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04/04/2024 | FRANCE | N°22/10040

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 04 avril 2024, 22/10040


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4



ARRET SUR RENVOI DE CASSATION



ARRÊT AU FOND

DU 04 AVRIL 2024



N°2024/78















Rôle N° RG 22/10040 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJXRD







S.A. MMA IARD

Société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES





C/



[O] [R]

[C] [S]

Société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS - MAF -













Copie exécutoire délivrée
>le :

à :



Me Romain CHERFILS



Me Laure CAPINERO



Me Joseph MAGNAN





Arrêt en date du 04 Avril 2024 prononcé sur saisine de la cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 11 Mai 2022, qui a cassé et annulé l'arrêt n° 18/2469 rendu le 28 Janvier 2021 pa...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRET SUR RENVOI DE CASSATION

ARRÊT AU FOND

DU 04 AVRIL 2024

N°2024/78

Rôle N° RG 22/10040 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJXRD

S.A. MMA IARD

Société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES

C/

[O] [R]

[C] [S]

Société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS - MAF -

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Romain CHERFILS

Me Laure CAPINERO

Me Joseph MAGNAN

Arrêt en date du 04 Avril 2024 prononcé sur saisine de la cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 11 Mai 2022, qui a cassé et annulé l'arrêt n° 18/2469 rendu le 28 Janvier 2021 par la cour d'appel de AIX EN PROVENCE (Chambre 1-3).

DEMANDEURS SUR RENVOI DE CASSATION

S.A. MMA IARD

(agissant en qualité d'assureur constructeur non réalisateur

(CNR) de la SCI [Localité 5])

, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Marine CHARPENTIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Joanne REINA de la SELARL PLANTAVIN REINA ET ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

Société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES

(agissant en qualité d'assureur constructeur non réalisateur

(CNR) de la SCI [Localité 5])

, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Marine CHARPENTIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Joanne REINA de la SELARL PLANTAVIN REINA ET ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

DEFENDEURS SUR RENVOI DE CASSATION

Monsieur [O] [R]

, demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Laure CAPINERO de la SELARL IN SITU AVOCATS, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur [C] [S]

, demeurant [Adresse 2]

non comparant

Société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS - MAF -

demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Laurent PRUDON, avocat au barreau de LYON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 30 Janvier 2024 en audience publique devant la cour composée de :

Madame Inès BONAFOS, Présidente,

Mme Véronique MÖLLER, Conseillère

M. Adrian CANDAU, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Avril 2024.

ARRÊT

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

La SCI [Localité 5], promoteur ' vendeur, a réalisé à Marseille, au 23 traverse de l'Hermitage, une opération immobilière consistant en la construction de 6 villas individuelles vendues par lots en l'état futur d'achèvement.

A cette fin, elle s'est assurée auprès de la société d'assurances MMA s'agissant de sa responsabilité civile décennale.

Les travaux ont été réalisés sous la maîtrise d''uvre de M. [O] [R] et [C] [S], assurés auprès de MAF ASSURANCE.

Les travaux ont été réceptionnés le 11 juillet 2008 ; l'ensemble immobilier a été soumis au statut de la copropriété et doté d'un règlement de copropriété horizontal établi à l'initiative de la SCI [Localité 5].

Le 14 janvier 2010, un mur de soutènement formant clôture de l'ensemble en partie basse de la parcelle, propriété du syndicat des copropriétaires sur laquelle sont édifiées des maisons individuelles, s'est effondré sur la quasi-totalité du lot appartenant aux époux [Z].

Deux arrêtés de péril imminent ont alors été pris par la commune de [Localité 6], interdisant l'usage des villas n°2 et 3, propriétés respectives des consorts [Z] et [N].

Ces derniers ont saisi la Présidente du Tribunal de grande instance de MARSEILLE en référé en vue de voir notamment instaurer une mesure d'expertise.

Celle-ci a été ordonnée par décision du 11 juin 2010. L'expert a remis son rapport le 29 janvier 2013.

