COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-1
ARRÊT AU FOND
DU 08 MARS 2024
N° 2024/67
Rôle N° RG 21/02044 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BG5YY
[O] [L]
C/
S.E.L.A.R.L. CABINET DENTAIRE [4]
Copie exécutoire délivrée le :
08 MARS 2024
à :
Me Katell MADEC, avocat au barreau de MARSEILLE
Me Lauriane BUONOMANO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 26 Janvier 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 19/01187.
APPELANTE
Madame [O] [L], demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Katell MADEC, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEE
S.E.L.A.R.L. CABINET DENTAIRE [4] pris en la personne de son représentant légal en exercice domicilié es qualité audit siège, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Lauriane BUONOMANO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Janvier 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseillère, chargée du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Mme Véronique SOULIER, Présidente
Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseillère
Mme Emmanuelle CASINI, Conseillère
Greffier lors des débats : Monsieur Kamel BENKHIRA
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Mars 2024.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Mars 2024
Signé par Madame Véronique SOULIER, Présidente et Monsieur Kamel BENKHIRA, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Mme [O] [L] a été engagée par la SELARL CABINET DENTAIRE [4] suivant contrat de travail à durée indéterminée du 2 mars 2018 en qualité d'assistante dentaire qualifiée.
Le 4 février 2019, Mme [L] a été en arrêt de travail pour cause de maladie.
Le 21 février 2019, Mme [L] a été convoquée à un entretien préalable à un licenciement économique prévu le 4 mars 2019 et qui a été reporté au 6 mars 2019, à la demande de la salariée.
Mme [L] a adhéré au contrat de sécurisation professionnelle le 13 mars 2019.
Le 15 mars 2019, la SELARL CABINET DENTAIRE [4] a adressé un courrier à Mme [L] en ces termes :
« Par un courrier du 21/02/2019 , nous vous avions régulièrement convoqué un entretien préalable à licenciement, initialement fixé au 4 mars 2019 et reporté, à votre demande au 6 mars 2019, auquel vous ne vous êtes pas rendue.
Nous vous informons ce jour de notre décision de vous licencier pour le motif économique suivant dans les conditions posées à l'article L.1233-3 du code du travail:
Notre cabinet a dû faire face, suite au départ d'un dentiste, d'une forte chute d'activité, nous contraignant à réduire les charges du cabinet.
De ce fait, et dans le but de préserver la compétitivité du cabinet, nous avons pris la décision de supprimer des postes d'assistantes dentaires et de prothésistes dentaires.
Eu égard votre faible ancienneté, nous avons pris la décision de supprimer votre poste d'assistante dentaire.
En dépit des recherches que nous avons effectuées au sein du cabinet, conformément à l'article L.1233-4 du code du travail, nous n'avons pas trouvé de poste de reclassement.
En raison de votre absence à l'entretien préalable, nous vous avons fait parvenir par courrier le 6 mars 2019 (LR AR 1A 126099 1513 5) l'information et les documents pour bénéficier du contrat de sécurisation professionnelle.
Nous vous rappelons que vous avez un délai de 21 jours, à compter de sa réception ( le 08/08/19), pour nous faire connaître votre décision, le défaut de réponse, à l'issue de ce délai, valant refus d'adhésion.
Compte tenu de ce délai, votre réponse devra nous parvenir au plus tard le 29 Mars 2019.
Dans l'attente de votre décision, nous vous notifions votre licenciement pour motif économique.
Si vous adhérez finalement au contrat de sécurisation professionnelle, la présente lettre sera nulle et votre contrat sera rompu d'un commun accord.».
Par requête reçue le 10 mai 2019, Mme [L] a saisi le conseil de prud'hommes de Marseille aux fins de contester son licenciement et de demander le paiement de rappels de salaire.
Par jugement du 26 janvier 2021, le conseil de prud'hommes a :
- condamné la SELARL CABINET DENTAIRE [4] à payer à Mme [L] les sommes suivantes :
* 94,52 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la journée du 29 janvier 2019.
* 9,45 euros bruts à titre de congés payés y afférent.
* 94,52 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la journée du 29 mars 2019.
* 9,45 euros bruts à titre de congés payés y afférent.
* 900 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- débouté Mme [L] du surplus de ses demandes.
- débouté la SELARL CABINET DENTAIRE [4] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- condamné le défendeur aux entiers dépens.
