La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/04/2024 | FRANCE | N°18/20179

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 11 avril 2024, 18/20179


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4



ARRÊT AU FOND

DU 11 AVRIL 2024



N° 2024/







Rôle N° RG 18/20179 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDQVH







SA AXA FRANCE





C/



[W] [C]

[E] [P]

[V] [J]

Syndicat des copropriétaires [Adresse 6]

SA [U]

S.A. BPCE ASSURANCES

Compagnie d'assurances GAN









Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Julie FEHLMANN

<

br>
Me Françoise BOULAN



Me Florence BENSA-TROIN



Me [G] [R]



Me Arnaud JACQUET









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 10 Décembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 16/03668.





APPE...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRÊT AU FOND

DU 11 AVRIL 2024

N° 2024/

Rôle N° RG 18/20179 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDQVH

SA AXA FRANCE

C/

[W] [C]

[E] [P]

[V] [J]

Syndicat des copropriétaires [Adresse 6]

SA [U]

S.A. BPCE ASSURANCES

Compagnie d'assurances GAN

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Julie FEHLMANN

Me Françoise BOULAN

Me Florence BENSA-TROIN

Me [G] [R]

Me Arnaud JACQUET

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 10 Décembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 16/03668.

APPELANTE

SA AXA FRANCE

prise en sa qualité d'assureur du syndicat de la copropriété

, demeurant [Adresse 7]

représentée par Me Julie FEHLMANN de la SELARL LEGIS-CONSEILS, avocat au barreau de GRASSE

INTIMES

Monsieur [W] [C]

, demeurant [Adresse 6]

représenté par Me Françoise BOULAN de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Rebecca VANDONI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Frédéric VANZO, avocat au barreau de NICE

Monsieur [E] [P]

, demeurant [Adresse 6]

représenté par Me Florence BENSA-TROIN de la SELARL BENSA & TROIN AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de GRASSE substituée par Me Thierry TROIN, avocat au barreau de NICE

Madame [V] [J]

, demeurant [Adresse 2]

défaillante

Syndicat des copropriétaires [Adresse 6]

Représenté par son syndic en exercice le cabinet TURIN IMMOBILIER

, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Franck GHIGO, avocat au barreau de GRASSE

SA [U]

prise en sa qualité d'assureur de M. [W] [C]

, demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Françoise BOULAN de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Rebecca VANDONI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Frédéric VANZO, avocat au barreau de NICE

Société BPCE ASSURANCES

, demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Florence BENSA-TROIN de la SELARL BENSA & TROIN AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de GRASSE substituée par Me Thierry TROIN, avocat au barreau de NICE

Compagnie d'assurances GAN

, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Arnaud JACQUET, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 06 Février 2024 en audience publique devant la cour composée de :

Madame Inès BONAFOS, Présidente

Mme Véronique MÖLLER, Conseillère

M. Adrian CANDAU, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Avril 2024.

ARRÊT

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Le 6 septembre 2013, un incendie s'est déclaré au niveau du plancher haut du 1er sous-sol du parking de la copropriété « [Adresse 6] », situé [Adresse 2] à [Localité 5] impliquant trois véhicules appartenant à Monsieur [W] [C], à Monsieur [E] [P] et à Madame [V] [J].

Le syndicat de copropriétaires de la résidence « [Adresse 6] » a déclaré le sinistre auprès de son assureur, la SA AXA France (AXA).

Plusieurs expertises ont été diligentées par des experts mandatés par AXA et le syndicat des copropriétaires afin de vérifier l'étendue des dommages et leurs conséquences sur la structure de l'immeuble, en particulier le plancher haut du premier sous-sol constituant une dalle pleine et la poutre en béton armé entre l'emplacement stationnement et la zone de circulation, avec des conclusions distinctes. Un étaiement d'urgence a néanmoins été mis en place.