Par jugement du 7 décembre 2017, le Tribunal de grande instance de MARSEILLE :

Déclare recevable l'action du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier la SCI [Localité 5] représenté par son syndic bénévole Madame [I] [Z] ;

Met hors de cause la SA MMA IARD ;

Met hors de cause la SA MAF en sa qualité d'assureur de monsieur [C] [S] ;

Condamne in solidum la SCI [Localité 5], Monsieur [C] [S], M. [O] [R] et son assureur la SA mutuelle des architectes français (MAF) dans la limite de 10% pour cette dernière à payer au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier

« [Localité 5] » la somme de 249 746€ HT au titre des travaux de reprise majorés de la TVA applicable à la date du présent jugement et avec indexation en fonction de l'indice BT 01 entre la date du dépôt du rapport et la date du présent jugement ;

Condamne in solidum la SCI [Localité 5], Monsieur [C] [S], M. [O] [R] et son assureur la SA mutuelle des architectes français (MAF) dans la limite de 10% à payer à Mme [D] [N] la somme de 23450,65€ au titre de son préjudice de jouissance et la somme de 12750€ au titre de son préjudice moral ;

Dit que le coût de la franchise contractuelle de la MAF sera supporté par M. [O] [R] ;

Condamne M. [C] [S] à garantir la SCI [Localité 5] à hauteur de 60% et monsieur [O] [R] et la MAF à hauteur de 25% de l'ensemble des condamnations prononcées à leur encontre au titre du principal, des intérêts, des frais et dépens ;

Condamne in solidum Mme [D] [N] et a SA NATIO ASSURANCES à relever et garantir la SA MAF à hauteur de 15% des condamnations prononcées à son encontre au titre du principal des intérêts des frais et dépens ;

Condamne la SA NATIO ASSURANCES à relever et garantir Madame [D] [N] de l'ensemble des condamnations prononcé à son encontre ;

Déboute la SA MAF de sa demande d'appel en garantie à l'encontre de la SCI [Localité 5] ;

Condamne in solidum la SCI [Localité 5], M [C] [S], M. [O] [R] et la MAF à hauteur de 10% à payer à Mme [D] [N] la somme de 1829,28€ au titre des frais d'expertise pour la procédure de péril et des frais de référé ;

Condamne in solidum la SCI [Localité 5], M [C] [S], M. [O] [R] et la MAF à hauteur de 10% à payer au Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Localité 5] la somme de 5.000€ au titre des frais irrépétibles ;

Condamne in solidum la SCI [Localité 5], M [C] [S], M. [O] [R] et la MAF à hauteur de 10% à payer à payer à Mme [D] [N] la somme de 2.500€ au titre des frais irrépétibles ;

Déboute les autres parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles ;

Condamne in solidum la SCI [Localité 5], M [C] [S], M. [O] [R] et la MAF à hauteur de 10% aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise de M. [L] ;

Dit que les dépens seront distraits au profit des avocats qui le demandent conformément à l'article 699 du Code de procédure civile ;

Ordonne l'exécution provisoire de la présente décision.

Par déclaration en date du 12 février 2018, Madame [D] [N] a formé appel contre cette décision à l'encontre de [O] [R], de [C] [S], de la SCI [Localité 5], de la société MMA IARD, du Syndicat des copropriétaires l'ENSEMBLE IMMOBILIER [Localité 5], de la SA MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES en qualité d'assureur constructeur non réalisateur de la SCI [Localité 5], de la SA NATIO, de la SA MAF.

