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11/03/2024 | FRANCE | N°24/00066

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-11 référés, 11 mars 2024, 24/00066


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11 référés





ORDONNANCE DE REFERE

du 11 Mars 2024



N° 2024/024





Rôle N° RG 24/00066 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BMRZJ







[N] [U] [B] ÉPOUSE [G]





C/



[E] [Y] [P]





















Copie exécutoire délivrée

le : 11 Mars 2024

à :



Me Valentin CESARI, avocat au barreau de NICE



Me Mireille DAMIANO, avocat a

u barreau de NICE





Prononcée à la suite d'une assignation en référé en date du 02 Février 2024.





DEMANDERESSE



Madame [N] [U] [B] ÉPOUSE [G], demeurant [Adresse 3]



représentée par Me Valentin CESARI, avocat au barreau de NICE





DEFENDEUR



Monsieur [E] [Y] [...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11 référés

ORDONNANCE DE REFERE

du 11 Mars 2024

N° 2024/024

Rôle N° RG 24/00066 - N° Portalis DBVB-V-B7I-BMRZJ

[N] [U] [B] ÉPOUSE [G]

C/

[E] [Y] [P]

Copie exécutoire délivrée

le : 11 Mars 2024

à :

Me Valentin CESARI, avocat au barreau de NICE

Me Mireille DAMIANO, avocat au barreau de NICE

Prononcée à la suite d'une assignation en référé en date du 02 Février 2024.

DEMANDERESSE

Madame [N] [U] [B] ÉPOUSE [G], demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Valentin CESARI, avocat au barreau de NICE

DEFENDEUR

Monsieur [E] [Y] [P], demeurant [Adresse 1]

comparant en personne, assisté par Me Mireille DAMIANO, avocat au barreau de NICE

* * * *

DÉBATS ET DÉLIBÉRÉ

L'affaire a été débattue le 26 Février 2024 en audience publique devant

Colette DECHAUX, Présidente de chambre,

déléguée par ordonnance du premier président.

En application des articles 957 et 965 du code de procédure civile

Greffier lors des débats : Cyrielle GOUNAUD.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Mars 2024.

ORDONNANCE

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Mars 2024.

Signée par Colette DECHAUX, Présidente de chambre et Caroline POTTIER, adjointe administrative faisant fonction de greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Par jugement en date du 14 novembre 2023, assorti de l'exécution provisoire, le conseil de prud'hommes de Nice, a, notamment, condamné Mme [N] [U] [B] veuve [G] [l'employeur] à verser à M. [E] [Y] [P] [le salarié] les sommes de:

* 33 035.16 euros nets à titre de rappel de salaires pour la période du 1er février 2020 au 1er février 2023,

* 12 267 euros nets au titre de l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L.8223-1 du code du travail,

* 20 000 euros nets à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral résultant de l'atteinte à la vie privée et familiale,

* 50 000 euros nets à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral résultant de l'emprise subie au long de la relation de travail et pour exécution déloyale du contrat de travail,

* 4 089 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, et 408.90 euros bruts au titre de l'indemnité de congés payés y afférente,

* 4 216.78 euros nets au titre de l'indemnité de licenciement,

* 16 356 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 5 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour procédure de licenciement vexatoire,

* 3 816.40 euros bruts à titre de rappel de salaire sur la période du 1er mars 2023 au 26 mai 2023, et 381.64 euros bruts au titre de l'indemnité de congés payés y afférente,

* 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'employeur a relevé appel de ce jugement par déclaration d'appel en date du 12 décembre 2023.

Par acte du commissaire de justice en date du 2 février 2024, l'employeur a fait assigner, devant le premier président de cette cour, le salarié en sollicitant la suspension de l'exécution provisoire des condamnations prononcées par le conseil de prud'hommes de Nice et en sollicitant sa condamnation au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Par conclusions visées par le greffier le 26 février 2024, oralement soutenues à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, l'employeur maintient l'intégralité de ses demandes et prétentions.

Par conclusions visées par le greffier le 26 février 2024, reprises oralement à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, le salarié nous demande de débouter son employeur de l'ensemble de ses demandes et prétentions et de le condamner au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

Exposé des moyens des parties:

Se fondant uniquement sur les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile et l'article 6 § 1er de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, l'employeur invoque une motivation insuffisante du jugement pour répondre à toutes les prétentions juridiques et factuelles des parties et la partialité ressortant de l'analyse des moyens à géométrie variable selon qu'ils émanent de l'une ou l'autre des parties.

Il ajoute avoir fait des observations sur la situation financière et patrimoniale particulièrement difficile dans laquelle la placerait une décision faisant droit aux demandes exorbitantes du salarié, sans que les premiers juges y ait répondu, et invoque que l'exécution provisoire portant sur une somme de 152 370.88 euros, ses moyens ne lui permettent pas de l'acquitter, même provisoirement alors que ses conséquences pécuniaires seraient difficilement récupérables si le montant des condamnations venait à être réduit.

Il argue également de la violation de l'article 4 du code de procédure civile pour soutenir que les premiers juges ont ajouté une demande à celles formulées par les parties en présence en décidant que le jugement devait être transmis au procureur de la République de Nice en se fondant sur l'article 40 du code de procédure pénale.

Le salarié réplique que le moyen tiré du défaut de motivation est inopérant et qu'en réalité l'appelante se plaint des conclusions tirées par les premiers juges de l'examen des éléments qui leur étaient soumis, et que si partialité il y avait, elle aurait dû inscrire un appel nullité ce qu'elle n'a pas fait.

Il objecte l'insuffisance des pièces produites par l'appelante au soutien de son moyen tiré des conséquences manifestement excessives et difficilement réparables de l'exécution provisoire, soutenant au contraire que son patrimoine immobilier demeure conséquent.

Il invoque les difficultés auxquelles il est confronté qu'il lui impute et souligne que les salaires, préavis et indemnité de licenciement ne lui ont pas été payés, alors qu'étant sans carte vitale, il ne peut trouver un emploi.

Réponse:

- concernant la suspension de l'exécution provisoire de droit:

Aux termes de l'article 514-3 alinéa 1 du code de procédure civile, en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.

Les deux conditions posées par l'article 514-3 alinéa 1 précité sont cumulatives.

Il résulte des conclusions déposées et soutenues par l'employeur à l'audience du 12 septembre 2023 du conseil de prud'hommes, qu'il a demandé à cette juridiction, sur le fondement de l'article 514-1 alinéa 1er du code de procédure civile, d'écarter l'exécution provisoire de droit.

Les premiers juges, sans statuer spécifiquement sur le rejet de prétention, ont ordonné l'exécution provisoire de leur décision.

Toutefois, il résulte de l'article 514-1 du code de procédure civile que le juge peut écarter, par décision spécialement motivée, l'exécution provisoire de droit, en tout ou partie, lorsqu'il estime qu'elle est incompatible avec la nature de l'affaire, alors qu'ils ont considéré au contraire que l'exécution provisoire devait être ordonnée, ce qui n'impliquait pas une motivation spéciale.

L'appelante est donc mal fondée à soutenir que les premiers juges n'ont pas répondu à sa prétention, l'ayant explicitement déboutée dans le dispositif de leur décision de l'ensemble de ses demandes.

Le jugement entrepris est motivé, en droit comme en fait et il appartient au juge du fond de se prononcer sur l'analyse faite par les juges prud'homaux des moyens et éléments versés aux débats.

Contrairement à ce qu'allègue l'appelante, les juges prud'homaux ne se sont pas limités, pour requalifier le contrat de travail non écrit à temps plein, à l'examen des attestations produites par le salarié, en ce que poursuivant l'analyse des 'éléments de preuve apportés par les deux parties', ils ont relevé 'l'absence de preuve de l'existence et de la remise au salarié d'un quelconque tableau de service prévoyant par avance ses horaires de travail ainsi que la répartition de son temps de travail entre les jours de la semaine' ce qui rend inopérant le grief de partialité allégué, et l'examen critique de leur motivation ne peut l'être dans le cadre de la présente procédure.

Il résulte des dispositions de l'article R.1454-28 alinéa 2 du code du travail que l'exécution provisoire de droit concerne notamment le paiement de sommes au titre des rémunérations et indemnités mentionnées au 2° de l'article R.1454-14, dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire. Cette moyenne est mentionnée dans le jugement et l'article R.1454-14 2° liste:

a) les salaires et accessoires du salaire ainsi que les commissions,

b) les indemnités de congés payés, de préavis et de licenciement,

c) l'indemnité compensatrice et de l'indemnité spéciale de licenciement en cas d'inaptitude médicale consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle mentionnées à l'article L. 1226-14,

e) l'indemnité de fin de contrat prévue à l'article L. 1243-8 et de l'indemnité de fin de mission mentionnée à l'article L. 1251-32.

L'exécution provisoire de droit ne peut donc concerner en l'espèce que les condamnations au paiement de rappel de salaires et indemnités de congés payés y afférentes à l'indemnité compensatrice de préavis et congés payés y afférents, et à l'indemnité compensatrice de licenciement, qui totalisent la somme de 45 947.88 euros.

Il résulte de la décision frappée d'appel que le salaire brut mensuel a été fixé à 2 044.50 euros, soit 1 594.71 euros nets mensuels, les condamnations ainsi prononcées étant chiffrées tantôt en brut, tantôt en net.

Pour autant, la condamnation au rappel de salaire sur la période du 1er février 2020 au 1er février 2023 fixée en net (33 035.16 euros), excède à elle seule le montant de l'exécution de droit qui totalise en net 14 352.39 euros (1 594.71 x 9).

La demanderesse à l'arrêt de l'exécution provisoire de droit ne rapporte pas la preuve qui lui incombe que le montant sur lequel celle-ci peut porter serait de nature à engendrer des conséquences manifestement excessives, pour justifier uniquement de son avis d'imposition sur le revenu au titre de l'année 2022, dont il résulte que si elle a déclaré des pensions, retraites ou rentes pour un montant de 5 476 euros, elle a également perçu des revenus de locations meublées pour un montant de 6 256 euros, et de capitaux mobiliers (201 euros).

Elle ne justifie ni de la situation de ses comptes bancaires, et spécialement des capitaux placés, ni de son patrimoine immobilier, alors que les éléments versés aux débats par le salarié, établissent qu'en 2023 elle est propriétaire de plusieurs biens immobiliers particulièrement bien situés à [Localité 2], et était titulaire, avec son époux, dans une banque monégasque en 2015 d'un compte avec un avoir supérieur à 500 000 euros, qu'elle ne justifie nullement avoir clôturé.

La circonstance que le salarié soit dans une situation précaire en France est inopérante à caractériser à elle seule un risque d'insolvabilité en cas d'infirmation du jugement pour les condamnations relevant de l'exécution provisoire de droit.

La demanderesse est par conséquent mal fondée en sa prétention d'arrêt de l'exécution de droit.

- concernant l'exécution provisoire ordonnée:

Selon l'article 517-1 du code de procédure civile, lorsque l'exécution provisoire a été ordonnée, elle ne peut être arrêtée, en cas d'appel, que par le premier président et dans les cas suivants:

1° Si elle est interdite par la loi,

2° Lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation de la décision et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives, dans ce dernier cas, le premier président peut aussi prendre les mesures prévues aux articles 517 et 518 à 522.

Le montant cumulé des condamnations prononcées concerné par l'exécution provisoire ordonnée s'élève à environ 138 00 euros.

La demanderesse a omis de distinguer dans ses conclusions, les condamnations relevant de l'exécution provisoire de droit de celle relevant de l'exécution provisoire ordonnée, comme de conclure au regard des dispositions du code de procédure civile les régissant. Ces moyens doivent donc être considérés communs.

La condition tenant à l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation du jugement entrepris tiré d'un manque d'impartialité, n'est pas caractérisée, ainsi que déjà retenu, les premiers juges ayant à l'issue de l'examen des éléments soumis à leur appréciation requalifié le contrat de travail à temps plein.

La circonstance qu'ils aient ensuite retenu l'existence d'un travail dissimulé et également ordonné la communication de leur décision au procureur de la République, est inopérante à établir le grief de partialité allégué.

Les dispositions des articles 515 à 517 du code de procédure civile ne subordonnent pas l'exécution provisoire dite facultative à une motivation spéciale.

Faute pour la demanderesse de justifier réellement de sa situation patrimoniale, elle n'établit pas que l'exécution provisoire ordonnée caractérise l'existence d'un risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

La demanderesse qui ne sollicite pas un aménagement de l'exécution provisoire ordonnée sur le fondement de l'article 521 du code de procédure civile et ne propose aucune garantie, n'est pas fondée à alléguer que la décision frappée d'appel serait à coup sûr génératrice de conséquences pécuniaires difficilement réparables a postérori.

Succombant dans ses demandes la demanderesse doit être condamnée aux dépens et ne peut utilement solliciter le bénéfice des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Il serait inéquitable de laisser à la charge du salarié les frais qu'il a été contraint d'exposer pour sa défense, ce qui justifie l'octroi de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

- Déboutons Mme [N] [U] [B] veuve [G] de l'ensemble de ses prétentions,

- Condamnons Mme [N] [U] [B] veuve [G] à payer à M. [E] [Y] [P] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamnons Mme [N] [U] [B] veuve [G] aux dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-11 référés
Numéro d'arrêt : 24/00066
Date de la décision : 11/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-11;24.00066 ?
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