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10/04/2024 | FRANCE | N°21/17668

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 2-4, 10 avril 2024, 21/17668


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 2-4



ARRÊT AU FOND

DU 10 AVRIL 2024



N° 2024/91







Rôle N° RG 21/17668 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BIRMB







[B] [H]

[L] [J] [Z] [H]





C/



[Y] [H]

[C] [H] épouse [U]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



par Me Joseph MAGNAN



Me Frédéric PEYSSON



Me Martine DES

OMBRE















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal judiciaire de TARASCON en date du 25 Novembre 2021 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 19/00220.





APPELANTS



Monsieur [B] [H]

né le [Date naissance 2] 1950 à [Localité 16], demeurant [Adresse 13] - [Localit...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 2-4

ARRÊT AU FOND

DU 10 AVRIL 2024

N° 2024/91

Rôle N° RG 21/17668 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BIRMB

[B] [H]

[L] [J] [Z] [H]

C/

[Y] [H]

[C] [H] épouse [U]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

par Me Joseph MAGNAN

Me Frédéric PEYSSON

Me Martine DESOMBRE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal judiciaire de TARASCON en date du 25 Novembre 2021 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 19/00220.

APPELANTS

Monsieur [B] [H]

né le [Date naissance 2] 1950 à [Localité 16], demeurant [Adresse 13] - [Localité 16]

représenté par Me Damien FAUPIN de la SELARL BURAVAN DESMETTRE GIGUET FAUPIN, avocat au barreau de TARASCON (avocat plaidant) et par Me Joseph MAGNAN de la SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE (avocat postulant)

Monsieur [L] [J] [Z] [H]

né le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 22], demeurant [Adresse 12]

représenté par Me Damien FAUPIN de la SELARL BURAVAN DESMETTRE GIGUET FAUPIN, avocat au barreau de TARASCON (avocat plaidant) et Me Joseph MAGNAN de la SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE (avocat postulant)

INTIMES

Monsieur [Y] [G] [P] [H] né le [Date naissance 10] 1965 à [Localité 16], demeurant [Adresse 14]

représenté par Me Frédéric PEYSSON, avocat au barreau de TOULON

Madame [C] [H] épouse [U]

née le [Date naissance 7] 1943 à [Localité 22], demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Martine DESOMBRE de la SCP MARTINE DESOMBRE & JULIEN DESOMBRE, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 13 Mars 2024 en audience publique devant la cour composée de :

Madame Michèle JAILLET, Présidente

Madame Nathalie BOUTARD, Conseillère

Mme Pascale BOYER, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Fabienne NIETO.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Avril 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Avril 2024,

Signé par Madame Michèle JAILLET, Présidente et Mme Fabienne NIETO, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOS'' DU LITIGE

M. [G] [H], né le [Date naissance 4] 1923 à [Localité 16] (Bouches-du-Rhône), a épousé Mme [N] [A], née le [Date naissance 6] 1926 à [Localité 22] (Vaucluse), le 20 février 1943 à [Localité 22]. Le couple a fait précéder l'union d'un contrat de communauté réduite aux acquêts reçu par Maître [F], notaire à [Localité 22], le 19 février 1943.

De cette union sont nés :

- Mme [C] [H], le [Date naissance 7] 1943 à [Localité 22],

- M. [W] [H], le [Date naissance 11] 1945 à [Localité 22],

- M. [B] [H], le [Date naissance 2] 1950 à [Localité 16],

- M. [L] [H], le 9 juin 1951 à [Localité 22].

Par acte authentique reçu le 23 février 1968 par Maître [K], notaire à [Localité 16], M. [G] [H] a fait une donation à son épouse de l'universalité des biens qui composeront sa succession.

Par acte authentique reçu par Maître [Z] [R], notaire à [Localité 16], le 2 décembre 1988, les époux [H] / [A] ont changé leur régime matrimonial et liquidé leur régime précédent afin de choisir la séparation de biens.

Ce changement de régime matrimonial a été homologué par jugement du tribunal de grande instance de Tarascon du 12 mai 1989.

Les époux [H] / [A] ont chacun rédigé un testament le même jour :

Par testament olographe en date du 30 mars 2004, M. [G] [H] a légué la quotité disponible de sa succession à M. [L] [H] et à M. [B] [H] en octroyant un usufruit universel à son épouse, Mme [N] [A] épouse [H].

Par testament olographe en date du 30 mars 2004, Mme [N] [A] veuve [H] a légué à M. [B] [H] et à M. [L] [H] la quotité disponible de sa succession en octroyant un usufruit universel à son époux, M. [G] [H].

