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21/03/2024 | FRANCE | N°23/04511

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-2, 21 mars 2024, 23/04511


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-2



ARRÊT

DU 21 MARS 2024



N° 2024/203









Rôle N° RG 23/04511 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLA2V







Société DE L'IMMEUBLE [Adresse 2]





C/



[R] [T]

[D] [T]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Roselyne SIMON-THIBAUD

de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON





Me Agnè

s ERMENEUX

de la SCP ERMENEUX - CAUCHI





Décision déférée à la Cour :



Ordonnance de référé rendue par le Président du Tribunal Judiciaire de MARSEILLE en date du 10 mars 2023 enregistrée au répertoire général sous le n° 22/04442.





APPELANT



Syndicat des copropriétaires de l'immeu...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-2

ARRÊT

DU 21 MARS 2024

N° 2024/203

Rôle N° RG 23/04511 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLA2V

Société DE L'IMMEUBLE [Adresse 2]

C/

[R] [T]

[D] [T]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Roselyne SIMON-THIBAUD

de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON

Me Agnès ERMENEUX

de la SCP ERMENEUX - CAUCHI

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance de référé rendue par le Président du Tribunal Judiciaire de MARSEILLE en date du 10 mars 2023 enregistrée au répertoire général sous le n° 22/04442.

APPELANT

Syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 2] représenté par son syndic en exercice le Cabinet DALLAPORTA

dont le siège social est situé [Adresse 1]

représenté par Me Roselyne SIMON-THIBAUD substituée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

et assisté de Me Ludovic PERNEY, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

INTIMES

Monsieur [R] [T]

né le 04 décembre 1966 à [Localité 3], demeurant [Adresse 2]

Madame [D] [U] épouse [T]

née le 01 janvier 1968 à [Localité 3], demeurant [Adresse 2]

représentés par Me Agnès ERMENEUX de la SCP ERMENEUX - CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

et assistés de Me Rémy STELLA de la SELARL DEFENZ, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 13 février 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Mme PERRAUT, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

M. Gilles PACAUD, Président

Mme Angélique NETO, Conseillère

Mme Florence PERRAUT, Conseillère rapporteur

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Julie DESHAYE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 mars 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 mars 2024,

Signé par M. Gilles PACAUD, Président et Mme Julie DESHAYE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE:

Monsieur [R] [T] et madame [D] [T] ont acquis le 21 février 2020 un appartement situé au 4ème et dernier étage, de l'immeuble situé [Adresse 2] (13006).

Ils ont réalisé des travaux de rénovation dans leur logement et sollicité en assemblée générale des copropriétaires l'autorisation d'en réaliser un certain nombre susceptibles de concerner les parties communes de l'immeuble.

Suivant exploit en date du 8 septembre 2022, le syndicat des coproprietaires de l'immeuble situé [Adresse 2], representé par son syndic en exercice, a assigné M. [T] et Mme [T] devant le président du tribunal judiciaire de Marseille, statuant en référé aux fins d'entendre :

- juger que la création d'un conduit d'évacuation des gaz brulés de la chaudière au sein des parties communes de la copropriété sans obtenir l'autorisation de l'assemblée générale constitue un trouble manifestement illicite ;

- juger que la mise en place d'une tuile à douille sur le toit de la copropriété sans obtenir l'autorisation de l'assemblée générale constitue un trouble manifestement illicite ;

- juger que la mise en place d'un groupe de climatisation sur le toit de la copropriété sans obtenir l'autorisation de l'assemblée générale constitue un trouble manifestement illicite ;

- juger que l'installation d'un chauffe-eau dans les parties communes sans obtenir l'autorisation de la copropriété constitue un trouble manifestement illicite ;

- juger que la création et l'agrandissement d'un puits de lumière dans les parties communes sans obtenir l'autorisation de l'assemblée générale constitue un trouble manifestement illicite ;

- juger que la création d'un faux plafond sans effectuer d'études de charges et sans obtenir l'autorisation de l'assemblée générale constitue un trouble manifestement illicite ;

