COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-8
ARRÊT AU FOND
DU 13 MARS 2024
N° 2024/ 139
N° RG 21/03358
N° Portalis DBVB-V-B7F-BHB5D
Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier RESIDENCE [5]
C/
[N] [B]
[U] [M] épouse [B]
Copie exécutoire délivrée le :
à :
Me Philippe-Laurent SIDER
Me CHETRIT
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal Judiciaire de MARSEILLE en date du 04 Février 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 19/004513.
APPELANT
Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier RESIDENCE [5] sis à [Localité 6] sis [Adresse 2]
pris en la personne de son syndic en exercice, la SARL LEANDRI IMMOBILIERE, dont le siège social est sis [Adresse 1], elle-même représentée par son gérant en exercice domicilié en cette qualité audit siège
représenté par Me Philippe-Laurent SIDER, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE, assisté par Me Béatrice PORTAL, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMES
Monsieur [N] [B]
né le 21 Août 1961 à [Localité 3] (TUNISIE), demeurant [Adresse 2]
Madame [U] [M] épouse [B]
née le 18 Janvier 1966 à [Localité 4] (TUNISIE), demeurant [Adresse 2]
représentés par Me Alain CHETRIT, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Janvier 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Philippe COULANGE, Président
Madame Céline ROBIN-KARRER, Conseillère
Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Priscilla BOSIO.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Mars 2024.
ARRÊT
Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Mars 2024, signé par Monsieur Philippe COULANGE, Président et Madame Maria FREDON, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DE LA PROCÉDURE
Suivant déclaration enregistrée le 5 mars 2021 au greffe de la cour, le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [5], sis [Adresse 2] à [Localité 6], agissant par son syndic en exercice la société LEANDRI IMMOBILIÈRE, a interjeté appel d'un jugement rendu le 4 février 2021 par le tribunal judiciaire de Marseille qui l'a intégralement débouté de son action à l'encontre des époux [N] [B] et [U] [M], tendant à obtenir paiement d'une somme de 8.222,14 euros au titre du solde débiteur de leur compte de répartition de charges provisoirement arrêté au 4 septembre 2020.
Aux termes de ses conclusions récapitulatives notifiées le 22 février 2022, auxquelles il est ici renvoyé pour l'exposé des moyens, l'appelant demande à la cour :
- d'infirmer le jugement entrepris,
- statuant à nouveau, de condamner solidairement les époux [B] à lui payer ladite somme de 8.222,14 euros, outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 8 novembre 2018,
- y ajoutant, de les condamner à payer 942,03 euros au titre des charges échues entre le 5 septembre 2020 et le 30 septembre 2021,
- de rejeter leur demande subsidiaire tendant à l'octroi de délais de paiement,
- de condamner en outre les intimés au paiement d'une somme de 2.000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive,
- et de mettre à leur charge les entiers dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'une indemnité de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions récapitulatives notifiées le 28 décembre 2021, les époux [B] poursuivent à titre principal la confirmation du jugement déféré et réclame en sus paiement d'une somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive, outre 2.000 euros au titre de leurs frais irrépétibles et leurs entiers dépens.
Ils font valoir :
- qu'un rapport de vérification des comptes établi par la société CoproConseils a mis en évidence les irrégularités de gestion commises par l'ancien syndic le Cabinet OTIM, ayant entraîné des erreurs dans la répartition des charges qui n'ont jamais été régularisées,
- que les charges spéciales au bâtiment 1 sont appelées sur la base de 91/10.000èmes, alors que leur titre de propriété fait état de 80/10.000èmes seulement,
- qu'ils ne possèdent aucun box de garage, de sorte qu'ils ne sont pas tenus de contribuer aux travaux de réfection de la rampe d'accès au sous-sol,
- que le syndicat a inclus indûment dans son décompte certains frais et honoraires,
- que la créance alléguée n'est ni certaine ni exigible,
- et que le dernier appel de fonds qui leur a été adressé fait apparaître qu'ils n'étaient redevables d'aucun arriéré de charges au 20 décembre 2021.
Subsidiairement, ils sollicitent l'octroi de délais de paiement sur 24 mois en application de l'article 1343-5 du code civil.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 3 janvier 2024.
DISCUSSION
Sur la régularité des comptes :
Dans un premier rapport édité le 12 juin 2018, la société CoproConseils, chargée par le conseil syndical de vérifier les comptes pour l'exercice du 1er octobre 2016 au 30 septembre 2017, a notamment conclu qu'il existait des irrégularités dans la répartition des charges, imputables à une mauvaise gestion de la part du précédent syndic le Cabinet OTIM.
Toutefois, dans un second rapport daté du 22 février 2019, elle a indiqué que la totalité des corrections comptables avait été effectuée par le nouveau syndic le Cabinet LEANDRI, permettant l'approbation des comptes 2016/2017 par l'assemblée générale, sous réserve de certains comptes de travaux.
Ces comptes ont effectivement été approuvés par l'assemblée générale des copropriétaires le 11 juin 2019.
Le syndicat produit également aux débats les délibérations ayant approuvé les comptes des exercices 2012/2013, 2013/2014, 2014/2015, 2015/2016 et 2017/2018, ainsi que les budgets prévisionnels des exercices 2019/2020 et 2020/2021.
En conséquence, le moyen tiré de l'irrégularité des comptes doit être rejeté.