M. [G] [H] est décédé le [Date décès 8] 2004 à [Localité 15] (Vaucluse) en laissant à sa survivance son conjoint successible, Mme [N] [A] épouse [H], et ses quatre enfants, Mme [C] [H], M. [W] [H], M. [B] [H] et M. [L] [H].

M. [W] [H] est décédé le [Date naissance 9] 2015 à [Localité 18] (Var) en laissant à sa survivance son fils M. [Y] [H], né le [Date naissance 10] 1965 à [Localité 16].

Mme [N] [A] veuve [H] est décédée le [Date décès 3] 2015 laissant pour lui succéder ses trois enfants, Mme [C] [H], M. [B] [H] et M. [L] [H], et son petit-fils M. [Y] [H] venant en représentation de son père prédécédé M. [W] [H].

M. [Y] [H] a considéré que Mme [N] [A] veuve [H] a placé des liquidités sur divers contrats d'assurance-vie conclus au bénéfice de M. [B] [H] de M. [L] [H] afin d'avantager deux de ses enfants au détriment des autres héritiers réservataires, dont son père M. [W] [H], duquel il tire ses droits.

Par exploits extrajudiciaires des 8 février 2019, 12 février 2019 et 13 février 2019, M. [Y] [H] a fait assigner Mme [C] [H], M. [L] [H] et M. [B] [H] devant le tribunal de grande instance de Tarascon pour voir ordonner l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage des successions de M. [G] [H] et de Mme [N] [A] veuve [H] ainsi que pour dire que les primes versées sur trois contrats d'assurance-vie sont manifestement exagérées au sens de l'article L. 132-13 du code des assurances et qu'elles doivent être réduites pour atteinte à la réserve héréditaire.

Mme [C] [H] n'a pas constitué avocat dans la procédure de première instance.

Par jugement réputé contradictoire du 25 novembre 2021, auquel il convient de se référer pour plus ample exposé des faits et des prétentions des parties, le tribunal judiciaire de Tarascon a :

- Ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage des successions de M. [G] [H] décédé le [Date décès 8] 2004 et Mme [N] [H] décédée le [Date décès 3] 2015.

- Commis Maître [V] [T], notaire à [Localité 21], afin de procéder aux opérations de compte, liquidation et partage et d'établir l'acte liquidatif.

- Commis Isabelle Dumas en qualité de juge commis pour surveiller les opérations et faire rapport en cas de difficultés.

- Débouté Messieurs [B] et [L] [H] de leur fin de non recevoir tirée de la prescription de l'action en réduction de M. [Y] '[H]'.

- Déclaré recevable comme non prescrite l'action en réduction de M. [Y] [H].

- Dit que les primes versées par Mme [N] [H] à hauteur de 308.376,53 euros pour le contrat [17] PERSPECTIVES ECUREUIL, 21.973,64 € pour le contrat [17] PEP TRANSMISSION, et 279.500 € pour le contrat [19] AMPER doivent faire l'objet d'une réduction pour atteinte à la réserve héréditaire et être réintégrées dans la masse successorale pour le calcul de cette réserve héréditaire.

- Dit que le notaire devra procéder à l'évaluation des biens ayant fait l'objet de donations par préciput et hors part au profit de Messieurs [B] et [L] [H] afin de les réintégrer dans la masse successorale pour calcul de la réserve héréditaire.

- Condamné Messieurs [B] et [L] [H] aux entiers dépens et à payer en outre à M. [Y] [H] une indemnité de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- Ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.

Par déclaration reçue au greffe le 15 décembre 2021, M. [B] [H] et M. [L] [H] ont interjeté appel de cette décision.

Par premières conclusions déposées le 8 mars 2022, les appelants demandaient à la cour de :

Vu les articles 815 et suivants du Code civil Vu l'article L. 132-13 du Code des assurances

RECEVOIR l'appel de Messieurs [B] et [L] [H] comme 'état' justifié au foind et recevable en la forme.

REFORMER lejugement entrepris en ce qu'il a :

DIT que les primes versées par Mme [N] [H] à hauteur de 308 376,53 euros pour le contrat [17] PERSPECTIVES ECUREUIL, 21 973,64 € pour le contrat [17] PEP TRANSMISSION, et 279 500 € pour le contrat [19] AMPER doivent faire l'objet d'une réduction pour atteinte à la réserve héréditaire et être réintégrées dans la masse successorale pour le calcul de cette réserve héréditaire.