- juger que la destruction de plusieurs murs devenus au fil du temps semi-porteurs dans un immeuble ancien sans l'autorisation de l'assemblée générale, ni études de charges, constitue un trouble manifestement illicite ;

- en conséquence, condamner M. et Mme [T] à remettre en état antérieur l'ensemble des parties communes, et ce, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, à compter de la décision à intervenir, ou du moins, à compter de sa signification ;

- leur enjoindre de communiquer, sous astreinte de 500 euros par jour de retard :

* le descriptif des travaux intérieurs effectués au sein de leur appartement,

* l'étude de structure relative à la surcharge apportée par la mise en place du nouveau faux plafond et les suspentes s'y rapportant,

* l'étude de structure relative à la destruction de plusieurs murs au sein de leur appartement,

* l'étude ou le rapport d'un homme de l'art sur l'ensemble des travaux entrepris,

- autoriser la réalisation des travaux nécessaires de mise en sécurité des parties communes par toute entreprise de construction qu'il plaira au syndic aux fins notamment de supprimer le conduit d'évacuation des gaz brûlés de chaudière des époux [T] installés dans les combles de la copropriété et générant un risque d'incendie ;

- condamner M. et Mme [T] au paiement d'une somme de 3 600 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens en ce compris les frais d'huissier.

Par ordonnance contradictoire en date du 10 mars 2023, le juge des référés du tribunal judiciaire de Marseille, a :

- rejeté l'exception d'incompétence soulevée par les époux [T] ;

- dit n'y avoir lieu a référé, et renvoyé les parties à mieux se pourvoir devant le juge du fond ;

- débouté les parties de l'ensemble de leurs demandes ;

- laissé les dépens à la charge du syndicat des copropriétaires.

Il s'est estimé compétent pour connaître du litige, ayant été saisi avant la désignation du juge de la mise en état dans le cadre de la procédure au fond intentée par les époux [T], selon assignation du 2 juin 2022.

Il a considéré que les troubles manifestement illicites invoqués par le syndicat des copropriétaires n'étaient pas caractérisés, dans la mesure où il n'était pas établi que certains aménagements réalisés par les époux [T] ne concernaient pas en réalité la rénovation ou le remplacement d'ouvrages existants et vétustes à défaut de savoir précisément quel était l'état antérieur des parties communes avant travaux.

Il a estimé qu'aucune expertise realisée au contradictoire des parties ne permet de savoir précisement quels sont les ouvrages réalisés de façon illicite dans les parties communes susceptibles de générer un trouble à l'origine de la demande de remise en état, sous astreinte des parties communes.

Il a relevé que certains travaux, dont il était demandé la suppression avaient été autorisés par assemblée générale du 15 octobre 2020 ; en outre, deux procès-verbaux sur trois dataient de l'année 2020, que certaines planches photographiques communiquées par le demandeur étaient illisibles et qu'on ignorait si elles étaient ou non rattachées à un constat d'huissier.

Selon déclaration reçue au greffe le 27 mars 2023, le syndicat des copropriétaires a interjeté appel de cette décision, l'appel visant à la critique en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé, a débouté les parties de leurs demandes, et leur a laissé la charge des dépens.

Par dernières conclusions transmises le 10 janvier 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, il sollicite de la cour qu'elle réforme l'ordonnance de référé en ce qu'elle :

- a dit n'y avoir lieu à référé ;

- débouté les parties de leurs demandes ;

- laissé les dépens à sa charge ;

et satuant à nouveau, qu'elle :

- juge que la création d'un conduit d'évacuation des gaz brûlés de la chaudière au sein des parties communes de la copropriété par les époux [T] sans obtenir l'autorisation de l'assemblée générale constitue un trouble manifestement illicite ;

- juge que la mise en place par les époux [T] d'une tuile à douille sur le toit de la copropriété sans obtenir l'autorisation de l'assemblée genérale constitue un trouble manifestement illicite ;

- juge que l'installation du chauffe-eau par les époux [T] dans les parties communes sans obtenir l'autorisation de la copropriété constitue un trouble manifestement illicite ;

