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09/04/2024 | FRANCE | N°22/11111

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8b, 09 avril 2024, 22/11111


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8b



ARRÊT AU FOND

DU 09 AVRIL 2024



N°2024/ 318













Rôle N° RG 22/11111 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJ3GD







[O] [F]





C/



CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES DES ALPES MARITIMES





































Copie exécutoire délivrée

le : 9/04/2024

à :

>
- Me Guillaume EVRARD, avocat au barreau de GRASSE



- Me Cyril MARTELLO, avocat au barreau de TOULON



















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Pole social du Tribunal judiciaire de NICE en date du 05 Juillet 2022,enregistré au répertoire général sous le n° 21/829.





APPELANT



Monsieur [O] [F]...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8b

ARRÊT AU FOND

DU 09 AVRIL 2024

N°2024/ 318

Rôle N° RG 22/11111 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJ3GD

[O] [F]

C/

CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES DES ALPES MARITIMES

Copie exécutoire délivrée

le : 9/04/2024

à :

- Me Guillaume EVRARD, avocat au barreau de GRASSE

- Me Cyril MARTELLO, avocat au barreau de TOULON

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du Tribunal judiciaire de NICE en date du 05 Juillet 2022,enregistré au répertoire général sous le n° 21/829.

APPELANT

Monsieur [O] [F]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/006421 du 07/10/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE), demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Guillaume EVRARD, avocat au barreau de GRASSE, dispensé en application des dispositions de l'article 946 alinéa 2 du code de procédure civile d'être représentée à l'audience

INTIMEE

CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES DES ALPES MARITIMES, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Cyril MARTELLO, avocat au barreau de TOULON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Février 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Emmanuelle TRIOL, Présidente, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Emmanuelle TRIOL, Présidente

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Monsieur Benjamin FAURE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Aurore COMBERTON.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 09 Avril 2024.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 Avril 2024

Signé par Mme Emmanuelle TRIOL, Présidente et Mme Aurore COMBERTON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Des relations intimes entre M. [O] [F] et Mme [G] [V] est né [Y] [F], le 11 juillet 2007, reconnu par ses deux parents.

Suite à la séparation des parents de [Y] et par jugement du 12 novembre 2009, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Nice a fixé la résidence de l'enfant au domicile de sa mère et condamné M. [F] à verser à cette dernière la somme de 150 eureos par mois au titre de sa part contributive à l'entretien et l'éducation de son fils.

Par jugement du 23 juin 2016, le juge aux affaires familiales a maintenu la résidence de [Y] au domicile maternel et la contribution de M. [F] à l'entretien et l'éducation de l'enfant à un montant identique.

Le 5 janvier 2019, Mme [V] a déposé une plainte contre son ex-compagnon pour non restitution de l'enfant après les vacances de Noël 2018.

Par jugement du 26 décembre 2019, le juge aux affaires familiales a fixé la résidence habituelle de [Y] au domicile de son père et condamné Mme [V] au paiement de la somme de 150 euros par mois au titre de sa contribution à l'entretien et l'éducation de son fils.

Le 18 septembre 2021, M. [F] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Nice pour contester la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable de la CAF des Alpes-Maritimes contre la décision de la CAF du 27 avril 2021 de refus de versement des prestations familiales auxquelles ouvre droit [Y].

Entretemps, le 5 octobre 2021, la commission de recours amiable a notifié à M. [F] une décision de rejet de sa demande.

Par jugement contradictoire du 5 juillet 2022, le pôle social a :

- déclaré le recours formé par M. [F] recevable,

- s'est déclaré incompétent pour connaître de la demande portant sur l'allocation de logement familiale et renvoyé M. [F] à mieux se pourvoir,

- a débouté M. [F] du surplus de ses demandes,

- a condamné le même aux entiers dépens

- rappelé le caractère exécutoire de droit de sa décision.

Le tribunal a, en effet, considéré :

- qu'il lui appartenait d'examiner l'exception d'incompétence au profit de la juridiction administrative au regard de son caractère d'ordre public en dépit du fait qu'elle ait été soulevée par la CAF après exposé de moyens de fond,

- qu'en application des dispositions de l'article L 825-1 du code de la construction et de l'habitation applicable aux décisions postérieures au 1er janvier 2020, il n'était pas compétent pour examiner la demande de M. [F] au titre de l'allocation de logement familiale, l'indication d'une voie de recours erronée étant sans effet,

- qu'au regard des conditions dans lesquelles le changement de résidence de l'enfant s'était produit, la demande de M. [F] au titre de l'allocation de soutien familial devait être rejetée.

Par lettre recommandée avec avis de réception expédiée le 29 juillet 2022, M. [F] a relevé appel du jugement.

EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Dispensé de comparaître en vertu de l'article 946 du code de procédure civile, par conclusions dûment notifiées à la partie adverse auxquelles il est expressément référé, l'appelant demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de :

- annuler la décision du 27 avril 2021 par laquelle le médiateur de la CAF lui a notifié un refus de faire droit à un rappel de prestations familiales pour la période de septembre 2018 à décembre 2019,

- annuler la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable de la CAF sur son recours contre la décision du 27 avril 2021,

- condamner la CAF des Alpes-Maritimes à lui payer les prestations familiales pour la période de septembre 2018 à décembre 2019 pour un montant qui ne peut être inférieur à 11 070 euros,

- débouter la caisse de toutes ses demandes,

- condamner la même aux entiers dépens et à lui verser la somme de 1 500 euros, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, l'appelant fait valoir, au visa des articles L 512-1 et L 513-1 du code de la sécurité sociale, qu'il a la charge de son fils depuis septembre 2018 et a donc droit aux prestations familiales depuis cette date.

S'agissant de l'exception d'incompétence au titre de l'allocation de logement familiale, il rappelle que la caisse lui a notifié que la décision du 5 octobre 2021 était susceptible de recours devant le pôle social du tribunal judiciaire de Nice.

Au sujet de cette même allocation, il souligne qu'il n'y a eu aucun enlèvement d'enfant, [Y] manifestant sa volonté de vivre à son domicile. Il mentionne que la CAF reconnaissant que l'enfant se trouvait au domicile paternel depuis janvier 2019, un rappel des prestations familiales aurait dû lui être versé au moins à compter de cette date.

S'agissant de sa demande au titre de l'allocation de soutien familial, et au visa de l'article 523-1 I.3° du code de la sécurité sociale, il fait valoir qu'il n'est pas nécessaire qu'un jugement mette à la charge d'un parent une pension alimentaire pour que soit ouvert le droit à l'allocation, l'impossibilité de faire face à son obligation d'entretien ou l'absence de versement d'une pension alimentaire étant suffisante à son obtention. Il souligne que Mme [V] ne lui a pas versé de pension alimentaire entre septembre 2018 et décembre 2019. Il affirme se trouver dans une situation financière délicate.

Par conclusions adressées à la cour le 26 février 2024 et redéposées à l'audience, dûment notifiées à la partie adverse et auxquelles elle s'est expressément référée, l'intimé demande à la cour de confirmer le jugement entrepris, de débouter M. [F] de sa nouvelle demande en paiement de prestations familiales de septembre 2018 à décembre 2019 et de le condamner aux entiers dépens et à lui verser la somme de 1 000 euros, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'intimée réplique, au visa des articles L 511-1, L 512-1, L 513-1, R 513-1 et R 552-2 du code de la sécurité sociale que M. [F] a maintenu l'enfant à son domicile à l'issue des vacances de Noël 2018 en toute illégalité de sorte qu'il ne remplissait les conditions d'attribution des prestations familiales.

Elle se réfère au jugement quant à l'incompétence du pôle social au titre de la demande relative à l'allocation logement familiale et souligne que M. [F] a saisi la juridiction avant avoir reçu la notification de la décision comportant une erreur quant à la voie de recours.

S'agissant de l'allocation de soutien familial, elle rappelle qu'elle est due à compter du premier jour du mois civil suivant celui au cours duquel les conditions d'attribution sont réunies et que c'est au titre d'un jugement du 26 décembre 2019 que la résidence habituelle de [Y] a été fixée au domicile de son père. Elle indique donc devoir l'allocation à compter du mois de janvier 2020. Elle mentionne encore qu'il résulte des pièces de l'appelant que ses difficultés financières n'ont commencé qu'en octobre 2021.

Sur la demande de M. [F] relative au versement de la somme de 11 070 euros, elle fait valoir que M. [F] lui a déclaré avoir la charge de l'enfant qu'à compter de décembre 2018 et non septembre 2018 et qu'à compter de cette date, il ne remplissait pas les conditions d'attribution des prestations familiales.

MOTIVATION

Selon les dispositions de l'article L 511-1 du code de la sécurité sociale, les prestations familiales comprennent :

1°) la prestation d'accueil du jeune enfant ;

2°) les allocations familiales ;

3°) le complément familial ;

4°) L'allocation de logement régie par les dispositions du livre VIII du code de la construction et de l'habitation ;

5°) l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé ;

6°) l'allocation de soutien familial ;

7°) l'allocation de rentrée scolaire ;

8°) L'allocation forfaitaire versée en cas de décès d'un enfant ;

9°) l'allocation journalière de présence parentale.

En l'espèce, les prestations familiales en cause sont l'allocation de logement régie par les dispositions du livre VIII du code de la construction et de l'habitation et l'allocation de soutien familial.

