COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-2
ARRÊT AU FOND
DU 07 JUILLET 2023
N° 2023/224
Rôle N° RG 18/12165 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCZ4G
[N] [P]
C/
SARL LES DOCKS DU SAVON
Copie exécutoire délivrée
le : 07 juillet 2023
à :
Me Marc LECOMTE de la SELARL ERGASIA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
(Vestiaire 157)
Me Fanny OHANNESSIAN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
(Vestiaire 87)
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX-EN-PROVENCE - section C - en date du 07 Juin 2018, enregistré au répertoire général sous le n° F 15/01151.
APPELANTE
Madame [N] [P], demeurant [Adresse 4]
représentée par Me Marc LECOMTE de la SELARL ERGASIA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, vestiaire : 157
INTIMEE
SARL LES DOCKS DU SAVON PRISE EN LA PERSONNE DE SON GERANT EN EXERCICE, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Fanny OHANNESSIAN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 10 Mai 2023 en audience publique devant la Cour composée de :
Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre suppléante
Madame Florence TREGUIER, Présidente de chambre
Madame Ursula BOURDON-PICQUOIN, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Mme Cyrielle GOUNAUD.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 07 Juillet 2023..
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 Juillet 2023.
Signé par Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre suppléante et Mme Cyrielle GOUNAUD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La SARL la Savonnerie du Pilon du Roy a engagé Mme [N] [P] à compter du 02/11/2004 par contrat de travail à durée déterminée à temps complet.
Conservant l'activité de vente aux professionnels, elle a cédé l'activité de vente aux particuliers à la SARL Les Docks du Savon à compter du 01/01/2014, le contrat de travail de la salariée ayant été transféré à cette dernière.
La convention collective nationale applicable est celle des commerces de gros du 23/06/1970, étendue par arrêté du 15/06/1972.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 19/02/2015, l'employeur a notifié un avertissement à Mme [P].
Contestant la légitimité de cette sanction, souhaitant voir reconnaître qu'elle exerçait la fonction de responsable de magasin et sollicitant la condamnation de l'employeur à lui payer diverses sommes à titre salarial et indemnitaire, Mme [P] a saisi le 30 novembre 2015 le conseil de prud'hommes d'Aix en Provence lequel par jugement du 07 juin 2018 a :
- dit le niveau de classification de Mme [P] conforme à son emploi,
- confirmé l'avertissement du 19 février 2015,
- débouté les deux parties de toute autre demande,
- condamné Mme [P] aux entiers dépens.
Mme [P] a relevé appel de ce jugement le 19 juillet 2018 par déclaration adressée au greffe par voie électronique.
Mme [P] a été licenciée pour motif économique par lettre recommandée avec accusé de réception du 03/12/2019 qui lui a été signifiée le 14 janvier 2020 par acte d'huissier de justice de la Selarl Nicolas Rey § Associés.
Elle a saisi le conseil de prud'hommes d'Aix en Provence le 16 octobre 2020 sollicitant la condamnation de l'employeur à lui payer des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Aux termes de ses conclusions récapitulatives n°3 d'appelante notifiées par voie électronique le 22 février 2021 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens soutenus, Mme [P] a demandé à la cour de :
- la dire bien fondée en son appel,
Réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau:
- dire que l'emploi occupé par Mme [P] relève de la qualification de vendeur hautement qualifié, niveau 6, échelon 3,
- dire y avoir lieu en conséquence à rappel de salaires et accessoires,
- dire que la société Les Docks du Savon a manqué à son obligation de sécurité et exécuté le contrat de travail de manière déloyale et fautive,
- dire le licenciement de Mme [P] dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- condamner la société Les Docks du Savon au paiement des sommes suivantes :
- 29.002,82 € à titre de rappel de salaire sur la base du minimum conventionnel et 2.900,28 € de congés payés afférents,
- 2.989,66 € à titre de rappel de prime d'ancienneté et 298,97 € de congés payés afférents,
- enjoindre à la société Les Docks du Savon sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir d'avoir à établir et délivrer à Mme [P] des bulletins de paie mentionnant la qualification de 'vendeur hautement qualifié niveau 6, échelon 3" et comportant les rappels de rémunération judiciairement fixés,
- l'enjoindre sous la même astreinte d'avoir à régulariser la situation de la concluante auprès des organismes sociaux,
- condamner en outre la société intimée au paiement des sommes suivantes:
- 10.000 € à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale et fautive du contrat de travail et manquement à l'obligation de sécurité,
- 40.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 1.500 € à titre d'indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- dire que les créances à caractère salarial produiront intérêts de droit à compter de la demande en justicie avec capitalisation en application des articles 1231-7 et 1343-2 du code civil,
- condamner la société Les Docks du Savon aux entiers dépens.
