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07/03/2024 | FRANCE | N°22/04572

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-7, 07 mars 2024, 22/04572


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7



ARRÊT AU FOND

DU 07 MARS 2024



N° 2024/ 125









Rôle N° RG 22/04572 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJEBX







[I] [Y]





C/



S.A.R.L. ADR





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Sylvia STALTERI







Me Philippe CAMINADE





Décision déférée à la Cour

:



Jugement du Juridiction de proximité de Draguignan en date du 09 Mars 2022 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 21/03009.







APPELANT





Monsieur [I] [Y]

né le 03 Février 1947 à [Localité 5] de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]





représenté par Me Sylvia STALTERI, avocat au...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7

ARRÊT AU FOND

DU 07 MARS 2024

N° 2024/ 125

Rôle N° RG 22/04572 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJEBX

[I] [Y]

C/

S.A.R.L. ADR

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Sylvia STALTERI

Me Philippe CAMINADE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juridiction de proximité de Draguignan en date du 09 Mars 2022 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 21/03009.

APPELANT

Monsieur [I] [Y]

né le 03 Février 1947 à [Localité 5] de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Sylvia STALTERI, avocat au barreau de GRASSE substitué par Me Antoine PROT, avocat au barreau de GRASSE, plaidant

INTIMEE

S.A.R.L. ADR, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Philippe CAMINADE, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 10 Janvier 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Carole MENDOZA, Conseillère,a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre

Madame Carole MENDOZA, Conseillère

Madame Mireille CAURIER-LEHOT, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 07 Mars 2024.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 Mars 2024,

Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

La SARL ADR exerce une activité de travaux de maçonnerie et de gros oeuvre de bâtiment.

Suivant marché conclu le 17 septembre 2017 pour la somme de 114.927, 90 euros TTC, M. [Y], propriétaire d'un terrain situé [Adresse 2] à [Localité 4] (83), a confié à cette société les travaux de gros oeuvre et VRD [Voiries et Réseaux Divers] pour la construction d'une villa. Le contrat prévoyait qu'une retenue de garantie de 5% serait appliquée sur chaque situation et que le levée se ferait dans l'année courante.

Par lettre du 04 mars 2021, la SARL ADR a mis en demeure M. et Mme [Y] de régler le solde des facture pour un montant de 9968, 05 euros TTC.

Par actes des 13 et 30 avril 2021, la SARL ADR a fait assigner M.[I] [Y] et Mme [Y] aux fins principalement de les voir condamner au paiement d'une facture du 31 mars 2019 d'un montant de 4631,62 euros et de différentes retenues de garanties à hauteur de 5336,93 euros.

Après échec d'une tentative de médiation et rejet par le juge des référés d'une demande d'expertise formée par M.[Y], la cour d'appel a, par arrêt du 17 mars 2022, infirmé cette décision en ce qu'elle a rejeté la demande d'expertise et ordonné une telle mesure confiée à M.[O].

Le rapport d'expertise a été déposé le 17 octobre 2023.

Par jugement réputé contradictoire du 09 mars 2022, le tribunal judiciaire de Draguignan a :

- condamné M.[I] [Y] à payer à la SARL ADR la somme de 4631, 62 euros au titre de la facture n° 00000742 du 31 mars 2019, augmentée des intérêts légaux à compter du jugement

- rejeté toutes autres demandes

- rappelé que le jugement est assorti de droit de l'exécution provisoire

- condamné M.[Y] au paiement de la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- condamné M.[Y] aux dépens.

Le premier juge a estimé qu'il n'y avait pas eu de réception tacite des travaux si bien que la SARL ADR ne pouvait solliciter le règlement des retenues de garanties puisque les conditions requises par l'article 2 de la loi du 16 juillet 1971 n'étaient pas réunies.

Il a condamné M.[Y] à payer la facture litigieuse en notant que ce dernier n'établissait pas que les travaux détaillés dans cette facture n'auraient pas réalisés. Il a ajouté que le montant global des travaux facturés incluant la facture litigieuse était cohérent avec ceux figurant au devis du 17 juin 2017 et à la lettre d'engagement du 17 septembre 2017. Il en a conclu que la SARL ADR démontrait la réalité et le bien fondé de sa facture.