Par ordonnance de référé en date du 8 décembre 2014, le syndicat de copropriétaires de la résidence « [Adresse 6] » et AXA ont obtenu, au contradictoire de Monsieur [W] [C] et de son assureur la société [U], de Monsieur [P], et de son assureur la société BPCE, de Madame [V] [J], et de son assureur la société GAN, la désignation de Monsieur [B], remplacé par la suite par Monsieur [M], en qualité d'expert judiciaire avec pour mission, notamment, de rechercher la ou les causes des désordres, décrire la structure complète de la dalle haute du parking existant avant l'incendie, donner toutes informations relatives à la règlementation applicable à la protection anti-incendie de cette dalle, donner son avis sur les travaux utiles et tous éléments techniques qui permettront au tribunal de se prononcer sur les responsabilités.

Le rapport d'expertise était déposé le 25 novembre 2015.

L'assemblée générale ordinaire des copropriétaires de la résidence « [Adresse 6] » a donné mandat, le 15 mars 2016, à son syndic « afin d'assigner au fond suite à l'incendie s'étant déclaré dans les parkings de l'immeuble ».

Sur la base de ce rapport, le syndicat des copropriétaires a donc, par acte en date du 7 juin 2016, assigné devant le tribunal de grande instance de Grasse Monsieur [W] [C] et son assureur la société [U], Monsieur [P] et son assureur la société BPCE, Madame [V] [J] et son assureur la société GAN, ainsi que AXA, recherché en qualité d'assureur de la copropriété au titre d'une police multirisque habitation, afin d'obtenir, sur le fondement de la loi dite Badinter du 5 juillet 1985, leur condamnation solidaire à lui verser une somme de 33.522 euros correspondant aux travaux de réparation de la dalle, outre une somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement en date du 10 décembre 2018, le tribunal de grande instance de Grasse :

CONDAMNE in solidum Monsieur [W] [C], Monsieur [E] [P] et Madame [V] [J] à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 33.522euros, somme portant intérêts au taux légal à compter du jugement ;

DIT que la société [U] en sa qualité d'assureur de Monsieur [W] [C], la société BPCE en sa qualité d'assureur de Monsieur [E] [P], et la société GAN en sa qualité d'assureur de Madame [V] [J] doivent garantir et relever leurs assurés respectifs des condamnations prononcées à leur encontre ;

DIT que, dans leurs rapports entre eux, Monsieur [C], Monsieur [P] et Madame [J] doivent supporter chacun un tiers des conséquences dommageables du sinistre ;

MET hors de cause AXA en sa qualité d'assureur multirisque habitation du syndicat de copropriétaires;

REJETTE toute autre demande ;

ORDONNE l'exécution provisoire du présent jugement ;

CONDAMNE in solidum Monsieur [C], Monsieur [P] et Madame [J] à payer au syndicat de copropriétaires la somme de 2.500euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

DIT n'y avoir lieu à autre application de ces mêmes dispositions ;

LAISSE les dépens à la charge, in solidum, de Monsieur [C], Monsieur [P] et Madame [J], en ce compris les frais d'expertise, distraits au profit de maître [G] [R].

Par déclaration d'appel enregistrée au greffe le 20 Décembre 2018, la SA AXA FRANCE a interjeté appel de ce jugement en ce qu'il a : rejeté toute autre demande qui concerne les demandes reconventionnelles formulées par la société AXA France en vertu des dispositions de l'article L121-12 du code des assurances, le Tribunal ayant débouté la société AXA France de son recours subrogatoire.

Par exploit d'huissier délivré les 12, 14 mars 2019, la société AXA France Iard a fait signifier sa déclaration d'appel et ses premières conclusions notifiées par rpva le 07 mars 2019 à la SA BPCE Assurance, la SA GAN Assurances, Monsieur [W] [C], Monsieur [E] [P], Madame [V] [J] conformément aux dispositions de l'article 902 du code de procédure civile.

Les parties ont exposé leur demande ainsi qu'il suit, étant rappelé qu'au visa de l'article 455 du code de procédure civile, l'arrêt doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens :

La société AXA France Iard (conclusions notifiées par rpva le 4 Janvier 2024) sollicite de la cour de :

Vu les dispositions de l'article L121-12 du code des assurances, Vu le rapport établi par l'expert,

Juger que l'incendie affectant l'immeuble [Adresse 6] a bien été provoqué par les trois véhicules terrestres à moteur appartenant respectivement à Monsieur [C], Monsieur [P], et Madame [J].

Déclarer Monsieur [C], Monsieur [P], et Madame [J]entièrement responsables des conséquences dommageables de cet incendie survenu dans le sous-sol de l'immeuble [Adresse 6].

Condamner la STE [U], BPCE et GAN, d'avoir à garantir et relever leurs assurés des condamnations prononcées à leur encontre.

Débouter le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 6], Monsieur [P] et tout contestant, de toute réclamation formulée à l'encontre de la STE AXA France, assureur multirisque habitation du syndicat de la copropriété.

Juger que la responsabilité du syndicat de la copropriété ne peut pas être recherchée dans la survenance de l'incendie.

Répartir la responsabilité des conséquences dommageables de l'incendie entre les trois propriétaires des véhicules concernés et leurs assureurs respectifs au titre de la garantie.

Confirmer les termes du jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de GRASSE, en ce qu'il a condamné in solidum Monsieur [C], Monsieur [P], Madame [J], à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 6], la somme de 33 522 €, et en ce qu'il a ordonné, dans les rapports entre les propriétaires, un partage de responsabilité à hauteur de 1/3, et en ce qu'il a mis hors de cause la société AXA France IARD, prise en sa qualité d'assureur multirisque habitation du syndicat de la copropriété.

Infirmer les termes du jugement en ce qu'il a rejeté la demande formulée par la société AXA France IARD, sur son action subrogatoire.

Sur le recours subrogatoire formulé par la société AXA France IARD :

Vu l'article L 121-12 du code des assurances, Vu le rapport d'expertise, Vu le rapport [T],

Condamner in solidum Monsieur [C], Monsieur [P], Madame [J], la société BPCE ASSURANCE, la compagnie d'assurance [U], la compagnie GAN ASSURANCE, d'avoir à verser à la société AXA France IARD, le montant de la somme de 138.726,43 €, outre une somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamner la société [U], la société BPCE ASSURANCE et la compagnie GAN d'avoir à relever et garantir leurs assurés respectifs, des condamnations prononcées à leur encontre.

Si par impossible, la Cour ne s'estimait pas suffisamment éclairée, sur le montant du recours de la société AXA France : Désigner tel expert qu'il plaira, lequel aura pour mission de chiffrer au contradictoire de l'ensemble des parties, le montant des dommages occasionnés à l'immeuble et au syndicat de la copropriété, en relation avec l'incendie.

Condamner la société [U], la société BPCE ASSURANCE et la compagnie GAN aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Julie FEHLMANN, Avocat aux offre de droit.

Au soutien de ses conclusions, AXA, assureur multirisque habitation du syndicat des copropriétaires, conclut à l'absence de recours à son encontre sur le fondement de la loi du 05 juillet 1985 applicable à l'incendie provoqué par un véhicule terrestre à moteur, même en stationnement. Elle soutient que les éléments de l'espèce démontrent que les trois véhicules en cause sont à l'origine de l'incendie qui a endommagé la dalle en béton du parking et que la responsabilité du syndicat des copropriétaires n'est pas en cause. Sa garantie multirisque habitation ne peut donc être recherchée et la contribution à l'indemnisation doit se faire à parts égales entre les propriétaires des véhicules impliqués. AXA considère que Monsieur [P] et son assureur ne peuvent s'exonérer de leur part de responsabilité et de contribution à la dette en invoquant le fait d'un tiers conformément aux dispositions de l'article 2 de la loi du 05 juillet 1985 et compte tenu des éléments de l'espèce qui tendent à établir une part de responsabilité prépondérante à l'encontre de son véhicule.

AXA reproche ensuite au tribunal de ne pas avoir fait droit à son recours subrogatoire fondé sur les dispositions de l'article L. 121-12 du code des assurances au motif qu'il n'avait pas versé les éléments de preuve du paiement de l'indemnité d'assurance alors que sont produits des copies de chèques, des justificatifs de virements et de paiements d'une indemnité d'un montant global de 138.726,43euros.

Monsieur [E] [P] et la SA BPCE Assurances (conclusions d'intimés valant appel incident notifiées par rpva le 18 Janvier 2022) forment appel incident et sollicitent de :

Vu principalement l'ancien article 1384 alinéa 2 du Code Civil devenu 1242 du Code Civil,

Vu subsidiairement la loi du 5 janvier 1985,

Vu également l'article L 121-12 du Code des Assurances et l'article 16 du Code de Procédure Civile,

CONFIRMER le jugement du Tribunal de Grande Instance de Grasse en date du 10 décembre 2018 uniquement en ce qu'il a rejeté les demandes subrogatoires de la société AXA.

INFIRMER le jugement pour le surplus et par voie de conséquence,

A titre principal,

DIRE ET JUGER que le point de départ de l'incendie se situe sur le parking de Mr [K] plus précisément sur le véhicule moto stationné sur son emplacement de parking.

DEBOUTER par voie de conséquence tout demandeur à l'encontre de Mr [P] et de la Société BPCE ASSURANCES.

A titre subsidiaire,

CONDAMNER Mr [K] la société [U], le syndicat de la copropriété [Adresse 6] et la société AXA France à relever et garantir Mr [P] et la Société BPCE ASSURANCES de toute éventuelle condamnation compte tenu de la responsabilité entre co-impliqués et de la faute de la victime.

A titre encore plus subsidiaire,

REJETER la mise à jour des demandes de AXA France à hauteur de 138.726,43 € compte tenu de l'absence de justification contradictoire du recouvrement.

PARTAGER les condamnations éventuelles en quatre parties compte tenu des quatre véhicules impliqués.

LIMITER les condamnations à hauteur de 25 % pour Mr [P] et la Société BPCE ASSURANCES.

En tout état de cause,

CONDAMNER tout succombant au paiement d'une somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens sous distraction de Maître Florence BENSA-TROIN Avocat au Barreau de Grasse en application de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

Monsieur [P] et la BPCE reprochent au tribunal de les avoir condamnés à contribuer à l'indemnisation des dommages alors que les éléments du dossier démontrent que le point de départ de l'incendie se situerait au niveau du parking de Monsieur [C]. Ils considèrent, sur le fondement des dispositions des articles 1384 alinéa 2 (ancien) du code civil, que la responsabilité de ce dernier doit être retenue en sa qualité de gardien de l'emplacement de parking identifié comme le point le plus chaud de l'incendie (partie privative) et où se trouvait stationné outre un véhicule Mini, un scooter entièrement calciné. Ils invoquent sur le même fondement la responsabilité du syndicat des copropriétaires, cet emplacement pouvant être analysé comme une partie privative ou comme une partie commune à usage privatif. La responsabilité du syndicat des copropriétaires est enfin recherchée sur le fondement de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965, le fait d'avoir laissé stationner un véhicule à l'origine de l'incendie étant, selon eux, constitutif d'une faute.

S'agissant du recours subrogatoire d'AXA, Monsieur [P] et la BPCE contestent l'implication de son véhicule dans l'incendie et font valoir l'absence de quittance subrogatoire et de contrat d'assurance permettant de démontrer que des garanties d'assurance étaient bien dues au syndicat des copropriétaires.

La SA [U] et Monsieur [W] [C] (conclusions récapitulatives notifiées par rpva le 5 Septembre 2019) sollicitent de :

CONFIRMER le jugement du tribunal de grande instance de Grasse du 10 décembre 2018

CONDAMNER tout succombant à payer à la compagnie [U] la somme de 3.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de la SELARL LEXAVOUE AIX EN PROVENCE, Avocat aux offres de droit.

Monsieur [C] et [U] exposent que le rapport d'expertise judicaire ne permet pas déterminer précisément la cause du sinistre et considèrent que le rapport de Monsieur [T] produit par AXA ne peut être pris en compte scientifiquement, n'ayant été établi que sur planches photos des lieux incendiés. Concernant le scooter qui aurait pris feu sur son emplacement de parking, Monsieur [W] [C] conteste en être le propriétaire. Ils font ainsi valoir que l'incendie provient de trois emplacements de stationnement et de trois propriétaires des véhicules, à savoir : Messieurs [C], [P] et [J], justifiant leur condamnation in solidum à parts égales.

Monsieur [C] et [U] sollicitent, par ailleurs, le rejet du recours subrogatoire d'AXA qu'ils considèrent comme une demande nouvelle en cause d'appel irrecevable.

La société GAN Assurances et Madame [V] [J] (conclusions notifiées par rpva le 15 Mai 2019) sollicitent de :

Dire et juger mal fondées sur la Loi du 5 juillet 1985 les demandes du syndicat de la copropriété [Adresse 6], dès lors qu'aucun accident au sens de cette Loi n'a pu être relevé.

Dire et juger que le véhicule de Monsieur [C] est celui qui a présenté la combustion la plus importante et semble manifestement à l'origine de l'incendie.

En conséquence :

A titre principal, mettre hors de cause la compagnie d'assurances GAN et son assurée Madame [J].

A titre subsidiaire, vu l'implication prédominante du véhicule de Monsieur [C] dans les dommages élevés par l'Expert judiciaire, dire et juger que Monsieur [C] et son assureur la compagnie [U] devront prendre en charge les deux tiers des conséquences dommageables du sinistre.

En conséquence,

limiter la responsabilité de Madame [J] et de son assureur la compagnie GAN, ainsi que celle des autres parties à la prise en charge d'un tiers des conséquences dommageables du sinistre.

Ramener toutes les autres demandes du syndicat de la copropriété [Adresse 6] à de plus justes proportions.

Débouter toutes les autres parties de toutes leurs demandes, fins et conclusions.

Débouter la compagnie AXA de son recours à l'encontre de la compagnie GAN et de Madame [J].

Condamner la compagnie AXA au paiement d'une indemnité de 2.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

La condamner aux entiers dépens en application des articles 696 et 699 du Code de Procédure Civile.

Le GAN et Madame [J] soutiennent que le fondement de la loi du 05 juillet 1985 n'est pas applicable en l'espèce dès lors que l'incendie serait volontaire, qu'il convient donc de distinguer la responsabilité de chacun des véhicules affectés. Or, il ressort de l'expertise judiciaire que le véhicule ayant causé le principal des désordres serait celui de Monsieur [C]. En revanche, aucune des pièces du dossier ne permet de démontrer que le véhicule de Madame [J] serait à l'origine de l'incendie, ce qui justifierait une mise hors de cause pure et simple et le rejet des demandes du syndicat de la copropriété de la résidence « [Adresse 6] » à leur égard.

Subsidiairement, ils sollicitent la limitation des réclamations du syndicat des copropriétaires compte tenu de la combustion plus importante du véhicule de Monsieur [C] justifiant une part de responsabilité au moins à hauteur des deux tiers des conséquences pécuniaires des dommages causés par l'incendie. Seul le tiers restant pouvant être partagé entre les autres parties, dont Madame [J] et le GAN.

Concernant le recours formé par AXA, ils concluent qu'il n'est pas déterminé que les règlements effectués sont en lien avec le sinistre, aucune facture n'étant produite ni évaluation d'expert.

Le syndicat des copropriétaires [Adresse 6] a constitué avocat mais n'a pas conclu.

L'affaire a été clôturée par ordonnance du conseiller de la mise en état du 8 Janvier 2024.

L'affaire a été retenue à l'audience du 06 février 2024 et mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 11 avril 2024.

MOTIFS :

Sur la contribution à l'indemnisation :

L'incendie provoqué par un véhicule terrestre à moteur, ce dernier fût-il en stationnement, est régi par la loi du 05 juillet 1985, et non pas par l'article 1384 (ancien 1242), alinéa 2, du code civil.

Les conclusions du GAN et de Madame [J] tendant à écarter la loi relative aux accidents de la circulation sont donc mal fondées.

Selon l'article 2 de cette loi, les victimes, y compris les conducteurs, ne peuvent se voir opposer la force majeure ou le fait d'un tiers par le conducteur ou le gardien d'un véhicule impliqué.

Il résulte des dispositions de cet article que lorsqu'aucune faute n'est établie contre les conducteurs de véhicules terrestres à moteur impliqués dans un accident de la circulation, leur contribution à l'indemnisation des victimes se répartit entre eux à parts égales.

En l'espèce, selon l'expert judiciaire, la dalle haute du parking a bien été impactée structurellement par l'incendie survenu le 06 septembre 2013 et nécessite des travaux de confortement. Le principal dommage est l'affaiblissement de la structure béton (dalle et poutres) à proximité du point le plus chaud de l'incendie, situé au niveau du véhicule de Monsieur [C] à gauche de la zone sinistrée, ce qui a nécessité un étaiement d'urgence depuis le 04 octobre 2013. Le laboratoire Alpha BTP consulté par l'expert judiciaire conclut à une dalle affaiblie par l'incendie qu'il faudra renforcer. Les causes des dommages sont l'incendie des trois véhicules garés dans le parking côté nord-est. Cependant, les causes de l'incendie ne sont pas précisées. L'expert judiciaire a déploré que les véhicules impliqués ont été enlevés très rapidement par leurs assureurs avant toutes investigations sur place, alors qu'aucune investigation complémentaire n'avait été faite ou communiquée avant leur enlèvement et la dépollution des lieux et que les dossiers de sinistre correspondant ne lui ont pas été communiqués. L'expert judiciaire n'a donc pas jugé opportun de procéder à des investigations supplémentaires pour rechercher les causes exactes de l'incendie deux ans après les faits, alors que la majorité des traces ont été effacées. Ainsi, l'expert judiciaire n'a-t-il pu se prononcer sur l'origine exacte de l'incendie ni sur la position du véhicule ayant pris feu en premier. Il explique, en effet, que l'endroit le plus atteint d'après les dégâts relevés au plafond est celui du parking de Madame [C] mais rien n'indique que le feu n'ait pas pris ailleurs et que la chaleur dégagée à cet endroit n'ait été maximale à cause d'un réservoir plus rempli que celui des autres véhicules par exemple. L'expert judiciaire conclut donc que la responsabilité des trois véhicules est engagée, sans pouvoir se positionner sur l'origine exacte du sinistre.

AXA produit, par ailleurs, le rapport daté du 04 février 2017 de Monsieur [T], expert en explosions et incendies qu'elle a mandaté et qui s'est fondé uniquement sur des clichés photographiques dont il précise que n'ayant pas été réalisés par ses soins, il manque un certain nombre de clichés qui auraient permis de formaliser mieux son raisonnement relatif à la cinétique de l'incendie. Il affirme néanmoins que le foyer de l'incendie se situe à l'arrière du véhicule B identifié comme appartenant à Monsieur [P]. Il ajoute que « le point d'origine ou point d'allumage se situe très vraisemblablement dans l'habitacle arrière du véhicule B ».

Ces éléments n'établissent pas l'existence d'une faute imputable spécifiquement à l'un des propriétaires des véhicules impliqués dans l'incendie. Si Monsieur [T] affirme que le foyer de l'incendie se trouve à l'arrière du véhicule de Monsieur [P], aucune faute ne peut s'en déduire à son encontre.

Il en va de même en ce qui concerne Monsieur [C] et le syndicat des copropriétaires dont la responsabilité est recherchée, en particulier par Monsieur [P] et la BPCE, sur le fondement de l'article 1384 alinéa 2, devenu 1242, du code civil en qualité de gardiens de l'emplacement de parking, partie commune à usage privatif ou partie privative, sur lequel était également stationné un scooter, ainsi que sur le fondement de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965. En effet, si Monsieur [M] situe le point le plus chaud de l'incendie au niveau de l'emplacement de stationnement du véhicule de Monsieur [C], aucune faute ne peut en être déduite tant à son encontre qu'à l'encontre du syndicat des copropriétaires et le fait de laisser stationner un scooter à l'arrière d'un autre véhicule ne constitue pas une telle faute. Il n'a pas plus été démontré le défaut d'entretien des parties communes ou le défaut de construction susceptible d'engager la responsabilité de plein droit de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 (ancienne rédaction) ni que l'incendie pourrait trouver son origine dans une partie commune puisque l'origine exacte de l'incendie n'a pas pu être déterminée.

Le montant de l'indemnisation allouée au syndicat des copropriétaires par le tribunal n'est pas discuté en cause d'appel.