DIT que le notaire devra procéder à l'évaluation des biens ayant fait l'objet de donations par préciput et hors part au profit de Messieurs [B] et [L] [H]afin de les réintégrer dans la masse successorale pour calcul de la réserve héréditaire.

CONDAMNÉ Messieurs [B] et [L] [H] aux entiers dépens et à payer en outre à M. [Y] [H] une indemnité de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

En conséquence, DEBOUTER Monsieur [Y] [H] de sa demande de requalification des primes versées et de réintégration à la succession afin d'action en réduction des donations par préciput et hors part.

Y ajoutant,

CONDAMNER Monsieur [Y] [H] au paiement de la somme de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile

Le CONDAMNER aux entiers dépens.

Par seules conclusions notifiées le 6 avril 2022, M. [Y] [H] sollicite de la cour de :

CONFIRMER en toutes ses dispositions le Jugement rendu le 25 novembre 2021 par le Tribunal Judiciaire de TARASCON.

CONDAMNER Monsieur [B] [H] et Monsieur [L] [H] à verser à Monsieur [Y] [H] la somme de 3 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

CONDAMNER Monsieur [B] [H] et Monsieur [L] [H] aux entiers dépens.

Aux termes de ses seules conclusions transmises le 13 juin 2022, Mme [C] [H] demande à la cour de :

DONNER ACTE à Madame [C] [H] du fait qu'elle s'en rapporte à justice

Au surplus

CONDAMNER [L] et [B] [H] conjointement et solidairement à lui verser la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile outre aux dépens.

Par conclusions responsives déposées le 10 août 2022, les appelants ont maintenu leurs demandes sauf à voir :

DEBOUTER Monsieur [Y] [H] du surplus de ses demandes.

DEBOUTER Madame [C] [H] de sa demande de paiement au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

Le 28 décembre 2022, le magistrat chargé de la mise en état a interrogé les parties pour savoir si le notaire commis avait dressé un projet de partage.

Le 29 décembre 2022, le conseil des appelants a répondu que son correspondant lui a indiqué qu'aucun projet n'a été établi.

Le 9 janvier 2023, le conseil de M. [Y] [H] a indiqué que le notaire attend l'issue de la procédure d'appel pour procéder au projet de partage.

Par avis du 10 octobre 2023, le magistrat chargé de la mise en état a informé les parties que cette affaire était fixée à l'audience du 13 mars 2024.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 14 février 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties aux conclusions récapitulatives régulièrement déposées.

Sur l'étendue de la saisine de la cour

Il convient de rappeler qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif.

Les demandes de 'donner acte' sont dépourvues de tout enjeu juridique et ne constituent pas des prétentions au succès desquels les parties pourraient avoir un intérêt légitime à agir au sens de l'article 4 du code de procédure civile.

Ne constituent pas par conséquent des prétentions au sens de l'article sus-cité du code de procédure civile les demandes des parties tendant à voir 'constater' ou 'donner acte' ou encore à 'prendre acte' de sorte que la cour n'a pas à y répondre.

Il n'y a donc pas lieu de reprendre ni d'écarter dans le dispositif du présent arrêt les demandes tendant à 'constater que' ou 'dire que ' telles que figurant dans le dispositif des conclusions des parties, lesquelles portent sur des moyens ou éléments de fait relevant des motifs et non des chefs de décision devant figurer dans la partie exécutoire de l'arrêt.

L'article 9 du code de procédure civile dispose qu''il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention' et que l'article 954 du même code, dans son alinéa 1er, impose notamment aux parties de formuler expressément ses prétentions et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune des prétentions est fondée 'avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et leur numérotation'.

Par ailleurs l'effet dévolutif de l'appel implique que la cour connaisse des faits survenus au cours de l'instance d'appel et depuis le jugement déféré et statue sur tous les éléments qui lui sont produits même s'ils ne se sont révélés à la connaissance des parties qu'en cours d'instance d'appel.

Sur les primes d'assurances-vie

L'article L. 132-13 du code des assurances dispose que 'Le capital ou la rente payables au décès du contractant à un bénéficiaire déterminé ne sont soumis ni aux règles du rapport à succession, ni à celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers du contractant.

Ces règles ne s'appliquent pas non plus aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci n'aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés'.

Les appelants sollicitent de voir réintégrer les primes d'assurance-vie litigieuses dans la masse successorale. Ils soutiennent que l'argumentaire utilisé par le tribunal n'est pas applicable au cas d'espèce.

