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04/04/2024 | FRANCE | N°21/02396

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-7, 04 avril 2024, 21/02396


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7



ARRÊT AU FOND

DU 04 AVRIL 2024



N° 2024/ 167







Rôle N° RG 21/02396 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BG62F







[B] [G]

[S] [E]





C/



Syndic. de copro. [Adresse 7]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Franck GHIGO,







Me Laurent BELFIORE





Décisio

n déférée à la Cour :



Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de Grasse en date du 13 Janvier 2021 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 18/01130.





APPELANTS



Madame [B] [G], demeurant [Adresse 8] - [Localité 4] - ITALIE





représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE, SIMO...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7

ARRÊT AU FOND

DU 04 AVRIL 2024

N° 2024/ 167

Rôle N° RG 21/02396 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BG62F

[B] [G]

[S] [E]

C/

Syndic. de copro. [Adresse 7]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Franck GHIGO,

Me Laurent BELFIORE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de Grasse en date du 13 Janvier 2021 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 18/01130.

APPELANTS

Madame [B] [G], demeurant [Adresse 8] - [Localité 4] - ITALIE

représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée de Me Franck GHIGO, avocat au barreau de GRASSE

Monsieur [S] [E], demeurant [Adresse 9] - [Localité 2] - ITALIE

représenté par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

assistée de Me Franck GHIGO, avocat au barreau de GRASSE

INTIMEE

Syndic. de copro. [Adresse 7] Le Syndicat des Copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé [Adresse 7], sis [Adresse 3] [Localité 5], représenté par son syndic en exercice, la SARL COGESTIA, SARL au capital de 10.000,00€, immatriculée au RCS de Cannes sous le n°529.425.810, dont le siège social est [Adresse 6], [Localité 1], pris en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège., demeurant [Adresse 3] - [Adresse 6] - [Localité 5]

représentée par Me Laurent BELFIORE de la SCP ARTAUD BELFIORE CASTILLON GREBILLE-ROMAND, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 07 Février 2024 en audience publique devant la cour composée de :

Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre

Madame Carole MENDOZA, Conseillère,

Madame Mireille CAURIER-LEHOT, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Avril 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Avril 2024,

Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

M.[E] et Mme [G] sont copropriétaires des lots 55 et 26 au sein de l'ensemble immobilier [Adresse 7] [Adresse 3] à [Localité 5].

Ils résident en Italie et proposent leurs lots en location dans le cadre de locations saisonnières.

L'assemblée générale du 19 juin 2017 a adopté la résolution 17 selon laquelle il était décidé d'appliquer une cause d'aggravation des charges aux propriétaires se livrant à une activité de location saisonnière entraînant une augmentation des charges et frais de nettoyage et d'autoriser le syndic à engager toutes les actions nécessaires pour mettre un terme aux nuisances liées à l'activité de location saisonnière hôtelière exercée par M.[E] via son agence et Mme [G] qui utilisent les services de l'agence de M.[E].

Par acte d'huissier du 16 janvier 2018, le syndicat des copropriétaires a fait assigner M.[E] et Mme [G] aux fins principalement de les voir cesser leur activité hôtelière sous astreinte et de les voir condamner à lui verser des dommages et intérêts.

L'assemblée générale du 28 juin 2018 a adopté la résolution 18 selon laquelle il était donné mandat au syndic d'ester en justice à l'encontre de M.[E] et Mme [G] et de l'indivision [C]-[G] afin de faire 'cesser, sous astreinte, les nuisances, troubles et activité hôtelière' auxquels ces copropriétaires se livraient et d'indemniser le syndicat des préjudices subis.

Par jugement contradictoire du 13 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Grasse a :

- dit recevable l'action du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 7]

- condamné M.[E] et Mme [G] à cesser leur activité de location courte durée dans le délai d'un mois à compter de la signification du jugement, sous astreinte passé ce délai, de 500 euros par infraction constatée

- condamné M.[E] et Mme [G] à payer au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 7] la somme de 1500 euros de dommages et intérêts

- condamné M.[E] et Mme [G] à payer au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 7] la somme de 1800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- condamné M.[E] et Mme [G] aux dépens.

Le premier juge a estimé recevable l'action du syndicat des copropriétaires en indiquant que la résolution n° 18 de l'assemblée générale du 28 juin 20218 avait donné mandat au syndic pour agir en justice. Il a relevé que l'assemblée générale pouvait ratifier postérieurement les actions intentées par le syndic. Il a noté que cette autorisation avait été donnée a posteriori mais avant que la juridiction ne statue.

Il a relevé que M.[E] et Mme [G], propriétaires de résidences secondaires dans l'immeuble, louaient leurs appartements pour de courtes périodes par l'intermédiaire de plates-formes tel que le site AIRBNB. Il a estimé que la rotation de courtes périodes de location n'était pas compatible avec l'esprit de la clause d'habitation bourgeoise du règlement de copropriété, même si ce dernier autorisait sous condition très encadrée l'exercice d'activités libérales.

Il a indiqué que le mode de location effectué par M.[E] et Mme [G] s'apparentait à une activité commerciale, ce qui constituait une violation du règlement de copropriété qui n'autorisait l'installation de commerces qu'au rez-de-chaussée.

Il a condamné M.[E] et Mme [G] à des dommages et intérêts en relevant l'existence de nuisances constituant un trouble collectif.

Par déclaration du 16 février 2021, M.[E] et Mme [G] ont relevé appel de tous les chefs de cette décision.

Le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 7] a constitué avocat.

Par conclusions notifiées par RPVA le 23 septembre 2021 auxquelles il convient de se référer, M.[E] et Mme [G] demandent à la cour :

*à titre principal

- de dire et juger que le syndicat des copropriétaires ne dispose d'aucune habilitation régulière d'agir en justice, la résolution n° 17 de l'assemblée générale du 19 juin 2017 n'ayant pas été mise à l'ordre du jour et votée à la majorité requise,

- de dire et juger que la résolution n°l8 de l'assemblée générale du 28 juin 2018 n'a pas le même objet que la résolution n°17 de l'assemblée générale du 19 juin 2017,

-de dire et juger que la résolution n°18 de l'assemblée générale du 28 juin 2018 est irrégulière pour abus de majorité,

- de dire et juger que le syndicat des copropriétaires sollicite dans le cadre de la présente procédure la condamnation de M. [E] et de Mme [G] à réparer les préjudices prétendument subis par lui alors que la résolution de l'assemblée générale du 19 juin 2017 a pour objet le vote d'une clause d'aggravation de charges,

En conséquence,

- de réformer le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

- de dire et juger les demandes formulées par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 7] irrecevables pour défaut d'habilitation,

A titre subsidiaire,

- de dire et juger que le règlement de copropriété autorise expressément la location meublée d'un appartement,

- de dire et juger que le règlement de copropriété ne contient aucune clause d'habitation bourgeoise exclusive puisqu'il autorise dans l'immeuble les activités commerciales ou libérales,

- de dire et juger que l'activité de location de M. [E] et de Mme [G] ne viole pas les dispositions du règlement de copropriété et ne porte pas atteinte à la destination de l'immeuble,

- de dire et juger que lesdites locations meublées de courtes durées ne constituent pas un changement d'usage du local meublé destiné à l'habitation au sens de l'article L637-1du code de la construction et de l'habitation.

- de dire et juger que le syndicat des copropriétaires tolère parfaitement la location meublée de courte durée pratiquée par d'autres copropriétaires,

- de dire et juger que le caractère collectif du préjudice n'est pas démontré,

- de dire et juger que la réalité du trouble manifestement illicite n est pas rapportée,

En conséquence :

- de réformer le jugement déféré

- de débouter le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 7] de ses demandes mal fondées,

- de condamner le syndicat des copropriétaires de 1'immeuble [Adresse 7] à leur payer une indemnité de 6.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- de dire et juger qu'ils seront dispensés de toute participation a la dépense commune des frais de procédure dont la charge sera répartie entre les autres copropriétaires sur le fondement des dispositions de l'article 10 alinéa 2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965.

- de condamner le syndicat des Copropriétaires de l'immeuble [Adresse 7] aux entiers dépens, distraits au profit de la SCP BADIE-SIMON-THIBAUD & JUSTON, sous sa due affirmation de droit.

Ils estiment que l'action intentée par le syndicat des copropriétaires est irrecevable au motif que la résolution n° 17 est irrégulière pour n'avoir pas été mise à l'ordre du jour et votée à la majorité requise. Ils ajoutent que cette résolution ne permet pas au syndicat d'agir pour leur faire cesser leur activité hôtelière et qu'elle prévoit même une clause d'aggravation des charges.

Ils soutiennent que la résolution 18 de l'assemblée générale du 28 juin 2018 ne régularise pas la résolution n° 17 puisqu'elle n'a pas le même objet. Ils ajoutent qu'elle est irrégulière puisqu'elle constitue un abus de majorité, au motif que d'autres copropriétaires procèdent à des locations meublées via la plate forme AIRBNB. Ils déclarent que les nuisances liées aux locations auxquelles ils procèdent ne sont pas démontrées.

Subsidiairement, ils déclarent pouvoir procéder à des locations meublées de courte durée puisque le règlement de copropriété permet une activité libérale et qu'aucune restriction ne peut dans ce cas être justifiée par la destination de l'immeuble, les activités étant similaires en termes de nuisances et de contraintes. Ils précisent que le règlement de copropriété autorise la location meublée saisonnière. Ils contestent toute nuisance liée à leurs locations ainsi que toute atteinte aux droits des copropriétaires.

Par conclusions notifiées par RPVA le 30 juin 2021 auxquelles il convient de se reporter, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 7] demande à la cour :

- de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf celle portant sur les dommages et intérêts alloués au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé [Adresse 7].

Et y statuant à nouveau,

- de condamner in solidum Monsieur [E] et Madame [G] à lui verser la somme de 5.000,00€ au titre de l'indemnisation des préjudices subis.

Et y ajoutant,

- de condamner in solidum Monsieur [E] et Madame [G] à lui verser la somme de 3.000,00€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

- de débouter Monsieur [E] et Madame [G] de leurs demandes, fins et conclusions.

Il déclare que le défaut d'habilitation d'un syndic à agir entraîne la nullité de la procédure pour vice de fond et non une irrecevabilité des demandes. Quoi qu'il en soit, il relève que le syndic a été habilité par les deux résolutions discutées par leurs adversaires, et notamment, de façon très précise, par la résolution 18 de l'assemblée générale du 28 juin 2018.

Il souligne que les consorts [E] et [G] n'ont pas agi pour voir annuler la résolution 18 du 28 juin 2018 discutée et ne peuvent en conséquence soulever le grief lié à un abus de majorité.

Il soutient que l'activité de location saisonnière des appartements entraîne des rotations de périodes de location courtes qui portent atteinte à la destination de l'ensemble immobilier et aux droits des copropriétaires. Il estime que les locations auxquelles procèdent les consorts [E] et [G] ne peuvent s'assimiler à des locations meublées traditionnelles mais s'apparente à une activité hôtelière.

Il indique que ces locations crée un trouble anormal de voisinage.

Il en sollicite réparation.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 24 janvier 2024.

MOTIVATION

A titre préliminaire, il convient d'indiquer que M.[E] et Mme [G] ne sollicitent, dans le dispositif de leurs conclusions, ni l'annulation de la résolution 17 de l'assemblée générale du 19 juin 2017, ni l'annulation de la résolution 18 de l'assemblée générale du 28 juin 2018.

Par ailleurs, la cour rappelle qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes visant à 'dire et juger' qui ne constituent pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions en ce qu'elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques au sens de l'article 4 du code de procédure civile et ne constituent que des rappels de moyens ou des arguments.

Sur la recevabilité des demandes du syndicat des copropriétaires

En vertu de l'article 117 du code de procédure civile, constituent des irrégularités de fond affectant la validité de l'acte :

Le défaut de capacité d'ester en justice ;

Le défaut de pouvoir d'une partie ou d'une personne figurant au procès comme représentant soit d'une personne morale, soit d'une personne atteinte d'une incapacité d'exercice ;

Le défaut de capacité ou de pouvoir d'une personne assurant la représentation d'une partie en justice.

L'article 121 du même code précise que, dans les cas où elle est susceptible d'être couverte, la nullité ne sera pas prononcée si sa cause a disparu au moment où le juge statue.

L'article 55 alinéa 1 du décret du 17 mars 1967 dispose que le syndic ne peut agir au nom du syndicat sans y avoir été autorisé par une décision de l'assemblée générale.

Le défaut de pouvoir du syndic d'agir en justice n'est pas une fin de non-recevoir au sens de l'article 122 du code de procédure civile mais une irrégularité de fond soumise aux articles 117 et suivants du même code.

Le syndicat des copropriétaires, représenté par son syndic, a assigné M.[E] et Mme [G] par acte d'huissier du 16 janvier 2018.

Par une résolution n° 18 du 28 juin 2018, l'assemblée générale des copropriétaires a donné mandat au syndic d'ester en justice à l'encontre de M.[E] et Mme [G] ainsi que de l'indivision [C]-[G] aux fins de 'faire cesser, sous astreinte, les nuisances, troubles et activités hôtelières' auxquels ces copropriétaires se livraient et aux fins d'indemniser le syndicat des préjudices subis.

L'autorisation d'ester en justice, donnée au syndic, pour des demandes qui correspndent à celles faites dans l'acte introductif d'instance et devant le premier juge, a été délivrée avant que le juge ne statue. En conséquence, les demandes formées par le syndicat des copropriétaires sont recevables. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

Sur la demande de condamnation sous astreinte de M.[E] et Mme [G] à faire cesser leur activité hôtelière

Les lots dont M.[E] et Mme [G] sont propriétaires sont situés au 2ème et 4ème étage.

Ces derniers ne démontrent pas que d'autres copropriétaires loueraient leurs biens sur la plate forme Airbnb, les photographies d'écran n'étant pas probantes.

Le chapitre 3 (conditions d'usage de l'immeuble) du règlement de copropriété est ainsi libellé:

'A DESTINATION DE L'IMMEUBLE

L'immeuble est destiné principalement à usage d'habitation. Deux lots sont affectés à usage commercial au rez-de-chaussée (...)

B CONDITIONS DE JOUISSANCE DES PARTIES PRIVATIVES

Principes - Chacun des copropriétaires aura le droit de jouir comme bon lui semble des parties privatives comprises dans son lot, à la condition de ne pas nuire aux droits des autres copropriétaires et de ne rien faire qui puisse compromettre la solidité, la sécurité ou la tranquillité de l'immeuble, ni de porter atteinte à sa destination.

Occupation- Les appartements pourront être occupés bourgeoisement ou pour l'exercice de professions libérales, à condition de ne pas nuire à la bonne tenue et à la tranquillité de l'immeuble; mais il est interdit d'y installer des bureaux commerciaux ou des communs, sauf au rez-de-chaussée où des commerces pourront être exercés dans les lots 35 et 36

Seuls seront autorisés dans les lots 35 et 36 l'exploitation de commerce et sous réserve que les règlements le permettent, l'exercice des professions libérales, mais à la condition que celles-ci ne causent aucun trouble de caractère exceptionnel par rapport à la destination de l'immeuble.(...).

La transformation des appartements en chambres meublées destinées à être louées à des personnes distinctes est interdite. Il en est ainsi notamment de l'organisation d'une pension de famille ou de l'exploitation d'un garni. Mais la location meublée d'un appartement en son entier est autorisée, de même que la location à titre accessoire d'une pièce d'un appartement(...)'

Si ma location saisonnière d'appartements n'est pas formellement interdite par le règlement de copropriété, encore faut-il que cette activité ne nuise pas aux droits des autres copropriétaires ni ne porte atteinte à la destination de l'immeuble.

La destination de l'immeuble n'est pas exclusivement bourgeoise à la lecture du règlement de copropriété.

Il convient de ne retenir que les témoignages des copropriétaires, des locataires et des personnes fréquentant l'immeuble où se trouvent les logements de M.[E] et Mme [G] puisqu'il s'agit de savoir si leurs locations nuisent aux droits des autres copropriétaires.

Des sommations interpellatives ont été effectuées le premier septembre 2017 par un huissier de justice.

M.[I], résidant au 4ème étage de l'immeuble, en face de l'appartement de M.[E] et Mme [G] indique qu'une boîte aux lettres a été dégradée le 26 août 2017 par les occupants de l'appartement, que des jeunes gens de la famille appuyaient leur pied sur le mur du hall d'entrée, que des poubelles étaient déposées dans le couloir, que durant l'hiver, des locataires étaient venus avec un chien qui s'était élancé vers lui et que l'entreprise qui nettoie le logement garait 'n'importe comment' ses véhicules.

Le témoignage de Mme [F] n'est pas probant puisqu'elle indique résider au troisième étage et n'évoque pas précisément des difficultés avec les locataires du 2ème ou du 4ème étage; il en est de même du témoignage de M.[R], qui est locataire au premier étage et n'incrimine pas précisément les locataires de M.[E] et Mme [G]. Le témoignage de Mme [A] manque de précision et ne permet pas d'incriminer les locataires de M.[E] et Mme [G], tout comme celui de M.[N] qui réside au premier étage et se plaint de nuisances provenant de l'appartement incriminé, sans autre précision, alors que M.[E] et Mme [G] ont deux logements. De la même manière, le témoignage de M.[X], qui fait partie d'une société de nettoyage, ne permet pas d'incriminer les locataires des logements de M.[E] et Mme [G].

M. [V] indique être le voisin de l'appartement du 4ème étage de M.[E]. Il évoque une odeur épouvantable (poisson et pourriture) qui s'est diffusée sur tout l'étage durant trois jours au moins en juin, la saleté du palier en août et la présence d'une poubelle ouverte sur le palier qui a été enlevée de mauvaise grâce par des locataires. Il indique que la résidence a toujours été 'très correcte en tout' mais déplore son état cette année, en raison du surnombre de personnes occupant l'appartement.

Le syndicat des copropriétaires ne justifie pas de l'existence de nuisances depuis l'année 2017, alors que ses dernières conclusions date de l'année 2021.

Ainsi, ces seuls éléments sont insuffisants pour démontrer que les locations auxquelles procèdent M.[E] et Mme [G] nuiraient aux droits des autres copropriétaires, étant précisé qu'elles ne portent pas atteinte à la destination de l'immeuble.

Il convient en conséquence d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné M.[E] et Mme [G] à cesser leur activité de location courte durée dans le délai d'un mois à compter de la signification du jugement, sous astreinte, passé ce délai, de 500 euros par infraction constatée et en ce qu'il les a condamnés à payer au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 7] la somme de 1500 euros de dommages et intérêts.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le syndicat des copropriétaires est essentiellement succombant. Il sera condamné aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés par la SCP BADIE-JUSTON-THIBAUD &JUSTON. Il sera débouté de ses demandes au titre des frais irrépétibles.

Il n'est pas équitable de laisser à la charge de M.[E] et Mme [G] les frais irrépétibles qu'ils ont exposés en première instance et en appel.

Le jugement déféré qui a condamné M.[E] et Mme [G] aux dépens et à verser la somme de 1800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile sera infirmé.

Le syndicat des copropriétaires sera condamné à leur verser la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

M. [E] et Mme [G] seront dispensés de toute participation à la dépense commune des frais de procédure.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe,

INFIRME le jugement déféré, sauf en ce qu'il a déclaré recevable l'action du syndicat de l'ensemble immobilier [Adresse 7] à [Localité 5],

STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT,

REJETTE la demande du syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 7] à [Localité 5] tendant à condamner M.[S] [E] et Mme [B] [G] à cesser leur activité de location courte durée sous astreinte,

REJETTE la demande de dommages et intérêts formée par le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 7] à [Localité 5],

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 7] à [Localité 5] à verser à M.[S] [E] et Mme [B] [G] la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 7] à [Localité 5] aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés par la SCP BADIE-JUSTON-THIBAUD &JUSTON,

REJETTE les demandes du le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 7] à [Localité 5] au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

DIT que M. [S] [E] et Mme [B] [G] seront dispensés de toute participation à la dépense commune des frais de procédure.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-7
Numéro d'arrêt : 21/02396
Date de la décision : 04/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-04;21.02396 ?
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