Suivant déclaration d'appel du 11 février 2021, Mme [L] a interjeté appel de ce jugement.
Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 23 novembre 2023, elle demande à la cour de :
- juger Mme [L] recevable et bien fondée en son appel.
- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Marseille en ce qu'il a :
Jugé que le licenciement de Mme [L] repose sur une cause réelle et sérieuse et débouté Mme [L] de ses demandes à ce titre.
Débouté Mme [L] de sa demande de paiement de trois tickets restaurant dus au titre du mois de janvier 2019.
Débouté Mme [L] de sa demande de paiement d'heures supplémentaires.
Débouté Mme [L] de sa demande de régularisation des documents de fin de contrat et du solde de tout compte.
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Marseille en ce qu'il a condamné la SELARL CABINET DENTAIRE [4] au paiement de la somme de :
* 94,52 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la journée du 29 janvier 2019.
* 9,45 euros bruts à titre de congés payés y afférent.
* 94,52 euros bruts à titre de rappels de salaire pour la journée du 29 mars 2019.
* 9,45 euros bruts à titre de congés payés y afférent.
* 900 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Statuant à nouveau :
- juger que le salaire de référence de Mme [L] est de 2.583,65 euros bruts.
- juger que la rupture de son contrat de travail est sans cause réelle et sérieuse.
Et en conséquence :
- condamner la SELARL CABINET DENTAIRE [4] au paiement de :
* un mois de salaire soit la somme de 2.583,65 euros bruts à titre d'indemnité de préavis.
* la somme de 258,37 euros brut à titre de congés payés afférents.
* la somme de six mois de salaire soit la somme de 15.502 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et, à tout le moins, la somme de 5.167,30 euros (deux mois de salaire bruts) à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
- condamner la SELARL CABINET DENTAIRE [4] au paiement de la somme de 5,10 euros nets (part patronale) x3, soit 15,30 euros nets au titre des tickets restaurant.
- condamner la SELARL CABINET DENTAIRE [4] au paiement de la somme de 16,075 x 17 heures soit 273,28 euros bruts outre les congés payés afférents au titre des heures supplémentaires.
- ordonner à la SELARL CABINET DENTAIRE [4] la régularisation de ses documents de fin de contrat qui devront faire état d'une rupture au 30 mars 2019.
- condamner la SELARL CABINET DENTAIRE [4] au paiement de la journée du 29 mars 2019 qui ne lui a pas été injustement payée, soit la somme de 94,52 euros bruts, outre les congés payés afférents.
- condamner la SELARL CABINET DENTAIRE [4] au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
- assortir toutes ces sommes des intérêts de droit à compter de la saisine du conseil de prud'hommes.
Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 1er décembre 2023, la SELARL CABINET DENTAIRE [4] demande à la cour de :
- débouter Mme [L] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions.
- confirmer le jugement rendu le 26 janvier 2021 par le conseil de prud'hommes de Marseille en ce qu'il a jugé régulier et fondé le licenciement de Mme [L]; à défaut, minorer à une somme purement symbolique le montant des dommages-intérêts à lui octroyer de ce chef.
- juger que Mme [L] a bien eu connaissance, en toutes hypothèses, des motifs de son licenciement avant la signature de son contrat de sécurisation professionnelle.
- confirmer le jugement rendu le 26 janvier 2021 par le conseil de prud'hommes de Marseille en ce qu'il a débouté Mme [L] de ses demandes suivantes : rappel au titre du paiement de trois tickets restaurant, rappel de salaire des journées du 25 juillet 2018 et 15 août 2018, paiement de cinq jours de RTT, paiement des heures supplémentaires, paiement de dommages-intérêts pour travail dissimulé, demande de régularisation des documents de fin de contrat et du solde de tout compte.
- juger au besoin, que la SELARL CABINET DENTAIRE [4] n'a commis aucun manquement au titre des points précités et qu'aucune somme ne saurait être due de ces chefs.
- infirmer le jugement rendu le 26 janvier 2021 par le conseil de prud'hommes de Marseille en ce qu'il a condamné la SELARL CABINET DENTAIRE [4] à verser à Mme [L] les sommes suivantes :
*94,52 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la journée du 29 janvier 2019.
* 9,45 euros bruts à titre de congés payés y afférent.