Ils exposent, en substance, que :

- Le jugement aurait fait une mauvaise appréciation des faits en considérant que les contrats d'assurance-vie ne présentaient pas d'intérêt pour Mme [N] [A] veuve [H]. Comme le constaterait lui-même M. [Y] [H], les primes versées, issues de la vente des immeubles l'ont été pour constituer à Mme [N] [A] veuve [H] un capital lui permettant de lui assurer des revenus tout au long de sa vie.

- Le juge de première instance serait parti d'un postulat pour le moins erroné selon lequel Mme [N] [A] veuve [H] n'aurait pas réalisé de rachat partiel. La pièce n°5 de M. [Y] [H] démontrerait que sa grand-mère bénéficiait de rachats partiels programmés à hauteur de 1.300 euros par mois sur le contrat n°858 610987 afin de lui assurer un complément de revenu.

- Contrairement à ce que retient le tribunal, l'utilité de l'opération n'est pas le seul critère à devoir être pris en considération dans le cadre de l'appréciation du caractère exagéré ou non des primes.

- Après avoir souscrit le contrat [17] n°804233304 le 6 septembre 1989, Mme [N] [A] veuve [H] disposait encore de plusieurs biens à [Localité 16], à [Localité 22] et à [Localité 20]. Il en irait ainsi nécessairement de même pour le contrat souscrit le 10 février 1990, le contrat [17] n°916151203, mais également pour les contrats ultérieurs d'octobre 2003 et de juin 2006.

- Ces contrats ont été souscrits alors que Mme [N] [A] veuve [H] disposait d'avoirs relativement importants. Les appelants mentionnent que le fait que les primes ajoutées à l'ensemble des biens légués ou donnés par le souscripteur ait conduit à un dépassement de la quotité disponible ne doit pas être considéré comme un des éléments du caractère exagéré ou non desdites primes.

- Les appelants insistent sur l'objectif de placement patrimonial cohérent au regard d'investissements passés et au regard de l'âge du souscripteur des différents contrats d'assurance-vie dont il est demandé la réintégration dans la succession.

- Il faudrait également prendre en compte les dates de versement puisque Mme [H] est décédée le [Date décès 3] 2015 quand les primes versées sur les contrats [17] l'ont été entre 2001 et 2013 et sur le contrat [19] au plus tard en 2008.

Les appelants sollicitent, par conséquent, l'infirmation du jugement pour que M. [Y] [H] soit débouté de ses demandes de réintégration des primes manifestement exagérées sur le fondement de l'article L. 132-13 du code des assurances.

M. [Y] [H] sollicite la confirmation du jugement attaqué.

Il fait valoir notamment que :

- Au jour du décès de Mme [N] [A] veuve [H], celle-ci avait procédé à la vente de tous ses immeubles pour les convertir en assurances-vie en nommant bénéficiaires M. [B] [H] et M. [L] [H]. Mme [N] [A] veuve [H] s'était seulement réservée l'usufruit d'un bien à [Localité 16].

- Mme [N] [A] épouse [H] disposait d'un revenu constitué seulement d'une pension de retraite versée par la MSA et d'une complémentaire versée par le CRAM DU SUD EST de 1.000 euros, pour un montant total de 12.600 euros par an.

- Mme [N] [A] veuve [H] n'était pas assujettie à l'impôt sur le revenu.

- Le versement sous forme de primes de tous les prix de vente des immeubles considérés, pour un montant total de 640.000 euros, serait manifestement exagéré au regard de ses facultés et ne présenterait aucun intérêt pour le souscripteur, sauf à transmettre aux bénéficiaires une partie de la succession afin d'écarter les autres héritiers.

- Ces versements paraissent disproportionnés par rapport aux revenus de la défunte. Eu égard à la jurisprudence applicable, il conviendrait de considérer que Mme [A] veuve [H] a versé l'intégralité de ses avoirs dans les primes de ses assurances-vie alors qu'elle disposait d'une faible retraite.

- L'analyse des rachats partiels permettraient de démontrer que les contrats d'assurance-vie ne présentaient aucun intérêt pour la défunte.

- Pour le contrat [17] N° 858610987, 'NUANCE 3D', deux versements auraient eu lieu : l'un le 13 mars 2008 pour 43.500 euros et l'autre pour 62.700 euros le 12 novembre 2003. Entre le 1er octobre 2005 et le 1er octobre 2015, Mme [A] veuve [H] a retiré pour son profit la somme totale de 49.400 euros. M. [Y] [H] sollicite donc la confirmation du jugement qui a considéré que le versement de ces primes n'est pas exagéré concernant ce contrat.

- Pour le contrat [17] N° 804233304 'PERSPECTIVE ÉCUREUIL', différents versements ont eu lieu entre le 12 novembre 2003 et le 16 septembre 2004. À partir de 2004, les virements annuels initiaux et conformes aux revenus de la défunte ont été interrompus. Des versements ponctuels ont été réalisés avec des sommes très élevées provenant de la vente des immeubles de la défunte. M. [Y] [H] détaille le versement des primes qu'il pense exagérées :

le 16 septembre 2004 sont versées deux primes pour une valeur totale de 84.376,53 euros;

le 27 janvier 2012, est versée une prime de 53.000 euros ;

le 9 mai 2012 est versée une prime de 90.000 euros ;

le 13 septembre 2013, une prime de 81.000 euros.

- Pour ce même contrat, le seul rachat partiel n'a eu lieu qu'avant le versement des primes manifestement exagérées. Il conviendrait, ce faisant, de confirmer le jugement attaqué en retenant que la totalité des primes manifestement exagérées doivent être réintégrées.

- Pour le contrat [17] N° 916151203 'PEP TRANSMISSION', M. [Y] [H] note le versement d'une prime de 21.973,64 euros le 12 novembre 2003. Aucun achat partiel n'a été réalisé de sorte qu'il conviendrait de réintégrer dans la masse successorale la somme de '28.864,35 euros'.

- Pour le contrat [19] N° 815719, M. [Y] [H] liste les versements suivants :

01/01/1991 : 762.25 euros

01/01/1992 : 762.25 euros

16/05/1993 : 1440.64 euros

16/03/2002 : 30500.00 euros

01/08/2003 : 7000.00 euros

16/03/2004 : 25000.00 euros

16/11/2004 : 40000.00 euros

10/04/2007 : 88000.00 euros

16/12/2007 : 40000.00 euros

16/04/2008 : 56000.00 euros

- Pour ce même contrat, M. [Y] [H] souligne qu'il n'est pas discutable que les primes versées en 1991, 1992, 1993 et août 2003 peuvent être considérées comme non exagérées. En revanche, les autres primes seraient exagérées selon lui puisqu'elles ne présentaient aucune utilité pour Mme [A]-[H].

M. [Y] [H] souhaite donc obtenir la réintégration dans la masse successorale de la somme de 279.500 euros correspondant aux primes manifestement exagérées.

Mme [C] [H] s'en rapporte à justice dans ce dossier.

Le jugement entrepris a étudié chacun des contrats d'assurance-vie souscrits par Mme [N] [A] veuve [H] et discutés dans la présente affaire.

Il a retenu que :

- les primes du contrat [17] 'NUANCES 3 D' ne sont pas contestées par M. [Y] [H] dans la mesure où elles présentaient un intérêt pour sa grand-mère. Celle-ci a, en effet, procédé à des rachats partiels trimestriels sur ce compte et a ainsi complété ses revenus.

- Il est relevé que Mme [H] disposait d'un patrimoine immobilier dont elle s'est dépossédée peu à peu pour investir les fonds provenant des ventes dans les contrats d'assurance-vie litigieux. Elle ne disposait plus de biens à son décès, à l'exception de l'usufruit d'un mazet et d'une terre agricole.

- Elle n'était pas imposable, ni son mari, d'après l'avis d'imposition sur les revenus de 2004 faisant état de revenus à hauteur de 7.782 euros pour son époux et de 3.002 la concernant. Elle a ensuite déclaré des pensions de retraite à hauteur de 12.421 euros en 2009, 12.515 euros en 2010, 12.689 euros en 2011, 12.598 euros en 2012, 14.403 euros en 2013 et 14.013 en 2014. Elle disposait de faibles ressources évoluant de 900 à 1.200 euros.

