lors de l'entretien préalable du 23 février 2016, ne saurait être considérée comme tardive ou dangereuse du fait de la pathologie du bénéficiaire ;

- le poste proposé consistait en réalité à un aménagement du poste de la salariée afin de tenir compte des restrictions médicales, la classification hiérarchique, la durée du temps de travail conforme à l'avenant du mois de novembre 2012 et la rémunération restant inchangées ;

- l'intimée, qui est une association, ne faisait pas partie d'un groupe, de sorte que le périmètre des recherches de reclassement ne saurait être contesté d'autant que celle-ci a effectué des recherches auprès de plusieurs agences ([Localité 5], [Localité 4], [Localité 3] etc ) ainsi qu'auprès d'autres structures similaires telles que Aide et Soins à Domicile, Emplois Familiaux Services (...) et ces dernières ont donné des réponses négatives (pièces intimée 29);

- contrairement à ce qu'indique la salariée, l'association justifie de la consultation des délégués du personnel concernant le reclassement et le licenciement (pièce intimée 41) ;

- le refus de la salariée du 21 mars 2016 du poste n'a pas permis son reclassement.

Le licenciement a donc une cause réelle et sérieuse et la cour confirme le jugement entrepris qui a débouté la salariée de ses demandes indemnitaires faites à ce titre.

IV) Sur les conséquences de la rupture

Sur l'indemnité compensatrice de préavis

La salariée estime que c'est à tort que le premier juge a considéré que l'inaptitude de la salariée était non professionnelle alors qu'elle avait droit à une indemnité à ce titre.

L'association rétorque que la salariée se borne à soutenir qu'il s'agirait d'une inaptitude d'origine professionnelle, alors qu'elle a reçu un refus de reconnaissance d'une maladie professionnelle et que les derniers arrêts de travail précédant le constat de l'inaptitude sont établis en arrêt maladie de droit commun.

S'agissant de l'inaptitude consécutive à une maladie ou un accident non professionnel, les dispositions de l'article L. 1226-4 al.3 du code du travail prévoient « En cas de licenciement, le préavis n'est pas exécuté et le contrat de travail est rompu à la date de notification du licenciement. Le préavis est néanmoins pris en compte pour le calcul de l'indemnité mentionnée à l'article L. 1234-9. Par dérogation à l'article L. 1234-5, l'inexécution du préavis ne donne pas lieu au versement d'une indemnité compensatrice ».

En l'espèce, la salariée n'explicite pas dans ses conclusions le caractère professionnel de l'inaptitude, ne démontre pas le lien entre l'accident du travail datant de janvier 2013 sur lequel aucun élément n'est donné, et l'inaptitude constatée par le médecin du travail, en janvier 2016.

Concernant la maladie professionnelle, la CPAM des Bouches-du-Rhône n'a pas reconnu le caractère professionnel de celle-ci et cette décision n'a pas fait l'objet d'un recours de la part de la salariée.

En conséquence, la salariée n'est pas fondée à réclamer une indemnité compensatrice de préavis.

Le jugement entrepris est confirmé sur ce point.

V) Sur les frais et dépens

Mme [G] qui succombe totalement doit s'acquitter des dépens, et être déboutée de sa demande faite en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Rejette la fin de non recevoir tirée de la tardiveté de l'appel et l'exception de péremption,

Confirme le jugement déféré, dans ses dispositions soumises à la cour ;

Y ajoutant

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [B] [G] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-3
Numéro d'arrêt : 19/03688
Date de la décision : 12/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-12;19.03688 ?
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