Il a estimé que la preuve de l'engagement de Mme [Y] n'était pas rapportée.

Il a rejeté les demandes de dommages et intérêts formées par les parties.

Le 28 mars 2022, M.[Y] a relevé appel de tous les chefs de cette décision.

La SARL ADR a constitué avocat.

Par conclusions notifiées par RPVA le 23 décembre 2023, M.[Y] demande à la cour :

- d'annuler ou de réformer le jugement déféré,

- de constater la prescription acquisitive des appels en garantie des factures 00006231, 0000650A et 0000656 A,

* à titre subsidiaire,

- de constater la régularité de la mise en oeuvre de la clause pénale,

- de constater l'incertitude de la créance issue de la facture n° 742 d'un montant de 4720, 74 euros,

- de débouter la SARL ADR de ses demandes,

- de condamner la SARL ADR à payer la somme de 14.000 euros de dommages et intérêts,

- de condamner la SARL ADR aux dépens.

Il expose que la cour d'appel d'Aix-en-Provence a ordonné une expertise par arrêt du 17 mars 2022. Il relate contester le rapport d'expertise judiciaire et fait état d'un rapport d'expertise amiable de M.[B] qui fait état de malfaçons et du préjudice qu'il a subi.

Il indique avoir sollicité M.[B] pour qu'il établisse notamment un rapport sur la facturation de la société ADR.

Il explique contester la qualité des travaux effectués, note justifier de nombreuses malfaçons et relève que les factures émises ne correspondent pas aux travaux décrits.

Il affirme n'avoir jamais reçu la facture dont il est demandé le paiement.

Il soulève la prescription de la demande au titre des retenues de garanties.

Il indique avoir réceptionné des factures à partir du 31 octobre 2017 jusqu'au 31 janvier 2019 et avoir effectué une retenue de garantie de 5% du montant de la facture avec un terme à un an. Il fait état de trois factures avec les termes exigibles suivants : 30 septembre 2018, premier janvier 2019 et 28 février 2019. Il en conclut que l'action en justice de la SARL ADR est prescrite, pour avoir été faite plus de deux ans après la déchéance du terme des trois factures.

Il conteste toute réception tacite des travaux. Il note que ses modestes revenus ne lui permettaient pas de vivre ailleurs que dans la maison dont il dénonçait les malfaçons. Il souligne avoir émis des réserves et notamment le 18 juin 2018, date d'un procès-verbal d'huissier de justice.

Il conteste l'argument selon lequel la date du point de départ de la prescription est la dernière facture alors qu'il résulte du contrat conclu entre les parties que les factures sont indépendantes les unes des autres.

Il fait état de l'inexécution par la société ADR de ses obligations contractuelles. Il note que cette dernière, qui s'était engagée à reprendre les travaux, ne l'a pas fait.

Il ajoute qu'il était dans son bon droit en retenant la garantie compte tenu du fait que les travaux effectués par la société ADR ne correspondaient pas aux devis et aux factures.

Il fait état d'un préjudice financier et moral qu'il a subi en lien avec les fautes contractuelles de la société ADR et en demande réparation.

Par conclusions notifiées par RPVA le 12 décembre 2023 auxquelles il convient de se reporter, la SARL ADR demande à la cour :

- de réformer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la condamnation de M. [Y] au paiement de la somme de 5.336,93 euros sur la base des différentes retenues de garantie prévues dans les factures de la SARL ADR ;

- de réformer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la condamnation de M. [Y] au paiement de dommages et intérêts pour rétention abusive des sommes dues ;

- de réformer le jugement déféré en ce qu'il ne condamne que M. [I] [Y] à lui payer la somme de 4.631,62 euros au titre de la facture n°00000742 du 31 mars 2019, augmentée des intérêts légaux à compter du présent jugement;

A défaut,

- de confirmer la condamnation de M. [Y] à lui payer la somme de 4.631 ,62 euros, perçue au titre de la facture n°00000742 du 31 mars 2019, augmentée des intérêts légaux à compter de la mise en demeure du 4 mars 2021 ;

- de réformer le jugement déféré en ce qu'il rejette la condamnation de Mme [K] [Y] à lui payer sa créance solidairement avec M. [I][Y] ;

- de confirmer le jugement déféré en ce qu'il déboute M. [I] [Y] de sa demande reconventionnelle ;

- de réformer le jugement déféré en ce qu'il ne condamne que M. [I] [Y] à lui payer la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

- de réformer le jugement déféré en ce qu'il ne condamne que M. [I] [Y] à supporter les entiers dépens.

Statuant à nouveau :

- de juger qu'elle a légitimement cru que Mme [K] [Y] était partie au contrat ;

- de juger que Mme [Y] doit être attrait dans la cause ;

- de juger que Mme [Y] sera condamnée solidairement avec M. [Y] à lui payer les sommes qui lui sont dues ;

A défaut,

- de juger que M. [Y] sera condamné à lui payer les sommes qui lui sont dues ;

- de juger que les demandes de M. [Y] tendant à voir ' constater ' ne constituent pas des prétentions.

- de juger que ses demandes ne sont pas prescrites ;

- de juger que les époux [Y] se sont contractuellement engagés à lui régler la somme de 114.927,90 € TTC correspondante à des travaux de construction ;

- de juger que les travaux ont été exécutés sans qu'aucune contestation postérieure à ces travaux ne soit élevée par les époux [Y] ;

- de juger que les époux [Y] ont tacitement réceptionné l'ouvrage qu'elle a réalisé en février 2019 ;

- de juger que les époux [Y] ont engagé leur responsabilité contractuelle en manquant à leurs obligations de paiement, retenant abusivement certaines sommes contractuellement dues, ce qui lui a généré un préjudice financier;

- de juger que sa créance initiale à l'encontre des époux [Y] s'élevait à 9.968,55 € ;

- de juger que sa créance à ce jour s'élève à la somme de 5.336,93 €, au titre des retenues de garantie à régler pour les travaux effectués ;

- d'écarter des débats toutes les demandes de M. [Y] tendant à voir 'constater' ;

- de condamner solidairement les époux [Y] au paiement de la somme de 9.968,05 €, déduction faite de la somme de 4.631,62 euros qu'elle a perçue, soit la somme de 5.336, 93 euros;

- de condamner M. [Y] au paiement de la somme de 9.968,05 €, déduction faite de la somme de 4.631,62 euros qu'elle a perçue, soit la somme de 5.336, 93 euros ;

- de condamner solidairement les époux [Y] au paiement de la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour rétention abusive des sommes dues ;

A défaut,

- de condamner M. [Y] au paiement de la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour rétention abusive des sommes dues ;

- de condamner chacun des époux [Y] au paiement des intérêts au taux légal, à compter de la mise en demeure du 4 mars 2021 ;

A défaut,

- de condamner M. [Y] au paiement des intérêts au taux légal, à compter de la mise en demeure du 4 mars 2021 ;

- de débouter M. [Y] de ses demandes;

- de condamner chacun des époux [Y] au paiement de la somme de 7.000 €, au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

A défaut,

- de condamner M. [Y] au paiement de la somme de 7.000 €, au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- de condamner solidairement les époux [Y] au paiement des entiers dépens, en application de l'article 696 du Code de procédure civile ;

A défaut,

- de condamner M.[Y] au paiement des entiers dépens, en application de l'article 696 du Code de procédure civile.

Elle indique que le rapport d'expertise judiciaire confirme la rétention abusive des époux [Y] des sommes dont ils sont redevables à son encontre.

Elle expose être créancière de retenues de garantie et du paiement du solde d'un montant de 4631,62 euros de la facture n° 742 du 31 mars 2019.