- Ses ressources étaient réduites, même en y rajoutant le rachat partiel programmé à hauteur de 1.300 euros brut sur le seul contrat d'assurance-vie NUANCES 3D qui ne justifiait pas le versement de primes à hauteur de :

63.000 euros et 21.376,32 euros en septembre 2004 sur le contrat 'PERSPECTIVES ECUREUIL' ;

53.000 euros en janvier 2012 sur le contrat 'PERSPECTIVES ECUREUIL' ;

90.000 euros en mai 2012 sur le contrat 'PERSPECTIVES ECUREUIL'

81.000 euros en septembre 2013 sur le contrat 'PERSPECTIVES ECUREUIL' soit un total de 308.376,53 euros sur ce contrat

21.973,64 euros en novembre 2003 pour le contrat PEP TRANSMISSION

30.500 euros en mars 2002 sur le contrat [19] AMPER

25.000 euros en mars 2004 sur le contrat [19] AMPER

40.000 euros en novembre 2004 sur le contrat [19] AMPER

88.000 en avril 2007 sur le contrat [19] AMPER

40.000 euros en décembre 2007 sur le contrat [19] AMPER

56.000 euros en avril 2008 sur le contrat [19] AMPER soit un total de 279.500 euros de primes versées entre 2002 et 2008.

- Le jugement retient que ces trois contrats d'assurance ('PERSPECTIVES ECUREUIL', 'PEP TRANSMISSION' et '[19] AMPER') ne présentaient aucun intérêt pour Mme [H] qui n'a effectué aucun rachat partiel, à l'exception du contrat NUANCES 3D. Il apparaît au regard de l'âge de Mme [N] [A] veuve [H], que le versement des primes répondait à un objectif de favoriser les bénéficiaires des contrats en excluant les sommes de la succession.

Le tribunal a, par conséquent, retenu que les primes étaient manifestement exagérées au sens de l'article L. 132-13 du code des assurances. Le jugement a ainsi fait droit à la demande de M. [Y] [H] et ordonné la réintégration desdites sommes afin qu'elles fassent l'objet d'une réduction pour atteinte à la réserve héréditaire.

Contrairement à ce prétendent les appelants, le tribunal n'a pas considéré qu'il n'existait aucun rachat partiel. Le jugement a, en effet, rappelé que le contrat NUANCES 3D faisait l'objet de rachats à intervalles réguliers afin d'assurer à Mme [N] [A] veuve [H] des revenus complémentaires.

Il n'est démontré, à l'aide de pièces visées par les appelants, aucun autre rachat partiel que ceux visés dans le jugement.

À ce titre, il convient par ailleurs de noter que les appelants ne produisent aucune pièce au soutien de leur appel, contrairement à l'obligation qui leur est faite par l'article 954 alinéa du code de procédure civile.

Le tribunal a examiné les pièces du dossier en confrontant chaque versement opéré à l'âge du souscripteur, laquelle était déjà âgée au moment du versement des primes en 2002, mais également à l'utilité économique de l'opération, au contexte patrimonial de celle-ci et au contexte extrapatrimonial conformément aux critères dégagés par la jurisprudence.

Le jugement a parfaitement considéré que, vendant tous ses biens immobiliers, Mme [N] [A] veuve [H] a placé l'argent ainsi obtenu dans plusieurs assurances-vie afin d'avantager deux de ses quatre enfants, à savoir les bénéficiaires des contrats conclus, M. [L] [H] et M. [B] [H].

Les appelants ne justifient pas d'un quelconque moyen de nature à remettre en question la motivation de la décision attaquée.

Il convient, dès lors, d'adopter les motifs du jugement pour éviter de les paraphraser.

Le jugement critiqué sera dès lors confirmé en toutes ses dispositions concernant les assurances-vie souscrites par la défunte.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le jugement critiqué doit être confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles de première instance.

Aux termes de l'article 1310 du code civil, la solidarité ne se présume pas, elle est légale ou conventionnelle.

Messieurs [B] et [L] [H], qui sucombent, doivent être in solidum condamnés aux dépens d'appel.

Les intimés ont exposé des frais de défense en cause d'appel ; Messieurs [B] et [L] [H] seront condamnés in solidum à régler au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile :

3.000 euros au profit de M. [Y] [H] ;

2.000 euros au profit de Mme [C] [H].

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement en date du 25 novembre 2021 rendu par le tribunal judiciaire de Tarascon,

Y ajoutant,

Condamne in solidum M. [B] [H] et M. [L] [H] aux dépens d'appel,

Condamne in solidum M. [B] [H] et M. [L] [H] à régler en cause d'appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile les sommes de :

3.000 euros au profit de M. [Y] [H],

2.000 euros au profit de Mme [C] [H],

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

Signé par Madame Michèle Jaillet, présidente, et par Madame Fabienne Nieto, greffière, auxquelles la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

la greffière la présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 2-4
Numéro d'arrêt : 21/17668
Date de la décision : 10/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 17/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-10;21.17668 ?
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