* 94,52 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la journée du 29 mars 2019.
* 9,45 euros bruts à titre de congés payés y afférent.
* 900 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Et, statuant de nouveau :
- juger qu'aucune somme ne saurait être due au titre de la journée du 29 janvier 2019 et de la journée du 29 mars 2019.
- juger qu'aucune somme ne saurait être due au titre des dépens de première instance et au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance.
En toutes hypothèses :
- condamner Mme [L], outre aux entiers dépens de première instance et d'appel ceux-ci distrait au profit de la SELEURL Lauriane BUONOMANO (Me Lauriane BUONOMANO) sur son affirmation de droit, à verser à CABINET DENTAIRE [4] la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
I. Sur les demandes relatives à l'exécution du contrat de travail
Sur la demande en paiement de trois tickets restaurant du mois de janvier 2019
Mme [L] soutient qu'au mois de janvier 2019, elle a travaillé 13 jours et n'a perçu que 10 tickets restaurant. Elle demande le paiement de la somme de 15,30 euros correspondant à la part patronale (soit 3x 5,10 euros).
La SELARL CABINET DENTAIRE [4] soutient que Mme [L] n'a travaillé que 10 jours au mois de janvier 2019.
* * *
Il ressort des écritures des parties que sont contestées les journées des 7, 8 et 29 janvier 2019 pour lesquelles Mme [L] soutient avoir travaillé et avoir droit au bénéfice de tickets restaurant.
Il ressort du planning produit par la SELARL CABINET DENTAIRE [4] que jusqu'au samedi 5 janvier 2019, Mme [L] est mentionnée en position de congés payés. Le 7 janvier 2019, il est bien indiqué qu'elle a repris son travail et a assisté à une journée de séminaire et qu'elle a travaillé le 8 janvier.
Concernant la journée du 29 janvier 2019, il est indiqué que Mme [L] n'a pas travaillé que l'après-midi ce qui est confirmé par l'échange de 'sms' de sorte qu'il doit être considéré que le horaires de travail de la salarié recoupaient la plage dédiée au déjeuner.
Dans ces conditions, par infirmation du jugement, il convient de condamner la SELARL CABINET DENTAIRE [4] à payer à Mme [L] la somme de 15,30 euros.
Sur les heures supplémentaires
En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments, après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties. Dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
Mme [L] sollicite le paiement de dix-sept heures qui correspond aux heures supplémentaires effectuées sur le seul mois d'avril 2018, soit la somme de 273,28 euros bruts, outre les congés payés afférents.
Mme [L] produit un message (sms) d'avril 2018 qui indique : 'coucou, je te transmets les heures supp du mois d'avril. Mardi 3/04 10mn de pause départ soir 19h20 soit 40 mn + 30 mn = 1h10 mn
Samedi 7 : journée complète soir 8h20 18h40 total 9h10
Lundi 09/04 pas de récupération partie à 19h soit 15min,
Mardi 10/04 dej à 16h10 pause de 15 min départ à 19H00 (doit 25mn + 15mn) = 40 mn
vendredi 13/04 arrivée à 7h40 (40 mn) pause en 15mn 40min + 50 min = 1h30
Mardi 17 avril départ le soir à 19h05 soit 20 min
Jeudi 19 avril départ à 19h05 soit 20 min
Jeudi 26 avril Départ du cabinet à 19h35 soit 55 min
Total du d'avril 16h (sans le vendredi 27 et lundi 30)'.
Mme [L] présente des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'elle prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
La SELARL CABINET DENTAIRE [4] fait valoir que Mme [L] n'apporte la moindre preuve de l'effectivité des heures supplémentaires alléguées; que les bulletins de salaire attestent que toutes les heures ont été réglées; que le 'sms' versé aux débats ne prouve pas que Mme [L] aurait effectué plus que les 25 heures supplémentaires payées et qu'il n'est pas justifié que Mme [L] ait respecté la procédure pour déclarer ses heures supplémentaires.
* * *
Au vu des pièces produites, il convient de relever que Mme [L] invoque des heures supplémentaires effectuées au mois d'avril 2018, soit un total qu'elle comptabilise à 16 heures. Or, il ressort du bulletins de salaire du mois d'avril 2018 que Mme [L] a été réglées à hauteur de 25,22 heures supplémentaires, ce qui établit qu'elle a bien été remplie de ses droits à hauteur de sa réclamation. La demande sera donc rejetée et le jugement confirmé sur ce point.
Sur la demande en paiement des journées des 29 janvier 2019 et 29 mars 2019
Alors que Mme [L] demande la confirmation des dispositions du jugement qui ont fait droit à ses demandes, la SELARL CABINET DENTAIRE [4] en demande l'infirmation.
* * *
Il ressort des éléments du débat que le 24 janvier 2019, Mme [L] a présenté une demande d'absence pour la journée du 29 janvier 2019 de 14h30 à 18h heures au motif de la réalisation d'un examen médical obligatoire lié à sa grossesse, demande qui a été acceptée par l'employeur. L'échange de 'sms' (pièce 42) confirme que Mme [L] a été absente uniquement l'après-midi et a travaillé le matin.
S'agissant de l'un des examens médicaux obligatoires à l'occasion d'une maternité, l'absence de la salarié ne doit pas entraîner de diminution de la rémunération.
Or, il ressort du bulletin de salaire du mois de janvier 2019 que l'employeur a déduit une journée de salaire concernant, le 29 janvier 2019.
Dans ces conditions, la demande de Mme [L] est fondée et le jugement sera confirmé de ce chef.
Par ailleurs, il ressort de la lettre de licenciement que l'information et les documents pour bénéficier du contrat de sécurisation professionnelle ont été réceptionnés par la salariée le 8 mars 2019. Ainsi, le délai de réflexion de 21 jours expirait le 29 mars inclus et le contrat de travail a été rompu le 30 mars 2019. Or, il ressort du bulletin de salaire du mois de mars 2019 que la journée du 29 août n'a pas été rémunérée par l'employeur. La demande est fondée et le jugement sera confirmé de ce chef.
II. Sur la rupture du contrat de travail
Mme [L] fait valoir qu'elle a accepté le contrat de sécurisation professionnelle le 13 mars 2019 - acceptation reçue par l'employeur le 14 mars 2019 - et qu'à la date de son acceptation, elle n'avait pas été informée des motifs de son licenciement qui lui ont été notifiés par voie d'huissier le 15 mars 2019, ce qui rend son licenciement sans cause réelle et sérieuse. Elle conteste avoir été destinataire par courrier du 6 mars 2019 des motifs de son licenciement et l'employeur ne rapporte pas la preuve d'avoir notifié le 6 mars 2019 les motifs économiques alors que la charge de la preuve lui incombe.
La SELARL CABINET DENTAIRE [4] conclut que, compte tenu du report de la date de l'entretien préalable et de l'absence de la salariée à l'entretien préalable, elle a envoyé à la salariée, par courrier RAR du 6 mars 2019, le contrat de sécurisation professionnelle mais également, comme la loi et la jurisprudence l'y autorisent, la note d'information comprenant les motifs justifiant son licenciement économique, comme l'indique le courrier du 15 mars qui énonce ' nous vous avons fait parvenir par courrier le 6 mars 2019 (LRAR 1A12609915135) l'information et les documents pour bénéficier du contrat de sécurisation professionnelle'. Ainsi, la SELARL CABINET DENTAIRE [4] soutient que Mme [L] avait parfaitement connaissance des motifs économiques de son licenciement au moment de la signature de son contrat de sécurisation professionnelle.
* * *
La rupture du contrat de travail résultant de l'acceptation par le salarié d'un contrat de sécurisation professionnelle doit avoir une cause économique réelle et sérieuse. L'employeur est en conséquence tenu d'énoncer la cause économique de la rupture du contrat soit dans le document écrit d'information sur ce dispositif remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement, soit dans la lettre qu'il est tenu d'adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d'envoi de la lettre de licenciement imposé par les articles L.1233-15 et L. 1233-39 du code du travail, soit encore, lorsqu'il n'est pas possible à l'employeur d'envoyer cette lettre avant l'acceptation par le salarié du contrat de sécurisation professionnelle, dans tout autre document écrit, porté à sa connaissance au plus tard au moment de son acceptation. A défaut, la rupture est dépourvue de cause réelle et sérieuse.
En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que, selon le bulletin d'acceptation et récépissé du document de présentation du contrat de sécurisation professionnelle (volet 3), Mme [L] a accepté le contrat de sécurisation professionnelle le 13 mars 2019.
La SELARL CABINET DENTAIRE [4], qui soutient qu'elle a informé la salariée de la cause économique de la rupture du contrat dans un courrier qu'elle a adressé le 6 mars 2019, ne produit pas ce courrier.
Mme [L] produit la lettre de transmission de ce courrier (pièce 9) qui indique :
'Objet: Document et récépissé du document de contrat de sécurisation professionnelle
Madame,
Suite à votre non-présentation à la convocation à l'entretien préalable à licenciement économique du mercredi 6 mars 2019 à 16h00 Nous vous faisons parvenir les documents relatifs au contrat de sécurisation professionnelle.
Nous vous demandons de bien vouloir vous retourner le récépissé du document du contrat de sécurisation professionnelle au cabinet dentaire [Adresse 2] à [Localité 5], (enveloppe timbrée jointe)', duquel il ne ressort pas la preuve de ce que la SELARL CABINET DENTAIRE [4] a bien informé la salariée de la cause économique de la rupture du contrat dans ce courrier.
De même, les mentions du courrier du 15 mars 2019 ne rapportent pas la preuve que l'information visait spécifiquement la cause économique de la rupture du contrat.
Or, il ressort du courrier du 15 mars 2019 que, dans ce document, la SELARL CABINET DENTAIRE [4] a porté à la connaissance de Mme [L] l'énoncé la cause économique de la rupture du contrat ('Nous vous informons ce jour de notre décision de vous licencier pour le motif économique suivant dans les conditions posées à l'article L. 1233-3 du code du travail'), soit postérieurement à l'acceptation par la salariée du contrat de sécurisation professionnelle.
Le licenciement est donc sans cause réelle et sérieuse. Le jugement doit donc être infirmé.
Il convient d'accorder à Mme [L] la somme de 2.583,65 euros à titre d'indemnité de préavis et la somme de 258,37 euros au titre des congés payés afférents.
En application des dispositions de l'article L1235-3 du code du travail, et compte tenu de son âge au moment de la rupture du contrat de travail (35 ans), de son ancienneté (un an ), de sa qualification, de sa rémunération (2.583,65 euros), des circonstances de la rupture et de la période de chômage qui s'en est suivie, d'une formation d'infirmière suivie à compter du 7 septembre 2020 et d'une absence d'actualisation de sa situation en cause d'appel, il convient d'accorder à Mme [L] une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un montant de 5.000 euros.
La remise d'une attestation pôle emploi, d'un certificat de travail et d'un bulletin de salaire rectificatif conformes à la teneur du présent arrêt s'impose.
Sur les intérêts
Les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation soit à compter du 14 mai 2019. Les créances indemnitaires produiront des intérêts au taux légal à compter présent arrêt .
Sur l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens
Les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront confirmées et il est équitable de condamner la SELARL CABINET DENTAIRE [4] à payer à Mme [L] la somme de 1.500 € au titre des frais non compris dans les dépens qu'elle a engagés en cause d'appel.
Les dépens d'appel seront à la charge de la SELARL CABINET DENTAIRE [4], partie succombante par application de l'article 696 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile et en matière prud'homale,
Confirme le jugement déféré sauf en ses dispositions ayant rejeté la demande la demande en paiement de tickets restaurant, la demande tendant à dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, la demande en paiement d'une indemnité de préavis, des congés payés afférents et d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la demande au titre des intérêts et la demande de remise des documents de fin de contrat,
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,
Dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,
Condamne la SELARL CABINET DENTAIRE [4] à payer à Mme [O] [L] les sommes de :
- 15,30 euros au titre des tickets restaurant,
- 2.583,65 euros à titre d'indemnité de préavis,
- 258,37 euros au titre des congés payés afférents,
- 5.000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Dit que les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter du 14 mai 2019 et que créances indemnitaires produiront des intérêts au taux légal à compter présent arrêt,
Ordonne la remise par la SELARL CABINET DENTAIRE [4] à Mme [O] [L] d'une attestation pôle emploi, d'un certificat de travail et d'un bulletin de salaire rectificatif conformes à la teneur du présent arrêt,
Y ajoutant,
Condamne la SELARL CABINET DENTAIRE [4] à payer à Mme [O] [L] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
Condamne la SELARL CABINET DENTAIRE [4] aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE