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08/03/2024 | FRANCE | N°19/03727

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 08 mars 2024, 19/03727


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3



ARRÊT AU FOND



DU 08 MARS 2024



N°2024/ 43







RG 19/03727

N° Portalis DBVB-V-B7D-BD4WT







SAS SOCIETE MEDITERRANEENNE DE NETTOIEMENT





C/



[C] [S]

SAS POLYCEO





















Copie exécutoire délivrée

le 8 Mars 2024 à :



-Me Jean-christophe STRATIGEAS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

V43<

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- Me Jean-claude SASSATELLI, avocat au barreau de MARSEILLE



- Me Pierre-yves IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

V352









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 15 Février 2019 ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 08 MARS 2024

N°2024/ 43

RG 19/03727

N° Portalis DBVB-V-B7D-BD4WT

SAS SOCIETE MEDITERRANEENNE DE NETTOIEMENT

C/

[C] [S]

SAS POLYCEO

Copie exécutoire délivrée

le 8 Mars 2024 à :

-Me Jean-christophe STRATIGEAS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

V43

- Me Jean-claude SASSATELLI, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Pierre-yves IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

V352

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 15 Février 2019 enregistré au répertoire général sous le n° F17/02845.

APPELANTE

SAS SOCIETE MEDITERRANEENNE DE NETTOIEMENT, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Jean-christophe STRATIGEAS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Thelma PROVOST, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMES

Monsieur [C] [S], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Jean-claude SASSATELLI, avocat au barreau de MARSEILLE

SAS POLYCEO, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Pierre-yves IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Gaëlle LE BRETON, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Décembre 2023 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, et Madame Ursula BOURDON-PICQUOIN, Conseillère, chargéEs du rapport.

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre

Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant

Madame Ursula BOURDON-PICQUOIN, Conseillère

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Mars 2024.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE

Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Mars 2024.

Signé par Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * * * * * * *

FAITS- PROCEDURE-PRETENTIONS DES PARTIES

Le 1er juin 2004, la société Méditerranéenne de Nettoiement (ci-après SMN), faisant partie du groupe [Z], signait avec M.[L] [F] [S] un contrat de travail à durée indéterminée à temps plein, pour un emploi de conducteur, filière collecte et activités assimilées, niveau II position 3 coefficient 110.

Il était spécifié que ce contrat «fait suite au contrat de travail signé avec la société Polyurbaine, ancien adjudicataire du marché de propreté de la voierie et collecte des résidus urbains du 15ème arrondissement de la ville de [Localité 4].», l'ancienneté reprise remontant au 1er juin 1997.

Par lettre recommandée du 16 janvier 2014 adressée au directeur de la SMN, le syndicat CFDT indiquait que M.[S] était nommé délégué syndical central.

Le salarié disposait également d'un mandat de délégué du personnel suppléant et était membre titulaire du comité d'entreprise.

La SMN était avisée le 27 avril 2017 par la société Polyceo (enseigne du groupe Derichebourg) de la perte du marché concerné, à compter du 1er septembre 2017.

Le 4 mai 2017, la SMN notifiait à M.[S] son transfert auprès de la société entrante, en application des dispositions conventionnelles et le 10 mai 2017, le salarié donnait son accord écrit à ce transfert.

Le 10 août 2017, l'inspection du travail rendait une décision autorisant le transfert de M.[S].

Le 31 août 2017, le salarié contresignait la lettre du 30 août 2017 de la responsable des ressources humaines de Polyceo, lui indiquant «votre contrat de travail est transféré de plein droit auprès de notre société », et lui précisant son affectation à l'agence [R] [H].

Après des échanges avec l'avocat du salarié en septembre 2017, la société Polyceo, par lettre recommandée du 13 novembre 2017, refusait définitivement l'intégration de M.[S], précisant que la société SMN n'avait pas fourni les pièces réclamées dans les délais fixés.

Par requête du 13 décembre 2017, M.[S] saisissait le conseil de prud'hommes de Marseille aux fins d'obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de la société Polyceo, sollicitant la condamnation de celle-ci à lui payer notamment des rappels de salaire et des indemnités au titre d'un licenciement nul.

Dans le cadre de conclusions subséquentes, le salarié a étendu ses demandes de façon subsidiaire à la société SMN.

Selon jugement du 15 février 2019, le conseil de prud'hommes a statué ainsi :

DIT que la requête introductive de M. [C] [S] est parfaitement recevable.

MET HORS DE CAUSE la SAS POLYCEO

DIT la situation professionnelle et les griefs formulés par M. [C] [S] suffisamment graves pour justifier une résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur la SAS SMN.

PRONONCE la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [C] [S] à compter du 15 février 2019.

CONDAMNE la SAS SMN au paiement des sommes suivantes :

- 42.191,52 € bruts de rappels de salaire, du 30 octobre 2017 au 15 février 2019

- 4.219,15 € bruts au titre des congés payés afférents

- 5.273,94 € bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 527,39 € bruts au titre des congés payés afférents,

- 16.041,55 € au titre de l'indemnité légale de licenciement,

- 31.643,44 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1.500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile .

DEBOUTE les parties de toutes autres demandes plus amples ou contraires.

FIXE le salaire mensuel de M. [C] [S] à la somme de 2.636,97 € bruts.

ORDONNE l'exécution provisoire de droit.

CONDAMNE la partie défenderesse aux dépens.

Le conseil de la SMN a interjeté appel par déclaration du 5 mars 2019.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises au greffe par voie électronique le 16 février 2023, l'appelante demande à la cour de :

«INFIRMER le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes le 15 février 2019 et statuant de nouveau de :

DEBOUTER les parties adverses de l'ensemble de leurs demandes dirigées à l'encontre de la Société SMN comme étant injustes et mal fondées ainsi que de tout appel incident.

CONDAMNER Monsieur [S] au remboursement des salaires indument versés du 1er septembre au 19 octobre 2017 soit la somme brute de 3 016,90 € bruts, outre 1 769,27€ de cotisations patronales, en tant que de besoin relevé et garanti par la société POLYCEO.

ORDONNER le remboursement de l'exécution provisoire par Monsieur [S], en tant que de besoin relevé et garanti par la société POLYCEO.

A titre subsidiaire de :

FIXER la date de la rupture du contrat de travail au 1er septembre 2017 et au plus tard au 17 octobre 2019, FIXER l'ancienneté de Monsieur [S] à 21 ans et 8 mois,

FIXER le salaire de référence de Monsieur [S] à 1.913,13 € bruts,

FIXER l'indemnité légale de licenciement est d'un montant de 11.372,50 €,

FIXER l'indemnité compensatrice de préavis à 3.826,26 € bruts, outre 382,63 € bruts relatifs à l'indemnité compensatrice de congés payés afférente, soit l'équivalent de 2 mois de salaire,

FIXER le montant des dommages et intérêts au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse à 5.739,39 € ou au titre d'un licenciement nul à 11.478,78 €,

FIXER le rappel de salaire sollicité par Monsieur [S] au titre d'une violation d'un statut protecteur à 22.957,59 € bruts, outre les congés payés afférents,

DEBOUTER Monsieur [S] de sa demande de rappel de salaire au titre de la période postérieure au 19 octobre 2017.

A titre infiniment subsidiaire de :

FIXER la date de la rupture au 15 février 2019,

FIXER l'ancienneté de Monsieur [S] à 21 ans et 8 mois,

FIXER le salaire de référence de Monsieur [S] à 1.913,13 € bruts,

FIXER l'indemnité légale de licenciement à 12.222,78 €,

FIXER l'indemnité compensatrice de préavis à 3.826,26 € bruts, outre 382,63 € bruts relatifs à l'indemnité compensatrice de congés payés afférente, soit l'équivalent de 2 mois de salaire,

DEBOUTER Monsieur [S] de sa demande visant à ce que la résiliation judiciaire produise les effets d'un licenciement nul, en l'absence de statut protecteur à la date de la rupture et en l'absence de discrimination pouvant être retenue à l'encontre de la Société SMN,

Si la Cour devait faire produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse à la résiliation judiciaire FIXER le montant des dommages et intérêts à 3 mois de salaire, soit 5.739,39 €,

DEBOUTER Monsieur [S] de sa demande de rappel de salaire au titre d'une violation d'un statut protecteur, ne disposant plus d'un statut protecteur à la date de la rupture fixée par le Conseil de Prud'hommes,

DEBOUTER Monsieur [S] de sa demande de rappel de salaire au titre de la période postérieure au 15 février 2019 et LIMITER la demande de rappel de salaire au titre de la période du 20 octobre 2019 au 15 février 2019 en tenant compte d'un salaire de référence de 1.913,13 € bruts,

En tout état de cause de :

DEBOUTER Monsieur [S] de sa demande de dommages et intérêts au titre d'une discrimination syndicale,

DEBOUTER les parties adverses de l'ensemble du surplus de leurs demandes dirigées à l'encontre de la Société SMN comme étant injustes et mal fondées ainsi que de tout appel incident.

CONDAMNER Monsieur [S] au remboursement des salaires indument versés du 1er septembre au 19 octobre 2017 soit la somme brute de 3 016,90 € bruts, outre 1 769,27€ de cotisations patronales, en tant que de besoin relevé et garanti par la société POLYCEO.

ORDONNER le remboursement de l'exécution provisoire par Monsieur [S], en tant que de besoin relevé et garanti par la société POLYCEO.

CONDAMNER tout succombant au paiement de la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de Maître Jean-Christophe STRATIGEAS, avocat associé du Cabinet CADJI & Associés. »

Dans ses dernières écritures transmises au greffe par voie électronique le 31 janvier 2023, la société Polyceo demande à la cour de :

«A titre principal :

Confirmer le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de Marseille en date du 15 février 2019 dans toutes ses dispositions ;

En conséquence :

Dire et juger que Monsieur [S] ne remplissait pas les conditions de l'annexe V, avenant n°42, de la convention collective nationale des activités du déchet pour que son contrat de travail soit transféré auprès de la Société POLYCEO ;

Mettre hors de cause la Société POLYCEO ;

Débouter Monsieur [S] et la SMN de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions et appel incident ;

A titre subsidiaire :

Dire et juger que la demande de résiliation judicaire aux torts exclusifs de la Société POLYCEO n'est pas fondée ;

A titre infiniment subsidiaire,

Constater que le salaire brut de base s'élève à 1 913,13 euros ;

Déduire des rappels de salaire demandés par Monsieur [S] les autres revenus perçus par ailleurs ;

Réduire le quantum des sommes demandées par Monsieur [S] à 3 mois de salaire conformément aux dispositions de l'article L.1235-3 du Code du travail ;

En tout état de cause

Débouter Monsieur [S] et la SMN de toutes les autres demandes ;

Condamner la SMN à payer à la Société POLYCEO la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC ;

Condamner les parties succombantes aux entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de Maître Pierre YVES IMPERATORE, membre de la SELARL LEXAVOUE AIX EN PROVENCE, Avocats associés, aux offres de droit.»

Dans ses dernières conclusions notifiées au greffe par voie électronique le 19 janvier 2023, M.[S] demande à la cour de :

« RECEVOIR Monsieur [S] en ses demandes et son appel incident et les dire bien fondées ;

JUGER que Monsieur [S] remplissait les conditions pour que son contrat de travail soit transféré auprès de la société POLYCEO tel que cela a été formalisé par la lettre remise en main propre le 30 août 2017 ;

JUGER que POLYCEO a gravement manqué à ses obligations contractuelles ;

JUGER que Monsieur [S] a été victime de discrimination par POLYCEO ;

En conséquence,

PRONONCER la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la société POLYCEO et subsidiairement aux torts de la société SMN ;

FIXER la date de la résiliation judiciaire au jour du prononcé de la décision de la Cour ;

CONDAMNER la société POLYCEO solidairement avec la société SMN à payer à Monsieur [S]: - 48 mois de salaire à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul : 126.574,56 €, 6 Mois

- indemnité compensatrice de préavis : 5.273,94 €; outre 527,39 € au titre des congés payés y afférents ;

- indemnité légale de licenciement : 16.876,61 € arrêtée au 15.02.2019, à parfaire en fonction de la date à laquelle la rupture sera prononcée ;

- la somme de 146.107 € arrêtée au 31.12.2021, à parfaire à la date de l'arrêt à intervenir, au titre des salaires qu'il aurait perçus entre le 1er septembre 2017 et la date dudit arrêt, outre les congés payés y afférents, suivant un salaire brut mensuel de 2.636,97 € brut, à savoir la somme de 150.834,68 € (137.122,44 € + 10% de CP - arrêtée au 31.12.2021), dont 4.727,63 € versés par la SNM pour les mois de septembre et octobre 2017 à déduire ;

- à titre subsidiaire sur cette question de maintien du salaire, celui qu'il aurait perçu depuis la période d'éviction jusqu'à la fin de sa période de protection, soit 12 mois : 31.643,64€, outre 3.164,36 € au titre des congés payés y afférents ;

- dommages-intérêts pour discrimination syndicale : 31.643,64 € ;

DECLARER le jugement commun et opposable à la société SMN ;

ORDONNER la délivrance des bulletins de salaire depuis le 1er septembre 2017 sous astreinte de 100€ par jour de retard, à compter du 10 ème jour suivant la signification de la décision à intervenir ;

ORDONNER la délivrance d'un certificat de travail et d'une attestation d'employeur destinée à Pôle Emploi, dite ASSEDIC, faisant tous deux notamment état d'une durée d'emploi ayant débuté le 1er Juin 1997 et prenant fin jour du prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail, et ce sous astreinte de 100 € par jour de retard, par document, à compter du 10 ème jour suivant la signification de la décision à intervenir ;

JUGER que les condamnations emporteront intérêts au taux légal des particuliers professionnel à compter de la date de saisine,

DEBOUTER la société POLYCEO et la société SMN de toutes leurs demandes, fins et conclusions.

CONDAMNER la société POLYCEO solidairement avec la société SMN à payer à Monsieur [S] 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNER la société POLYCEO et la société SMN aux entiers dépens.»

Pour l'exposé plus détaillé des prétentions et moyens des parties, il sera renvoyé, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions des parties sus-visées.

MOTIFS DE L'ARRÊT

A titre liminaire, la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et que les «dire et juger» et les «constater» ainsi que les «donner acte» ne sont pas des prétentions en ce que ces demandes ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert hormis les cas prévus par la loi ; en conséquence, la cour ne statuera pas sur celles-ci, qui ne sont en réalité que le rappel des moyens invoqués.

Sur le transfert du contrat de travail

L'autorisation préalable de l'inspecteur du travail est requise pour le transfert des salariés protégés lorsqu'il est compris dans un transfert partiel d'entreprise ou d'établissement, soit par application de l'article L.1224-1 du code du travail, soit, par défaut, en application de dispositions conventionnelles (article L. 2414-1 du même code).

1-Sur la décision administrative

La société sortante soutient que le juge judiciaire ne peut remettre en cause l'appréciation faite par l'autorité administrative, ce qu'il avait fait valoir devant le conseil de prud'hommes, précisant que l'absence de notification de la décision à la société entrante n'a pas pour effet de la lui rendre inopposable, ajoutant que seul le salarié pouvait refuser le transfert, ce qui n'est pas le cas.

Le salarié estime que la décision de l'inspection du travail doit produire son plein effet et rend irrévocable son transfert.

La société entrante rappelle l'absence de communication des documents par la société SMN avant la date prévue justifiant son impossibilité d'opérer le transfert, indique qu'elle n'était pas partie à la procédure devant l'inspection du travail, laquelle consiste principalement à vérifier s'il n'y a pas discrimination.

La cour relève que la décision de l'inspection du travail a été portée à la connaissance de la société Polyceo, par l'entreprise sortante le 23 août 2017, soit antérieurement à la date d'effet de la reprise du marché.

Contrairement aux affirmations de la société entrante, il résulte de la circulaire DGT 07/2012 du 30 juillet 2012 relative aux décisions administratives en matière de rupture ou de transfert du contrat de travail des salariés protégés, et notamment de sa fiche 15 dédiée aux transferts, page 4, que le contrôle de l'autorité administrative doit porter sur :

«- 4.1. La matérialité du fait générateur du transfert

L'inspecteur du travail doit s'assurer de la réalité du transfert et de la nature des éléments transférés, mais, à la différence d'une demande d'autorisation de licenciement, il ne saurait porter d'appréciation sur l'origine de l'opération.

4.2. L'applicabilité des dispositions légales ou conventionnelles invoquées dans la demande d'autorisation de transfert (...)

Si, en l'absence de transfert d'une entité économique autonome, la demande est fondée sur des dispositions conventionnelles, l'autorité administrative doit vérifier l'applicabilité de ces dispositions.

4.3. L'appartenance effective du salarié pour tout ou partie de son temps de travail à l'unité transférée

L'autorité administrative ne doit pas se borner à vérifier si le contrat de travail de l'intéressé est en cours au jour de la modification intervenue dans la situation juridique de l'employeur, mais est tenue d'examiner si le salarié concerné exécutait effectivement son contrat de travail dans l'entité transférée (CE, 15 juin 2005, n° 250.747, Sté Cogecom).

4.4. L'absence de lien avec le mandat ou l'appartenance syndicale

Le législateur a voulu éviter que les représentants du personnel ou syndicaux en cours de mandat ne fassent l'objet d'une mutation discriminatoire dans une partie d'établissement ou d'entreprise destinée à être transférée par application de l'article article L. 1224-1 (C. trav., art. L. 2421-9) : le choix de ces salariés ne doit pas révéler une volonté de l'employeur cédant d'éliminer les représentants du personnel les plus actifs (CE 12 oct. 1990, n°87.204 et 87.617, [K] et [B]).»

En l'espèce, la décision administrative d'autorisation de transfert du 10 août 2017, (pièce 4 salarié) a été :

- prise après une enquête contradictoire au cours de laquelle la société SMN a été entendue ainsi que le salarié,

- rendue au visa des articles L.2414-1, L.2421-9 et R.2421-17 du code du travail mais aussi de la convention collective nationale des activités de déchet et plus particulièrement son avenant n°53 du 15 juin 2015 relatif aux conditions de transfert des contrats de travail en cas de changement de titulaire d'un marché public,

- motivée ainsi :

«Considérant que la société SMN a perdu le marché relatif à la propreté urbaine et collecte des déchets ménagers et assimilés sur une partie du territoire de la ville de [Localité 4] - lot 3 propreté de la voierie du 15ème et du 16ème arrondissement et collecte des déchets ménagers et assimilés sur les 2ème, 15ème et 16ème arrondissements de [Localité 4] ; qu'à compter du 1er septembre, ce marché est repris par la société Derichebourg appliquant la même convention collective.

Considérant que M. [C] [S] remplit les conditions d'application de l'avenant n°53; qu'il est affecté exclusivement au marché repris;

Considérant qu'il n'a pas été établi de lien entre les mandats exercés par le salarié et la demande d'autorisation de transfert de son contrat.»

En conséquence, cette décision ne peut être remise en cause par la société Polyceo, laquelle s'imposait également au juge judiciaire, la décision du conseil de prud'hommes de Marseille devant être infirmée totalement, en raison de la séparation des pouvoirs.

2- Sur les conséquences de la décision administrative

Le changement d'employeur résultant du transfert conventionnel constitue, à la différence du transfert opéré en application des dispositions de l'article L.1224-1 du code du travail, une novation du contrat de travail nécessitant l'accord exprès du salarié protégé.

En l'espèce, il résulte de l'apposition de la signature de M.[S] tant sur la lettre de la société SMN dès le 10 mai 2017 que sur celle de la société Polyceo du 31 août 2017, que le salarié n'a pas refusé son transfert.

En conséquence, c'est à tort que M.[S] persiste à faire des demandes à l'encontre de son ancien employeur, lequel n'a pas à être mis hors de cause, mais n'est redevable d'aucune somme à l'égard du salarié.

Sur la résiliation judiciaire

1- sur le bien fondé de la demande

Le juge prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur en cas de manquements suffisamment graves de ce dernier à ses obligations, de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail.

La résiliation judiciaire du contrat de travail produit les effets d'un licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse avec toutes ses conséquences de droit.

Le salarié fait valoir qu'en ne l'intégrant pas dans ses effectifs et en ne lui fournissant pas de travail, alors même qu'il lui a fait savoir à maintes reprises qu'il se tenait à sa disposition, la société Polyceo a manqué gravement à ses obligations contractuelles.

Cette dernière indique qu'aucun manquement grave ne peut être retenu à son encontre, n'ayant fait que valoir sa position dans un litige concernant la transférabilité du contrat de travail de M.[S].

Elle ajoute qu'à aucun moment depuis le 1er septembre 2017, le salarié n'a indiqué à la société être à sa disposition, si ce n'est deux courriers d'avocat des 15 septembre et 6 novembre 2017 (pièces adverses n°6 et 8), le salarié lui-même n'ayant écrit le 3 octobre 2017, qu'en sa qualité de représentant du personnel de la SMN.

Non seulement il est établi que la société entrante n'a pas intégré M.[S] au 1er septembre 2017 mais elle a refusé définitivement le transfert par lettre recommandée du 13 novembre 2017, étant précisé que dans sa lettre du 15 septembre 2017, l'avocat du salarié indiquait que ce dernier était à disposition et attendait d'être contacté, demande réitérée le 6 novembre 2017, après que la société sortante ait adressé de nouveaux documents.

En conséquence, les manquements étaient suffisamment graves pour justifier la résiliation judiciaire du contrat aux torts de la société Polyceo.

2- Sur la date de la rupture

Le salarié demande que la résiliation judiciaire produise ses effets à la date du présent arrêt.

La société Polyceo invoque la lettre de rupture adressée à titre conservatoire le 26 juillet 2018.

La résiliation judiciaire du contrat de travail prend effet au jour où le juge la prononce,

dès lors qu'à cette date le salarié est toujours au service de son employeur.

Si du fait de la lettre de rupture -dont la validité n'a pas à être examinée par la cour - le salarié n'était plus tenu d'être à disposition de son employeur à compter de cette date, la cour, se doit d'examiner la situation réelle des parties, et constate par la pièce 17 produite par le salarié que, dès le 23 novembre 2017, ce dernier était inscrit sur la liste des demandeurs d'emploi à Pôle Emploi, et avait donc cessé de se tenir au service de la société.

En conséquence, cette date doit être retenue comme celle de la rupture.

3- Sur les conséquences financières de la rupture

La rupture produit les effets d'un licenciement nul pour violation du statut protecteur, permettant au salarié, qui ne sollicite pas sa réintégration, d'obtenir outre les indemnités de rupture, une indemnité sur le fondement de l'article L.1235-3-1 du code du travail, dans sa version postérieure au 22 septembre 2017, et une indemnité pour violation du statut protecteur.

a) sur la rémunération à retenir

Les sociétés demandent à la cour de fixer le salaire mensuel brut de M.[S] à la somme de 1 913,13 euros.

Le salarié soutient que la somme s'établit à 2 636,97 euros.

La cour constate que M.[S] fournit ses bulletins de salaire sur la période du 01/10/2016 au 01/10/2017, mais n'a procédé à aucune explication ou calcul pour justifier de sa demande.

Les bulletins de salaire d'octobre 2016 à mai 2017 permettent de dire que le salaire brut du salarié oscillait entre 2 428,14 et 2 459,02 euros, celui de juin est de 2 978,38 euros, celui de juillet de 2 496,66 euros et celui d'août 2017 comporte des indemnités de congés payés, des primes à caractère annuel à déduire, permettant de fixer le salaire à 2 623,49 euros, ce qui sur les trois derniers mois correspond à une moyenne supérieure à celle sollicitée.