Par arrêt en date du 28 janvier 2021, cette Cour :

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a :

*mis hors de cause la SA MMA IARD ;

*condamné M. [C] [S] à garantir la SCI [Localité 5] à hauteur de 60 % et M. [O] [R] et la MAF à hauteur de 25 % de l'ensemble des condamnations prononcées à leur encontre au titre du principal, des intérêts, des frais et dépens ;

*réduit la garantie de la MAF ès qualités d'assureur de M. [R] à 10% du montant des préjudices ;

Le confirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau et y ajoutant ;

DECLARE irrecevables les demandes formées contre les sociétés MMA IARD et MMA assurances mutuelles ès qualités d'assureur dommages-ouvrage ;

CONDAMNE les sociétés MMA IARD et MMA assurances mutuelles in solidum avec la SCI [Localité 5], M. [C] [S], M. [O] [R] et la MAF ès qualités d'assureur de M. [R] et dans la limite de 20% à payer au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Localité 5] la somme de 249 746 euros HT au titre des travaux de reprise majorée de la TVA de 10 % avec revalorisation avec revalorisation suivant l'indice BT01 entre le mois de janvier 2013, date du dépôt du rapport d'expertise et la date du présent arrêt avec comme indice de base l'indice BT01 du mois de janvier 2013 et comme indice multiplicateur celui en vigueur à la date du présent arrêt ;

CONDAMNE les sociétés MMA IARD et MMA assurances mutuelles, avec application de leur plafond de garantie et sous déduction de leur franchise contractuelle, in solidum avec la SCI [Localité 5], M. [C] [S], M. [O] [R] et la MAF ès qualités d'assureur de M. [R] et dans la limite de 20% à payer à Mme [D] [N] :

* la somme de 23 450,65 euros au titre de son préjudice de jouissance de janvier 2012 au 31 décembre 2015,

* la somme de 9 792 euros en réparation de son préjudice de jouissance du 1er janvier 2016 au 31 août 2018,

* la somme de 5 202 euros en réparation de son préjudice de jouissance du 1 septembre 2018 au 28 février 2020,

* la somme de 12 750 euros en réparation de son préjudice moral ;

DIT que la franchise et le plafond de garantie des sociétés MMA IARD et MMA assurances mutuelles, applicables aux préjudices immatériels, sont opposables à leur assurée la SCI [Localité 5] ;

DIT que la franchise et le plafond de garantie de la MAF ès qualité d'assureur de M. [R], au titre des préjudices immatériels, sont opposables à leur assuré et aux tiers lésés ;

CONDAMNE M. [C] [S] d'une part et M. [R] et la MAF dans la limite de 20% d'autre part à relever et garantir la SCI [Localité 5] des condamnations prononcées contre elle à hauteur de 45% en ce qui concerne M. [C] [S] et à hauteur de 40% en ce qui concerne M. [R] et la MAF ;

CONDAMNE M. [C] [S], M. [O] [R] et la MAF, Mme [N] et la société Natio assurance à relever et garantir les MMA des condamnations prononcées contre elle au titre de l'indemnisation du préjudice subi par le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier L'hermitage à proportion de leur part de responsabilité chacune, à savoir :

* M. [C] [S] à hauteur de 45%,

* M. [O] [R] et la MAF à hauteur de 40% et dans la limite de 20% en ce qui concerne la MAF ;

* Mme [D] [N] et la société Natio assurance à hauteur de 15% ;

CONDAMNE M. [C] [S], M. [O] [R] et la MAF à relever et garantir les MMA des condamnations prononcées contre elle au titre de l'indemnisation du préjudice subis par Mme [D] [N] à hauteur de 45% en ce qui concerne M. [C] [S] et de 40% en ce qui concerne M. [O] [R] et la MAF, dans la limite de 20% pour la MAF ;

CONDAMNE M. [C] [S], M. [O] [R] et la MAF dans la limite de 20% à payer au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Localité 5] la somme de 5 000 euros et à Mme [N] la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE les autres demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE in solidum M. [C] [S], M. [O] [R] et la MAF dans la limite de 20% aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés contre eux conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile

Par arrêt en date du 11 mai 2022, la 3ème chambre civile de la Cour de cassation, sur pourvoi interjeté par les assurances MMA IARD :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne M. [S], M. [R] et la Mutuelle des architectes français à relever et garantir les sociétés Mutuelles du Mans assurances IARD assurances mutuelles et Mutuelles du Mans assurances IARD des condamnations prononcées contre elles au titre de l'indemnisation des préjudices subis par Mme [N] à hauteur de 45 % en ce qui concerne M. [S] et de 40 % en ce qui concerne M. [R] et la Mutuelle des architectes français, dans la limite de 20 %, l'arrêt rendu le 28 janvier 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Met hors de cause la société Natio,

Dit n'y avoir lieu de mettre hors de cause M. [R],

Condamne M. [S], M. [R] et la Mutuelle des architectes français aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes.