Elle indique que Mme [Y] doit être considérée comme sa débitrice du fait que la lettre d'engagement, que cette dernière n'avait certes pas signée, était conclue entre la SARL ADR et M. et Mme [Y]. Elle ajoute qu'elle pouvait légitimement croire que Mme [Y] avait mandaté son époux pour effectuer les travaux en son nom et pour son compte et fait état de l'existence d'un mandat apparent. Elle précise que ses factures étaient libellées au nom de M. et Mme [Y], sans protestation de la part de ces derniers. Elle ajoute que Mme [Y] était dans la cause en première instance.

Elle estime que la cour n'est pas saisie des demandes de 'constater' de M.[Y].

Elle conteste toute prescription de sa demande de paiement des retenues de garanties.

Elle conteste l'argument selon lequel le point de départ du délai de prescription court un an après l'émission de chaque facture. Elle relève qu'il n'y eu aucune réception de l'ouvrage à la suite des factures éditées entre le 30 septembre 2017 et le 31 janvier 2019.

Elle mentionne que M.et Mme [Y] n'ont émis des contestations qu'après qu'elle a sollicité le paiement de sa créance.

Elle déclare que les retenues de garantie, qui se sont cumulées, étaient exigibles un an après la réception des travaux.

Elle indique que la facture n° 742 concerne une créance certaine et exigible. Elle conteste n'avoir pas transmis cette facture.

S'agissant du paiement des retenues de garanties, elle rappelle la réception tacite des travaux par les époux [Y] qui ont pris possession du bien.

Elle soutient que l'expert judiciaire note que les travaux de reprise des désordres sont mineurs voire inexistants, si bien que les époux ne peuvent se prévaloir de malfaçons pour refuser d'acquitter le montant de la facture et restituer les retenues de garanties.

Elle fait état de sa créance et note avoir perçu la somme de 4631,62 euros après une saisie pratiquée sur le compte bancaire de M.[Y].

Elle fait état du préjudice qu'elle a subi en raison de la résistance abusive des époux [Y] à lui verser les sommes dues. Elle évoque leur mauvaise foi.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 27 décembre 2023.

MOTIVATION

Sur la mise en cause de Mme [K] [Y]

La SARL ADR n'a pas intimé Mme [Y]. Ses demandes sont en conséquence irrecevables à son encontre.

Sur les demandes de 'constater' et de 'juger'

La cour rappelle, à titre liminaire, qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes visant à 'constater' ou 'juger' qui ne constituent pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions en ce qu'elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques au sens de l'article 4 du code de procédure civile et ne constituent que des rappels de moyens ou des arguments.

Toutefois, la demande de M.[Y] tendant à voir constater la prescription acquisitive des appel en garantie des factures 00006231, 0000650A et 0000656A est une demande en justice puisqu'il sollicite clairement la prescription de la demande en restitution de la retenue en garantie.

Sur la prescription de la demande de restitution des retenues de garantie

L'article 218-2 du code de la consommation énonce que l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans.

Selon l'article 1 de la loi du 16 juillet 1971 dans sa version applicable, les paiements des acomptes sur la valeur définitive des marchés de travaux privés visés à l'article 1779-3° du code civil peuvent être amputés d'une retenue égale au plus à 5 p. 100 de leur montant et garantissant contractuellement l'exécution des travaux, pour satisfaire, le cas échéant, aux réserves faites à la réception par le maître de l'ouvrage.

Selon l'article 2 de la même loi, à l'expiration du délai d'une année à compter de la date de réception, faite avec ou sans réserve, des travaux visés à l'article précédent, la caution est libérée ou les sommes consignées sont versées à l'entrepreneur, même en l'absence de mainlevée, si le maître de l'ouvrage n'a pas notifié à la caution ou au consignataire, par lettre recommandée, son opposition motivée par l'inexécution des obligations de l'entrepreneur. L'opposition abusive entraîne la condamnation de l'opposant à des dommages-intérêts.

Le marché de travaux conclu entre les parties, qui vise le devis n° 775 du 04 juillet 2017, d'un montant de 114.927, 90 euros mentionnait qu'il n'y aurait aucun acompte à la commande et que le règlement serait effectué mensuellement, suivant l'avancement des travaux déjà réalisés.

L'expert rappelle que les travaux confiés à la société ADR avait pour objet la réalisation de gros oeuvre de la maison, des murs et de quelques prestations de VRD. Il note que les lots de corps d'états secondaires ont été réalisés directement par M.[Y] qui s'est installé dans la maison en février 2021.

Il relève que le gros oeuvre était terminé en mars 2018.

Il n'est pas démontré de réception tacite en février 2019. M.[Y] justifie avoir, par un courriel du 18 mars 2018, dénoncé des désordres au représentant de la SARL ADR, mais sans les décrire. Dans un courriel du 25 mars 2018, il demandait au représentant de la SARL ADR d'intervenir sur les chaînages d'arase afin de pouvoir poser lui-même la charpente. Ce n'est qu'après avoir été sollicité en paiement du solde du marché par lettre du 04 mars 2021, que M.[Y] évoque avec précision certaines difficultés (absence de réception de plan de coffrage des planchers; absence d'informations sur le changement des liants pour le montage des Monomur avec la validation du fabricant ainsi que la validation des colles utilisées; absence de réception du projet DGD; absence de réception de copie d'attestations d'assurances), sans toutefois évoquer de malfaçons. Il ressort de l'expertise judiciaire que M.[Y] s'est installé dans la maison en février 2021, après avoir payé l'essentiel du marché, ce qui constitue une réception tacite.

Dès lors, la demande en paiement des retenues de garantie par acte d'huissier du 13 avril 2021 n'est pas prescrite.

Sur la restitution des retenues de garantie

L'expert expose que M.[Y] a retiré à la société ADR la réalisation des enduits primaires des façades, ce qui a entraîné une absence de finition des ouvrages, ainsi que la réalisation des appuis et seuils des portes fenêtres, ce qui a ôté du marché de cette société des pièces de finitions.

Il estime que les travaux de reprise des désordres sont mineurs voire inexistants.

L'expert, qui a étudié l'ensemble des factures éditées par la société ADR, relève que l'ensemble des prestations facturées avaient été réalisées, à l'exception de la pose de briques de terre cuites Climamur 30 cms de Wienerberger au lieu de briques Monomur R 37 Porotherm de Wienerberger, sans qu'il considère que ce changement ait d'impact sur l'ouvrage.

Dès lors, c'est à tort que M.[Y] s'oppose au versement des retenues de garantie. Il sera condamné au versement de la somme de 5336, 93 euros

Sur le paiement de la facture n° 00000742 du 31 mars 2019

Cette facture est versée au débat comme en témoigne le bordereau de pièce (pièce 4) et la pièce fournie à la cour.

Cette facture est d'un montant de 4969,20 euros TTC. Elle a pour objet 'VRD version 70m, EDF-PTT', la fourniture et la mise en oeuvre de briques creuses à perforations verticales de 30 cms, la fourniture et la mise en oeuvre d'élément de poteau en briques creuses à perforations verticales de 30 cms d'épaisseur, et la fourniture et mise en oeuvre d'éléments de chaînage horizontal en briques creuses de 30 cms d'épaisseur.

L'expertise judiciaire, effectuée contradictoire, dont le rapport final a été déposé en l'état le 17 octobre 2023, a pris en compte les pièces de M.[Y] ( notamment le procès-verbal d'huissier de justice du 11 juin 2018 et le rapport amiable de M.[C] du 05 décembre 2021). Effectuée avec sérieux et objectivité, elle constitue une pièce sur laquelle la cour peut s'appuyer.

L'expert judiciaire, qui a eu transmission de l'ensemble des factures, (dont la facture litigieuse du 31 mars 2019), a relevé que l'ensemble des prestations facturées par la SARL ADR avaient été réalisées sur le chantier, hormis les réserves ou malfaçons qu'il évoque, et notamment, la pose de briques en terre cuites Climamur 30 cms de Wienerberger au lieu de briques Monomur R37 Porotherm de Wienerberger.

L'expert ne mentionne pas que les travaux de VRD visés par la facture du 31 mars 2019 n'auraient pas été réalisés. S'agissant des autres prestations, il s'agit de la pose de briques de 30cms Climamur au lieu de celles qui avaient été prévues par le devis. Il n'en demeure pas moins que la prestations a été faite.

L'expert mentionne que le changement de briques n'a que peu d'impact thermique, qu'il n'affecte pas l'ouvrage dans un de ses éléments constitutifs, qu'il ne le rend pas impropre à sa destination et qu'il ne compromet pas la solidité de l'ouvrage. Le rapport amiable du 31 octobre 2023 de M. [B], effectué après le dépôt du rapport d'expertise judiciaire, n'est pas suffisamment documenté pour écarter les conclusions de l'expert judiciaire.

L'expert judiciaire évoque un écart entre la pose des briques et note qu'il s'agit d'un désordre esthétique. Toutefois, il relève que la réalisation des enduits primaires de façades a été retiré à la société ADR, ce qui a entraîné une absence de finition des ouvrages.

Dès lors, c'est à tort que M.[Y] estime que la facture sollicitée n'est pas due. Il ne peut soulever d'exception d'inexécution. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

Sur les sommes dues par M. [Y]

M.[Y] sera ainsi condamné au versement de la somme de 9968, 05 euros, déduction faite de celle de 4631, 32 euros (au titre de la facture sollicitée, payée à l'issue du jugement déféré), soit 5336, 93 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 04 mars 2021.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

Sur la demande de dommages et intérêts formée par la société ADR

La société ADR ne justifie pas d'un préjudice distinct qui ne serait pas déjà réparé par les intérêts moratoires. Elle sera en conséquence déboutée de sa demande de dommages et intérêts. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

Sur la demande de dommages et intérêts formée par M.[Y]

M.[Y] ne justifie pas du préjudice qu'il aurait subi à raison de l'inexécution contractuelle par la société ADR de ses obligations. Ainsi qu'il l'a été indiqué, les travaux de reprise sont minimes, voire inexistants.

M.[Y] évoque un préjudice financier et moral, sans faire de distinction entre les deux chefs de préjudice. Il ne démontre ni ne détaille ces deux préjudices. Il ne justifie pas plus que l'AVC dont il a malheureusement été victime aurait été en lien avec les agissements qu'il reproche à la société ADR.

En conséquence, il sera débouté de sa demande de dommages et intérêts. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

Sur les dépens et sur l'article 700 du code de procédure civile

M.[Y] est essentiellement succombant. Il sera condamné aux dépens de première instance et d'appel et sera débouté de ses demandes au titre des frais irrépétibles.

Il n'est pas équitable de laisser à la charge de la société ADR les frais irrépétibles qu'elle a exposés en première instance et en appel.

Le jugement déféré qui a condamné M.[Y] aux dépens et au versement de la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile sera confirmé.

Il sera également condamné à payer la somme de 500 euros à la société ADR au titre des frais irrépétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe,

DÉCLARE irrecevables les demandes de la société ADR à l'égard de Mme [K] [Y]

CONFIRME le jugement déféré, sauf en ce qu'il a rejeté les demandes de la société ADR au titre du remboursement des retenues de garantie,

STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT,

REJETTE la fin de non recevoir tirée de la prescription de la demande de restitution des retenues de garantie,

CONDAMNE M.[I] [Y] à payer à la société ADR la somme de 9968, 05 euros, déduction faite de celle de 4631, 32 euros (au titre de la facture sollicitée, payée à l'issue du jugement déféré et qui n'est plus sollicitée par la société ADR), soit 5336, 93 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 04 mars 2021,

CONDAMNE M.[I] [Y] à verser à la société ADR la somme de 500 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,

REJETTE la demande de M.[I] [Y] au titre des frais irrépétibles qu'il a exposés devant la cour d'appel,

CONDAMNE M.[I] [Y] aux dépens de la présente instance.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-7
Numéro d'arrêt : 22/04572
Date de la décision : 07/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-07;22.04572 ?
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