Sur les tantièmes de copropriété rattachés au lot n° 225 :
Suivant leur titre de propriété résultant d'un acte de vente du 28 janvier 2014, les époux [B] sont propriétaires d'un appartement de type F 5 A situé au sixième étage du bâtiment 1, escalier B, constituant le lot n° 225 de l'état descriptif de division, auquel sont rattachés 75/10.000èmes de la propriété du sol et des parties communes générales, et 80/10.000èmes des parties communes spéciales au bâtiment 1.
Toutefois, selon les extraits du règlement de copropriété versés au dossier, chaque appartement de type 5 et de catégorie A s'est vu attribué 75/10.000èmes des parties communes de l'ensemble immobilier et 91/10.000 èmes des parties communes du bâtiment 1.
La publication au fichier immobilier a eu pour effet de rendre ce règlement opposable à l'ensemble des copropriétaires présents ou à venir, de sorte que ses stipulations doivent prévaloir, en cas de divergence, sur celles des actes particuliers translatifs de propriété.
Il en résulte que, contrairement à l'opinion du premier juge, les charges dues par les époux [B] ont été régulièrement calculées en fonction des tantièmes mentionnés au règlement de copropriété.
Sur les travaux de réfection de la rampe d'accès aux garages :
Aux termes de la résolution n° 21 adoptée le 11 juin 2019 à l'unanimité des copropriétaires présents ou représentés, l'assemblée générale a décidé que le coût des travaux de réfection de la voie voie d'accès aux garages serait réparti selon les millièmes généraux.
Cette décision, non contestée en temps utile, s'impose aux époux [B], de sorte qu'ils sont tenus de s'acquitter de l'appel de fonds correspondant qui leur a été adressé le 9 juillet 2019 pour un montant de 1.168,10 euros.
Sur les frais de contentieux et de recouvrement :
L'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 met à la charge du copropriétaire défaillant les frais nécessaires exposés par le syndicat, notamment les frais de mise en demeure, de relance et de prise d'hypothèque, ainsi que les droits et émoluments des actes des commissaires de justice et le droit de recouvrement ou d'encaissement à la charge du débiteur.
Le contrat de syndic conclu avec le Cabinet LEANDRI stipule de son côté que celui-ci est en droit de percevoir à l'encontre du copropriétaire concerné :
- 40 € pour une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception,
- 60 € pour une relance après mise en demeure,
- 70 € pour la conclusion d'un protocole d'accord,
- 200 € pour les frais de constitution d'hypothèque ou de mainlevée,
- 300 € pour le dépôt d'une requête en injonction de payer,
- 300 € pour la constitution du dossier transmis à l'auxiliaire de justice, 'uniquement en cas de diligences exceptionnelles',
- et des vacations au temps passé pour le suivi du dossier transmis à l'avocat, là encore 'uniquement en cas de diligences exceptionnelles'.
L'historique du compte des époux [B] fait apparaître entre le 26 avril 2018 et le 30 septembre 2021 l'imputation de frais de suivi contentieux pour un montant total de 1.320 euros qui n'apparaissent pas justifiés par des diligences exceptionnelles du syndic, de sorte qu'il convient de déduire cette somme de la créance réclamée.
S'agissant d'autre part du coût de l'assignation en justice et des honoraires d'avocat, représentant la somme de 2.669,09 euros, il y a lieu de constater qu'ils ont été d'ores et déjà retirés du décompte.
Sur l'actualisation de la créance du syndicat :
Aux termes des dernières conclusions notifiées par l'appelant, la cour est saisie d'une demande en paiement du solde débiteur de charges provisoirement arrêté au 30 septembre 2021.
Sur la foi du dernier décompte produit aux débats, et compte tenu des motifs qui précèdent, ce solde doit être fixé à 7.844,17 euros, outre les intérêts au taux légal à compter de la même date.
En effet, le rejet de la demande en paiement du syndicat par le jugement déféré, même assorti de l'exécution provisoire, ne revêtait pas un caractère définitif, de sorte que la créance correspondante ne pouvait être annulée par une écriture comptable passée le 5 mars 2021.
Sur la demande d'octroi de délais de paiement :
Les époux [B], qui apparaissent en définitive comme des débiteurs de mauvaise foi, ne peuvent obtenir en justice des délais de paiement.
Sur les demandes accessoires en dommages-intérêts :
L'action introduite par le syndicat des copropriétaires ne revêt aucun caractère abusif, de sorte que les époux [B] doivent être déboutés de leur demande en dommages-intérêts.
En revanche, le défaut de paiement de leurs charges, qui s'est perpétué durant plusieurs années, a occasionné au syndicat un préjudice financier en le privant de fonds nécessaires à l'entretien de l'immeuble, qui doit être réparé par l'allocation d'une somme de 800 euros.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Les époux [B], qui succombent à l'issue de l'instance, devront supporter les entiers dépens de première instance et d'appel.
En outre, l'équité commande d'allouer au syndicat des copropriétaires une indemnité de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles qu'il a été contraint d'exposer pour recouvrer sa créance.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
Infirme le jugement déféré, et statuant à nouveau :
Condamne solidairement les époux [N] [B] et [U] [M] à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 7.844,17 euros au titre du solde débiteur de leur compte individuel de répartition de charges provisoirement arrêté au 30 septembre 2021, outre les intérêts moratoires au taux légal à compter de la même date,
Rejette leur demande d'octroi de délais de paiement,
Les condamne en outre à payer la somme de 800 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive,
Condamne les époux [B] aux entiers dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'à verser au syndicat une somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT