COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-3
ARRET SUR RENVOI DE CASSATION
ARRÊT AU FOND
DU 11 AVRIL 2024
N°2024/30
Rôle N° RG 23/02571 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BKZ4M
S.A. BNP PARIBAS
C/
[U]-[B] [Z] [O] [P]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Jean-Christophe STRATIGEAS
Me Joseph MAGNAN
Arrêt en date du 11 Avril 2024 prononcé sur saisine de la cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 30 novembre 2022, qui a cassé et annulé l'arrêt n° 2020/132 rendu le 22 octobre 2020 par la Cour d'Appel d'AIX-EN-PROVENCE (Chambre 3-4), statuant sur l'appel du jugement du Tribunal de Commerce d'AIX-EN-PROVENCE en date du 19 juin 2017.
DEMANDEUR SUR RENVOI DE CASSATION
S.A. BNP PARIBAS, représentée par son directeur général,
dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Jean-Christophe STRATIGEAS de la SELARL CADJI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistée de Me Quentin LE FLOC'H, avocat au barreau de PARIS, plaidant, substituant Me Bertrand CHAMBREUIL, avocat au barreau de PARIS
DEFENDEUR SUR RENVOI DE CASSATION
Monsieur [U]-[B] [Z] [O] [P]
né le [Date naissance 2] 1955 à [Localité 9] (13),
demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Joseph MAGNAN de la SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
assisté de Me Ambroise ARNAUD de la SELARL VIDAPARM, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Janvier 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Françoise PETEL, Conseillère, chargée du rapport, qui a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Philippe DELMOTTE, Président,
Madame Françoise PETEL, Conseillère
Madame Gaëlle MARTIN, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Laure METGE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Avril 2024.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Avril 2024
Signé par Monsieur Philippe DELMOTTE, Président et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Par acte sous seing privé du 26 mars 2008, la SA BNP Paribas a consenti à la SAS du Levant, représentée par M. [U] [P], un prêt professionnel, destiné à refinancer partiellement l'acquisition de 360000 actions de la SAS Sea-Tankers, d'un montant de 10.500.000 euros, au taux de l'Euribor 3 mois + 1,30 % l'an, d'une durée de 60 mois, remboursable in fine, sous la garantie notamment du nantissement des titres concernés.
Par acte sous seing privé du 7 septembre 2011, ce prêt a fait l'objet d'un avenant aux termes duquel la SARL du Levant s'est engagée à ne pas distribuer de dividendes à ses actionnaires, à affecter prioritairement le produit de toute cession d'actifs au remboursement du prêt, et à respecter son engagement de maintenir une trésorerie disponible non nantie à hauteur de 5.000.000 euros.
Selon acte sous seing privé du même jour, M. [U] [P] s'est porté caution solidaire des engagements, au titre dudit prêt, de la SARL du Levant envers la banque, dans la limite de la somme de 10.500.000 euros, et pour une durée venant à échéance au 1er mai 2013.
D'autres avenants au prêt du 26 mars 2008 ont été signés les 26 mars 2013, puis 26 décembre 2013.
Par acte sous seing privé du 4 avril 2013, annulant et remplaçant celui du 7 septembre 2011, M. [U] [P] s'est, en garantie du prêt, porté caution solidaire des engagements de la SARL du Levant envers la SA BNP Paribas, dans la limite de la somme de 10.500.000 euros, et pour une durée de 36 mois.
Selon courrier recommandé du 4 juin 2014, la SA BNP Paribas a prononcé l'exigibilité du prêt et mis en demeure l'emprunteur de régler la somme de 9.925.897,11 euros.
Par courrier du même jour, elle en a avisé la caution solidaire.
Suivant exploit du 18 février 2016, la SA BNP Paribas a fait assigner la SARL du Levant en paiement devant le tribunal de commerce de Marseille.
Par jugement, devenu définitif, du 16 janvier 2017, ce tribunal a déclaré la SARL du Levant irrecevable comme prescrite en ses demandes reconventionnelles, et l'a condamnée à payer à la SA BNP Paribas la somme principale de 9.822.280,85 euros, au titre du capital restant dû en vertu du prêt du 26 mars 2008, avec intérêts au taux contractuel de l'Euribor 3 mois + 1,30 % majoré de 2 points à compter du 23 janvier 2016, et celle de 714.287,89 euros au titre des intérêts échus au 22 janvier 2016, avec capitalisation des dits intérêts.
Selon jugement du 30 novembre 2017, le tribunal de commerce d'Aix-en-Provence a ouvert une procédure de redressement judiciaire de la SARL du Levant, convertie en liquidation judiciaire par jugement du 15 octobre 2019.
Le 9 janvier 2018, la SA BNP Paribas a déclaré au passif de ladite procédure collective sa créance pour la somme de 11.117.246,86 euros à titre privilégié, laquelle, après contestation de la part du dirigeant de la société au motif de l'inexactitude des intérêts déclarés pour la somme de 275.438,41 euros, a fait l'objet d'une admission dans les termes de la déclaration selon notification du 5 novembre 2019.
Entre-temps, suivant exploit du 29 mars 2016, la SA BNP Paribas a fait assigner, en sa qualité de caution solidaire de la SARL du Levant, M. [U] [P] en paiement devant le tribunal de commerce d'Aix-en-Provence.
Par jugement du 19 juin 2017, ce tribunal a :
' prononcé la décharge totale de la caution, M. [U] [P], au titre des cautionnements du 7 septembre 2011 et du 4 avril 2013,
' débouté les parties de toutes leurs autres demandes,
' condamné la SA BNP Paribas à payer à M. [U] [P] une somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
' condamné la SA BNP Paribas aux dépens de l'instance,
' dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.
Suivant déclaration du 6 juillet 2017, la SA BNP Paribas a interjeté appel de cette décision.
Par arrêt du 22 octobre 2020, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a :
' infirmé le jugement déféré,
statuant à nouveau :
' condamné M. [P], en sa qualité de caution de la société du Levant, au paiement au profit de la BNP en deniers ou quittances des sommes suivantes :
' 9.822.280,82 euros en principal,
' 714.287,89 euros au titre des intérêts échus au 22 janvier 2016,
' outre les intérêts contractuels sur la somme de 9.822.280,85 euros à compter du 23 janvier 2016 et jusqu'à parfait paiement au taux de l'Euribor 3 mois + 1,30 % majoré de 2 %,
et ce avec capitalisation annuelle des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil, dans la limite de 10.500.000 euros,
' 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
et aux entiers dépens.
M. [U] [P] a formé un pourvoi à l'encontre de cet arrêt.
Par arrêt du 30 novembre 2022, la Cour de cassation a cassé et annulé, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 octobre 2020, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence, remis l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyées devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée.
Suivant déclaration du 15 février 2023, la SA BNP Paribas a saisi la cour de renvoi.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées et déposées le 5 octobre 2023, auxquelles il est expressément référé en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la SA BNP Paribas demande à la cour de :
' infirmer le jugement dont appel en ses dispositions par lesquelles il a prononcé « la décharge totale de la caution, M. [U] [P], au titre des cautionnements du 7 septembre 2011 et du 4 avril 2013 » et en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes dirigées à l'encontre de ce dernier tout en la condamnant sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,
statuant à nouveau,
' dire M. [U] [P] mal fondé dans ses exceptions respectives visant à se voir décharger de son engagement de caution et subsidiairement à en voir prononcer la nullité,
' débouter M. [U] [P] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions dirigées à son encontre,
' condamner M. [U] [P] en sa qualité de caution solidaire de la SARL du Levant au paiement des sommes suivantes en deniers ou quittances :
- 9.822.280,85 euros en principal représentant le capital restant dû au titre du prêt du 26 mars 2008,
- 714.287,89 euros au titre des intérêts échus au 22 janvier 2016,
- outre les intérêts contractuels sur la somme de 9.822.280,85 euros à compter du 23 janvier
2016 et jusqu'à parfait paiement, au taux de l'Euribor 3 mois + 1,30 %, majoré de 2 %,
' ordonner la capitalisation des dits intérêts dans les conditions prévues par 1343-2 du code civil (article 1154 ancien du code civil),
' condamner M. [U] [P] au paiement d'une somme de 6.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,
' condamner le même aux dépens qui seront recouvrés par Me Jean-Christophe Stratigeas de la SELARL Cadji et associés, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Par conclusions récapitulatives déposées et notifiées le 9 octobre 2023, auxquelles il est expressément référé en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, M. [U] [P] demande à la cour de :
' confirmer le jugement déféré du tribunal de commerce d'Aix-en-Provence du 19 juin 2017 en ce qu'il a :
- prononcé la décharge totale de la caution au titre des cautionnements du 7 septembre 2011 et du 4 avril 2013,
- débouté la SA BNP Paribas de ses demandes contre lui,
' en tout état de cause débouter BNP Paribas de ses demandes contre lui,
' condamner la SA BNP Paribas à lui payer la somme de 15.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de Me Joseph Magnan, avocat aux offres de droit.
MOTIFS
A titre liminaire, il est constaté que M. [U] [P], qui, pour s'opposer à la demande en paiement de la SA BNP Paribas, sollicitait jusqu'alors de se voir décharger de son engagement de caution sur le fondement de l'article 2314 du code civil, invoque désormais, pour soutenir que l'appelante ne saurait se prévaloir du cautionnement par lui souscrit, les dispositions du seul article L.341-4 du code de la consommation dans sa version applicable au présent litige.
Le moyen nouveau tiré de l'application de ce texte doit donc seul être examiné dans le présent cadre procédural.
Aux termes de l'article L.341-4 précité, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.
Pour l'application de ces dispositions, c'est à la caution qu'il incombe de rapporter la preuve de la disproportion qu'elle allègue, et au créancier qui entend se prévaloir d'un contrat de cautionnement manifestement disproportionné d'établir qu'au moment où il appelle la caution, le patrimoine de celle-ci lui permet de faire face à son obligation.
Le caractère manifestement disproportionné du cautionnement s'apprécie au regard, d'un côté, de l'ensemble des engagements souscrits par la caution, d'un autre côté, de ses biens et revenus, sans tenir compte des résultats escomptés de l'opération garantie.
A cet égard, l'intimé fait valoir que son patrimoine n'avait plus en 2013 la valeur de celui de l'année 2008, que, si les titres qu'il détenait dans la SARL du Levant couvraient largement à cette époque le prêt souscrit auprès de la SA BNP Paribas, tel n'était plus le cas depuis 2011 et plus encore en 2013, compte tenu des pertes de la société Sea Tankers, dont la banque était amplement informée, que, dès lors, la demande de souscription, le 4 avril 2013, d'une caution personnelle de 10.500.000 euros était manifestement disproportionnée eu égard à ses biens et revenus.
Rappelant qu'il est marié sous le régime de la séparation de biens, et que le domicile familial est la propriété de son épouse, M. [U] [P] expose qu'il ne dispose d'aucun bien immobilier.
Il précise que sa solvabilité ne résultait que des 99 % de parts dont il était propriétaire dans la SARL du Levant, société holding qui détenait notamment 10 % des actions de Sea Tankers, 99 % de la Cave de [Localité 6] et quelques participations sans grande valeur, ainsi que cela résulte des bilans de la dite SARL.
L'appelante réplique que l'intimé voudrait laisser croire que sa solvabilité n'aurait été par elle appréciée qu'à l'aune de ses droits dans la SARL du Levant dont il était le principal associé, et ainsi sur la seule considération de la valeur des actions Sea Tankers acquises par cette dernière, que, cependant, d'une part, la surface financière de la SARL du Levant ne se résumait pas à sa seule détention des 10 % du capital de la société Sea Tankers, et, d'autre part, le patrimoine personnel de la caution ne se réduisait pas non plus à celui de la SARL du Levant.
Elle soutient qu'en effet, la SARL du Levant, alors société holding disposant de participations au sein de différentes sociétés, dont certes la société Sea Tankers, détenait aussi 100 % de la SAS Levant Commodities, 99 % de la SAS Cave de Bargemone, 30 % de la SARL ACVV-Aquarêve, 20 % de la SCI Alcybiade, outre 100 % de la société maltaise AK Marine Trading Ltd.
La SA BNP Paribas ajoute que M. [U] [P] détenait des parts sociales dans les SCI de [Localité 12], SCI du [Localité 5], SCI [Localité 8] et GFA de [Localité 10].
Sur ce, s'agissant de la situation financière et patrimoniale de la caution à la date de son engagement, de l'ensemble des pièces versées aux débats, qui concernent cependant essentiellement la société Sea Tankers à propos de laquelle l'intimé opère effectivement de longs développements, il résulte notamment que :
- M. [U] [P], qui ne produit pas son avis d'imposition sur les revenus de l'année 2012, a, selon celui relatif aux revenus de 2013, perçu pour l'année considérée, au titre des salaires et assimilés, des revenus nets imposables de 541.231 euros,
- son foyer fiscal a, pour 2013, déclaré des revenus de capitaux mobiliers de 2.273 euros, sans que soient toutefois précisés les biens concernés par cette déclaration,
- il était propriétaire de 10 % en pleine propriété et 40 % en usufruit des parts sociales d'une SCI de [Localité 12], laquelle était propriétaire de biens et droits immobiliers sis à [Localité 11], acquis en juin 2008 pour le prix de 2.130.000 euros, aucun justificatif n'étant cependant produit quant à la valeur de ces biens à la date du cautionnement,
- il détenait 10 % en pleine propriété et 40 % en usufruit du capital social d'une SCI du [Localité 5], propriétaire de plusieurs biens immobiliers à [Localité 4] (Bouches-du-Rhône), acquis en novembre 2008, un prêt d'un montant de 450.000 euros ayant été consenti à ladite SCI par le Crédit Agricole en décembre 2008,
- il détenait 10 % en pleine propriété et 40 % en usufruit des parts sociales d'une SCI [Localité 8], propriétaire à [Localité 7] (Alpes de Haute Provence) d'une maison, dont la valeur n'est pas indiquée, précision faite que deux prêts ont été contractés auprès du Crédit Agricole, l'un en décembre 2008 pour son acquisition, l'autre en décembre 2011 pour financer des travaux, chacun d'un montant de 450.000 euros,
- il était détenteur de 10 % en pleine propriété et de 50 % en usufruit du capital social d'un GFA de [Localité 10], lequel était, notamment, propriétaire de biens immobiliers sis à [Localité 4], acquis en mars 2007 pour le prix de 2.170.000 euros, et donnés à bail rural, aucun justificatif n'étant cependant produit quant à la valeur, le 4 avril 2013, des dits biens, dont il apparaît qu'ils étaient grevés de deux hypothèques conventionnelles inscrites en 2012 pour un montant total de 1.700.000 euros,
- l'intimé était par ailleurs propriétaire de 99 % des parts de la SARL du Levant, dont il était le gérant et qui avait fait l'objet d'une augmentation de capital le 8 juin 2012, ladite SARL, qui exerçait une activité de holding, étant elle-même détentrice de :
- 20240 des 20400 parts de la SAS Cave de Bargemone, domaine viticole, dont le capital avait été porté à 2.040.000 euros le 29 mars 2013,
- 20 % de la SCI Alcybiade, société immobilière sur laquelle la SARL détenait une créance de 4.592.246 euros,
- 100 % du capital de AK Marine, société maltaise de construction de navires, dont le compte courant dans la holding est passé de 2.921.680 euros au 31 décembre 2012 à 11.637.765 euros au 31 décembre 2013,
- 90 %, qui deviendront 100 % après une augmentation de capital et une prise de participation complémentaire le 19 avril 2013, de la SAS Levant Commodities, ayant pour activité le négoce de pétrole,
- 30,4 % de la SARL Aquarev, agence de voyages,
- 10 % de la SAS Sea Tankers, opérateur de navires, dont les titres, objet d'ailleurs du financement garanti, seront, dans les comptes de la SARL du Levant, ramenés de 14.655.400 euros au 1er janvier 2013 à 2.048.307 euros au 31 décembre 2013 en considération, au vu des comptes de Sea Tankers à cette dernière date, de la dépréciation des actifs navires.
S'agissant de cette dernière société, la SAS Sea Tankers, il apparaît que son capital avait été, par décision du 31 janvier 2012, ramené, par réduction de la valeur nominale des actions, de 228.458.700 euros à 43.407.153 euros.
Ceci étant, si, des nombreux documents produits la concernant, il ressort que la situation de ladite SAS s'était détériorée au cours des années précédant le renouvellement de l'engagement de caution souscrit par M. [U] [P] le 4 avril 2013, il reste notamment, selon le « rapport d'audit contractuel sur les comptes annuels » de la SARL du Levant pour l'exercice clos le 31 décembre 2013 établi à la demande de l'intimé, que la valeur des titres de participation de celle-ci s'élevait, au 1er janvier 2013, à un total de 15.770.750 euros.
Ainsi, constat fait de ce qu'en tout état de cause la caution ne justifie pas de l'exacte réalité de sa situation financière et patrimoniale, s'agissant en particulier de la consistance et de la valeur nette de son patrimoine mobilier, à la date de conclusion du contrat de cautionnement litigieux, il ne saurait, eu égard à l'ensemble des éléments précédemment évoqués, être considéré qu'est démontré le caractère manifestement disproportionné à ses biens et revenus de l'engagement souscrit le 4 avril 2013 dans la limite de la somme, certes très importante, de 10.500.000 euros.
En conséquence, et sans qu'il y ait davantage lieu de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, le moyen tiré de l'application de l'ancien article L.341-4 du code de la consommation est écarté.
Dès lors, la créance de la banque, admise au passif de la procédure collective de la SARL du Levant pour la somme de 11.117.246,86 euros, n'étant pas autrement contestée, il convient de condamner M. [U] [P], tenu en sa qualité de caution solidaire dans la limite précitée de 10.500.000 euros, au paiement de ladite somme, laquelle porte intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure résultant de l'acte introductif d'instance du 29 mars 2016, lesdits intérêts étant capitalisés dans les termes de l'article 1343-2 du code civil.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement et contradictoirement,
Infirme le jugement du tribunal de commerce d'Aix-en-Provence du 19 juin 2017,
Statuant à nouveau,
Condamne M. [U] [P], en sa qualité de caution solidaire de la SARL du Levant, à payer à la SA BNP Paribas la somme de 10.500.000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 29 mars 2016, et capitalisation des dits intérêts dans les termes de l'article 1343-2 du code civil,
Condamne M. [U] [P] à payer à la SA BNP Paribas la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Le condamne aux dépens, ceux d'appel distraits conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT