COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-8b
ARRÊT AU FOND
DU 07 MARS 2024
N°2024/174
Rôle N° RG 21/14983 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BIIZZ
[D] [S]
C/
Caisse primaire d'assurance maladie du Var
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
- Me Sabrina PRATTICO
- Me Stéphane CECCALDI
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Pole social du Tribunal Judiciaire de Toulon en date du 24 Septembre 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 19/01820.
APPELANT
Monsieur [D] [S], demeurant [Adresse 1] - [Localité 2]
représenté par Me Sabrina PRATTICO, avocat au barreau de TOULON
INTIME
Caisse primaire d'assurance maladie du Var, demeurant [Adresse 19] - [Localité 9]
représenté par Me Stéphane CECCALDI, avocat au barreau de MARSEILLE,
dispensé en application des dispositions de l'article 946 alinéa 2 du code de procédure civile d'être représentée à l'audience
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Janvier 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Benjamin FAURE, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Mme Emmanuelle TRIOL, Présidente de chambre
Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller
Monsieur Benjamin FAURE, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Séverine HOUSSARD.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 07 Mars 2024.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 Mars 2024
Signé par Mme Emmanuelle TRIOL, Présidente et Mme Séverine HOUSSARD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
M. [D] [S], né le 22 mai 1955, a perçu de la caisse primaire d'assurance maladie du Var (CPAM) une pension d'invalidité de 2e catégorie à compter du 12 décembre 2013 d'un montant brut mensuel de 1.449,30 euros.
Par décision du 22 novembre 2018, la CPAM a suspendu sa pension au-delà du 1er juin 2017 au motif qu'il ne remplissait plus les conditions d'octroi d'une pension d'invalidité au - delà de l'âge légal de la retraite.
Le 20 décembre 2018, M. [D] [S] a saisi la commission de recours amiable qui a rejeté le recours le 4 janvier 2019.
Le 12 mars 2019, M. [D] [S] a saisi le pôle social du tribunal de grande instance de Toulon.
Par jugement du 24 septembre 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Toulon a rejeté la demande de M. [D] [S] et l'a condamné aux dépens en considérant que ce dernier ne rapportait pas la preuve de l'exercice effectif d'une activité professionnelle rémunérée.
Le 21 octobre 2021, M. [D] [S] a relevé appel du jugement dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas contestées.
EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Initialement appelé à l'audience du 16 février 2023, le dossier a été renvoyé à l'audience du 18 janvier 2024 avec un calendrier de procédure, l'appelant ayant changé d'avocat suite à la cessation d'activité de son conseil.
Dans ses conclusions, soutenues oralement à l'audience du 18 janvier 2024, auxquelles il est expressément référé, M. [D] [S] sollicite l'infirmation du jugement, et, statuant à nouveau, l'octroi d'une pension d'invalidité au - delà de l'âge légal de la retraite, la condamnation de la CPAM a :
- "informer l'assureur prévoyance de la perception de la pension d'invalidité depuis le 22 mai 2017;
- "la condamnation de la CPAM à supporter les dépens et à lui payer :
- l'arriéré de pension depuis le 22 mai 2017 ;
- 5000 € en réparation de son préjudice ;
- 2000 € sur le fondement de 700 du code de procédure civile ;
Au soutien de ses prétentions, il fait valoir qu'il est le gérant de plusieurs sociétés dans lesquelles il exerce des fonctions effectives ainsi que le démontrent les attestations de ses experts comptables et les éléments fiscaux desdits sociétés .
Dispensée de comparaître sur le fondement de l'article 946 alinéa 2 du code de procédure civile, la CPAM, dans ses conclusions antérieurement communiquées à la partie adverse pour l'audience du 16 février 2023, auxquelles il est expressément référé, sollicite la confirmation du jugement.
Elle expose que l'appelant ne démontre pas l'exercice d'une activité professionnelle, la seule activité destinée à faire fructifier un patrimoine au travers de la direction de sociétés n'étant pas une activité professionnelle rémunérée.
MOTIFS
Sur la demande de maintien de sa pension d'invalidité par M. [D] [S] et ses conséquences
En application du deuxième alinéa de l'article L341-16 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, " l'assuré qui exerce une activité professionnelle et qui, à l'âge prévu au premier alinéa de l'article L. 351-1, ne demande pas l'attribution de la pension de vieillesse substituée continue de bénéficier de sa pension d'invalidité jusqu'à la date pour laquelle il demande le bénéfice de sa pension de retraite et au plus tard jusqu'à l'âge mentionné au 1° de l'article L. 351-8. "
Il résulte de ce dernier texte que l'exercice d'une activité professionnelle doit s'entendre d'une activité effective, la simple existence d'un lien contractuel ne pouvant suffire à caractériser une telle activité.
La date à laquelle doit s'apprécier la condition légale exigée pour conserver le bénéfice de la pension d'invalidité, à savoir l'exercice d'une activité professionnelle rémunérée, est celle de l'âge prévu au premier alinéa de l'article L. 351-1 du code de la sécurité sociale. Il incombe donc à l'assuré de démontrer qu'à son 62e anniversaire, il exerçait une activité professionnelle rémunérée, soit au 22 mai 2017.
Par courrier du 5 janvier 2017, M. [D] [S] a indiqué à la CPAM qu'il continuait d'exercer une activité professionnelle et qu'il souhaitait reporter sa retraite au 1er juin 2022.
Il reconnaît également qu'il a été radié comme professionnel indépendant depuis le 30 janvier 2014.
Il a communiqué à la CPAM des attestations rédigées par lui-même en date du 8 août 2017 dans lesquelles il précise être, en 2017, gérant non-salarié des sociétés [18], [16], [12], [7], [4] et [3].
Ces documents sont complétés par les attestations ultérieures, délivrées au fil des demandes de la CPAM, de M.[V], M.[O] et M.[U], experts-comptables, qui confirment cet état de fait et précisent, en définitive, qu'il n'a perçu aucune rémunération au titre de cette activité pour les années 2013, 2014, 2015, 2016 et 2017. Il exerce des fonctions identiques, non-rémunérées pour les exercices 2017 et ultérieurs, dans les sociétés [11] et[14]4.
D'ailleurs, la cour observe que si l'appelant se plaint des lenteurs de l'instruction de son dossier par la CPAM dans un courrier adressé à son directeur le 26 avril 2018, il demeure que les justificatifs de sa situation exacte au sein des sociétés mentionnées ci-dessus n'ont été obtenus que suite à plusieurs demandes de la CPAM puisque M. [D] [S] a d'abord communiqué des attestations rédigées par lui-même pour son propre compte, puis des attestations de ses comptables au titre des années 2013, 2014 et 2015 et enfin s'agissant des années 2016 et 2017.
M. [D] [S] verse aux débats les déclarations d'impôt sur les sociétés relatives aux sociétés [8], [10], [13],[5]c, [6], [15] dont il est gérant et associé, soit en son nom propre, soit par l'intermédiaire des sociétés [5] ou [17]. Ces sociétés exploitent du patrimoine immobilier donné à bail que M. [D] [S] fait fructifier.
Il est d'ailleurs à observer qu'il résulte de l'avis d'impôt 2018 sur les revenus 2017 que M. [D] [S] a perçu la somme de 33.732 euros correspondant au montant de sa pension d'invalidité et touche essentiellement des revenus fonciers et de capitaux mobiliers à proportion de 39.327 euros.
Il s'en évince que l'intéressé fait prospérer son patrimoine au travers des diverses sociétés évoquées ci-dessus.
Enfin, l'attestation de M.[V], expert-comptable, selon laquelle M. [D] [S] a engagé des dépenses dans l'intérêt de la société [17] au titre de son activité pour les années 2015 à 2022 n'amène aucun élément de nature à contredire ce constat et utile à la résolution du litige.
En l'état de ces éléments, la cour estime que [D] [S] ne rapporte pas la preuve de ce qu'il exerçait, au 22 mai 2017, une activité professionnelle rémunérée.
C'est donc à juste titre que les premiers juges ont débouté [D] [S] de sa demande de maintien de sa pension d'invalidité. Il n'y a donc pas non plus lieu de condamner la CPAM à informer l'assureur prévoyance de l'appelant du maintien de ladite pension et à verser l'arriéré des sommes dues depuis la cessation du versement de cette dernière.
Sur la demande indemnitaire de M. [D] [S]
Selon l'article 1240 du code civil, " tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. "
Au regard des éléments rappelés ci-dessus, aucune faute ne peut être reprochée à la CPAM qui a, à juste titre, considéré que M. [D] [S] ne justifiait pas de l'exercice effectif d'une activité professionnelle rémunérée.
En l'absence de faute commise par la CPAM, cette prétention a été rejetée à bon droit par les premiers juges.
Sur les dépens
M. [D] [S] succombe à la procédure et doit être condamné aux dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme, en ses dispositions soumises à la cour, le jugement rendu le 24 septembre 2021 par le pôle social du tribunal judiciaire de Toulon,
Y ajoutant,
Condamne M. [D] [S] aux dépens,
Le greffier La présidente