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08/03/2024 | FRANCE | N°19/18132

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 08 mars 2024, 19/18132


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3



ARRÊT AU FOND



DU 08 MARS 2024



N°2024/ 54





RG 19/18132

N° Portalis DBVB-V-B7D-BFG5D







[K] [N]





C/



Association PROVENCE PROMOTION























Copie exécutoire délivrée

le 08 Mars 2024 à :



- Me Antoine LOUNIS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

V157



- Me Jean MARTINEZ, avoca

t au barreau de MARSEILLE











Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 31 Octobre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° F 17/00251.







APPELANT



Monsieur [K] [N], demeurant [Adresse 1]

...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 08 MARS 2024

N°2024/ 54

RG 19/18132

N° Portalis DBVB-V-B7D-BFG5D

[K] [N]

C/

Association PROVENCE PROMOTION

Copie exécutoire délivrée

le 08 Mars 2024 à :

- Me Antoine LOUNIS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

V157

- Me Jean MARTINEZ, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 31 Octobre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° F 17/00251.

APPELANT

Monsieur [K] [N], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Antoine LOUNIS de la SELARL ERGASIA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Sandrine MATHIEU, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

Association PROVENCE PROMOTION, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Jean MARTINEZ, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Octobre 2023 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, et Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant, chargées du rapport.

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre

Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant

Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Janvier 2024, délibéré prorogé en raison de la survenance d'une difficulté dans la mise en oeuvre de la décision au 23 Février 2024, puis au 8 Mars 2024.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE

Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Mars 2024.

Signé par Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * * * * * * *

FAITS ET PROCÉDURE

M. [K] [N] était engagé par l'association Provence Promotion à compter du 1er janvier 2013 en qualité de « directeur prospection internationale », statut cadre, selon contrat à durée indéterminée à temps plein.

La convention collective nationale applicable était celle des statuts des personnels des organismes de développement économique.

Il occupait à compter du 25 septembre 2015 les fonctions de « directeur stratégie et développement » moyennant un salaire mensuel brut de 6 710,93 €.

M. [N] était convoqué le 20 juin 2016 à un entretien préalable à une mesure de licenciement fixé au 27 juin 2016. Il était licencié pour licenciement économique par courrier du 6 juillet 2016.

Il saisissait le 7 février 2017 le conseil de prud'hommes de Marseille en contestation du licenciement et en paiement d'indemnités.

Par jugement du 31 octobre 2019 le conseil de prud'hommes a statué comme suit :

« Déboute [K] [N] de l'ensemble de ses demandes,

Déboute l'Association Provence Promotion de sa demande reconventionnelle

Dit que les dépens éventuels seront partagés par moitié entre les parties ».

Par acte du 27 novembre 2019, le conseil de M. [N] a interjeté appel de cette décision.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 26 février 2020, M. [N] demande à la cour de :

«Dire Monsieur [N] bien fondé en son appel.

Infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 31 octobre 2019 par la Section Encadrement » du Conseil de Prud'hommes de Marseille.

Dire le licenciement litigieux dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Condamner en conséquence l'Association Provence Promotion au paiement des sommes suivantes :

- 190 006,00 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, en application des dispositions de l'article L.1235-3 du Code du Travail,

- 3 000,00 € à titre d'indemnité sur 1e fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile

Condamner l'intimée aux dépens ».

Dans ses dernières écritures communiquées au greffe par voie électronique le 3 juillet 2020, l'association Provence Promotion demande à la cour de :

« Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

Dit que le motif économique est fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

Dit que l'Association a rempli son obligation de reclassement ;

Débouté Monsieur [K] [N] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions;

A titre subsidiaire, si votre Cour venait à infirmer le jugement et considérer que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, elle jugerait que les demandes de l'appelant sont excessives et les ramènerait à des considérations plus raisonnables en limitant la condamnation de l'Association la somme de 40.265,58 euros (6 mois de salaire) ;

Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté l'Association de sa demande reconventionnelle de 2.000€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Et, statuant à nouveau, condamner Monsieur [K] [N] à payer à l'Association la somme de 2.000€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour la première instance;

Condamner Monsieur [K] [N] à payer à l'Association la somme de 2.000€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens pour l'instance d'appel ».

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs écritures susvisées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I) Sur l'obligation du reclassement

Le salarié reproche au premier juge de s'être satisfait de la proposition faite par l'employeur en exécution de son obligation substantielle de manière loyale et exhaustive.

Il soutient qu'avant tout licenciement pour motif économique, l'employeur doit rechercher les voies de reclassement permettant de préserver autant que possible des éléments essentiels du contrat de travail et que l'association n'a pas respecté cette obligation, puisque la proposition à ce titre était inacceptable et que cette dernière s'est bornée à produire six courriers relatifs à cette recherche prétendue, seule la réponse d'ITER étant produite.

L'association objecte que, dès le mois de mai 2016, elle a recherché activement des postes de reclassement auprès de ses cinq structures partenaires, qu'aucun emploi relevant de la même catégorie que celui occupé, ni aucun emploi équivalent ne s'est avéré disponible et qu'il a été proposé à M. [N] un poste qu'il a refusé. Elle souligne qu'elle est allée au-delà de ses obligations légales en ayant recours aux services d'un cabinet d'out-placement afin d'accompagner le salarié dans ses démarches de reconversion et de recherche d'emploi postérieure.

Par application de l'article L.1233-4 du code du travail dans sa version applicable au litige, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré que sur les emplois disponibles situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie.

Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. À défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure.

Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.

Le reclassement doit en outre être recherché avant la décision de licenciement au sein de la société comme au sein des organismes avec lesquels la permutabilité du personnel est possible et l'employeur doit s'expliquer sur la permutabilité et ses éventuelles limites, au regard des activités ou de l'organisation, ou du lieu d'exploitation.

Cette recherche de reclassement qui est une obligation de moyen dite 'renforcée' doit être mise en 'uvre de façon loyale et personnalisée sur des postes disponibles et existants.

En l'espèce, il s'avère que l'association ne disposait pas en interne d'un poste relevant de la même catégorie que celle du salarié et avec la même rémunération, les trois postes de direction ayant été supprimés. Il a été proposé au salarié conformément au texte précité le seul poste disponible au sein de l'association, soit celui de responsable administratif et financier qui a été refusé par le salarié (pièces intimée 7 et appelant 7).

L'association a en outre passé le 29 juin 2016 un contrat de prestation de services, prestations de transition de carrière et d'out-placement avec la société BPI afin « d'accompagner les trois salariés de Provence Promotion conformément à la proposition commerciale annexée au présent contrat ». Ce contrat concernait trois salariés dont M. [N], lequel a refusé d'adhérer à cette aide.

S'agissant du reclassement externe, l'association qui est une agence de développement économique des territoires a limité son périmètre de reclassement à 5 entités permettant la permutabilité du personnel en fonction des liens institutionnels les unissant ou dont l'activité était similaire à la sienne. Elle a interrogé la CCI de [Localité 4], le Conseil Départemental qui sont ses interlocuteurs privilégiés, le CNER (fédération regroupant les agences de développement ), l'ARII (agence régionale pour l'innovation et l'internationalisation ) et l'ANIMA INVESTMENT NET WORK ( réseau international de développement économique) qui exercent dans le même champ d'action. L'association a également contacté l'agence ITER ne relevant pas du groupe de reclassement commun, afin d'augmenter les possibilités de reclassement externe et en raison des liens existants entre les directeurs des deux structures, ce qui démontre qu'elle a effectué des recherches loyales.

Elle a adressé un courrier personnalisé le 18 mai 2016 aux 5 directeurs généraux des organismes concernés afin de connaître « s'il existait au sein de sa structure des emplois vacants susceptibles de permettre le reclassement des salariés dont vous trouverez le profil en annexe ». Il est observé que sur certains courriers, le directeur général de l'association M. [P], a pris la peine de mentionner les prénoms des directeurs généraux et la formule de politesse d'usage à la main attestant de l'attention portée à la demande.

Le profil professionnel de M. [N] est développé de manière précise dans l'annexe avec notamment son expérience et ses compétences (pièce intimée 5).

La réponse du directeur général d'ITER Organisation proposant de « transmettre des informations développées dans le courrier à M. [N] et [E] afin de leur permettre de postuler aux offres de postes qui correspondraient le mieux à leurs compétences et également de s'enregistrer aux alertes d'emploi correspondant à leur profil » atteste que les courriers ont bien été transmis aux destinataires sans que l'absence des courriers en réponse des autres organismes ne puisse être opposée à l'association (pièce intimée 5 et 13).

En conséquence, le jugement entrepris doit être confirmé sur ce point, l'association ayant satisfait de façon sérieuse et loyale à son obligation de reclassement .

II) Sur la cause économique du licenciement

En vertu des dispositions de l'article L.1232-6 du Code du travail, la lettre de licenciement comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur ; la motivation de cette lettre fixe les limites du litige.
 

En l'espèce, la lettre de licenciement était libellée dans les termes suivants :

'Faisant suite à notre entretien du 27juin 2016, nous vous notifions, par la présente, votre licenciement pour motif économique.

Nous vous rappelons les motifs conduisant à votre licenciement, qui caractérisent une nécessité de sauvegarde de compétitivité au sens de la jurisprudence applicable aux organismes non lucratifs.

