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04/04/2024 | FRANCE | N°21/02644

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-7, 04 avril 2024, 21/02644


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7



ARRÊT AU FOND

DU 04 AVRIL 2024



N° 2024/ 168









Rôle N° RG 21/02644 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BG7RT







[Y] [P]





C/



Syndic. de copro. LE MANOIR





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Jean philippe FOURMEAUX





Me Renaud ARLABOSSE









Décis

ion déférée à la Cour :



Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de DRAGUIGNAN en date du 19 Janvier 2021 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 17/07980.





APPELANTE





Madame [Y] [P]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]



représentée par Me Jean philippe FOURMEAUX de l...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7

ARRÊT AU FOND

DU 04 AVRIL 2024

N° 2024/ 168

Rôle N° RG 21/02644 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BG7RT

[Y] [P]

C/

Syndic. de copro. LE MANOIR

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Jean philippe FOURMEAUX

Me Renaud ARLABOSSE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de DRAGUIGNAN en date du 19 Janvier 2021 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 17/07980.

APPELANTE

Madame [Y] [P]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Jean philippe FOURMEAUX de la SELARL CABINET FOURMEAUX-LAMBERT ASSOCIES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN substituée par Me Hélène AUBERT, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant

INTIMEE

Syndic. de copro. LE MANOIR pris en la personne de son syndic en exercice, la SCM NEXITY LAMY, au capital de 219388000 euros, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de PARIS, sous le numéro 487530099, ayant son siège social sis [Adresse 1], représentée par son Président Directeur Général en exercice domicilié en cette qualité audit siège, demeurant [Adresse 2] - [Adresse 1]

représentée par Me Renaud ARLABOSSE de la SELARL ALVAREZ-ARLABOSSE, avocat au barreau de DRAGUIGNAN substituée par Me Lionel ALVAREZ, avocat au barreau de TOULON, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 07 Février 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Carole MENDOZA, Conseillère,a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre

Madame Carole MENDOZA, Conseillère

Madame Mireille CAURIER-LEHOT, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Avril 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Avril 2024,

Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [Y] [P] est copropriétaire au sein d'un ensemble immobilier [Adresse 3].

Le 31 octobre 2014, l'assemblée générale des copropriétaires a décidé de déplacer le local technique de la piscine, par partie commune, qui se trouvait au sous-sol du bâtiment A pour l'installer dans le parc. Cette installation a été confiée à la société (Société de Travaux et Construction du Littoral, (STCL), assurée auprès de la société SMA.

Se plaignant de préjudices sonores et visuels, Mme [P] a saisi le juge des référés en suppression du local et demandé subsidiairement une expertise qui a été décidée par ordonnance du 24 juin 2015.

Le 12 octobre 2016, l'assemblée générale des copropriétaires a voté une résolution n° 30 selon laquelle le local technique de la piscine devait être déplacé à côté de la façade nord nord ouest du bâtiment.

L'expert a déposé son rapport le 11 mai 2017.

Par acte d'huissier du 02 novembre 2017, Mme [P] a fait assigner le syndicat des copropriétaires représenté par son syndic, la SAS Nexity, aux fins principalement d'obtenir l'indemnisation de ses préjudices et la mise en conformité du réseau d'évacuation des eaux de vidange de la piscine.

Par acte d'huissier du 17 novembre 2017, le syndicat des copropriétaires a appelé en garantie la STCL qui a elle-même, par acte d'huissier du 09 octobre 2018, appelé en garantie son assureur, la société SMA.

Par jugement contradictoire du 19 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Draguignan a :

- déclaré Mme [Y] [P] irrecevable en ses demandes ;

- débouté le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier LE MANOIR, pris en la personne de son syndic en exercice la SCM NEXITY LAMY, de sa demande au titre de la procédure abusive ;

- condamné Mme [Y] [P] à verser au syndicat des copropriétaires de l'ensemble

immobilier LE MANOIR, pris en la personne de son syndic en exercice la SCM NEXITY LAMY, la somme de 3.000 € (TROIS MILLE EUROS) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier LE MANOIR, pris en la personne de son syndic en exercice la SCM NEXITY LAMYà verser à la SARL S.T.C.L et à la SMA SA, chacune la somme de 1.500 € (MILLE CINQ CENTS EUROS) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Mme [Y] [P] et le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier LE MANOIR, pris en la personne de son syndic en exercice la SCM NEXITY LAMY, aux dépens.

Le premier juge a estimé irrecevable pour être prescrite l'action intentée par Mme [P], au visa de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965. Il a indiqué que Mme [P] avait deux mois pour agir.

Par déclaration du 19 février 2021, Mme [P] a relevé appel de cette décision en ce qu'elle l'a déclarée irrecevable en ses demandes, en ce qu'elle l'a condamnée à verser au syndicat de copropriétaires de l'ensemble immobilier Le Manoir la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'elle l'a condamnée à participer aux dépens.

Le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Le Manoir a constitué avocat.

Par conclusions notifiées par RPVA le 23 septembre 2021 auxquelles il convient de se reporter, Mme [P] demande à la cour :

- de réformer en toutes ses dispositions le jugement déféré,

*statuant à nouveau,

- de condamner le syndicat des copropriétaires de la copropriété LE MANOIR à lui payer la somme de 600 € au titre du préjudice visuel subi.

- de condamner le syndicat des copropriétaires de la copropriété LE MANOIR à lui payer la somme de 1 200 € au titre du préjudice acoustique subi.

- de condamner le syndicat des copropriétaires de la copropriété LE MANOIR à procéder ou à faire procéder, sous astreinte de 200 € par jour de retard passé un délai d'un mois à compter de la signification de la décision à intervenir, aux travaux nécessaires à mettre un terme définitif au trouble anormal qui lui est causé, la copropriété devant procéder au raccordement de l'installation au réseau eaux usées de la copropriété, lesdits travaux ayant été évalués par l'expert à la somme de 7 404,91 € TTC valeur mai 2017.

- de condamner le syndicat des copropriétaires de la copropriété LE MANOIR à lui payer la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts.

-de débouter le syndicat des copropriétaires de la copropriété dénommée LE MANOIR de l'ensemble de ses demandes en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive et article 700 du code de procédure civile.

- de dire et juger que le syndicat des copropriétaires de la copropriété dénommée LE MANOIR devra seul supporter les conséquences de l'appel en garantie diligenté à l'encontre de la SMA SA et de la société STCL.

- de dispenser Madame [P], en tant que copropriétaire, de toute participation à la dépense commune des frais de procédure.

Elle expose que son action a pour objet d'obtenir la réparation des nuisances consécutives à l'implantation du local technique contre son lot privatif et non la contestation d'une décision d'une assemblée générale. Elle en conclut que son action n'est pas irrecevable.

Elle indique s'appuyer sur les conclusions de l'expert pour faire état de préjudices de vue et acoustiques (liés à la filtration d'eau qui engendre des bruits de gargouillis provenant de la grille d'eaux pluviales). Elle estime engagée la responsabilité du syndicat des copropriétaires au visa de l'article 1242 du code civil, en sa qualité de gardien du local technique.

Subsidiairement, elle fait état d'un trouble anormal de voisinage.

Elle demande à être indemnisée des préjudices qu'elle dit subir. Elle sollicite la mise en oeuvre de travaux par le syndicat des copropriétaires, seuls à même de mettre un terme à son préjudice acoustique. Elle relève que l'expert a fait état d'une non-conformité du raccordement de l'installation au réseau d'évacuation. Elle précise qu'il faudrait raccorder l'installation au réseau d'eaux usées et non d'eaux pluviales.

Elle sollicite enfin des dommages et intérêts pour préjudice de jouissance.

Elle conteste toute procédure abusive.

Par conclusions notifiées par RPVA le 23 juin 2021 auxquelles il convient de se reporter, le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Le Manoir demande à la cour :

- de confirmer le jugement du 19 janvier 2021 en ce qu'il a déclaré Madame [Y] [P] irrecevable ;

*subsidiairement

- de débouter Mme [P] de ses demandes

*très subsidiairement

- de condamner la Société à responsabilité limitée S.T.C.L. (SOCIETE DE TRAVAUX ET CONSTRUCTION DU LITTORAL), sans approbation des fins de la demande principale dirigée contre le syndicat des copropriétaires, à le relever et garantir de toutes condamnations en principal, intérêts, dommages et intérêts, frais de l'article 700 du Code de procédure civile et dépens, qui viendraient à être prononcées contre ledit le syndicat des copropriétaires sur la

demande de Madame [Y] [P] ;

*sur appel incident

- de réformer le jugement en ce qu'il l'a débouté sa demande de dommages et intérêts contre Madame [P] ;

- de condamner Madame [Y] [P] à payer la somme de 1 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- de réformer le jugement en ce qu'il l'a condamné à payer à la société STCL et à la SMA une somme de 1 500 € chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civil, et aux dépens, in solidum avec Madame [P] ;

- de condamner Madame [Y] [P] à payer la somme de 10 000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- de condamner Madame [Y] [P] aux entiers dépens et dire que, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, Maître [G] [I] pourra recouvrer directement les frais dont il a fait l'avance sans en avoir reçu provision.

Il estime irrecevables les demandes de Mme [P] qui aurait dû agir dans les deux mois de la notification de la résolution 30 de l'assemblée générale du 12 octobre 2016. Il soutient que l'action de cette dernière consiste en réalité à contester cette résolution.

Subsidiairement, il fait observer que la construction du local technique n'a pas porté atteinte aux parties privatives de Mme [P] ni aux modalités de jouissance de celles-ci.

Il conteste tout trouble anormal de voisinage.

Il déclare que Mme [P] ne souffre d'aucun préjudice de vue puisque le local n'est visible que d'une partie de sa terrasse. Il ajoute avoir fait planter des végétaux qui sert de paravent de verdure.

Il précise qu'il n'existe pas plus de préjudice sonore puisque le gargouillis dont se plaint Mme [P] ne s'entend que deux fois par semaine pendant 6 minutes au maximum, en été, lors du contre-lavage des filtres de la piscine et à partir de la terrasse de l'intéressée. Il indique que l'expert judiciaire a conclu que les niveaux sonores déterminés par décret pour considérer l'existence d'une gêne n'étaient pas atteints. Il relève que l'expert n'évoque qu'une potentialité de gêne.

Il estime abusive la procédure intentée par Mme [P] et sollicite des dommages et intérêts.

Il déclare que les eaux de vidange des piscines ne doivent pas être rejetéees dans le réseau public d'assainissement des eaux usées selon le règlement d'urbanisme applicable à l'époque des travaux et encore actuellement. Il en conclut que l'installation était conforme, contrairement aux allégations expertales.

Il fait valoir qu'il n'a pas à payer les frais irrépétibles de première instance des parties appelées en la cause ni les dépens ni solidum avec cette dernière. Il note que les interventions forcées étaient légitimes et que seule Mme [P] aurait dû en supporter les conséquences.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 24 janvier 2024.

MOTIVATION

Sur la prescription de l'action formée par Mme [P]

Aux termes de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 dans sa version alors applicable, les actions personnelles nées de l'application de la présente loi entre des copropriétaires, ou entre un copropriétaire et le syndicat, se prescrivent par un délai de dix ans.

Les actions qui ont pour objet de contester les décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants, dans un délai de deux mois à compter de la notification desdites décisions qui leur est faite à la diligence du syndic, dans un délai de deux mois à compter de la tenue de l'assemblée générale. Sauf en cas d'urgence, l'exécution par le syndic des travaux décidés par l'assemblée générale en application des articles 25 et 26 est suspendue jusqu'à l'expiration du délai mentionné à la première phrase du présent alinéa.

L'action formée par Mme [P] ne consiste pas à contester la résolution d'une assemblée générale mais à obtenir la réparation de préjudices qu'elle dit avoir subis à la suite de l'installation du local technique de la piscine, partie commune.

Elle disposait à l'époque d'un délai de 10 ans. Dès lors, l'action en réparation intentée par Mme [P] contre le syndicat des copropriétaires par acte d'huissier du 02 novembre 2017 n'est pas prescrite. Partant, elle est recevable.

Sur la responsabilité du syndicat des copropriétaires

Aux termes de l'article 1242 du code civil, on est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde.

Le syndicat de copropriétaires a sous sa garde le local technique.

Mme [P] ne démontre pas que le local technique, chose inerte, présenterait un caractère d'anormalité, ou que sa position serait anormale. Dès lors, elle sera déboutée de ses demandes sur ce fondement.

Nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ou encore excédant les inconvénients normaux du voisinage.

Il appartient à Mme [P] de démontrer avoir subi un trouble anormal du fait du local technique.

L'expertise judiciaire établit qu'a été installé un groupe de pompes silencieuses pour la piscine situé dans le local technique. Mme [P] avait expliqué entendre un gargouillis d'eau depuis le regard d'eaux pluviales avec grille qui se trouve au bord de sa terrasse. Elle avait relevé que ce gargouillis s'entendait deux fois par semaine, en été, lors du contre-lavage des filtres de la piscine. L'expert explique qu'après mise en contre-lavage des filtres, dès la mise en service des pompes, un bruit d'écoulement se fait entendre provenant de l'avaloir pluvial situé sur la terrasse de Mme [P]. Il expose que l'émergence globale est de 9dBA, soit la limite retenue comme critère de gêne par le décret. Il note que si le bruit devait durer plus de vingt minutes par 24 heures et par opération, l'émergence globale serait supérieure à la limite et serait cause de gêne avérée. L'expert évoque enfin une potentialité de nuisance, en notant que si le bruit ambiant au cours de la mesure avait été inférieur de un décibel à celui constaté, la gêne aurait été avérée.

Mme [P] ne démontre pas que le bruit de 'gargouillis' dure plus de vingt minutes par 24 heures et opération et qu'il serait cause de gêne

Elle ne justifie pas d'un trouble anormal de voisinage en matière de nuisances sonores, les explications fournies par l'expert prenant en compte des hypothèses qu'il n'a lui-même pas constatées et dont Mme [P] ne rapporte pas la preuve.

L'expert relève enfin que la gêne 'serait' par ailleurs inexistante si l'installation de filtration avait été réalisée en respectant les règles d'hygiène conduisant au rejet des eaux sales de contre-lavage à l'égout et non dans le réseau pluvial qui finit à la mer et sans traitement.

Le syndicat des copropriétaires démontre que le plan d'urbanisme applicable à la commune de [Localité 4] prévoit que les eaux provenant de la vidange des piscines doivent être conduites dans les caniveaux, fossés ou collecteurs d'évacuation et qu'en aucun cas ces eaux ne doivent être rejetées dans le réseau public d'assainissement des eaux usées sauf en cas de réseau unitaire existant.

Toutefois, l'expert mentionne avoir interrogé le centre technique municipal de [Localité 4] concernant les dispositions applicables sur la commune relatives à l'évacuation des eaux de contre-lavage et de vidanges des piscines. Il lui a été expliqué que le contre-lavage devait être dirigé vers le réseau d'eaux usées, afin d'écarter les risques de pollution littorale. Les dires de l'expert doivent être pris en compte. Toutefois, il est exact que l'expert ne produit en annexe aucun document ayant valeur réglementaire émanant de la ville de [Localité 4] permettant de dire que le contre-lavage vers le réseau d'eaux usées serait en réalité prohibé. Il en est de même de Mme [P].

Il n'est pas contesté que le contre-lavage de la piscine n'est pas dirigé vers le réseau d'eaux usées. Toutefois, Mme [P] ne démontre pas que le montage actuel lui crée un trouble anormal de voisinage et elle ne démontre pas que ce montage serait prohibé par le règlement sanitaire d'assainissement des eaux usées. Dès lors, elle sera déboutée de sa demande d'indemnisation à ce titre.

Pour les mêmes raisons, elle sera déboutée de sa demande tendant à voir condamner le syndicat des copropriétaires à effectuer des travaux, sous astreinte, tendant à voir procéder au raccordement de l'installation au réseau 'eaux usées' de la copropriété.

Le local technique est implanté, selon les constatations de l'expert, à 20cms de la terrasse de Mme [P]; il se trouve en contrebas de 1,50m environ par rapport au niveau de l'appartement de cette dernière. L'expert note 'qu'assis à la terrasse [de Mme [P]], nous avons une vue directe sur le local technique et sur l'allée des parties communes de la copropriété, du fait des arbres qui ont été arrachés'.

Il est ainsi établi que l'édification du local technique crée un trouble anormal de voisinage à Mme [P] en raison d'un préjudice de vue qui sera intégralement réparé par la somme de 600 euros..

Selon l'article 9 de la loi du 10 juillet 1965, les copropriétaires qui subissent un préjudice par suite de l'exécution des travaux, en raison soit d'une diminution définitive de la valeur de leur lot, soit d'un trouble de jouissance grave, même s'il est temporaire, soit de dégradations, ont droit à une indemnité.

Cette indemnité, qui est à la charge de l'ensemble des copropriétaires, est répartie, s'agissant des travaux décidés dans les conditions prévues par les a et b du II de l'article 24, des f, g et o de l'article 25 et par l'article 30, en proportion de la participation de chacun au coût des travaux.

Mme [P] a été indemnisée du préjudice de vue qu'elle a subi et qui ne présente plus à ce jour un trouble anormal du voisinage, en raison de la plantation de végétaux par le syndicat de copropriété. Elle ne démontre pas subir un préjudice par suite de l'exécution des travaux de déplacement du local technique, en raison d'une diminution définitive de la valeur de son lot ou d'un trouble de jouissance grave.

Elle demande des dommages et intérêts 'toute cause de préjudice confondue', en évoquant les travaux, les allées et venues des intervenants, la procédure, les réunions d'expertise.

Or, elle ne justifie pas bénéficier des conditions permettant une indemnisation au titre de l'exécution des travaux, en application de l'article 9 de la loi du 10 juillet 1965.

La procédure et les réunions d'expertise ne sont pas un fait fautif du syndicat des copropriétaires qui justifierait des dommages et intérêts, alors même qu'elle est à l'initiative de cette procédure.

En conséquence, il convient de rejeter sa demande de dommages et intérêts.

Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formée par le syndicat des copropriétaires

Le syndicat des copropriétaires ne justifie pas que la procédure intentée par Mme [P], même si elle n'a que partiellement abouti, aurait dégénéré en abus de droit. Il sera débouté de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

La demande d'appel en garantie formée par le syndicat des copropriétaires à l'encontre de la société de travaux et de construction du littoral est irrecevable puisque cette société n'est ni intimée, ni intervenante dans le cadre de la présente instance. L'assureur de cette société n'est pas non plus intimé ni intervenant dans cette procédure. Ainsi, la demande du syndicat des copropriétaires tendant à la réformation du chef du jugement relatif aux frais irrépétibles à verser à la société S.T.C.L et à son assurer, la SA SMA, est irrecevable.

Sur les dépens et sur les frais irrépétibles

Mme [P] est partiellement succombante dans ses demandes, tout comme le syndicat des copropriétaires.

Chaque partie supportera les dépens qu'elle a exposés en première instance et en cause d'appel. Le coût de l'expertise judiciaire sera partagée à hauteur d'un quart pour Mme [P] et de 3/4 pour le syndicat des copropriétaires.

Mme [P] sera déboutée de sa demande tendant à être dispensée de toute participation à la dépense commune des frais de procédure.

Pour des raisons tirées de l'équité, il convient de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a condamné Mme [P] à verser la somme de 3000 euros au syndicat des copropriétaires et en ce qu'il a mis les dépens à la charge de Mme [P] et du syndicat des copropriétaires.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe,

DÉCLARE irrecevables les demandes d'appel en garantie du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 3] et sa demande de réformation de sa condamnation à verser une indemnité au titre des frais irrépétibles à la société S.T.C.L et à la SA SMA.

INFIRME le jugement déféré, sauf en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts formée par le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 3] pour procédure abusive

STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT

DÉCLARE recevables les demandes formées par Mme [Y] [P] pour n'être pas prescrites,

REJETTE la demande d'indemnisation formée par Mme [Y] [P] pour un préjudice sonore et sa demande tendant à voir condamner le syndicat des copropriétaires à effectuer des travaux de raccordement de l'installation au réseau 'eaux usées' de la copropriété,sous astreinte,

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 3] à verser à Mme [Y] [P] la somme de 600 euros en réparation de son préjudice de vue,

REJETTE le surplus des demandes indemnitaires formées par Mme [Y] [P]

CONDAMNE les parties à prendre en charge les dépens (hors expertise judiciaire) qu'elles ont exposés en première instance et en appel,

DIT que le coût de l'expertise judiciaire sera pris en charge à hauteur d'un quart pour Mme [Y] [P] et de trois quart pour le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 3],

REJETTE la demande de Mme [Y] [P] tendant à être dispensée de toute participation à la dépense commune des frais de procédure

REJETTE les demandes de Mme [Y] [P] et du syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 3] au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-7
Numéro d'arrêt : 21/02644
Date de la décision : 04/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-04;21.02644 ?
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