Par déclaration de saisine en date du 12 juillet 2022, les ASSURANCES MMA IARD, agissant en qualité d'assureur constructeur non réalisateur de la SCI [Localité 5] ont saisi la présente Cour en vue d'obtenir : la réformation et/ou l'annulation du jugement rendu le 7 décembre 2017 par le Tribunal de Grande Instance de Marseille, dans la limite de la cassation partielle prononcée par l'arrêt de la Cour de cassation le 11 mai 2022 à l'encontre de l'arrêt rendu par la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence le 28 janvier 2021, en ce qu'il a condamné M. [S], M.[R] et la Mutuelle des architectes français à relever et garantir les sociétés Mutuelles du Mans assurances IARD assurances mutuelles et Mutuelles du Mans assurances IARD des condamnations prononcées contre elles au titre de l'indemnisation des préjudices subis par Mme [N] à hauteur de 45% en ce qui concerne M. [S] et de 40% en ce qui concerne M. [R] et la Mutuelle des architectes français, dans la limite de 20%.

***

Par conclusions récapitulatives n°3 après renvoi de cassation notifiées le 5 décembre 2023, les assurances MMA IARD demandent à la Cour de :

Vu l'Arrêt de la Cour de Cassation, 3ème Chambre Civile, en date du 11 mai 2022,

Il est donc demandé à la Cour, dans les limites de la cassation partielle, de bien vouloir :

REFORMER le jugement rendu le 7 décembre 2017 par le Tribunal de Grande Instance de Marseille, en ce qu'il a condamné Monsieur [S], Monsieur [R] et la MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS à relever et garantir MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES des condamnations prononcées contre elles au titre de l'indemnisation des préjudices subis par Madame [N] à hauteur de 45 % en ce qui concerne Monsieur [S] et de 40 % en ce qui concerne Monsieur [R] et la MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS, dans la limite de 20 %

Statuant à nouveau :

A titre principal :

CONDAMNER Monsieur [S], Monsieur [R] et la MAF à relever et garantir intégralement MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES de l'ensemble des condamnations prononcées à leur encontre au titre de l'indemnisation des préjudices subis par Madame [N],

A titre subsidiaire : si, la Cour estime qu'il appartient à MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES de proposer un partage entre Monsieur [S], Monsieur [R] et MAF,

CONDAMNER Monsieur [S], Monsieur [R] et la MAF à relever et garantir intégralement MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES de l'ensemble des condamnations prononcées à leur encontre au titre de l'indemnisation des préjudices subis par Madame [N] à hauteur de :

* 52,94 % pour Monsieur [S],

* 47,06 % pour Monsieur [R] et MAF, dans la limite de 20%.

En tout état de cause :

DEBOUTER Monsieur [S], Monsieur [R] et MAF de l'intégralité de leurs demandes.

CONDAMNER in solidum Monsieur [S], Monsieur [R] et la MAF à régler à MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

CONDAMNER in solidum Monsieur [S], Monsieur [R] et la MAF aux entiers dépens, distraits au profit de Maître Romain CHERFILS, membre de la SELARL LEXAVOUE AIX EN PROVENCE, avocat associé, en application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

A l'appui de leurs prétentions, les assurances MMA IARD font valoir qu'aux termes de l'arrêt attaqué, cette Cour a fixé et partagé les responsabilités de la façon suivante :

15% à l'encontre de Madame [N],

45% à l'encontre de Monsieur [S],

40% à l'encontre de Monsieur [R].

Elle fait valoir que dès lors que la Cour d'appel a exclu dans sa décision toute faute de la SCI [Localité 5] et partagé la responsabilité entre les architectes et Madame [N], les appels en garantie des MMA devaient être intégraux et la part contributive des architectes devait être calculée sur les préjudices totaux de Madame [N] et non pas sur les sommes allouées ; qu'en d'autres termes, la Cour ne pouvait pas laisser à la SCI une part de responsabilité de 15% tout en constatant qu'aucune faute ne lui était imputable.

Pour s'opposer aux moyens de Monsieur [R], elles indiquent qu'elles avaient bien présenté des demandes à l'encontre de Madame [N].

Monsieur [O] [R], par conclusions notifiées le 27 septembre 2023 demande à la Cour de :

Vu l'arrêt de La Cour d'appel d'Aix-en-Provence du 28 janvier 2021,

Vu l'arrêt de la Cour de cassation du 11 mai 2022,

Constater que la part de responsabilité de 15% laissée à la charge des MMA IARD concerne la part de responsabilité de Mme [N] qui n'a pas la qualité de constructeur,

Débouter les MMA IARD de l'ensemble de leurs demandes formulées à l'encontre de Monsieur [R],

Condamner MMA IARD SA et MMA IARD ASSURANCE MUTUELLES à payer à Monsieur [R] la somme de 5.000€ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens distraits au profit de Me Laure CAPINERO avocat sous sa due affirmation.

Il fait valoir que la part de responsabilité laissée à la charge des MMA ne correspond pas à une part qui lui est imputable ; il souligne le fait que selon le premier arrêt de la Cour d'appel, une part des préjudices a été laissée à Madame [N] à hauteur de 15% en ce qu'elle avait remblayé derrière le mur pour construire sa piscine et qu'elle est donc fautive dans cette mesure de 15%. Il considère que la responsabilité des architectes telle qu'elle a été retenue en l'espèce n'a pas à absorber la responsabilité distincte de Mme [N] retenue sur le fondement de l'article 1382 du Code civil ; qu'il appartenait donc aux MMA de former des demandes en ce sens à l'encontre de Mme [N].

La Mutuelle des Architectes Français, par conclusions d'appel après renvoi de cassation notifiées le 27 octobre 2022 demande à la Cour de :

Vu notamment les articles 623, 624 et 700 du Code de Procédure Civile,

Vu les pièces communiquées,

Il est demandé à la Cour dans les limites de la cassation partielle prononcée de :

Infirmer le jugement rendu le 7 décembre 2017 par le Tribunal de Grande Instance de Marseille, en ce qu'il a condamné Monsieur [S], Monsieur [R] à relever et garantir les sociétés Mutuelles du Mans assurances IARD assurances mutuelles, et Mutuelles du Mans IARD des condamnations prononcées contre elles au titre de l'indemnisation des préjudices subis par Madame [N] à hauteur de 45% en ce qui concerne Monsieur [S], et de 40 % en ce qui concerne Monsieur [R] et la MAF, dans la limite de 20%,

Débouter MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES de ses demandes de condamnations telles que formulées dans ses conclusions du 12 septembre 2012, la demande de condamnation intégrale de la MAF de les relever et garantir, excédant les limites de la cassation partielle intervenue, faute de tenir compte de l'absence de garantie de la MAF pour Monsieur [S], et de l'opposabilité à son assuré Monsieur [R] et aux tiers, les MMA IARD de sa franchise et de son plafond de garantie limitée par la Cour d'Appel à 20%,

Statuant à nouveau sur le chef de l'arrêt annulé par la Cour de Cassation :

Condamner M [S], M [R], et la Mutuelle des Architectes Français à relever et garantir les sociétés MMA IARD ASSURANCES et MMA IARD des condamnations prononcées contre elles au titre de l'indemnisation des préjudices subis par Mme [N] à hauteur de :

52,94 % en ce qui concerne Monsieur [S],

47,06 % en ce qui concerne M [R], dont 20% de cette quote pour la MAF

CONDAMNER la Mutuelle des architectes français, assureur de Monsieur [R], dans la limite de 20% de la quote part incombant à Monsieur [R] soit à hauteur de 9,41%.

Rejeter toute demande contraire et CONFIRMER pour le surplus le jugement attaqué.

CONDAMNER in solidum les MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLE, à payer à la MAF les sommes suivantes :

La somme de 3.000,00 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Les entiers dépens, distraits au profit de la société Maître Joseph MAGNAN, Avocat au Barreau d'AIX EN PROVENCE qui sera admis au bénéfice de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

LA MAF souligne en premier lieu que le dossier revient après cassation partielle ; elle souligne le fait que l'arrêt de la Cour de Cassation casse uniquement le dispositif qui a condamné à relever et garantir les MMA IARD des condamnations prononcées contre elles au titre de l'indemnisation subie par Madame [N], à hauteur de 45% pour M [S], et de 40% pour Monsieur [R], la Mutuelle des architectes de France dans la limite de 20% des 40% de Monsieur [R].

A ce titre elle fait valoir qu'en ce qui la concerne, elle n'intervient que dans la limite de 20% de la part de responsabilité incombant à Monsieur [R] et que cette limite n'a pas lieu d'être remise en cause, la question n'étant que celle de la répartition des responsabilités entre MM. [S] et [R] ; elle rappelle qu'elle ne doit garantir que Monsieur [R] puisque les missions assurées par monsieur [S] pour ce chantier n'étaient pas assurées par elle.

La MAF considère que dès lors que MM. [S] et [R] ainsi qu'elle-même dans la limite de 20% doivent assurer 100% (et non plus 85%) des sommes dues à Mme [N] mises à la charge des MMA, il en résulte que :

M. [S] doit relever et garantir les MMA dans la mesure de 52,94%,

M. [R] doit relever et garantir les MMA dans la mesure de 47,06%

Elle doit elle-même garantir 20% de la part de Monsieur [R], soit 9,41% de l'ensemble.

Monsieur [S] n'a pas constitué avocat dans le cadre de la saisine de la Cour après cassation et a fait l'objet d'actes d'assignation en date du 10 novembre 2022 et du 19 décembre 2023 selon les modalités de l'article 659 du Code de procédure civile. La décision sera rendue par défaut par application de l'article 474 du Code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la demande principale :

L'arrêt de cette Cour en date du 28 janvier 2021 avait retenu le caractère décennal des travaux des désordres qui se sont manifestés par un effondrement du mur de soutènement de la copropriété l'HERMITAGE, mur qui faisait partie de l'opération de construction des 6 villas. Dans le cadre de ce litige, Madame [N] et le Syndicat des copropriétaires engagé une action directe contre les MMA en leur qualité d'assureur dommage-ouvrage et d'assureur en responsabilité décennale CNR de la SCI [Localité 5].

Il doit être rappelé que la maîtrise d''uvre du projet avait été confiée à Monsieur [R] et M. [S] dans le cadre d'une mission de maîtrise d''uvre complète.

Les MMA, en tant qu'assureur de la SCI ont donc été condamnées à indemniser les victimes de leurs préjudices et à relever et garantir la SCI [Localité 5] des condamnations prononcées contre celle-ci.

Devant la Cour d'appel, les MMA ont demandé que l'obligation de la relever et garantir de toute condamnation mise à la charge des maîtres d''uvre soit étendue à la totalité de la condamnation mise à sa charge en sa qualité d'assureur de la SCI [Localité 5].

Il est à noter que la limitation de l'obligation de la garantie de la MAF à l'égard de Monsieur [R] (cette limite a été fixée à 20% de sa part de responsabilité) a été justifiée par une réduction proportionnelle suite à une déclaration erronée du montant du chantier.

Concernant la répartition des responsabilités, la Cour a retenu une part imputable à Madame [N] au motif que celle-ci avait contribué à la réalisation du sinistre en procédant à une élévation du mur et à un dépôt de remblais contre ce mur de soutènement, réduisant ainsi le coefficient de sécurité applicable à celui-ci. Cette part de Madame [N] a été fixée à 15% en confirmation de la première décision.