Les agences de développement économique des territoires, dont fait partie Provence Promotion, font face à des mutations économiques et politiques qui impactent le niveau et la structure des subventions dont elles bénéficient et remettent en cause leur modèle économique.

]usqu'en 2010, Provence Promotion fonctionnait avec des ressources stables, un budget porté à 99% par la CCIMP et la Cour départemental et un effectif de 25personnes représentant alors 57% des charges totales.

A partir de l'année 2011, la CCIMP et la le conseil départemental ont progressivement réduit leurs subventions respectives afin de faire face à leurs propres contraintes budgétaires qui se sont par ailleurs aggravées depuis 2015. C'est dans ce contexte que la CCIMP et le conseil départemental ont réduit de 15% chacun leur subvention 2016, représentant pour l'association une perte de recettes de 468KC et créant un déficit. Par ailleurs, deux lois ont profondément modifié le cadre institutionnel dans lequel s'inscrit désormais l'action de l'association depuis le début de l'année 2016: la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles et surtout la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (loi NOTRe). Cette dernière loi a notamment supprimé la clause générale de compétence des départements, qui les autorisait notamment à intervenir dans le domaine économique.

C'est dans ce cadre que le financement de Provence Promotion par le conseil départemental des Bouches du Rhône ne sera plus possible à compter du budget de l'année 2017, entraînant une perte conséquente de ressources pour l'Agence.

Des démarches sont entreprises par la gouvernance de Provence Promotion pour demander à la Métropole Aix- Marseille Provence de se substituer au Département. Provence Promotion n'a cependant aucune visibilité ni certitude sur les proportions et le calendrier de cette substitution qui n'est pas automatique.

Rien ne permet d'envisager que le financement attendu de la Métropole sera supérieur à la subvention donnée en 2016 par le Département.

Le montant des ressources de Provence Promotion devrait donc se stabiliser au niveau de 2016.

Or, dans la configuration actuelle de l'association et au regard de sa structure de coûts, l'équilibre budgétaire de Provence Promotion n'est pas assuré, et ce, même en réduisant les dépenses d'actions externes à un niveau minimal.

La perte serait, en effet, de- 300 K€ en 2016 et de - 370 K€ en 2017.

Le déficit de la structure, face à une hypothèse relativement optimiste des recettes, est donc bien de nature structurelle.

C'est la raison pour laquelle un plan d'économie entraînant une réorganisation des postes de direction est nécessaire. Il est d'autant plus nécessaire que le soutien financier espéré de la métropole sera conditionné a la garantie d'une structure financière saine et pérenne.

Dans l'organisation actuelle, le poids des frais fixes ne laisse aucune marge à l'agence pour disposer du budget nécessaire pour ses actions de prospection et de promotion tout en résorbant le déficit budgétaire. Il faut, dès lors, redonner à l'association des marges de manoeuvre.

Les charges de personnel, charges et taxes incluses, représentent, en essai, 73% du budget en 2016, alors que les frais de fonctionnement n'en représentent que 17 % et les dépenses externes d'actions 19%.

ll est, dès lors, nécessaire de revoir l'organisation fonctionnelle, à savoir les 3 postes de direction fonctionnelle, dans une démarche de réduction des coûts fixes.

C'est dans ce contexte que nous avons été contraints de supprimer votre poste de Directeur Stratégie et Développement.

Les recherches de reclassement auprès d'organismes externes n'ont permis d'identifier aucun poste vacant; en revanche nous vous avons présenté le poste nouvellement créé de contrôleur de gestion/ responsable administratif au sein de notre organisme, que vous avez refusé.

Dans la mesure où la totalité de votre catégorie professionnelle est supprimée, il n'y a pas lieu de faire application des critères d'ordre des licenciements.

Nous vous informons que vous avez la faculté de demander la réunion de la Commission Paritaire nationale, qui a pour fonction de traiter les litiges nés de l'interprétation du statut CNER-UCCAR, en écrivant au CNER, [Adresse 2].

Nous vous rappelons que nous vous avons remis les documents relatifs au contrat de sécurisation professionnelle et que vous disposez, depuis cette date, à savoir le 27juin 2016, d'un délai de réflexion de 21 jours, Pour l'accepter ou la refuser (...) »

Le salarié reproche aux premiers juges d'avoir retenu la cause réelle et sérieuse au regard de la pérennité de l'association qui n'a jamais été en péril.

Il soutient qu'il a été embauché l'année 2013 qui a connu le pire résultat et qu'il a été licencié en 2016 alors que le résultat négatif de l'année précédente n'était que de 961 €, que le plan d'économie dans le cadre duquel son poste a été supprimé, a été contesté par les délégués du personnel lors de la réunion du 30 mars 2016.

En application de l'article L1233-3 du code du travail dans sa version antérieure au 1er décembre 2016, est constitutif d'un licenciement pour motif économique, le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non-inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ; lorsqu'une entreprise fait partie d'un groupe, les difficultés économiques de l'employeur doivent s'apprécier tant au sein de la société, qu'au regard de la situation économique du groupe de sociétés exerçant dans le même secteur d'activité, sans qu'il y ait lieu de réduire le groupe aux sociétés ou entreprises situées sur le territoire national ;

Indépendamment des difficultés économiques ou des mutations technologiques prévues par ce texte, la réorganisation de l'entreprise peut également constituer un motif de licenciement à condition toutefois qu'elle soit nécessaire pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ou celle du secteur d'activité du groupe dont l'entreprise fait partie.

Dans le cas d'une association la sauvegarde de la compétitivité doit s'entendre de la nécessité d'assurer sa pérennité au regard du strict équilibre entre les recettes et les dépenses.

Le caractère réel et sérieux du motif économique doit être apprécié à la date de la rupture du contrat de travail.

L'association Provence Promotion est une association à but non lucratif régie par la loi du 1er juillet 1901. Elle a été créée en 1998 par la chambre de commerce et d'industrie Marseille-Provence (CCIMP) et le conseil général des Bouches-du-Rhône, avec pour but le développement économique et l'attractivité des Bouches-du-Rhône. Elle réunit les collectivités locales, les aménageurs et les représentants du monde économique.

En raison de la redéfinition des compétences des collectivités locales devant intervenir le 7 août 2015 et ne permettant plus au conseil départemental d'agir au niveau économique (Loi NOTRe: Nouvelle Organisation Territoriale de la République supprimant la clause générale de compétence pour les régions et les départements), la métropole Aix-Marseille Provence en se substituant aux anciens EPCI est devenue adhérente au sein du collège des institutions territoriales suite au conseil d'administration de l'association du 30 mars 2016 et a été intégrée dans les statuts de l'association, en lieu et place du conseil départemental et aux côtés de la CCIMP.

L'association a présenté le 30 mars 2016 un projet de réorganisation proposant une procédure de licenciement collectif pour trois postes de direction. Ce projet a été soumis aux délégués du personnel qui ont donné le 12 avril 2016 un avis favorable avec des réserves, ces derniers estimant prématuré d'engager un plan de réorganisation avant les affectations budgétaires de la métropole et les élections consulaires (pièce appelant 6).

Si à la date du licenciement du salarié en juillet 2016, l'engagement de la métropole Aix-Marseille Provence était objectivement établi, le transfert des compétences du conseil départemental des Bouches-du-Rhône à la Métropole Aix-Marseille Provence n'a été effectif qu'en octobre 2016.

De même, les subventions envisagées par Métropole Aix-Marseille Provence au bénéfice de l'association n'avaient pas encore été définies alors qu'existait depuis plusieurs années et en particulier depuis janvier 2016 un contexte général de restrictions des budgets pour la CCIMP et pour le conseil départemental. Les propres difficultés de ces deux financeurs initiaux ayant amené une baisse des subventions(pièces intimée 3 et 4)

Les craintes relatives à la viabilité de l'association étaient donc justifiées.

Outre l'absence de visibilité concernant les subventions envisagées par la Métropole Aix-Marseille Provence, le projet de bilan pour l'exercice 2016 laissait entrevoir un résultat déficitaire de - 246.744 € contre - 81 .963 € en 2015 attestant d'un déséquilibre budgétaire.

La comparaison du poste des recettes liées à l'ensemble de subventions d'exploitation montre qu'en 2015 celles-ci totalisaient 3 281 100 € contre 2 912 436 € en 2016, soit une diminution de 341'160 € (pièces intimée 9 et 11).

Enfin, la charge des trois postes de cadres fonctionnels représentant à eux seuls 22 % de la masse salariale totale, il est manifeste que cette suppression pouvait permettre de compenser en partie la perte des subventions.

En conséquence, il ressort de manière suffisante la preuve que l'association Provence Promotion rencontrait au moment du licenciement des difficultés économiques sérieuses et structurelles de nature à mettre en péril la pérennité de l'association et qu'une réorganisation s'imposait au regard du montant des frais fixes afin de lui permettre de retrouver un équilibre budgétaire.

En conséquence, la cour confirme la décision du conseil des prud'hommes qui a dit que le motif économique est réel et sérieux et qui a débouté le salarié de l'ensemble de ses demandes.

III) Sur les frais et dépens :

M. [N] qui succombe doit s'acquitter des dépens, être débouté de sa demande faite en application de l'article 700 du code de procédure civile mais les circonstances de la cause justifient de voir écarter la demande faite à ce titre par l'association.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute les parties de leurs demandes,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile;

Condamne M. [K] [N] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-3
Numéro d'arrêt : 19/18132
Date de la décision : 08/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-08;19.18132 ?
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