La cause des dommages faits à l'immeuble étant l'incendie des trois véhicules appartenant respectivement à Monsieur [C], Monsieur [P] et Madame [J], sans qu'aucune faute ne puisse être établie à l'encontre de l'un d'eux, c'est à juste titre que le tribunal les a condamnés, sur le fondement des dispositions de la loi du 05 juillet 1985, in solidum à les réparer à hauteur de la somme de 33.522euros suivant le devis de l'entreprise Freyssinet avec intérêts au taux légal à compter du jugement, et dit que, dans leurs rapports entre eux, la contribution à l'indemnisation doit se répartir entre les propriétaires des véhicules impliqués dans l'incendie, à parts égales, soit 1/3 chacun.

La mise en 'uvre des garanties de leurs assureurs n'étant pas contestée, le jugement sera aussi confirmé en ce qu'il a dit que [U], la BPCE et le GAN doivent garantir leurs assurés respectifs des condamnations prononcées à leur encontre.

Enfin, AXA ayant été actionné en sa qualité d'assureur multirisques habitation du syndicat des copropriétaires, dont la responsabilité n'a pas été retenue, il y a lieu de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a mis cet assureur hors de cause.

Sur le recours subrogatoire d'AXA :

AXA fonde son recours subrogatoire exclusivement sur les dispositions de l'article L. 121-12 du code des assurances.

A toutes fins utiles, il est précisé que le recours subrogatoire formée ne cause d'appel avec une élévation du montant n'est pas une demande nouvelle puisque tendant à la même fin d'indemnisation des sommes versées à son assuré en lien avec ce litige.

Selon l'alinéa 1er de cet article : « l'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur ».

L'action est conditionnée par le paiement de l'indemnité d'assurance à l'assuré. L'assureur doit prouver que le paiement de l'indemnité d'assurance est intervenu en exécution du contrat. L'assureur, qui soutient être légalement subrogé dans les droits et actions de son assuré indemnisé mais ne produit pas la police d'assurance, ne justifie pas que son paiement est intervenu en vertu d'une garantie régulièrement souscrite, pouvant seule lui conférer la qualité d'indemnité d'assurance visée par l'article L. 121-12.

L'action subrogatoire de l'article L. 121-12 est également subordonnée à l'existence d'une action de l'assuré contre un tiers responsable. A ce titre, il est admis que l'assureur exerce une action en responsabilité fondée sur la loi du 05 juillet 1985.

Lorsque les conditions de la subrogation sont réunies, celle-ci se produit de plein droit.

En l'espèce, force est de constater qu'AXA ne produit pas la police d'assurance souscrite par le syndicat des copropriétaires.

En outre, il n'est pas établi que tous les versements effectués l'ont été au bénéfice de l'assuré. La preuve du paiement de l'indemnité d'assurance n'est donc pas rapportée. En effet, les versements et chèques dont il est fait état ne sont pas établis au bénéfice du syndicat des copropriétaires et aucune facture permettant de faire le rapprochement des paiements effectués avec le sinistre n'est produite aux débats.

En conséquence, le jugement querellé sera confirmé en ce qu'il a rejeté le recours subrogatoire d'AXA.

AXA étant défaillant dans l'administration de la preuve de la réunion des conditions de son recours subrogatoire, il n'y a pas lieu de faire droit à sa demande subsidiaire d'expertise judiciaire pour déterminer le montant des dommages occasionnés à l'immeuble et au syndicat de copropriété en relation avec l'incendie.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Le jugement en date du 10 décembre 2018 doit être confirmé en ses dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

AXA, qui succombe en son appel, sera condamné à supporter les dépens de la présente procédure avec distraction au profit des avocats de la cause qui peuvent y prétendre.

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe, et après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement en date du 10 décembre 2018 en toutes ses dispositions dont appel,

Y AJOUTANT,

DEBOUTE la société AXA France Iard de sa demande subsidiaire tendant à ordonner une expertise judiciaire,

DEBOUTE les parties de leurs demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

CONDAMNE la société AXA France Iard à supporter les entiers dépens de l'appel avec distraction au profit des avocats de la cause qui peuvent y prétendre.

Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Madame Patricia CARTHIEUX, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 18/20179
Date de la décision : 11/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 17/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-11;18.20179 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award