En conséquence, la cour retient la somme de 2 636,97 euros comme salaire de référence à la fois pour le calcul des indemnités de rupture et pour l'indemnité d'éviction comme correspondant à la rémunération de base augmentée des avantages bruts que le salarié aurait perçus s'il avait travaillé, y compris les primes liées à l'exercice du travail et aux sujétions de l'activité.

b) Sur les rappels de salaire du 01/09/2017 au 23/11/2017

En considération de la date du transfert, la société Polyceo était tenue au paiement des salaires, sur cette période, étant devenue l'employeur, et le salarié démontrant s'être tenu à disposition jusqu'à cette date.

Elle est donc redevable de la somme de 7 207,72 euros outre l'incidence de congés payés.

c) Sur l'indemnité pour violation du statut protecteur

Le salarié protégé dont la demande de résiliation judiciaire est accueillie, a droit, au titre de la violation de son statut protecteur, au paiement d'une indemnité égale à la rémunération qu'il aurait dû percevoir entre son éviction, et l'expiration de la période de protection en cours au jour de la demande.

Elle présente un caractère forfaitaire et n'ouvre pas droit au paiement de congés payés afférents.

Comme l'indique le salarié, de façon subsidiaire page 16 de ses conclusions, le transfert de son contrat de travail a emporté la fin de son mandat mais il est demeuré protégé pendant 12 mois, de sorte que l'indemnité d'éviction doit être fixée pour la période du 23/11/2017 au 01/09/2018, à la somme de 24'435,93 euros.

d) Sur les indemnités de rupture

Le salarié, ayant plus de deux ans d'ancienneté est en droit d'obtenir une indemnité compensatrice de préavis de deux mois dont le montant réclamé n'est pas autrement discuté.

S'agissant de l'indemnité de licenciement, le salarié sollicite l'indemnité légale laquelle se révèle, selon ses calculs, plus avantageuse que l'indemnité conventionnelle.

La cour ne peut retenir l'ancienneté comme demandé par M.[S], ni à la date de la décision du conseil de prud'hommes, ni à la date de saisine du conseil de prud'hommes, mais à celle de la rupture, soit 20 ans 5 mois et 23 jours.

Conformément à la règle édictée par l'article R.1234-2 du code du travail, la somme revenant à M.[S] s'élève à 15 804,94 euros.

e) Sur l'indemnité pour rupture illicite

Le salarié âgé de 51 ans est resté sans emploi du 23 novembre 2017 au 31 janvier 2018, comme le démontrent ses pièces 17 & suivantes, mais il ne donne aucun élément sur sa situation entre février 2018 et mars 2019, date à laquelle il a de nouveau été réinscrit à Pôle Emploi.

Si les sociétés démontrent que, à la même époque, M.[S] était également dirigeant de plusieurs établissements dans le secteur d'activité de la restauration, les avis d'imposition pour les années concernées ne permettent pas de dire qu'il en tirait des revenus substantiels.

En l'état des éléments produits, la cour fixe à la somme de 45 000 euros les dommages et intérêts dûs par la société Polyceo, au titre de la rupture.

Sur la discrimination

Aux termes de l'article L.1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie par l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, notamment en matière de rémunération, de mesures d'intéressement ou de distribution d'action, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de ses activités syndicales.

L'article L.2141-5 du code du travail interdit à l'employeur de prendre en

considération l'appartenance à un syndicat ou l'exercice d'une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d'avancement, de rémunération et d'octroi d'avantages sociaux, de mesures de discipline et de rupture du contrat de travail.

Selon l'article L.1134-1 du code du travail, en cas de litige, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, au vu desquels, il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, et le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

En l'espèce, M.[S] indique que, sous couvert de formalités liées au transfert des contrats de travail qui incombent aux entreprises entrantes et sortantes, la société Polyceo a prétendu que le contrat de travail n'était pas transférable, alors qu'il remplissait bien les conditions d'ancienneté et de présence pour intégrer les effectifs la société entrante.

Il estime que la société a refusé de le transférer en raison de son mandat syndical tel que cela résulte des termes de la lettre adressée à son avocat.

Il rappelle que la reprise du marché par la société Polyceo s'est faite non sans heurts en septembre 2017, les salariés s'étant mis en grève et souhaitant d'ailleurs qu'il soit leur porte-parole.

Il explique que son implication consciencieuse dans son mandat syndical est la raison pour laquelle la société Polyceo a en réalité tout fait pour qu'il n'intègre pas ses effectifs.

Pour étayer ses affirmations, le salarié produit :

- la lettre adressée par l'employeur le 20/09/2017 à son avocat, indiquant :

«De telles habilitations étant indispensables à l'exécution des fonctions du salarié, nous considérerons que le transfert de son contrat de travail est rendu impossible.

Il appartiendra à la société [Z] de gérer ensuite le cas de Monsieur [C] [S].

Au regard des éléments qui figurent dans votre courrier, il nous semble également nécessaire de préciser que nous n'avons aucune information de nature à laisser penser que M. [C] [S] se tient actuellement à la disposition de notre entreprise.

Nous convenons qu'il était effectivement présent au sein de la société POLYCEO sur le site situé 4 traverse Santi, le 1er septembre 2017 à l'heure de la prise de service du matin (5h00).

Cependant, il est important de rappeler que sa présence était uniquement liée à son mandat représentatif chez [Z].

En effet, son organisation syndicale était dépositaire d'un préavis de grève et nous avons autorisé les représentants du syndicat à s'adresser aux salariés dans ce cadre.

A aucun moment il n'a manifesté sa volonté de prendre son service. Il n'a pas demandé à obtenir son planning ou à disposer d'une tenue de travail, par exemple.

S'il avait l'intention de travailler, en sa qualité de Conducteur PL de benne OM, il se serait présenté non pas sur le site dédié aux activités de nettoiement (4 traverse santi) mais bien sur celui dédié aux activités de collecte, auxquelles il devrait être rattaché (10/12 bis [R] [H])» (pièce 7),

- une pétition non datée des salariés Derichebourg demandant à ce que M.[S] les représente afin de protester contre le règlement que veut mettre en place la société (pièce 14),

- l'attestation du coordinateur national CFDT des activités de déchet, confirmant d'une part que M.[S] a représenté depuis la fin des années 1990 les salariés lors des transferts et d'autre part qu'un préavis de grève en intersyndicale a été déposé en octobre 2017, mentionnant que la direction a tout fait pour leur refuser l'accès aux négociations et a mis tout en oeuvre pour refuser l'intégration de l'interessé «de part son appartenance syndicale et ses compétences» (pièce 15),

- le témoignage de M.[W], ancien directeur de Polyceo, lequel atteste ainsi : « En ma qualité d'ancien directeur de POLYCEO [Localité 4], j'ai assisté aux réunions préparatoires à la reprise des personnels [Z] et VEOLIA en présence d'[J] [P] (DG° et [O] [D] (DRH). Ces réunions se tenaient dans une salle d'un hôtel de [Localité 5]. Mr [S] [C], en sa qualité de DS CFDT représentait les personnels de [A]. Il a toujours insisté pour faire valoir les avantages acquis du personnel disant qu'il ferait tout pour qu'ils soient reconduits dans leur intégralité notamment la mutuelle et le plan de carrière. Le concernant, la DRG l'a mis en garde sur le fait que son dossier n'était pas complet notamment pour une non validité de son permis PL. Mr [S] a rappelé qu'il était posé comme chauffeur VL et de dire que son cas se réglerait à la fin, il insistait pour les avantages collectifs. Il se disait très écouté des autres salariés pouvant avoir ainsi une incidence lors du démarrage. Mr [S] s'est présenté le jour prévu de l'intégration pour récupérer son contrat. La DRH a refusé qu'il prenne son poste ». (pièce 16),

- les conclusions de la SMN, société sortante : « En effet dès le 1er septembre 2017, Monsieur [S] qui était un représentant du personnel dévoué, a noté que les conditions du transfert chez POLYCEO pour l'ensemble des salariés étaient difficiles.

Il a été celui qui a porté les revendications de ses collègues à l'encontre de POLYCEO.

Au demeurant, Monsieur [S] a toujours été particulièrement actif en qualité de représentant du personnel, de sorte que cette attitude de sa part est parfaitement normale.

POLYCEO a décidé d'écarter des effectifs ce salarié qu'elle estimait indésirable car représentant réellement les intérêts du personnel.

C'est la raison pour laquelle POLYCEO a cherché à tout prix à évincer Monsieur [S] de ses effectifs bien tardivement ».

Le salarié établit ainsi l'existence matérielle de faits pouvant laisser présumer l'existence

d'une discrimination à son encontre.

La société Polyceo fait valoir que dans le cadre des opérations de transfert, plus de 30 salariés protégés ont été repris par elle et qu'il résulte des termes mêmes de l'attestation de l'ancien directeur que, depuis le départ, le problème de la validité du permis de M.[S] a été soulevé, le refus de transfert n'étant en aucun cas lié au mandat mais uniquement parce que M.[S] ne remplissait pas les conditions conventionnelles permettant son transfert.

Si la société se prévaut d'une pièce 15 au titre du transfert de nombreux salariés protégés, la cour relève qu'elle ne figure pas au bordereau des pièces communiquées sous ce numéro ou un autre.

L'employeur échoue à démontrer que les faits matériellement établis par M.[S] sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

En effet, non seulement il a été démontré que la société entrante ne pouvait s'opposer au transfert mais il ressort des échanges de correspondance avec la société sortante qu'elle n'était pas en droit de suspendre celui-ci, étant précisé au demeurant qu'elle disposait de tous les éléments nécessaires pour présenter à M.[S] un avenant à son contrat de travail dès le 19 octobre 2017.

Compte tenu des événements sociaux intervenus en septembre et octobre 2017, et de la participation active de M.[S] à ceux-ci, il est manifeste que la décision de refuser l'intégration du salarié, intervenue par lettre recommandée du 13 novembre 2017, établit la discrimination.

Compte tenu des circonstances de celle-ci, de sa courte durée, et des conséquences dommageables qu'elle a eu pour M.[S] telles qu'elles ressortent des pièces et des explications fournies, le préjudice distinct en résultant pour le salarié, doit être fixé à 5 000 euros.

Sur les autres demandes

Les sommes allouées à titre de salaires porteront intérêts au taux légal à compter de la date de convocation de l'employeur (présentation de la lettre recommandée) à l'audience de tentative de conciliation valant mise en demeure.

  Par dérogation à l'article 1153-1 du code civil, les sommes allouées à titre indemnitaire produiront intérêts au taux légal à compter de la date du jugement de 1ère instance.

La société Polyceo devra remettre à M.[S] les bulletins de salaire, une attestation Pôle Emploi et un certificat de travail conformes à la présente décision, sous astreinte.

Sur les demandes reconventionnelles de la société SMN

M. [S] doit rembourser, au titre de la répétition de l'indû, à la société SMN, les salaires qui lui ont été versés pour la période du 01/09 au 19/10/2017, et qui incombaient à la société Polyceo.

Le salarié indique page 8 de ses conclusions qu'il n'aurait perçu que la somme de 2 324,38 euros

mais page 16 et dans son dispositif, indique une somme de 4 727,63 euros versée par la société SMN, dont il demande la déduction.

La somme réclamée par la société sortante étant au total de 4'786,17 euros, il convient de faire droit à la demande reconventionnelle sur ce point.

Si le salarié évoque au titre de la discussion page 8 de ses conclusions, la possibilité d'être relevé et garanti par la société Polyceo, il n'a pas repris cette demande dans le dispositif de ses écritures et la société SMN ne peut se substituer à lui pour le faire.

S'agissant des autres condamnations subies par la société SMN, le présent arrêt infirmatif constitue le titre ouvrant droit à la restitution par M.[S] des sommes versées en exécution du jugement, et dès lors il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de la société en restitution des sommes versées, les parties devant opérer un compte entre elles pour le cas échéant, le soumettre en cas de litige au juge de l'exécution.

Sur les frais et dépens

Les dépens ne peuvent être distraits, la procédure en matière sociale ne donnant pas l'exclusivité à l'avocat dans la représentation.

La société Polyceo qui succombe totalement, doit s'acquitter des dépens de l'entière procédure, être déboutée de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et à ce titre payer à chacune des autres parties, la somme de 3 000 euros.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et Y ajoutant,

Dit que le transfert du contrat de travail de M.[S] à la société Polyceo s'est opéré de plein droit, à compter du 1er septembre 2017, en application de la décision administrative,

Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de la société Polyceo, au 23 novembre 2017,

Condamne la société Polyceo à payer à M.[C] [S], les sommes suivantes:

- 7 207,72 euros à titre de rappel de salaire du 01/09 au 23/11/2017

- 720,77 euros au titre des congés payés afférents

- 5 273,94 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 527,39 euros au titre des congés payés afférents

- 15 804,94 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement

- 24'435,93 euros au titre de l'indemnité pour violation du statut protecteur

- 45 000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture illicite

- 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination syndicale

Dit que les sommes allouées à titre de salaires porteront intérêts au taux légal à compter du 15/12/2017 et que les sommes allouées à titre indemnitaire produiront intérêts au taux légal à compter du 15/02/2019,

Ordonne à la société Polyceo de délivrer à M.[S] les bulletins de salaire et les documents sociaux rectifiés conformément à la présente décision,

Dit qu'à défaut de remise effective totale ou partielle dans un délai de 30 jours à compter du prononcé de la présente décision, la société y sera contrainte sous astreinte de 100 euros par jour de retard, pendant 90 jours,

Condamne M.[C] [S] à rembourser à la société Méditerranéenne de Nettoiement, la somme de 3 016,90 euros bruts et celle de 1 769,27 euros de cotisations patronales, au titre du remboursement des sommes indues,

Rappelle que le présent arrêt constitue le titre faisant naître le droit de la société Méditerranéenne de Nettoiement à restitution par M.[S], des sommes versées au titre de l'exécution provisoire,

Condamne la société Polyceo à payer sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, tant à M.[S] qu'à la société SMN, la somme de 3 000 euros,

Déboute les parties de leurs autres demandes,

Condamne la société Polyceo aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-3
Numéro d'arrêt : 19/03727
Date de la décision : 08/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-08;19.03727 ?
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