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26/03/2024 | FRANCE | N°20/04118

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-1, 26 mars 2024, 20/04118


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-1



ARRÊT AU FOND

DU 26 MARS 2024



N° 2024/131







Rôle N° RG 20/04118 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BFYUE







S.C.I. CORONAM





C/



S.A.S. ALLE

S.A.R.L. TAD FINANCES





















Copie exécutoire délivrée le :





à :





Me Christian DUREUIL





Me Grégoire LUGAGNE DELPON

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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal judiciaire d'AIX-EN-PROVENCE en date du 6 Février 2020 enregistré au répertoire général sous le n°19/00802 .







APPELANTE



S.C.I. CORONAM prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège, demeura...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-1

ARRÊT AU FOND

DU 26 MARS 2024

N° 2024/131

Rôle N° RG 20/04118 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BFYUE

S.C.I. CORONAM

C/

S.A.S. ALLE

S.A.R.L. TAD FINANCES

Copie exécutoire délivrée le :

à :

Me Christian DUREUIL

Me Grégoire LUGAGNE DELPON

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal judiciaire d'AIX-EN-PROVENCE en date du 6 Février 2020 enregistré au répertoire général sous le n°19/00802 .

APPELANTE

S.C.I. CORONAM prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège, demeurant [Adresse 1].[Adresse 2]

représentée par Me Christian DUREUIL substitué par Me Delphine GUETCHIDJIAN, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE de la SCP DUREUIL - GUETCHIDJIAN

INTIMÉES

S.A.S. ALLE prise en la personne de son représentant légal en exercice,

domiciliée demeurant [Adresse 4]

S.A.R.L. TAD FINANCES prise en la personne de son représentant légal en exercice,

domiciliée [Adresse 3]

toutes deux représentées par Me Grégoire LUGAGNE DELPON de la SELARL NORDJURIS MARSEILLE AVOCAT CONSEIL D ENTREPRISE, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 20 Février 2024 en audience publique devant la cour composée de :

Monsieur Olivier BRUE, Président

Madame Catherine OUVREL, Conseillère

Madame Fabienne ALLARD, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur Nicolas FAVARD.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 26 Mars 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 26 Mars 2024,

Signé par Monsieur Olivier BRUE, Président et Madame Anaïs DOVINA, greffier lors du prononcé, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Un compromis de vente notarié a été signé le 11 avril 2018 par la SCI Coronam, vendeur et la SAS Alle et la SARLTad Finances qui se sont engagées à acheter à concurrence de 50% chacune, un terrain élevé d'un hôtel-bar-restaurant, situé à Martigues lieu dit La Couronne (Bouches du Rhône), moyennant le prix de 650.000 €, en précisant qu'elles entendaient conserver l'usage du bien.

La vente était soumise à la condition suspensive d'une autorisation d'exploitation et/ou d'occupation de la part des propriétaires des parcelles sur lesquelles est édifiée la terrasse nord (Etat et commune de [Localité 5]) et qu'il soit obtenu un accord de principe ou une absence d'opposition pour toute future autorisation au profit de l'exploitant.

L'acte prévoyait le versement par les acquéreurs de la somme de 32'500 €, placée sous séquestre chez le notaire.

Le 27 août 2018, les acquéreurs, ont indiqué par l'intermédiaire du notaire rédacteur du compromis, qu'ils souhaitaient reprendre leur liberté en raison de l'impossibilité d'obtenir l'autorisation d'occupation de terrasse de la part de la commune de [Localité 5] et récupérer le dépôt de garantie.

La SCI Coronam a contesté cette demande par courrier du 14 septembre 2018, en faisant observer que les acquéreurs ou leur mandataire architecte avaient fait état auprès des services de l'urbanisme de la ville de Martigues d'un projet de création de logements après démolition de l'hôtel existant.

Par assignation du 23 janvier 2019, la SAS Alle et la SARLTad Finances ont fait citer la SCI Coronam, devant le tribunal de grande instance d'Aix en Provence, pour obtenir la mainlevée du séquestre de 32.500,00 euros correspondant à la somme versée au notaire à la signature du compromis, au motif que la non-réalisation de la vente n'était pas due à la faute des acquéreurs.

Par jugement rendu le 6 février 2020, cette juridiction a:

-ordonné la mainlevée de séquestre de la somme de 32 500 € entre les mains de Me [E] [U] notaire, au profit de la SAS Alle et de la SARLTad Finances.

- dit qu'elle produira des intérêts au taux légal à compter du 30 janvier 2019, avec capitalisation annuelle conformément à l'article 1343-2 du Code civil.

- dit n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte

- débouté la SAS Alle et la SARLTad Finances de leur demande de dommages-intérêts pour résistance abusive

- ordonné l'exécution provisoire

- condamné la SCI Coronam aux dépens.

Par déclaration transmise au greffe le 16 mars 2020, la SCI Coronam a relevé appel de cette décision.

Vu les conclusions transmises le 11 août 2022, par l'appelante.

Elle estime que le défaut de mention de l'avocat dans l'acte introductif d'instance constitue une irrégularité de fond qui entraîne la nullité de l'assignation et par voie de conséquence celle du jugement et non une irrégularité formelle pouvant être régularisée par le fait que lors d'audiences électroniques, un échange contradictoire a eu lieu entre les avocats des parties. Elle ajoute que l'acte de constitution émanant des sociétés intimées ne peut, à lui seul, régulariser la procédure.

La SCI Coronam rappelle que la condition suspensive est réputée accomplie lorsque celui qui y avait intérêt en a empêché l'accomplissement.

Elle fait valoir que la mairie a suspendu la délivrance de son autorisation d'exploitation après avoir reçu une demande portant sur les droits à bâtir et démolir de la parcelle, en vue de la création de logements.

L'appelante précise que la SAS Alle et la SARLTad Finances ont délivré des mandats de vente de la parcelle, avant même de l'avoir acquise, ainsi que des mandats aux fins de vente de l'hôtel par lots, ce, en se qualifiant de propriétaires et que ce comportement révèle leur renonciation au bénéfice de la condition suspensive.

La SCI Coronam soutient que la dissimulation au premier juge de ces mandats de vente, constitue un comportement dolosif justifiant l'allocation à son profit de dommages et intérêts.

Vu les conclusions transmises le 5 août 2022, par la SAS Alle et la SARLTad Finances.

Elles soulignent que la SCI Coronam a pu indentifier leur avocat auquel son conseil a écrit pour l'informer qu'il ne se constituerait pas en l'état de la nullité de l'assignation et qu'elle n'a ainsi subi aucun grief, étant précisé qu'elles ont ensuite officiellement constitué avocat.

Les intimées contestent :

- avoir sollicité le service de l'urbanisme de la commune de [Localité 5] dans le cadre d'un projet de construction, en contradiction avec la demande d'autorisation d'exploitation et d'occupation.

- toute renonciation au bénéfice de la condition suspensive, celle-ci ne pouvant intervenir tacitement, mais seulement, selon compromis par lettre recommandée avec avis de réception.

Elles affirment qu'elles pouvaient, en leur qualité de marchand de biens, donner un mandat de

recherche avant même d'avoir régularisé l'acte définitif, sans qu'un tel mandat puisse être

considéré comme valant renonciation à une condition suspensive.

La SAS Alle et la SARLTad Finances considèrent que la somme séquestrée leur revient, dès lors que la condition suspensive n'a pas été réalisée sans faute de leur part et observent que la SCI Coronam a depuis lors vendu le bien à un tiers dans des conditions plus favorables.

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 23 janvier 2024.

SUR CE

Sur la nullité de l'assignation :

Aux termes de l'article 117 du code de procédure civile constituent des irrégularités de fond affectant la validité de l'acte, le défaut de capacité ou de pouvoir d'une personne assurant la représentation d'une partie en justice.

Cette liste est limitative

La mention de la constitution de l'avocat requise à peine de nullité de l'assignation par l'article 752 du même code ne constitue donc pas une irrégularité de fond, mais une irrégularité de forme au sens de l'article 114.

L'article 115 prévoit que la nullité est couverte par la régularisation ultérieure de l'acte si aucune forclusion n'est intervenue et si la régularisation ne laisse subsister aucun grief.

L'assignation délivrée le 23 janvier 2019 à la demande de la SAS Alle et la SARLTad Finances ne comporte pas la mention de l'avocat constitué.

Par message transmis par le réseau privé virtuel des avocats RPVA, le 2 mai 2019, et adressé en copie à l'avocat de la SAS Alle et la SARLTad Finances, le conseil de la SCI Coronam a indiqué au juge de la mise en état, que l'assignation était irrégulière à défaut de comporter une constitution d'avocat pour les demanderesses.

La SAS Alle et la SARLTad Finances justifient avoir transmis leur constitution d'avocat par voie électronique le 27 novembre 2019, soit avant la date de l'audience.

Dans ces conditions, il convient de considérer que le défaut de mention de l'avocat constitué des demandeurs a été régularisé et que la société défenderesse ne peut justifier d'aucun grief, dès lors qu'elle a fait le choix délibéré de ne pas conclure.

Il n'y a donc pas lieu de prononcer l'annulation de l'acte introductif d'instance.

Sur le dépôt de garantie:

Le compromis de vente signé par les parties le 11 avril 2018 visant un bien comprenant une parcelle de terrain sur laquelle sont édifiés un bâtiment à usage de bar hôtel restaurant et chambres, un bâtiment à usage d'hôtel bungalow et local technique , ainsi qu'un bâtiment à usage de logement de fonction prévoit qu'il est conclu sous la condition suspensive qu'il soit justifié par le vendeur que la terrasse située au nord ait fait l'objet d'une autorisation d'exploitation et/ou d'occupation de la part des propriétaires des parcelles (Etat et commune de [Localité 5]) sur lesquels elle est édifiée et qu'il soit obtenu un accord de principe ou une absence d'opposition pour toute future autorisation au profit de l'exploitant.

La rubrique séquestre de cet avant-contrat stipulant sa page 7 que :

- En cas de non réalisation des présentes par la faute de l'acquéreur et conformément aux dispositions de l'article 960 du Code civil, le séquestre ne pourra remettre les fonds vendeur que du consentement de toutes les parties en exécution d'une décision judiciaire devenue définitive.

- En cas de non réalisation des présentes pour la faute de l'acquéreur, le vendeur donne dès maintenant pouvoir au séquestre de remettre les fonds à l'acquéreur.

Par courrier du 27 août 2018, Me [E] [U] , notaire des acquéreurs a informé la société

venderesse avoir reçu de la mairie relati vement à la conditi on suspensive attachée à la terrasse sise au nord un courriel du 20 juillet 2018 indiquant :

« L'autorisation d'occupation temporaire proposée dans l'attente de la régularisation de l'occupation du domaine communal n'est plus d'actualité. En effet, cette AOT était délivrée pour éviter de pénaliser l'activité du restaurant de l'établissement 'Hôtel des Pins '. Elle est liée à une activité commerciale. Or, l'instruction des demandes reçues à la direction de l'urbanisme met en évidence l'abandon de toutes activités commerciales en particulier l'activité de restauration pour laquelle était utilisée la terrasse construite sur le domaine public. Par conséquent, l'AOT est en suspens dansl'attente de la confirmation des projets en cours . »

Par lettre du 22 juillet 2019, l'adjointe déléguée à l'urbanisme de la commune de Martigues a confirmé qu'une demande d'autorisation d'occupation du domaine public pour la régularisation de l'emprise de la terrasse du restaurant de l'Hôtel des Pins avait été déposée en juin 2018 par la SCI Coronam et précisé : « qu'en juillet 2018 l'autorisation d'occupation du domaine public était rédigée et devait être signée par le Maire.Toutefois, parallèlement à cette demande, un cabinet d'architecte a saisi la ville par courriel, d'une demande portant sur les droits à bâtir de la parcelle, notamment après démolition des bâtiments et sur la création de logements par reconstruction ou changement de destination ».

Elle ajoute que : « ces demandes étant en contradiction avec la demande d'autorisation d'occupation du domaine public précédemment demandée par la SCI Coronam, la ville n'a plus souhaité délivrer d'autorisation. Le dossier a donc été suspendu dans l'attente d'éléments concrets sur la destination future du bien ».

S'il est prévu dans le compromis que les acquéreurs entendent conserver l'usage commercial de bar hôtel restaurant du bien, il n'est pas démontré que ceux-ci ont personnellement ou de leur fait violé cet engagement.

Dans sa correspondance du 14 septembre 2018, la SCI Coronam expose qu'il est avéré que les candidats acquéreurs ou leurs mandataires ont sans son autorisation oeuvré auprès des services de l'urbanisme pour présenter des projets différents de la nature actuelle d'hôtel restaurant.

Ce fait est confirmé par la lettre adressée au notaire des acquéreurs le 24 octobre 2018 par l'adjointe déléguée à l'urbanisme de la commune de [Localité 5], évoquant des demandes portant sur les droits bâtir de la parcelle émanant d'un cabinet d'architecture.

Les mandats de vente délivrés par les acquéreurs produits aux débats portent en effet sur un ensemble immobilier à usage d'hôtel restaurant, visé dans l'annonce jointe ou sur des appartements issus de celui-ci.

Aucun élément ne permet ainsi d'attribuer à la SAS Alle et la SARLTad Finances un projet de démolition et de construction d'un ensemble immobilier nouveau, alors qu'il est avéré, selon les dires de la SCI Coronam elle-même que les services de l'urbanisme de la mairie de [Localité 5] ont été contactés par des architectes ou autres mandataires de futurs sous acquéreurs.

Il ne peut être reproché dans ce contexte aux acquéreurs, exerçant l'activité de marchand de biens, d'avoir délivré des mandats de vente avant même d'avoir finalisé l'acquisition du bien immobilier, ni être considéré que cette démarche constitue une renonciation expresse au bénéfice de la condition suspensive.

L'absence de référénce, dans le cadre de la procédure de première instance de la délivrance anticipée de ces mandats ne peut être qualifiée de comportement dolosif, ni avoir eu pour effet de tromper la religion du tribunal.

Elle ne peut justifier l'octroi de dommages-intérêts au bénéfice de la SCI Coronam.

Il apparaît donc pas que la non réalisation de suspensive puisse être imputée à la SAS Alle et la SARLTad Finances, ni qu'elles en ont directement et personnellement empêché l'accomplissement. Les dispositions de l'article 1304-3 du Code civil n'ont donc pas vocation à s'appliquer en l'espèce.

Le dépôt de garantie de 32 500 €, doit, en conséquence, leur être restitué, en application des clauses contractuelles ci-dessus rappelées, ce, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation.

Il convient de constater que les intimées ne sollicitent plus en cause d'appel le prononcé d'une astreinte, ni l'allocation de dommages et intérêts pour résistance abusive.

Le jugement est confirmé.

Il y a lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au seul bénéfice de la SAS Alle et la SARLTad Finances.

La partie perdante est condamnée aux dépens, conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

DIT n'y avoir lieu de prononcer l'annulation de l'assignation délivrée le 30 janvier 2019 à la demande de la SAS Alle et la SARLTad Finances.

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

REJETTE la demande de dommages et intérêts formée par la SCI Coronam.

CONDAMNE la SCI Coronam à payer à la SAS Alle et la SARLTad Finances, la somme de

3 000 €, en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

CONDAMNE la SCI Coronam aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-1
Numéro d'arrêt : 20/04118
Date de la décision : 26/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 02/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-26;20.04118 ?
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