La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/03/2024 | FRANCE | N°22/09704

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-7, 14 mars 2024, 22/09704


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7



ARRÊT AU FOND

DU 14 MARS 2024



N° 2024/ 139







Rôle N° RG 22/09704 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJWHL







SCI VIELLEFON





C/



[I] [Z]

[P] [M]

Syndicat SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES [Adresse 8]

Compagnie d'assurance MAAF ASSURANCES













Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Emmanuelle PLAN





Me Elisabet

h RECOTILLET





Me Olivier PEISSE





Me Olivier SINELLE





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Juge des contentieux de la protection de TOULON en date du 13 Mai 2022 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 21/01722.





APPELANTE



SCI VIELLEF...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7

ARRÊT AU FOND

DU 14 MARS 2024

N° 2024/ 139

Rôle N° RG 22/09704 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJWHL

SCI VIELLEFON

C/

[I] [Z]

[P] [M]

Syndicat SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES [Adresse 8]

Compagnie d'assurance MAAF ASSURANCES

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Emmanuelle PLAN

Me Elisabeth RECOTILLET

Me Olivier PEISSE

Me Olivier SINELLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juge des contentieux de la protection de TOULON en date du 13 Mai 2022 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 21/01722.

APPELANTE

SCI VIELLEFON Immatriculée au RCS de TOULON sous le n° 388 208 910 prise en la personne de son représentant légal en exercice, domici lié en cette qualité au siège sis, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Emmanuelle PLAN de la SELARL SOLUTIO AVOCATS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée de Me Jocelyne ROCHE, avocat au barreau de TOULON

INTIMES

Madame [I] [Z]

née le 26 Octobre 1973 à [Localité 5], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Elisabeth RECOTILLET, avocat au barreau de TOULON

Monsieur [P] [M]

né le 01 Juillet 1976 à [Localité 9], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Elisabeth RECOTILLET, avocat au barreau de TOULON

Syndicat SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES [Adresse 8] prise en la personne de son syndic en exercice FONCIA par son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité au siège sis, demeurant [Adresse 4], demeurant [Adresse 10]

représentée par Me Olivier PEISSE, avocat au barreau de TOULON

Compagnie d'assurance MAAF ASSURANCES société anonyme au capital de 160.000.000 € entièrement versé, immatriculée au RCS de Niort sous le n°542.073.580, entreprise régie par le code des assurances, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, demeurant [Adresse 6]

représentée par Me Olivier SINELLE de l'AARPI ESCLAPEZ-SINELLE-PILLIARD, avocat au barreau de TOULON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 17 Janvier 2024 en audience publique devant la cour composée de :

Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre

Madame Carole MENDOZA, Conseillère,

Madame Mireille CAURIER-LEHOT, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Mars 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Mars 2024,

Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 20 janvier 2018 à effet au premier février 2018, la SCI VIELLEFON a donné à bail d'habitation à Monsieur [M] un bien situé au dernier étage d'un immeuble de [Localité 7], moyennant un loyer mensuel de 620 euros majoré d'une provision sur charges mensuelle de 30 euros.

Par avenant du 13 février 2018, le loyer mensuel a été fixé à la somme de 600 euros.

La MAAF est assureur responsabilité civile de la SCI VIELLEFON.

Le 21 septembre 2020, les locataires ont signé avec le syndic de copropriété, la SAS FONCIA, un constat amiable de dégâts des eaux, qui évoquait un sinistre du 19 septembre 2020 ayant endommagé les plafonds de la cuisine et de la chambre du logement.

Des travaux de reprise d'étanchéité ont été effectués le 04 décembre 2020 et le 03 mai 2021 par la société SEV, mandaté par le syndic de copropriété.

Le 07 septembre 2021, un rapport de visite de la mairie de [Localité 7] concluait à l'indécence du logement en raison d'infiltrations d'eau liées au mauvais état de la toiture.

Par acte d'huissier du 26 mars 2021, Madame [Z] et Monsieur [M] ont fait assigner la SCI VIELLEFON aux fins de la voir condamner à rembourser le montant des loyers perçus depuis le mois d'octobre 2020 jusqu'à la réalisation effective des travaux.

Par acte d'huissier du 14 septembre 2021, la SCI VIELLEFON a fait citer le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 8] en intervention forcée.

Par jugement contradictoire du 13 mai 2022, le juge des contentieux de la protection de Toulon a :

- déclaré l'intervention volontaire de la SA MAAF ASSURANCES recevable,

- déclaré l'intervention forcée du syndicat des copropriétaires [Adresse 8]

recevable,

- condamné la SCI VIELLEFON à payer à Madame [I] [Z] et Monsieur [P]

[M] la somme de 1.839,50 euros au titre de leur préjudice de jouissance,

- ordonné à la SCI VIELLEFON d'effectuer dans le logement situé [Adresse 2], donné à bail le 20 janvier 2018 à Madame [I] [Z] et Monsieur [P] [M], des travaux de remise en état des murs et plafonds

endommagés par les infiltrations d'eau,

- assorti l'obligation précitée d'une astreinte de 50 euros par jour de retard qui commencera à courir à compter de l'expiration d'un délai de quatre mois suivant la signification du jugement,

- condamné la SCIVIELLEFON à payer à Madame [I] [Z] et Monsieur [P]

[M] la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné la SCI VIELLEFON et la SA MAAF ASSURANCES à payer au syndicat des copropriétaires [Adresse 8] la somme de 800 euros sur le fondement de1'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné la SCI VIELLEFON et la SA MAAF ASSURANCES aux dépens, en ce compris le

coût du procès-verbal de constat d'huissier en date du 22 février 2021,

- débouté les parties à l'instance de toutes leurs autres demandes,

- rappelé que l'exécution provisoire est applicable de droit.

Le premier juge a retenu la responsabilité du bailleur dans les désordres subis par ses locataires en écartant l'application de l'article 1725 du code civil, au motif que le dommage découlait d'un vice de construction, dont le bailleur doit la garantie au locataire. Il a estimé que le fait que la toiture était une partie commune n'était pas un argument suffisant pour voir écarter la responsabilité du bailleur.

Il a souligné que les locataires reconnaissaient que les infiltrations avaient cessé depuis le 03 mai 2021, date à laquelle la société SEV était intervenue. Il a estimé que les observations du rapport de visite de la mairie de [Localité 7] du 07 septembre 2021, procédaient d'un diagnostic insuffisant de la toiture.

Il a jugé qu'étaient imputables au bailleur les travaux d'embellissements nécessaires à la suite de l'existence des dégâts des eaux subis par les locataires.

Il a rejeté la demande de suspension ou de consignation des loyers durant l'exécution des travaux, en application de l'article 20-1 de la loi du 06 juillet 1989 au motif que le logement n'était pas inhabitable ni même indécent puisque les infiltrations d'eau avaient cessé.

Il a également rejeté la demande des locataires tendant à être remboursés intégralement des loyers depuis le mois d'octobre 2020. Il leur a accordé un remboursement partiel pour la période d'octobre 2020 au 03 mai 2021 à hauteur de 40%.

Il n'a pas estimé utile la mise en oeuvre d'une expertise judiciaire.

Par déclaration du 06 juillet 2022, la SCI VIELLEFON a relevé appel des chefs de la décision qui la déboutent de ses demandes et la condamnent à effectuer des travaux sous astreinte, à payer à Madame [Z] et Monsieur [M] des dommages et intérêts au titre de leur préjudice de jouissance, à verser des indemnités sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à prendre en charge les dépens.

Madame [Z] et Monsieur [M] ont constitué avocat.

Le syndicat des copropriétaires [Adresse 8] a constitué avocat

La compagnie MAAF assurances a constitué avocat.

Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 13 décembre 2023 auxquelles il convient de se reporter, la SCI VIELLEFON demande à la cour :

- de déclarer recevable l'appel interjeté par la SCI VIEILLEFON et en conséquence :

- de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré l'intervention volontaire de la SA MAAF ASSURANCES recevable,

- de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré l'intervention forcée du syndicat des

copropriétaires [Adresse 8] recevable,

- de réformer le jugement en ce qu'il a condamné la SCI VIELLEFON à payer à Madame

[Z] et Monsieur [M] la somme de 1839.50 € au titre de leur préjudice de jouissance

- de réformer le jugement en ce qu'il a ordonné à la SCI VIELLEFON d'effectuer dans le logement sis [Adresse 1], des travaux de remise en état des murs et plafonds endommagés par les infiltrations d'eau, et en ce qu'il a assorti d'une astreinte de 50 € par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de quatre mois suivant la signification du jugement,

- de réformer le jugement en ce qu'il a condamné la SCI VIELLEFON à payer à Madame

[Z] et Monsieur [M] la somme de 800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- de réformer le jugement en ce qu'il a condamné la SCI VIELLEFON à payer au syndicat des copropriétaires [Adresse 8] la somme de 800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- de réformer le jugement en ce qu'il a condamné la SCI VIELLEFON à payer les dépens de l'instance en ce compris le coût du procès verbal de constat d'huissier du 22 février 2021

- de dire que la responsabilité de la SCI VIELLEFON ne peut être engagée au regard de l'origine

des désordres qui se trouve dans les parties communes de l'immeuble.

- de débouter les consorts [M]- [Z] de toutes leurs fins et demandes

- de débouter la MAAF de toutes ses fins et demandes.

- de débouter le syndicat des copropriétaires de toutes ses fins et demandes

- de condamner les consorts [Z]-[M] à payer la somme de 2000 € à l'appelante à titre de dommages intérêts.

- de déclarer recevables les demandes dirigées contre le syndicat des copropriétaires.

en conséquence :

- de condamner le syndicat des copropriétaires à payer à la SCI VIELLEFON :

*les sommes restées à sa charge au titre des travaux de remise en état soit la somme de 1697,63 € au titre de la vétusté et 106 € au titre de la franchise contractuelle,

* la sommes de 1839,50 réglée aux locataires au titre de la perte de jouissance,

*la somme de 800€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

*le dépens de première instance,

- de condamner le syndicat des copropriétaires à régler aux locataires toute somme supplémentaire, qui sera allouée par la Cour à ces derniers au titre de la réparation de leur préjudice,

*à titre subsidiaire :

- de condamner le syndicat des copropriétaires [Adresse 8] à relever et garantir la SCI VIELLEFON de toutes les condamnations prononcées à son encontre tant par le premier jugement que par l'arrêt à intervenir.

* en toutes hypothèses,

- de condamner tout succombant à lui payer la somme de 3.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

- de condamner les mêmes aux entiers dépens d'appel distraits au profit de Me Emmanuelle PLAN ' SELARL SOLUTIO AVOCATS.

Elle conteste toute responsabilité dans la survenance de désordres affectant le bien loué qui proviennent de la toiture, partie commune. Elle souligne que seul le syndicat des copropriétaires est responsable en application de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965.

Elle estime que ses locataires ne pouvaient agir contre elle puisqu'elle n'a pas qualité pour entreprendre des travaux de réparation sur les parties communes et relève qu'ils avaient le pouvoir de se tourner vers le syndicat des copropriétaires. Elle excipe l'article 1725 du code civil pour être mise hors de cause.

Elle conteste devoir effectuer les travaux d'embellissement puisqu'elle n'a commis aucune faute en sa qualité de bailleur.

Elle estime que sa seule obligation était d'accomplir les démarches nécessaires auprès du syndicat des copropriétaires pour remédier aux désordres dont l'origine est une partie commune, ce qu'elle a fait.

Elle relève que l'appartement loué n'est pas inhabitable et que les locataires ne démontrent pas l'existence d'un préjudice de jouissance. Elle ajoute que les problèmes de circulation d'air incombent aux locataires qui doivent désobstruer les grilles de ventilation existantes.

Elle souligne avoir néanmoins effectué les travaux mis à la charge par le premier juge en raison de l'exécution provisoire de la décision et sollicite en conséquence que le syndicat des copropriétaires la rembourse de ces derniers ainsi que des dommages et intérêts au titre du préjudice de jouissance qu'elle a versés en exécution du jugement.

Subsidiairement, elle sollicite la garantie du syndicat des copropriétaires en soutenant qu'il ne s'agit pas d'une demande nouvelle en cause d'appel puisqu'elle avait demandé, en première instance, la condamnation de celui-ci. Elle fait état de la responsabilité de plein droit du syndicat des copropriétaires tout en ajoutant qu'il a commis un défaut de surveillance puisque les premières réparations sur la toiture n'étaient pas suffisantes.

Elle expose que la MAAF, son assureur, lui a réglé le coût des travaux de remise en état auxquelles elle était condamnée sous astreinte.

Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 09 mai 2023 auxquelles il convient de se reporter, Monsieur [Z] et Madame [M] demandent à la cour :

- de débouter la SCI VIELLEFON de ses demandes,

- de confirmer le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qui concerne le montant de l'indemnité qui leur a été allouée au titre de leur préjudice de jouissance,

- de condamner la SCI VIELLEFON à leur verser la somme de 9360 euros au titre de leur préjudice de jouissance,

- de condamner la SCI VIELLEFON à leur verser la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner la SCI VIELLEFON aux dépens.

Ils soutiennent que leur bailleur doit leur garantir la jouissance paisible du logement loué et qu'il est tenu de la garantie des vices de construction. Ils ajoutent qu'il est obligé d'entretenir les locaux en état de servir à l'usage prévu par le contrat. Ils estiment qu'ils étaient en droit d'intenter une action contre leur bailleur même si l'origine des désordres se trouve dans les parties communes.

Ils expliquent avoir fait toutes les démarches nécessaires auprès de leur assureur.

Ils sollicitent de leur bailleur la prise en charge des travaux d'embellissement et la réparation de leur préjudice de jouissance.

Ils soulignent qu'aucune mise en eau de la toiture n'a été effectuée à la suite de la deuxième réparation de mai 2021 si bien qu'ils n'ont pu constater son efficacité qu'à la suite de la survenue d'un épisode de pluies de septembre 2021. Ils exposent avoir indiqué au mandataire de leur bailleur, à cette date, que les fuites avaient cessé.

Ils déclarent que la reprise des embellissements n'a été effectuée que tardivement, après le jugement déféré. Ils estiment que ce retard est imputable au bailleur. Ils notent que leur préjudice de jouissance a couru d'octobre 2020 jusqu'au mois d'octobre 2022, date à laquelle les travaux de réfection des embellissements ont débuté. Ils estiment en outre que le trouble de jouissance doit être évalué à hauteur de 60% du montant du loyer, compte tenu des dégâts affectant le logement.

Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 20 décembre 2022 auxquelles il convient de se reporter, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 8] demande à la cour:

- de confirmer le jugement déféré,

- de rejeter toutes les demandes formées à son encontre,

- de condamner tout succombant à lui verser la somme de 2500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner tout succombant aux dépens.

Il expose que les difficultés de réfection des peintures dans le logement loué n'est pas de sa responsabilité.

Il souligne que le clos et le couvert était assuré dès le mois de septembre 2021 si bien que les locataires ne peuvent faire état de l'indécence du bien. Il ajoute que le bien n'a jamais été inhabitable.

Subsidiairement, il relève qu'il n'existe plus de sinistre depuis le 05 mai 2021 si bien que les reprises de peinture auraient pu être intervenir plus tôt. Il estime n'avoir pas à pâtir des discussions entre assureurs.

Il s'oppose à une expertise judiciaire.

Il estime nouvelle en cause d'appel la demande d'appel en garantie formée à son encontre par le bailleur.

Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 23 juin 2023 auxquelles il convient de se reporter, la MAAF demande à la cour :

A titre principal,

- d'infirmer le jugement déféré du 13 mai 2022, en ce qu'il a condamné la MAAF aux dépens et à payer la somme de 800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, solidairement avec son assurée ;

Statuant à nouveau,

- de rejeter toute demande de condamnation de la MAAF présentée sur le fondement des

articles 696 et 700 du code de procédure civile ;

- de déclarer l'appel en garantie de la SCI VIELLEFON contre la MAAF irrecevable.

A titre subsidiaire,

- de débouter la SCI VIELLEFON de son appel en garantie contre la MAAF.

En tout état de cause,

- de juger que la SCI VIELLEFON ne formule plus aucune demande à l'encontre de la MAAF.

- de condamner tout succombant aux entiers dépens d'appel,

- de condamner tout succombant à payer à la MAAF la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, dont ceux d'appel distraits au profit de Maître Olivier SINELLE, Avocat, sur son offre de droits et conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Elle soutient que l'appel en garantie formé contre elle par la SCI VIELLEFON est irrecevable puisqu'il s'agit d'une demande nouvelle en cause d'appel.

Subsidiairement, elle en demande le rejet au motif que son assurée ne précise pas sur quelle garantie contractuelle elle fonde sa demande ni quelle condamnation devrait être garantie.

Elle relève que la garantie 'dégâts des eaux' du contrat couvre uniquement les dommages causés directement par l'eau. Elle précise avoir versé à son assurée une indemnité correspondant au montant des travaux de réfection des plafonds et des murs.

Elle estime que la garantie perte de loyers ne peut être actionnée que si les locataires ont dû quitter les bâtiments endommagés.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 03 janvier 2024.

MOTIVATION

Rien dans les éléments soumis à l'appréciation de la cour ne permet de critiquer la régularité, par ailleurs non contestée, de l'appel. Il sera déclaré recevable.

Selon l'article 6 de la loi du 06 juillet 1989, le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé, répondant à un critère de performance énergétique minimale et doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation (...)

Le bailleur est obligé :

a) De délivrer au locataire le logement en bon état d'usage et de réparation (...)

b) D'assurer au locataire la jouissance paisible du logement et, sans préjudice des dispositions de l'article 1721 du code civil, de le garantir des vices ou défauts de nature à y faire obstacle hormis ceux qui, consignés dans l'état des lieux, auraient fait l'objet de la clause expresse mentionnée au a ci-dessus ;

c) D'entretenir les locaux en état de servir à l'usage prévu par le contrat et d'y faire toutes les réparations, autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l'entretien normal des locaux loués (...)

Aux termes de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965, le syndicat est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers ayant leur origine dans les parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires.

Il incombe au bailleur d'accomplir toutes les diligences nécessaires auprès du syndicat des copropriétaires pour remédier aux troubles de jouissance subis par le locataire, sans pouvoir se retrancher derrière le fait que ces troubles proviennent des parties communes de l'immeuble ni renvoyer le locataire à saisir son assureur ou celui de la copropriété (Cass. Civ. 3è, 9 septembre 2021, n°20-12.347).

Il n'est pas contesté que le sinistre affectant le logement loué à M.[M] et Mme [Z] provenait de la toiture, partie commune de l'immeuble.

Il est exact que les locataires disposaient de ce fait d'une action directe contre le syndicat des copropriétaires.Toutefois, rien ne les empêchait d'agir à l'encontre de leur bailleur, copropriétaire, qui est obligé de leur assurer la jouissance paisible des lieux loués et de les garantir des vices de la chose louée, liés à la mauvaise étanchéité de la toiture.

C'est donc par des motifs pertinents que le premier juge a retenu la responsabilité du bailleur, la SCI VIELLEFON, même si le sinistre subi par les locataires provenait d'une partie commune. Le jugement sera confirmé sur ce point.

La SCI VIELLEFON dispose d'un recours à l'égard du syndicat des copropriétaires. Contrairement à ce qu'avance le syndicat des copropriétaires, la demande d'appel en garantie n'est pas nouvelle en cause d'appel. En effet, cette demande tend aux mêmes fins que celles soumises au premier juge puisque la SCI VIELLEFON évoquait l'unique responsabilité du syndicat des copropriétaires dans la survenance des préjudices de ses locataires et souhaitait la prise en charge de l'indemnisation de ses locataires par le syndicat.

Sur l'indemnisation de M.[M] et Mme [Z]

*Sur les travaux de remise en état du bien loué

La SCI VEILLEFON est obligée, en sa qualité de bailleur, d'entretenir les locaux en état de servir à l'usage prévu par le contrat et d'y faire toutes les réparations, autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l'entretien normal des locaux. Les travaux sollicités par les locataires ne concernent pas les parties communes mais les travaux de remise en état du bien loué en raison des dommages créés par les infiltrations d'eau.

C'est donc par des motifs pertinents que le premier juge a ordonné à la SCI VIELLEFON d'effectuer dans le logement des travaux de remise en état des murs et plafonds endommagés par les infiltrations d'eau, sous astreinte de 50 euros par jour de retard qui comrnencera à courir à compter de l'expiration d'un délai de quatre mois suivant la signification du jugement.

*Sur le préjudice de jouissance

Les locataires subissaient déjà en octobre 2020 des infiltrations au sein du logement qu'ils louaient.

S'il est exact que l'origine des infiltrations a cessé à compter du 03 mai 2021, à la suite d'une intervention d'une société mandatée par le syndic de copropriété pour réparer l'étanchéité de la toiture, il n'en demeure pas mois que les locaux loués sont restés endommagés après cette date.

Même si le logement n'était pas inhabitable, les locataires ont subi un préjudice de jouissance puisque les lieux loués n'étaient pas en bon état d'entretien.

Les travaux de remise en état du logement loué ont débuté en octobre 2022, date à laquelle les locataires estiment que leur préjudice de jouissance a pris fin.

Ce préjudice a ainsi duré environ deux ans.

M.[M] et Mme [Z] sont locataires d'un logement de type T2 situé au 5ème étage d'un immeuble, d'une surface de 52 m². Le loyer hors charges s'élève à la somme mensuelle de 600 euros depuis l'avenant du 13 février 2018.

Les infiltrations ont affecté le plafond de la cuisine et de la chambre, comme en témoignent plusieurs pièces produites. Le rapport d'expertise amiable du 09 février 2021, accompagné de photographies, permet de constater qu'une partie du plafond de la cuisine est fortement endommagée.

Un procès-verbal d'huissier de justice, du 22 février 2021, permet de constater qu'une partie du plafond de la chambre est dégradée de façon conséquente, qu'il existe une importante trace d'humidité dans la salle de bains, que la peinture se décolle sur une petite partie du mur du couloir et que le plafond de la cuisine est fortement détérioré.

Le préjudice de jouissance des locataires sera intégralement réparé, pour la période d'octobre 2020 à octobre 2022 par la somme arrondie de 5000 euros, correspondant à 35% du montant du loyer mensuel. Le bailleur ne peut prétendre à une diminution voire une exonération de sa responsabilité en alléguant que le rapport de la ville de [Localité 7] avait prescrit, à la charge des locataires, la désobstruction de la ventilation basse dans la pièce principale en enlevant la serre sur la terrasse et le nettoyage de la poussière sur les grilles de ventilation, puisqu'il ne démontre pas que le préjudice de jouissance des locataires aurait été aggravé par la présence de cette serre et la présence de poussière sur les grilles de ventilation.

La SCI VIELLEFON sera condamnée à verser cette somme à ces locataires. Le jugement déféré sera infirmé sur ce point.

Il n'y a pas lieu de statuer spécifiquement sur la demande de la SCI VIELLEFON tendant à condamner le syndicat des copropriétaires à lui rembourser les sommes payées en exécution du jugement infirmé (à savoir celle de 1839, 50 euros au titre du préjudice de jouissance, celle de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens); en effet le présent arrêt infirmatif constitue le titre en vertu duquel les parties devront faire leurs comptes.

La SCI VIELLEFON peut appeler en garantie le syndicat des copropriétaires puisque le sinistre résulte d'un problème d'étanchéité d'une partie commune.

Toutefois, il est acquis que la cause du sinistre est réparée depuis le 03 mai 2021, date à laquelle une entreprise, mandatée par le syndic de copropriété, est venue faire des travaux sur la toiture.

Le syndicat des copropriétaires ne peut être amené à garantir la SCI VIELLEFON pour la période postérieure au 03 mai 2021, s'agissant du préjudice de jouissance des locataires.

La SCI VIELLEFON justifie avoir effectué les travaux auxquels la condamnait le jugement déféré. Elle indique avoir gardé à sa charge la somme de 1697, 63 euros au titre de la vétusté et la somme de 106 euros au titre de la franchise contractuelle. Ces sommes laissées à sa charge sont la conséquence des travaux de remise en état qu'elle était tenue d'effectuer en sa qualité de bailleur, travaux qui sont la conséquence d'une responsabilité de plein droit du syndicat des copropriétaires.

Dès lors, il convient de condamner le syndicat des copropriétaires à verser à la SCI VIELLEFON la somme de 1697, 63 euros au titre de la vétusté ainsi que la somme de 106 euros.

Le syndicat des copropriétaires devra également la garantir à hauteur de 1458 euros au titre du trouble de jouissance des locataires pour la période d'octobre 2020 à mai 2021.

La SCI VIELLEFON ne forme aucune demande à l'égard de son assureur, la MAAF.

Sur la demande de dommages et intérêts formée par la SCI VIELLEFON à l'égard de M.[M] et Mme [Z]

La SCI VIELLEFON ne justifie d'aucune faute commise par ses locataires à son encontre. Elle sera déboutée de cette demande.

Sur les dépens et sur les frais irrépétibles

Le syndicat des copropriétaires et la SCI VIELLEFON sont essentiellement succombants. Ils seront condamnés in solidum aux dépens de première instance et d'appel, ceux-ci pouvant être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile. Le syndicat des copropriétaires sera débouté de sa demande au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

Le procès-verbal d'huissier de justice du 22 février 2021 ne fait pas partie des dépens mais doit être intégré aux frais irrépétibles exposés par M.[M] et Mme [Z].

Le syndicat des copropriétaires devra garantir la SCI VIELLEFON au titre des dépens à hauteur de 50%.

Pour des raisons tirées de l'équité, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de la société MAAF au titre des frais irrépétibles qu'elle a exposés en première instance et en cause d'appel.

Il n'est pas équitable de laisser à la charge de M.[M] et Mme [Z] les frais irrépétibles qu'ils ont exposés en première instance et en appel.

Le jugement déféré qui a condamné la SCI VIELLEFON aux dépens et qui l'a condamnée à verser la somme de 800 euros à M.[M] et Mme [Z] sera confirmé, sauf à dire que le procès-verbal d'huissier de justice du 22 février 2021 fait partie des frais irrépétibles et sauf à dire que le syndicat des copropriétaires sera tenu de garantir la SCI VIELLEFON à hauteur de 50% de ces sommes. Il sera infirmé en ce qu'il a mis les dépens à la charge de la SA MAAF ASSURANCES et en ce qu'il a condamné la SCI VIELLEFON et la SA MAAF ASSURANCES à verser au syndicat des copropriétaires la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La SCI VIELLEFON sera condamnée à verser à M.[M] et Mme [Z] la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles qu'ils ont exposés en appel. Le syndicat des copropriétaires sera tenu de la garantir à hauteur de 50% de cette somme.

Le syndicat des copropriétaires est essentiellement succombant à l'égard de la SCI VIELLEFON. Il sera condamné à lui verser la somme de 1000 euros au titre des frais irrépétibles exposés par cette dernière.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe,

DÉCLARE recevable l'appel formé par la SCI VIELLEFON

CONFIRME le jugement en ce qu'il a retenu la responsabilité de la SCI VIELLEFON à l'égard de M. [P] [M] et Mme [I] [Z], en ce qu'il a ordonné à la SCI VIELLEFON d'effectuer des travaux sous astreinte, en ce qu'il a condamné la SCI VIELLEFON aux dépens, (sauf à inclure le coût du procès-verbal d'huissier de justice du 22 février 2021 dans les frais irrépétibles de M.[P] [M] et Mme [I] [Z] et sauf à dire que le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 8] à [Localité 7] sera tenu de la garantir à hauteur de 50% de cette somme), et en ce qu'il a condamné la SCI VIELLEFON à payer à M.[P] [M] et Mme [I] [Z] la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, sauf à dire que le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 8] à [Localité 7] sera tenu de la garantir à hauteur de 50% de cette somme,

INFIRME pour le surplus et y AJOUTANT,

CONSTATE que les travaux de remise en état du logement loué à M.[P] [M] et Mme [I] [Z] ont été effectués,

CONDAMNE la SCI VIELLEFON à verser à M. [P] [M] et Mme [I] [Z] la somme de 5000 euros en réparation de leur préjudice de jouissance,

DÉCLARE recevable l'appel en garantie formé par la SCI VIELLEFON à l'encontre du syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 8] à [Localité 7]

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 8] à payer à la SCI VIELLEFON la somme de 1697,63 euros au titre de la vétusté et la somme de 106 euros

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 8] à garantir la SCI VIELLEFON des condamnations prononcées à son encontre sauf à limiter la garantie au titre du préjudice de jouissance de M.[P] [M] et Mme [I] [Z] à la somme de 1458 euros ainsi qu'à limiter à hauteur de 50% la garantie au titre des frais irrépétibles exposés par M.[P] [M] et Mme [I] [Z] et les dépens mis à la charge de la SCI VIELLEFON

REJETTE la demande de dommages et intérêts formée par la SCI VIELLEFON à l'encontre de M.[P] [M] et Mme [I] [Z],

REJETTE la demande de la société MAAF faite au titre des frais irrépétibles,

CONDAMNE la SCI VIELLEFON à verser à M.[P] [M] et Mme [I] [Z] la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 8] à verser la somme de 1000 euros à la SCI VIELLEFON sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE in solidum le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 8] et la SCI VIELLEFON aux dépens qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-7
Numéro d'arrêt : 22/09704
Date de la décision : 14/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-14;22.09704 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award