- juge que l'agrandissement du puits de lumière des époux [T] dans les parties communes sans obtenir l'autorisation de l'assemblée générale constitue un trouble manifestement illicite ;

- juge que l'agrandissement du Velux des époux [T] au sein des parties communes de la copropriété, sans obtenir l'autorisation de l'assemblée générale de copropriété, constitue un trouble manifestement illicite ;

en conséquence, qu'elle condamne les époux [T] à remettre en état antérieur l'ensemble des parties communes, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la présente décision, ou du moins à compter de sa signification et plus particulièrement de retirer :

- le conduit d'évacuation des gaz brûlés de leur chaudière illégalement crée dans les combles ;

- la tuile à douille sur le toit de la copropriété ;

- le chauffe-eau illégalement installé dans les combles ;

- le puits de lumière installé dans les combles et le ramener à des dimensions équivalentes au précédent puits de lumière ;

- le vélux illégalement installé dans les parties communes de la copropriété et le ramener à des dimensions équivalentes au précédent vélux ;

en tout état de cause qu'elle :

- déboute les époux [T] de leurs demandes ;

- condamne les époux [T] au paiement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens et d'appel en ce compris les frais d'huissier.

Sur la compétence du juge des référés, il estime que le juge des référés est compétent car la demande lui a été présentée avant la désignation du juge de la mise en état au fond et qu'il est parfaitement compétent pour faire cesser un trouble manifestement illicite, résultant de la réalisation par un copropriétaire de travaux affectant les parties communes, sans obtenir la moindre autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires.

Sur la demande de remise en état antérieure des parties communes fondée sur l'existence d'un trouble manifestement illicite, il souligne que les époux [T] ont effectué, sans autorisation de l'assemblée générale des travaux structurels suivants qui affectent les parties communes de l'immeuble :

- le chauffe-eau (cumulus) installé au sein des combles de la copropriété, parties communes ;

- la création d'un conduit d'évacuation des gaz brûlés de la chaudière, au sein des parties communes de la copropriété ;

- la mise en place d'une tuile à douille sur le toit de la copropriété ;

- l'agrandissement du puit de lumière et du vélux au sein des parties communes ;

Il estime être bien fondé à demander la remise en état antérieur.

Par dernières conclusions transmises le 25 janvier 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, les époux [T] sollicitent de la cour qu'elle confirme l'ordonnance de référé en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé ;

- déboute le syndicat des copropriétaires de l'ensemble de ses demandes ;

Ils sollicitent l'infirmation en ce qu'ils ont été déboutés de leurs demandes de condamnation du syndicat des copropriétaires à leur verser une provision de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre des préjudices subis et 2 000 euros au titre des dispositions de l'articles 700 du code de procédure civile ;

- condamne le syndicat des copropriétaires à leurs verser la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts afin de compenser leur préjudice ;

- condamne le syndicat des copropriétaires à leur verser la somme de 4 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens ;

- les dispense de toute participation au titre de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965.

Sur les demandes excédant la compétence du juge des référés, ils estiment qu'il n'y a ni dommage imminent ni trouble manifestement illicite.

A l'appui de leurs prétentions, ils font valoir :

- sur le conduit d'évacuation des gazs brûlés de la chaudière :

* qu'il existait avant travaux une chaudière à gaz et que le conduit traversait les combles pour évacuer les gaz brûlé en toiture comme c'est le cas actuellement ;

* que l'évacuation préexistait et il ne s'agit donc pas de travaux au titre des parties communes ;

- sur la tuile à douille en toiture :

* qu'il s'agit de la sortie en toiture du tuyau d'évacuation des gazs brûlés de la chaudière à gaz qui préexistait dans cet appartement ;

* que la sortie en toiture se situe au même endroit et a uniquement été réhaussé pour respecter les normes applicables ;

- sur le chauffe-eau :

* qu'ils ont uniquement changé l'ancien chauffe-eau qui était vétuste et qui était situé au même endroit ;

- sur le vélux en toiture et le puit de lumière :

* qu'ils ont toujours existé, que le velux était ancien et non étanche et qu'ils l'ont juste changé.

Ils ajoutent avoir toujours été de bonne foi ayant sollicite auprès du syndic une assemblée générale ordinaire ou extraordinaire, pour le vote des travaux envisagés.

Ils soulignent avoir communiqué aux copropriétaires et au syndic la justification de la réalisation des travaux selon les normes en vigueur et conformes aux règles de l'art.

Ils déclarent vivre difficilement cette situation, Mme ayant développé des troubles dépressifs.

L'instruction de l'affaire a été close par ordonnance en date du 30 janvier 2024.

MOTIFS :

A titre préliminaire sur la compétence du juge des référés

Il convient de rappeler que les questions d'imputabilité et contestation sérieuse s'analysent comme des moyens de défense visant à contester les conditions d'application des dispositions des article 834 et 835 du code de procédure civile, et donc de la mise en oeuvre des pouvoirs du juge des référé, et non la compétence matérielle de ce dernier pour connaître de ce débat.

Sur le trouble manifestement illicite et la remise en état des lieux

Aux termes de l'article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection, dans les limites de sa compétence, peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite : dans les cas ou l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Le dommage imminent s'entend du dommage qui n'est pas encore réalisé mais qui se produira sûrement si la situation présente doit se perpétuer et le trouble manifestement illicite résulte de toute perturbation résultant d'un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit.

Si l'existence de contestations sérieuses n'interdit pas au juge de prendre les mesures nécessaires pour faire cesser un dommage imminent ou un trouble manifestement illicite, il reste qu'une contestation réellement sérieuse sur l'existence même du trouble et sur son caractère manifestement illicite doit conduire le juge des référés à refuser de prescrire la mesure sollicitée.

La cour doit apprécier l'existence d'un dommage imminent ou d'un trouble manifestement illicite au moment où le premier juge a statué, peu important le fait que ce dernier ait cessé, en raison de l'exécution de l'ordonnance déférée, exécutoire de plein droit.

Constitue un trouble manifestement illicite la violation évidente d'une règle de droit résultant d'un fait matériel ou juridique, le juge des référés pouvant mettre fin à un tel trouble en cours de réalisation.

Aux termes de l'article 25 b de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ne sont adoptées qu'à la majorité des voix de tous les copropriétaires les décisions concernant ... l'autorisation donnée à certains copropriétaires d'effectuer à leurs frais des travaux affectant les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble, et conformes à la destination de celui-ci.

Par application des dispositions de ce texte, tous les travaux effectués par un copropriétaire sur les parties communes, même à usage privatif, doivent être autorisés et ce, même s'ils tendent à rendre l'immeuble conforme au règlement de copropriété ou à l'état descriptif.

Il est acquis qu'à défaut d'obtention d'une telle autorisation, le syndicat des copropriétaires est en droit d'exiger le rétablissement des lieux en leur état antérieur, sans avoir justifier d'un quelconque préjudice.

S'agissant des travaux réalisés sur les parties privatives, ils peuvent être entrepris, sans autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires à la condition de ne pas affecter l'harmonie de l'immeuble.

En principe le règlement de copropriété détermine les parties communes et les droits des copropriétaires.

A défaut d'information du règlement de copropriété, l'article 3 de la loi du 10 juillet 1965 dispose que sont communes les parties des bâtiments et des terrains affectées à l'usage ou à l'utilité de tous les copropriétaires ou de plusieurs d'entre eux.

Dans le silence ou la contradiction des titres, sont réputées parties communes :

- le sol, les cours, les parcs et jardins, les voies d'accès ;

- le gros oeuvre des bâtiments, les éléments d'équipement commun, y compris les parties de canalisations y afférentes qui traversent des locaux privatifs ;

- les coffres, gaines et têtes de cheminées ;

- les locaux des services communs ;

- les passages et corridors ;

- tout élément incorporé dans les parties communes.

Sont réputés droits accessoires aux parties communes dans le silence ou la contradiction des titres :

- le droit de surélever un bâtiment affecté à l'usage commun ou comportant plusieurs locaux qui constituent des parties privatives différentes, ou d'en affouiller le sol ;

- le droit d'édifier des bâtiments nouveaux dans des cours, parcs ou jardins constituant des parties communes ;

- le droit d'affouiller de tels cours, parcs ou jardins ;

- le droit de mitoyenneté afférent aux parties communes ;

- le droit d'affichage sur les parties communes ;

- le droit de construire afférent aux parties communes.

L'article 9 du code de procédure civile dispose qu' il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

En l'espèce il résulte des pièces versées aux débats que les époux [T] ont acquis le bien objet du présent litige le 21 février 2020, précisément les lots n°8, et 13.

* Sur l'installation d'un chauffe-eau (cumulus) par les époux [T] au sein des combles de la copropriété :

Le règlement de copropriété stipule article 6 que sont considérées commes parties communes :

- 1° Parties communes à l'ensemble des copropriétaires de l'immeuble :

Forment la propriété indivise toutes les parties de l'immeuble qui sont à l'usage commun des différents propriétaires de l'immeuble, à savoir :

- le sol en totalité,

- les fondations de l'immeuble, les gros murs de façade et de côté, les murs de refend, les planchers, en un mot toute la structure de l'immeuble,

- les conduits de fumée, les conduites principales de toutes natures, eau, gaz, électricité, évacuation des eaux pluviales, ménagères et des bains, les chutes des water-closets et la canalisation du tout à l'égoût (exception faite des parties de ces canalisations et conduits se trouvant à l'intérieur de chaque appartement ou local affecté à l'usage exclusif et particulier de chaque appartement ou local),

- la toiture, la chambre des eaux, les gouttières et les tuyaux de descente...

Et enfin d'une façon générale toutes les parties de l'immeuble qui ne sont pas affectées à l'usage exclusif de l'un des copropriétaires.

Le syndicat des copropriétaires estime que le chauffe-eau serait installé au sein des combles, qu'il estime être partie commune, sans autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires.

Il produit un constat de commissaire de justice en date du 21 décembre 2022 qui constate la présence d'un trou sur le mur situé à l'intérieur des combles et constate la présence d'un cumulus de couleur blanche qui y est apposé, desservant la propriété des époux [T]. Les photographies versées aux débats à l'appui du constat sont difficilement lisibles et ne permettent pas de déterminer le positionnement exact du cumulus.

Par procès-verbal du 9 juin 2023, l'assemblée générale des copropriétaires a refusé de voter la résolution n°25 visant à voir valider le remplacement du chauffe-eau, équipement privatif par les époux [T], implanté depuis des décennies.

Les époux [T] font valoir que le cumulus est situé dans la même position depuis plusieurs années. Ils démontrent au vu des photographies versées aux débats que le nouveau chauffe-eau a été fixé sur les pattes de fixation qui préexistait.

Ils versent aux débats une photographie dans laquelle le chauffe-eau, se situe dans leur salle de bains, encastré dans le plafond, au-dessus de leur baignoire. Le plafond a été enlevé, et le chauffe-eau se trouve pour partie dans le plafond mais une partie en dépasse.

A défaut de démonstration que ce chauffeau-eau se situe totalement dans les parties communes de la copropriété, avec l'évidence requise en référé, il ne saurait être reproché aux époux [T] de ne pas avoir sollicité l'autorisation de l'assemblée générale pour effectuer des travaux visant à le remplacer.

Par conséquent, le syndicat des copropriétaires ne rapportant pas la preuve d'un trouble manifestement illicite, il conviendra de confirmer l'ordonnance entreprise, par substitution de motifs, en ce qu'elle a débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande visant à voir retirer le chauffe-eau installé par les époux [T].

*Sur le conduit d'évacuation des gazs brûlés de la chaudière :

Le règlement de copropriété stipule, chapitre 3, article 6 que sont considérées commes parties communes :

- les conduits de fumée, les conduites principales de toutes natures, eau, gaz, électricité, évacuation des eaux pluviales, ménagères et des bains, les chutes des water-closets et la canalisation du tout à l'égoût (exception faite des parties de ces canalisations et conduits se trouvant à l'intérieur de chaque appartement ou local affecté à l'usage exclusif et particulier de chaque appartement ou local).

Les époux [T] versent aux débats un constat d'huissier du 4 mars 2020, photographies à l'appui, effectué avant travaux qui matérialise un conduit d'évacuation des gazs brûlés sur l'ancienne chaudière, dans leur cuisine.

Par procès-verbal d'assemblée générale du 15 octobre 2020, l'assemblée générale des copropriétaires a rejeté la demande des époux [T] visant à ratifier la création d'un conduit d'évacuation des gazs brûlés.

Il était inscrit dans la teneur de leur courrier joint à la convocation de l'assemblée, qu'ils avaient prévu le déplacement de la chaudière à gaz qui se trouvait dans l'actuelle cuisine afin de la transformer en chambre pour l'un de leurs fils, que la chaudière était prévue dans la future buanderie et qu'ils allaient faire placer par leur entrepreneur une tuile à douille.

Le syndicat des copropriétaires verse aux débats deux photographies desquelles il ressort que la chaudièredes époux [T] qui se situait dans la cuisine a bien été déplacée dans une autre pièce, la buanderie.

De plus, il produit un constat d'huissier du 7 mai 2020 dans lequel aucun conduit d'évacuation des gazs n'existait dans les combles.

Par procès-verbal du 11 mars 2022, l'assemblée générale des copropriétaires a réitéré le rejet de la résolution visant à régulariser les travaux y afférents.

Or il ressort du rapport du bureau d'études structures SAG en date du 2 juin 2022, sur l'inspection des combles et de la toiture que lors de sa première visite en 2019, il n'y avait pas de tube d'évacuation de fumées ou de gaz de chauffage et qu'à présent il y a un tube sous les combles, qui ressort dans le toit, pouvant générer des chaleurs excessives lors du passage du plancher sec avec canisses et que cet élément serait non conforme

Si un conduit préexistait, force est de constater que les époux [T] ont procédé à la création d'un nouveau tube d'évacuation des gazs brûlés, passant au milieu des combles de la copropriété et sortant en toiture, partie commune de l'immeuble.

Même si ces derniers justifient d'une attestation du 19 janvier 2023 de la société provence cheminée de la mise en conformité du tubage de la chaudière, le syndicat des copropriétaires, justifie d'une atteinte aux parties communes.

Il démontre l'affectation des parties communes par ce nouveau conduit d'évacuation des gazs brûlés qui sort par le toit, et justifie donc d'un trouble manifestement illicite. Ce dernier était donc constitué au moment où le premier juge a statué.

Il conviendra d'infirmer l'ordonnance entreprise, en ce qu'elle a débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande visant à voir retirer le conduit d'évacuation des gazs brûlés de la chaudière. Les époux [T] seront condamnés à procéder à ce retrait.

*Sur la tuile à douille sur le toit de la copropriété :

Le règlement de copropriété stipule, chapitre 3, article 6 que la toiture est considérée comme une partie commune.

Les époux [T] reconnaissent avoir réhaussé la tuile à douille en toiture afin de respecter les normes applicables.

Or ils ne démontrent pas avoir obtenu l'autorisation du syndicat des copropriétaires pour effectuer ces travaux relatifs à une partie commune.

Par ailleurs au vu des photographies versées aux débats par le syndicat des copropriétaires, il est établi qu'aucune tuile à douille ne préexistait et qu'elle a été installée lors des premiers travaux des époux [T] en 2020 et réhaussée en 2023.

Par conséquent la mise en place d'une tuile à douille sur le toit de la copropriété, partie commune, sans obtenir l'autorisation de l'assemblée générale de copropriété, constitue un trouble manifestement . Celui-ci était donc constitué au moment où le premier juge a statué.

Il conviendra d'infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande visant à obtenir le retrait de la tuile à douille installée sur le toit de la copropriété. Les époux [T] seront condamnés à la retirer.

*Sur le vélux et le puits de lumière :

Le règlement de copropriété stipule, chapitre 3, article 6 que la toiture est considérée comme une partie commune.

Il ressort des éléments versés aux débats notamment des photographies produites par le syndicat des copropriétaires, et des constats d'huissier des 21 décembre 2022 et 28 mars 2023, que les époux [T] ont procédé à l'agrandissement du vélux au niveau de la toiture.

Il est démontré que ce n'est pas un simple remplacement du vélux qui préexistait, le nouveau vélux mesurant 78 cm de large sur 102 cm de long en comparaison avec l'ancien qui mesurait 44 cm de large sur 58 cm de long.

Par conséquent l'agrandissement du vélux dans le toit constitue une appropriation des parties communes, qui a été effectué sans l'autorisation de l'assemblée générale et constitue un trouble manifestement illicite. Celui-ci était constitué au moment où le premier juge a statué.

Il conviendra d'infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande visant à obtenir la remise en état du puits de lumière et donc le retrait du vélux installé sur le toit de la copropriété.

Les époux [T] seront condamnés à retirer le velux installé dans le toit et devront le ramener à des dimensions équivalentes au précédent.

Au vu de la condamnation à retirer le vélux, demande de retrait du puits de lumière, est devenue sans objet, le syndicat ayant seulement démontré un agrandissement du vélux qui a pour conséquence d'augmenter la luminosité du puits de lumière.

* Sur l'astreinte :

Aux termes de l'article L. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution, tout juge peut, même d'office, ordonner une astreinte pour assurer l'exécution de sa décision.

Au vu des circonstances de l'espèce, les époux [T] seront condamnés à procéder au retrait du conduit d'évacuation des gazs brûlés, du vélux installé dans le toit et la tuile à douille sous astreinte provisoire de 200 euros par jour de retard, à compter du délai d'un mois suivant la signification de la présente décision, pendant un délai de 4 mois.

Sur la demande de dommages et intérêts

Aux termes de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme qui a causé à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

L'article 32-1 du code de procédure civile dispose que celui qui agit en Justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros sans préjudice des dommages et intérêts qui seraient réclamés.

En l'espèce les époux [T] ne démontrent pas en quoi l'attitude du syndicat des copropriétaires peut être assimilé à du harcèlement ou un abus de droit, leur occasionnant un préjudice.

Le syndicat des copropriétaires a en charge la défense des droits de la copropriété. Au vu des circonstances de l'espèce, aucun abus de droit n'est démontré.

L'ordonnance entreprise sera donc confirmée de ce chef, en ce qu'elle les a déboutés de leur demande formulée à ce titre.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Il convient d'infirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a condamné le syndicat des copropriétaires à supporter les dépens.

Succombant pour l'essentiel, les époux [T] seront condamnés à supporter les dépens de première instance et d'appel. Ils seront déboutés de leur demande de dispense au titre de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965.

L'équité commande que chacune des parties, qui succombe pour partie, soit condamnée à supporter la charge de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant dans les limites de l'appel ;

Infirme l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a :

- débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande visant à obtenir le retrait du conduit d'évacuation des gazs brûlés par la nouvelle chaudière des époux [T] ;

- débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande visant à obtenir le retrait de la tuile à douille installée sur le toit de l'immeuble ;

- débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande visant à obtenir la remise en état du puits de lumière et le retrait du vélux installé sur le toit de la copropriété ;

- laissé au syndicat des copropriétaires la charge des dépens ;

Confirme l'ordonnance entreprise pour le surplus en toutes ses dispositions déférées à la cour ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Condamne M. et Mme [T], sous astreinte provisoire de 200 euros par jour de retard, à compter du délai d'un mois suivant la signification de la présente décision, et pendant un délai de 4 mois, à :

- retirer le conduit d'évacuation des gazs brûlés par leur nouvelle chaudière ;

- retirer le vélux installé dans le toit de la copropriété et les condame à le ramener à des dimensions équivalentes à celles du précédent vélux ;

- retirer la tuile à douille sur le toit de la copropriété ;

Déboute M. et Mme [T] de leur demande de dispense des frais liés à l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 ;

Condamne M. et Mme [T] à supporter l'intégralité des dépens de première instance et d'appel ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-2
Numéro d'arrêt : 23/04511
Date de la décision : 21/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-21;23.04511 ?
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