La SCI [Localité 5] et son assureur la MMA, Monsieur [S], Monsieur [R] et son assureur la MAF ont donc été condamnés à indemniser Madame [N] de ses préjudices ; au regard de l'implication des maîtres d''uvre, la part de responsabilité de Monsieur [S] a été fixée à 45% et celle de monsieur [R] à 40%.

La décision d'appel précise en outre que Monsieur [S], Monsieur [R] sous la garantie de la MAF et Madame [N] sous la garantie de la société NATIO étaient condamnés à relever et garantir les MMA des condamnations prononcées contre elle à proportion de leur part de responsabilité. Dans son dispositif, elle mentionne à ce titre :

« Condamne M. [C] [S], M. [O] [R] et la MAF, Mme [N] et la société Natio assurance à relever et garantir les MMA des condamnations prononcées contre elle au titre de l'indemnisation du préjudice subi par le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier L'hermitage à proportion de leur part de responsabilité chacune, à savoir :

M. [C] [S] à hauteur de 45%,

M. [O] [R] et la MAF à hauteur de 40% et dans la limite de 20% en ce qui concerne la MAF ;

Mme [D] [N] et la société Natio assurance à hauteur de 15% ;

Condamne M. [C] [S], M. [O] [R] et la MAF à relever et garantir les MMA des condamnations prononcées contre elle au titre de l'indemnisation du préjudice subis par Mme [D] [N] à hauteur de 45% en ce qui concerne M. [C] [S] et de 40% en ce qui concerne M. [O] [R] et la MAF, dans la limite de 20% pour la MAF ; »

Dans le cadre du pourvoi interjeté à l'encontre de cette décision, les MMA ont reproché à l'arrêt de la Cour d'avoir condamné les maîtres d''uvre et la MAF à la relever et garantir des condamnations prononcées contre elle au titre de l'indemnisation de Madame [N] à hauteur de 45% et de 40% et dans la limite de 20% pour la MAF dans sa relation avec Monsieur [R].

Elle a soutenu que selon cette solution, 15% des indemnités allouées à Madame [N] restaient à sa charge alors qu'elle n'avait commis aucune faute (en tant qu'assureur de la SCI [Localité 5]) et qu'un coobligé non fautif ne pouvaient pas être tenu à la charge définitive de la dette dès lors que d'autres coobligés sont tenus sur le fondement de leur faute.

En effet, s'agissant des condamnations prononcées par cette Cour au bénéfice de Madame [N], les sommes allouées à cette dernière ont été mises à la charge in solidum de la SCI [Localité 5] et son assureur les MMA, de Monsieur [S], de Monsieur [R] et de la MAF. Les assurances MMA n'ont cependant été relevées de cette condamnation qu'à hauteur de 85% de sorte que 15% sont restées à sa charge.

La Cour de cassation, en son arrêt du 11 mai 2022 a fait droit à cette argumentation des MMA, retenant qu'aucune part de responsabilité n'avait été mise à la charge de la SCI [Localité 5] et que les assurances MMA n'étaient donc relevées et garanties que de façon incomplète alors « qu'un coobligé non fautif peut recourir pour le tout contre les coobligés fautifs ».

Selon Monsieur [R], si la position de la Cour de cassation n'est pas contestable, il n'est pas établi que la part de responsabilité laissée à la charge des MMA concerne une part de responsabilité pour laquelle il est lui-même coobligé fautif ; qu'en effet, les 15% restants concernent la part de responsabilité de Madame [N] à l'encontre de laquelle aucune demande n'avait été formulée par la SCI et par son assureur. Ainsi, il considère qu'il ne saurait être tenu de la part de responsabilité mise à la charge sur un motif propre (article 1382 du Code civil) de Madame [N].

La MAF considère également que la cassation partielle ne porte que sur le dispositif de l'arrêt de la Cour d'appel en ce qu'elle a condamné à relever et garantir les MMA des condamnations prononcées contre elle au titre de l'indemnisation subie par Madame [N] à hauteur de 45% pour Monsieur [S] et de 40% pour Monsieur [R] et de la MAF dans la limite de 20% des 40% de Monsieur [R]. Elle considère qu'en tout état de cause, en l'absence de cassation sur ce point, elle ne peut être condamnée à relever et garantir Monsieur [R] que dans la limite des 20% laissés à sa charge. Elle souligne également que les répartitions des responsabilités n'ont pas été remises en cause (45% pour Monsieur [S], 40% pour Monsieur [R] et la MAF dans la limite de 20%, et 15% pour Madame [N]). Elle estime donc qu'en portant l'obligation de relever et garantir les maîtres d''uvre s'agissant des sommes allouées à Madame [N], la part de Monsieur [R] doit être fixée à 47,06% (40% x 100/85) et qu'elle-même n'est tenue qu'à 20% de cette part.

Il convient de relever que l'application de la solution donnée par la Cour de cassation aux sommes allouées à Madame [N] ne revient pas à faire supporter par les maîtres d''uvres une part de responsabilité devant rester à la charge de Madame [N]. En effet, il ressort des décisions rendues par le Tribunal de grande instance de MARSEILLE et par cette Cour que les sommes qui lui ont été allouée ont été fixées en considération de la part de responsabilité de 15% laissée à sa charge. Ainsi, les sommes allouées à Madame [N] correspondent précisément à la part de ses préjudices imputables à la responsabilité des maîtres d''uvre, déduction faite de sa propre part de responsabilité.

Dès lors, le moyen développé par Monsieur [R] selon lequel il ne saurait être tenu de supporter la part de responsabilité qui a été laissée pour un motif propre à Madame [N] n'est pas fondé.

En conséquence, il apparaît justifié de maintenir la répartition des responsabilités mises à la charge de chacun des maîtres d''uvre, cette solution n'ayant pas été remise en cause par la Cour de cassation et de répartir sur cette base la part de 15% pour laquelle les MMA n'ont pas été relevées et garanties aux termes de l'arrêt de cette Cour en date du 28 janvier 2021.

Dès lors, ces parts de 45% (Monsieur [S]) et de 40% (Monsieur [R]) seront fixées à 52,94% (Monsieur [S]) et 47,06€ (Monsieur [R]) dans leur obligation de relever et garantir les MMA des condamnations prononcées contre elles au titre du préjudice subi par Mme [D] [N]. La part d'obligation de 20% de la MAF dans la condamnation mise à la charge de Monsieur [R] sera maintenue.

Il convient en conséquence d'infirmer sur ce point le jugement du Tribunal de grande instance de MARSEILLE en date du 7 décembre 2017.

Sur les demandes annexes :

Compte tenu de la solution du litige, il convient de condamner in solidum Monsieur [C] [S] et Monsieur [O] [R] et la MAF dans la limite de 20% à payer aux assurances MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES et MMA IARD la somme totale de 2.500€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Monsieur [C] [S] et Monsieur [O] [R] et la MAF dans la limite de 20% seront également condamnés in solidum aux entiers dépens de la procédure de saisie après cassation.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, statuant sur renvoi après cassation partielle, par mise à disposition au greffe et par décision par défaut,

Condamne Monsieur [C] [S], Monsieur [O] [R] et la MAF à relever et garantir les MMA des condamnations prononcées contre elles au titre de l'indemnisation des préjudices subis par Madame [D] [N] à hauteur de 52,94% en ce qui concerne Monsieur [C] [S] et de 47,06% en ce qui concerne Monsieur [O] [R] et la MAF, dans la limite de 20% pour la MAF ;

Condamne Monsieur [C] [S], Monsieur [O] [R] et la MAF, dans la limite de 20% pour la MAF à payer aux assurances MMA la somme totale de 2.500€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile :

Condamne Monsieur [C] [S], Monsieur [O] [R] et la MAF, dans la limite de 20% pour la MAF aux entiers dépens de l'instance.

Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Madame Patricia CARTHIEUX, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 22/10040
Date de la décision : 04/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-04;22.10040 ?
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