Aux termes de l'article L 512-1 alinéa 1 du même code, toute personne française ou étrangère résidant en France, au sens de l'article L. 111-2-3, ayant à sa charge un ou plusieurs enfants résidant en France, bénéficie pour ces enfants des prestations familiales dans les conditions prévues par le présent livre sous réserve que ce ou ces derniers ne soient pas bénéficiaires, à titre personnel, d'une ou plusieurs prestations familiales, de l'allocation de logement sociale ou de l'aide personnalisée au logement.

Selon les dispositions de l'article L 513-1 du même code, les prestations familiales sont, sous réserve des règles particulières à chaque prestation, dues à la personne physique qui assume la charge effective et permanente de l'enfant.

Enfin, il ressort des dispositions de l'article R 513-1 du même code que la personne physique à qui est reconnu le droit aux prestations familiales a la qualité d'allocataire; que sous réserve des dispositions de l'article R. 521-2, ce droit n'est reconnu qu'à une personne au titre d'un même enfant; que lorsque les deux membres d'un couple assument à leur foyer la charge effective et permanente de l'enfant, l'allocataire est celui d'entre eux qu'ils désignent d'un commun accord (...) qu'en cas de divorce, de séparation de droit ou de fait des époux ou de cessation de la vie commune des concubins, et si l'un et l'autre ont la charge effective et permanente de l'enfant, l'allocataire est celui des membres du couple au foyer duquel vit l'enfant.

* Sur l'allocation logement familiale :

Aux termes de l'article L 825-1 du code de la construction et de l'habitation créé par l'ordonnance n° 2019-770 du 17 juillet 2019, sous réserve des dispositions de l'article L. 114-17 du code de la sécurité sociale qui attribuent au tribunal de grande instance désigné en application de l'article L. 211-16 du code de l'organisation judiciaire la compétence pour connaître des contestations relatives aux pénalités prononcées en cas de fraude, les recours dirigés contre les décisions prises en matière d'aides personnelles au logement et de primes de déménagement par les organismes mentionnés à l'article L. 812-1 sont portés devant la juridiction administrative.

Ce texte est entré en vigueur au 1er janvier 2020 et s'applique aux décisions postérieures à cette dernière date.

Le pôle social a parfaitement rappelé que, même si la CAF des Alpes-Maritimes n'avait pas soulevé l'exception d'incompétence in limine litis, il lui appartenait de statuer à son sujet au regard de son caractère d'ordre public. Il a ensuite exactement décidé que la décision de la CAF étant postérieure au 1er janvier 2020, il n'avait pas compétence pour statuer. A bon droit, il a considéré que la notification d'une voie de recours erronée était sans incidence sur l'application des règles relatives à la compétence d'attribution. Enfin, conformément à l'article du code de procédure civile, il a donc renvoyé M. [F] à mieux se pourvoir.

* Sur l'allocation de soutien familial :

Il ressort des pièces produites à la cour que la résidence habituelle de l'enfant commun de M. [F] et Mme [V] a d'abord été fixée au domicile maternel, par jugements du juge aux affaires familiales du 12 novembre 2009 et 23 juin 2016 avant que, [Y] n'ayant pas été rendu à sa mère à l'issue des vacances de Noël 2018, le domicile de l'enfant ne soit fixé chez son père, par jugement du 26 décembre 2019.

Cette dernière décision de justice n'a pas spécifié à compter de quelle date la résidence habituelle de [Y] était fixée chez son père de sorte qu'il convient d'appliquer la date du jugement, soit le 26 décembre 2019.

Dès lors, antérieurement à cette date, et en application des dispositions du jugement du 23 juin 2016, la résidence habituelle de [Y] était fixée par l'autorité judiciaire au domicile de Mme [V]. Comme parfaitement décidé par le pôle social et souligné par la CAF des Alpes-Maritimes, jusqu'au 26 décembre 2019, la présence de l'enfant au domicile de son père ne résultait que de la volonté délibérée de M. [F] de transgresser les dispositions prises par le juge aux affaires familiales. Cette transgression a les mêmes effets que l'enlèvement d'un enfant de la résidence de son parent gardien.

Dès lors, la CAF des Alpes-Maritumes a, à bon droit, considéré que l'allocation de soutien familial devait être versée à M. [F] à compter du 1er janvier 2020.

Il en ressort que la demande de versement de la somme de 11 070 euros formée par M. [F] au titre de la période courant de septembre 2018 à décembre 2019 doit être rejetée.

Le jugement entrepris est donc confirmé en toutes ses dispositions.

M. [F] est condamné aux entiers dépens et à verser à la CAF des Alpes-Maritimes la somme de 1 000 euros, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour,

Y ajoutant,

Condamne M. [O] [F] aux entiers dépens,

Condamne M. [O] [F] à payer à la CAF des Alpes-Maritimes la somme de 1 000 euros, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8b
Numéro d'arrêt : 22/11111
Date de la décision : 09/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 17/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-09;22.11111 ?
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