Par conclusions d'intimée notifiées par voie électronique le 12 janvier 2021 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens soutenus, la société Les Docks du Savon a demandé à la cour de :
- dire que Mme [P] a sollicité la condamnation de l'intimée au paiement de la somme de 40.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse dans le courrier de la SELARL Ergasia adressé au conseil de prud'hommes d'Aix en Provence le 16/10/2020 et dans ses conclusions récapitulatives du 19/10/2020 devant la cour d'appel,
- prononcer le sursis à satuter dans l'attente de la décision définitive consécutive au jugement du conseil de prud'hommes d'Aix en Provence sur la litispendance,
- dire que la concluante a invoqué pour la première fois en appel les articles 101 et 102 du code de procédure civile, 9, 377 et 378 du même code, L.233-42 du code de commerce ainsi que L.1235-3 de celui du travail,
- dire que Mme [P] n'a pas visé dans ses conclusions du 06/01/2021 les articles 1231-7 et 1343-2 du code civile ainsi que L.1233-2 à L.1233-4 et L.1235-3 de celui du travail comme moyens nouveaux en appel,
- prononcer l'irrecevabilité de ces moyens nouveaux,
- écarter des débats les attestations de Mme [L], M. [J], Mme [U] et M. [Z] ainsi que la pétition des clients aux motifs suivants:
- l'absence de signature par Mmes [L] et [U] de leurs attestations,
- l'absence de carte nationale d'identité jointe à l'attestation de M.[J],
- le défaut de mention relative aux sanctions pénales pour faux témoignage sur cette attestation de M. [J],
- l'absence des cartes nationales d'identité des signataires de la pétition de clients et de cette mention afférente aux sanctions pénales pour faux témoignage sur cette pétition,
- dire que les documents communiqués par l'intimé rapportent la preuve de l'occupation par Mme [P] de la fonction de vendeuse niveau IV échelon 3,
- dire que l'appelante ne rapporte pas la preuve à sa charge de l'occuption des fonctions de vendeuse hautement qualifiée niveau VI échelon 3 et de responsable des ventes du magasin,
- débouter Mme [P] de ses demandes,
Confirmer partiellement le jugement du 07/06/2018,
- écarter des débats la jurisprudence de la cour de cassation résumée dans son bulletin d'information du 15/03/2016 et l'arrêt de la cour d'appel d'Aix en Provence du 21/07/2016 à défaut de leur communication contradictoire malgré la sommation de communiquer n°1 de la concluante du 23/10/2018,
- dire que la jurisprudence communiquée par Mme [P] ne correspond pas au cas d'espèce,
- dire que les documents communiqués par l'intimée rapportent la preuve du bien fondé de l'avertissement du 19/02/2015 et de l'absence de disproportion de la sanction,
- dire que l'appelante ne justifie pas des manquements contractuels reprochés à la société Les Docks du Savon,
- dire que les documents de la concluante établissent l'exécution déloyale par Mme [P] de son contrat de travail,
- dire que les documents de l'intimée établissent la réalité du motif du licenciement économique de l'appelante et l'impossibilité de son reclassement,
- dire que Mme [P] ne rapporte pas la preuve de son préjudice au-delà du montant de 7.900,26€ correspondant à sa perte de salaire,
- limiter en tout état de cause son indemnisation à cette somme,
- prononcer l'irrecevabilité de la demande de l'appelante relative à la régularisation de la situation de l'intimée auprès des organismes sociaux et ce d'autant plus à défaut de mention du moindre fondement juridique à cet égard,
- condamner Mme [P] au paiement des sommes suivantes à la concluante :
- 5.000 € à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices subis du fait des manquements contractuels de l'appelante toutes causes confondues,
- 5.000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure, appel et résistance abusifs,
- 6.000 € au titre des frais irrépétibles tant en 1ère instance qu'en appel, le montant retenu par l'huissier, les dépens dont le coût des 2 PV de constat de la Selarl Nicolas Rey et Associés du 14/01/2020.
Par ordonnance d'incident du 23 avril 2021, le magistrat de la mise en état a :
- ordonné le sursis à statuer dans l'attente du jugement à intervenir du conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence saisi depuis le 16/10/2020 de la contestation du licenciement et de la demande de condamnation de la société Les Docks du Savon au paiement des sommes de 40.000€ à titre de dommages-intérêts,
- dit n'y avoir lieu à statuer sur les demandes de la société Les Docks du Savon de dommages-intérêts et des deux parties au titre de l'article 700 du code de procédure,
- ordonné la révocation de la clôture et renvoyé le dossier à la mise en état,
- dit n'y avoir lieu à statuer sur la recevabilité des moyens invoqués par Mme [P].
Par jugement du 06 décembre 2022, le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence a:
- dit qu'il y a litispendance entre la présente procédure et celle dont est saisie la cour d'appel d'Aix en Provence,
En conséquence:
- s'est déclaré incompétent par application des articles 101 et 102 du code de procédure civile au profit de la cour d'appel d'Aix-en-Provence,
- dit qu'il sera procédé conformément aux dispositions de l'article 82 du code de procédure civile.
Par conclusions de demande de reprise d'instance notifiées par voie électronique le 10 janvier 2023 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens soutenus, Mme [P] a demandé à la cour de bien vouloir révoquer le sursis à statuer et réserver les dépens.
La clôture de l'instruction a été ordonnée le 17 avril 2023, l'audience de plaidoiries étant fixée au 10 mai 2023.
SUR CE :
A titre liminaire, la cour constate que la SARL Les Docks du Savon n'ayant pas notifié de nouvelles conclusions postérieurement à l'ordonnance du magistrat de la mise en état du 23 avril 2021, les prétentions dont elle demeure saisie relativement au prononcé du sursis à statuer dans l'attente du jugement du conseil de prud'hommes d'Aix en Provence sur la litispendance sont devenues sans objet.
En outre, par application de l'article 563 du code de procédure civile, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves pour justifier en appel les prétentions qu'elles avaient soumises au premier juge de sorte que les moyens nouveaux développés en appel par Mme [P] sont recevables.
Enfin, si Mme [P] a critiqué dans sa déclaration d'appel les chefs de jugement ayant rejeté sa demande d'annulation de l'avertissement du 19/02/2015, cette prétention n'a pas été énoncée dans le dispositif de ses dernières conclusions notifiées le 22/02/2021 de sorte que par application des dispositions de l'article 954§3 du code de procédure civile, la cour n'étant saisie d'aucune critique de ce chef, confirme le jugement entrepris.
Sur l'exécution du contrat de travail :
Sur la qualification professionnelle et le rappel des salaires :
La qualification professionnelle du salarié, qui doit être précisée dans le contrat de travail, est déterminée en référence à la classification fixée par la convention collective applicable dans l'entreprise.
En cas de litige, il appartient au juge d'apprécier les fonctions réellement exercées par le salarié
En cas de sous-classement, le salarié doit être replacé de manière rétroactive au niveau auquel son poste correspond. Il peut alors prétendre à un rappel de salaire correspondant au minimum conventionnel afférent à ce coefficient.
Mme [P] fait valoir qu'elle a été recrutée en qualité de responsable des ventes du magasin, emploi qu'elle n'a jamais cessé d'exercer, que travaillant seule et en toute autonomie dans le magasin, elle est entièrement responsable du chiffre d'affaires de l'entreprise et qu'au regard de ses responsabilités, elle ne pouvait être rémunérée par référence au niveau IV de la convention collective applicable correspondant à l'emploi de vendeuse mais au niveau VI, échelon 3 de celle-ci correspondant au poste de 'Vendeur hautement qualifié'.
La SARL Les Docks du Savon répond que malgré le terme de Responsable des ventes du magain mentionné par erreur dans le contrat de travail, la salariée n'a jamais exercé cette fonction mais celle de vendeuse alors qu'il n'existe aucune nécessité de technicité s'agissant de ventes de savons, que la fréquentation du magasin est relative, que le gérant détermine l'offre des produits, les sélectionne, fixe leur prix de vente et communique des instructions à la salariée, passe les commandes et le réapprovisionnement, livre et enlève des commandes dans le magasin, procède au relevé de caisse en monnaie.
En matière prud'homale, la preuve est libre, le juge appréciant souverainement la valeur et la portée des moyens de preuve qui lui sont soumis.
Au surplus, les dispositions de l'article 202 du code de procédure civile n'étant pas prescrites à peine de nullité , il n'y a pas lieu, ainsi que le demande la SARL Les Docks du Savon, d'écarter des débats les attestations versées aux débats par Mme [P] de Mme [L], M. [J], Mme [U] et M. [Z] ainsi que la pétition des clients pour absence de signatures sur certaines d'entre elles, pour absence de carte nationale d'identité ou encore pour absence de mention afférente aux sanctions pénales pour faux témoignage des signataires de la pétition de clients.
L'emploi de 'responsable des ventes du magasin' ne figure pas dans la liste des emplois repères figurant dans l'annexe A de la convention collective applicable qui mentionne les emplois suivants:
'- vendeur : dans le cadre des conditions commerciales fixées par la direction, recueille et suscite les commandes de la clientèle qu'il est chargé d'entretenir, possède une connaissance suffisante des gammes de produits et des échanges avec la clientèle pour effectuer des ventes de complément, de substituton ou de promotion,
- vendeur hautement qualifié : en fonction d'objectifs généraux donnés par la direction et l'appréciation des évolutions du marché, gère et développe une clientèle. Il possède une connaissance technique confirmée des produits et services dont il assure la promotion.'
S'agissant des 6 niveaux de qualification pour les employés et les techniciens, ils sont déterminés en fonction des critères classants fondamentaux :
- niveau I - exécution en application de consignes précises, de tâches simples ne demandant aucune formation spécifique,
- niveau II - pratique encadrée d'un savoir-faire acquis ou une formation professionnelle de base,
- niveau III - mise en oeuvre d'un savoir faire impliquant maîtrise des procédures et prise d'iniatives pour d'adapter aux situations courantes de l'emploi exercé,
- niveau IV - mise en oeuvre de techniques et de méthodes et prise d'initiative avec l'autonomie nécessaire à la réalisation d'un objectif spécifique à l'emploi,
- niveau V - exercice d'une fonction spécifique comportant réalisation de travaux très qualifiés, organisation et relations avec les autres services,
- niveau VI - exercice de fonctions analogues à celles du niveau V comportant une technicité de niveau supérieur.
Il résulte de la lecture de pièces contractuelles :
- qu'aux termes du contrat de travail à durée indéterminée signé des parties le 2 novembre 2004, Mme [P] est engagée en qualité de: 'responsable des ventes du magasin' pour un horaire de 35 heures par semaine moyennant une rémunération de 1.172,71 € ,
- que cet emploi figure sur les bulletins de paie qu'elle produit (pièce n°2) de mai à décembre 2004 lesquels indiquent qu'il s'agit de l'échelon 1, coefficient 1,
- que le bulletin de paie de décembre 2013 mentionne un emploi de 'vendeuse', niveau II, échelon 2, celui de novembre 2015, un emploi de vendeuse niveau III, échelon 2,
- que le bulletin de paie de juillet 2016 mentionne enfin un emploi de vendeuse, niveau IV, échelon 3.
Mme [P] verse aux débats quatre témoignages rédigés par des client(e)s qui tout en indiquant que cette dernière travaillait seule dans le magasin nuancent cette affirmation, Mme [L] indiquant avoir pu constater que la 'vendeuse Mme [P] [N] était exténuée, à bout de nerf, harcelée par Mme [G]' ce qui suppose une présence régulière de celle-ci dans le magasin, Mme [U] indiquant que Mme [P] 'était (parfois) aidée pendant les fêtes de fin d'année par une dame (la compagne du propriétaire), salariée de l'entreprise', M. [Z] faisant état de ce qu'il 'n'a été servi qu'une seule fois par une autre personne' étant relevé que cette clientèle ne fréquente le magasin qu'irrégulièrement et que si ces témoins précisent que Mme [P] ouvrait, fermait le magasin et leur vendait les produits, ils ne contredisent nullement l'attestation de M. [V] (pièce n°33) versé aux débats par l'employeur qui témoigne de ce qu'il a 'souvent vu M. [S], le gérant de l'entreprise à des heures et jours différents dans le dépôt faire des livraisons de produits, de la manutention de bidons,' la pétition produite en pièce n°15 par la salariée faisant seulement état de ses qualités de vendeuse (agréable, présentable, gentille, aimable) (pièces n°15).
Il se déduit de ces éléments que Mme [P] n'établit pas qu'elle exerçait la fonction de vendeuse hautement qualifiée en l'absence d'une technicité particulière des produits vendus et en raison d'une autonomie limitée à l'ouverture, la fermeture du magasin et à la vente des produits du magasin en appliquant les directives du gérant (pièce n°17 - gérant lui reprochant la mise en vente de boites d'emballage défectueuses sans son autorisation alors qu'il les avaient retirées de la vente) aucune des pièces produites ne démontrant qu'elle passait des commandes, qu'elle gérait ainsi le réapprovisionnement, le référencement, qu'elle installait les produits dans le magasin, qu'elle gérait le relevé journalier de la caisse à la place du gérant, la pièce n°6 qu'elle présente comme un'état des chiffres d'affaires du magasin depuis 2004" étant une liste manuscrite annuelle du chiffre d'affaires mensuel non corroborée par aucun élément de caisse et non conforme aux bilans et compte de résultat produits par l'employeur et qu'elle a, seule, constitué une clientèle fidèle et régulière l'employeur versant aux débats cinq témoignages précis et concordants (pièces n°19, 35 à 38) de clients ayant au contraire cessé de se rendre dans le magasin en raison du manque d'amabilité de Mme [P] à leur égard.
Dès lors, l'emploi de vendeuse niveau III, échelon 2, occupé par Mme [P] en novembre 2015 au moment de la contestation de sa classification correspond aux fonctions qu'elle exerçait réellement, le courrier du contrôleur du travail du 29/02/2018 se bornant à constater que le salaire versé à la salariée correspondait effectivement au niveau et à l'échelon figurant sur le bulletin de salaire de celle-ci de sorte qu'il convient de confirmer les dispositions du jugement entrepris l'ayant déboutée de sa demande de modification de sa classification professionnelle ainsi que de ses demandes de rappel de salaire et de prime d'ancienneté subséquentes correspondant à l'emploi de vendeur hautement qualifié, niveau 6, échelon 3.
Sur le manquement de l'employeur à l'obligation légale de sécurité et l'exécution déloyale du contrat de travail :
L'article L1222-1 du code du travail dispose que le contrat de travail est exécuté de bonne foi.
L'article L 4121-1 du code du travail prévoit que l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé mentale et physique des travailleurs.
Mme [P] sollicite la condamnation de la SARL Les Docks du Savon à lui payer une somme de 10.000 € à titre de dommages-intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail et manquement à l'obligation de sécurité reprochant à l'employeur :
- d'avoir été victime des débordements de sa compagne dont il a pris le parti sans chercher à s'assurer que cette dernière n'était pas l'instigatrice de la dégradation des relations avec sa salariée,
- d'avoir été contrainte de supporter une climatisation et un chauffage défectueux, l'absence d'eau chaude, une arrière-boutique dans la pénombre, l'obligation de porter des bidons de savon liquide de plus de 20 kgs,
- d'avoir fait installer deux caméras dans le magasin et une troisième dans l'atelier sans l'en informer péalablement.
Il est constant que par courrier daté du 19/02/2015 et adressé par lettre recommandée avec accusé de réception, M. [S], gérant de la société les Docks du Savon a notifié à Mme [P] un avertissement lui reprochant d'avoir violemment injurié Mme [G], sa compagne et tenu des propos diffamatoires mais que c'est à tort que Mme [P] prétend que celui-ci n'a pas cherché à s'assurer que celle-ci n'était pas l'instigatrice de la dégradation des relations avec sa salariée alors qu'il justifie s'être entretenu avec elle oralement avant notification de la sanction disciplinaire ce qu'a confirmé M. [M], propriétaire des murs, présent lors de cet entretien du 19 juin 2015 (pièce n°11) durant lequel 'Mme [N] a invoqué sa volonté de mettre fin à ses jours dans l'hypothèse où elle devrait perdre son emploi' l'employeur ayant en conséquence limité la sanction qu'il envisageait de prendre à son encontre à un avertissement.
Enfin, s'il est établi qu'avant le 19/02/2015, date de l'altercation ayant opposé Mme [P] et Mme [G] le magasin n'était pas doté d'un équipement de vidéo surveillance et que celui-ci a été installé postérieurement à cette date ainsi que le démontre la demande d'autorisation d'un système de vidéo protection établie le 05/06/2015 (pièce n°15) concernant l'installation de deux caméras à l'intérieur du magasin destinées selon l'imprimé de demande d'autorisation à la sécurité des personnes et à la prévention des atteintes aux biens, la salariée se borne à affirmer que le dispositif mis en place sans son information préalable 'est illicite et porte atteinte à ses droits' sans autres précisions alors qu'elle ne soutient ni ne démontre que ce système de vidéoprotection était utilisé pour la contrôler dans l'exercice de leurs fonction, que l'employeur indique que 'cette installation avait un but dissuasif pour la clientèle' de sorte qu'en l'état des éléments versés aux débats, l'installation litigieuse ne devait pas donner lieu à une information préalable de Mme [P] de sorte que l'employeur n'a commis aucun manquement.
Pour démontrer le manquement de l'employeur à son obligation légale de sécurité, Mme [P] s'appuie exclusivement sur des photographies (pièce n°19) au demeurant de très mauvaise qualité.
Cependant, la charge de la preuve du respect de l'obligation de sécurité pèse sur l'employeur auquel il appartient de démontrer qu'il a effectivement pris les mesures nécessaires pour protéger la santé et assurer la sécurité de la salariée ce qu'il ne fait pas ne produisant qu'une seule attestation établie par M. [V] lequel évoque la manutention de produits et de bidons par le gérant et non par Mme [P] sans verser aux débats aucun élément prouvant que celle-ci n'a pas travaillé avec une climatisation et un chauffage défectueux, en l'absence d'eau chaude, dans la pénombre et ce faisant ne démontre pas qu'il a respecté son obligation légale de sécurité causant ainsi un préjudice à Mme [P] lequel sera réparé par la condamnation de l'employeur à lui payer une somme de 500 € à titre de dommages-intérêts pour exécution fautive du contrat de travail et manquement à l'obligation de sécurité.
Les dispositions du jugement entrepris ayant débouté Mme [P] de cette demande sont infirmées.
Sur le manquement de la salariée à l'exécution loyale du contrat de travail :
La SARL les Docks du Savon reproche également à Mme [P] une exécution déloyale du contrat de travail réclamant la condamnation de cette dernière à lui payer une somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts en se fondant sur les documents suivants:
- une lettre recommandée avec accusé de réception qu'il lui a adressée le 08/12/2015 (pièce n°17) lui reprochant de ne pas l'avoir informé de ce qu'elle avait réceptionné la semaine précédente une lettre recommandée destinée au gérant contenant une convocation devant la juridiction des prud'hommes à sa demande,
- une lettre recommandée adressée au conseil de Mme [P] datée du 08/12/2015 (pièce n°18) à laquelle était jointe le courrier précédant leur reprochant leur absence de réponse,
- une attestation de Mme [W] (pièce n°19) attestant que l'employée a refusé au nom du gérant de participer à un don pour le loto des pompiers de gardanne en lui disant que le magasin fermait,
- un courriel de la SA Orange du 22/06/2015 auquel était joint des factures détaillées des 13 et 14/01/2015 faisant apparaître l'existence d'appels vers un numéro spécial correspondant à une voyante,
- un extrait Facebook faisant apparaître une publication vantant sous un faux profil les qualités de vendeuse de Mme [P],
- quatre attestations de clients (pièces n°35 à 38) évoquant le comportement désagréable de la salariée ayant occasionné une perte de la clientèle.
Le premier reproche concomitant à la saisine par la salariée le 30 novembre 2015 de la juridiction prud'homale ne caractérise aucun manquement contractuel.
L'attestation de Mme [W] est dépourvue de force probante les faits relatés n'étant pas datés.
L'établissement par la salariée d'un faux profil Facebook n'est pas non plus démontré alors que la salariée verse aux débats de nombreux témoignages de clients vantant ses qualités professionnelles de vendeuse.
Enfin, si l'employeur établit en produisant cinq témoignages concordants de clients ayant cessé de se rendre dans le magasin de savonnerie en 2018, 2019 en raison de l'accueil désagréable que leur a réservé la 'vendeuse [N] ' (pièces n°36 à 38) laquelle leur a donné l'impression d'être dérangée passant beaucoup de temps au téléphone et qu'il est exact que la salariée n'a pas contesté les appels téléphoniques en direction de sites de voyance en journée (pièce n°12) courant novembre et décembre 2014 imputés par l'employeur, la cour relève que ces derniers faits sont anciens, ponctuels, que les clients étant revenus, la perte de clientèle alléguée n'est pas établie, de sorte que la société Les Docks du Savon ne démontre ni l'existence ni l'étendue du préjudice allégué.
Les dispositions du jugement entrepris ayant débouté la SARL Les Docks du Savon de cette demande sont confirmées.
Sur la rupture du contrat de travail :
En application des articles L. 1233-2 et L.1233-3 du code du travail dans sa version applicable au litige, tout licenciement pour motif économique doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, le motif économique, non inhérent à la personne du salarié, résultant d'une suppression, ou transformation d'emploi ou d'une modification refusée par le salarié d'un élément essentiel de son contrat de travail, consécutives à des difficultés économiques, à des mutations technologiques à la cessation d'activité de l'entreprise ou à une réorganisation de celle-ci nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité.
Les difficultés économiques, qui ne doivent pas résulter d'un manquement ou d'une légèreté blâmable de l'employeur, sont caractérisées soit par l'évolution significative d'au moins un indicateur économique tel qu'une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires, des pertes d'exploitations ou une dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation soit par tout autre élément de nature à les justifier.
Une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires est constituée dès lors que la durée de cette baisse est, en comparaison avec la même période de l'année précédente au moins égale à un trimestre dans une entreprise de moins de 11 salariés.
Le licenciement économique d'un salarié ne peut intervenir que si tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et si son reclassement ne peut pas être opéré sur les emplois disponibles situés sur le territoire national dans l'entreprise ou le groupe auquel elle appartient.
La recherche de reclassement doit être effective et sérieuse, le reclassement devant être recherché à partir du moment où le licenciement est envisagé jusqu'à sa notification.
La lettre de licenciement notifiée le 3 décembre 2019 à Mme [P] , qui fixe les limites du litige, est rédigée ainsi qu'il suit :
'... Nous vous informons de notre décision de vous licencier pour les motifs économiques suivants.
Suite aux sérieuses difficultés financières rencontrées par notre entreprise, notre expert comptable M. [T] nous a communiqué par écrit l'analyse suivante de notre situation.
Nous avons réalisé un déficit de 40.670 € en 2018 notamment en raison d'une baisse du chiffre d'affaires.
Il est donc impératif si nous entendons assurer la pérennité de notre entreprise de renouer dès que possible avec sa rentabilité.
Pour atteindre cet objectif, la priorité doit être de maîtriser au mieux nos charges.
Le déficit sus-évoqués aboutit à ce que nos capitaux propres soient devenus inférieurs à la moitié de notre capital social.
Cette situation est visée par le code de commerce et notre société devrait donc être dissoute sauf décision contraire des associés.
Si les associés décident de ne pas dissoudre la société, ils devront reconstituer les capitaux propres dans un délai de 2 ans.
Il est dès lors nécessaire de retrouver un résultat bénéficiaire.
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Par ailleurs nos bilans 2016 à 2018 font apparaître un chiffre d'affaires HT respectifs de 141.844 euros en 2016, 144.009 euros en 2017 et 123.294 € en 2018.
Notre résultat fiscal a été un bénéfice de 1.960 € en 2016, une perte de 5.575 € en 2017 et une perte de 40.270 € en 2018.
Notre chiffre d'affaires du 01er au 30/09/2019 s'est élevé au montant de 108.276 € alors qu'il avait été de 120.953,05 € en 2016, 109.112,83 € en 2017 et 101.230 € TTC en 2018 durant la même période.
Par contre cette légère augmentation du chiffre d'affaires en 2019 n'est due qu'à un renforcement du mode de vente des produits en vrac vendus 20 % moins chers qui permet de récupérer des ventes au détriment de la marge;
Nous subissons depuis plusieurs années une baisse de notre chiffre d'affaires, des pertes d'exploitation et une dégradation de notre trésorerie.
Un réorganisation de l'entreprise est donc nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité.
Les difficultés financières évoquées et cette réorganisation de l'entreprise ont une incidence directe sur le maintien de votre poste de vendeuse qui correspond au seul emploi salarié.
L'occupation de ce poste sans salaire par le gérant en cas de licenciement économique permettrait une diminution de charges conséquentes.
Lors de l'entretien préalable du 6 novembre 2019 vous ne nous avez pas apporté d'éléments critiquant utilement la décision de licenciement pour motif économique que nous envisagions à votre encontre.
En dépit des recherches que nous avons effectuées conformément à l'article L.1233-4 du code du travail nous n'avons pas trouvé de poste de reclassement comme nous vous l'avons indqiué dans notre lettre recommandée avec accusé de réception du 24/10/2019....'
Mme [P] critique la motivation de la lettre de licenciement laquelle évoque des difficultés financières sans préciser leur incidence sur l'emploi qu'elle occupait nécessaire à la poursuite de l'exploitation de l'entreprise, l'employeur évoquant son intention de l'occuper lui-même sans salaire afin de réduire les charges salariales.
Elle conteste également la réalité du motif économique en indiquant que le chiffre d'affaires de l'année 2019 à la fin de laquelle son licenciement a été décidé est supérieur à celui de l'année 2018 objectivant ainsi une amélioration de la situation qu'elle a soutenue durant l'entretien préalable au licenciement et que la nécessité de réorganiser l'entreprise afin de préserver sa compétitivité n'est pas démontrée, l'environnement concurrentiel de l'entreprise Les Docks du Savon n'ayant pas évolué.
Enfin, elle indique que l'employeur ne lui a adressé aucune proposition de reclassement.
La société Les Docks du Savon répond en substance:
- que la lettre de licenciement énonce clairement que le poste de vendeuse sera supprimé dans la mesure où il sera désormais occupé par le gérant sans salaire afin de diminuer les charges de l'entreprise,
- que les pièces comptables produites pour la période 2016/2018 établissent la diminution du chiffre d'affaire, des pertes d'exploitation, une dégradation de la trésorerie ainsi qu'une diminution du capital social de plus de la moitié celui-ci étant ramené à 10.000 €, la légère augmentation du chiffres d'affaires en 2019 n'étant due qu'au renforcement du mode de vente des produits en vrac vendus 20% plus chers,
- que la salariée ne rapporte pas la preuve de l'absence d'évolution de l'environnement concurrentiel,
- que le seul emploi salarié de l'entreprise étant supprimé, elle ne pouvait proposer à Mme [P] aucune baisse d'horaire ou de salaire et qu'elle a tenté de la reclassant en externe en adressant plusieurs courrier à divers magasins de l'enseigne l'Occitanie en Provence situés à [Localité 2] et [Localité 3].
Il résulte de l'examen détaillé des bilans et comptes de résultat des exercices 2015 à 2019 que la perte de la moitié des capitaux propres évoqués en 2019 au moment du licenciement de la salariée a été décidée dès le 04/11/2015 (pièce n°9 de l'entreprise) soit quatre ans auparavant et que si l'employeur démontre qu'en décembre 2018 le chiffre d'affaires HT s'élevait à 123.294 euros contre 144.009 euros en décembre 2017, au moment où il a engagé la procédure de licenciement économique en octobre 2019, le chiffre d'affaires de la période du 01er au 30/09/2019 (pièce n°40) s' élevait à 108.276 € soit un résultat supérieur à celui réalisé sur la même période en 2018 (101.230 €) et équivalent à celui de la même période de 2017 (109.112,83€), l'amélioration constatée ayant perduré jusqu'à la fin de l'année le bilan simplifié de l'exercice 2019 faisant état d'un chiffre d'affaires de 131.029 euros avec un résultat déficitaire mais limité à 10.382 € au lieu de la perte de 40.270 € constatée l'année précédente de sorte que l'employeur ne démontre pas que les difficultés économiques rendaient nécessaire durant le dernier trimestre 2019 la suppression du poste de vendeuse de Mme [P] alors qu'il allégue sans produire aucun élément que le secteur est devenu très concurrentiel et qu'il ne prouve pas la réalité de la suppression de l'emploi de Mme [P] par reprise des tâches correspondantes par le gérant non salarié, l'extrait du registre du personnel versé aux débats en pièce n°39 n'étant pas actualisé puisque ne mentionnant pas même la date de sortie de l'entreprise de Mme [P] , le témoignage de M. [O] (pièce n° 36) faisant état de son retour au magasin de Gardanne en mai 2020 et de la présence 'd'une nouvelle personne s'occupant du magasin ...à la fois compétente, avenante et sympathique' dont la description physique ne correspond donc pas au gérant de l'entreprise.
Ainsi sans qu'il y ait lieu de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, la cour estime que le motif économique du licenciement n'étant pas établi, celui-ci est privé de cause réelle et sérieuse, la salariée étant fondée à solliciter la condamnation de la société Les Docks du Savon à lui payer des dommages-intérêts réparant la perte injustifiée de son emploi.
Elle demande à la cour par application des articles 10 de la convention n°158 de l'OIT et 24 de la charte sociale européenne d'écarter le barème prévu par l'article L.1235-3 du code du travail sollicitant, de procéder à une appréciation in concreto de son préjudice et de condamner l'employeur à lui payer une indemnité de 40.000 €.
La société les Docks du Savon s'y oppose à titre subsidiaire en indiquant que l'indemnité fixée par l'article L.1235-3 du code du travail pour 15 ans d'ancienneté est comprise entre 3 et 13 mois de salaire soit en l'espèce entre 4.679,52 € et 23.397,50 € et que Mme [P] ne rapporte pas la preuve de son préjudice au delà du montant de 7.900,26 € correspondant à sa perte de salaire.
Les dispositions des articles L. 1235-3 et suivantes du code du travail, dans leur rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, qui permettent raisonnablement l'indemnisation de la perte injustifiée de l'emploi et assurent le caractère dissuasif des sommes mises à la charge de l'employeur, sont de nature à permettre le versement d'une indemnité adéquate ou une réparation considérée comme appropriée au sens de l'article 10 de la Convention n° 158 de l'Organisation internationale du travail (OIT) et sont ainsi compatibles avec les stipulations de cet article.
Par ailleurs, les dispositions de la Charte sociale européenne selon lesquelles les Etats contractants ont entendu reconnaître des principes et des objectifs poursuivis par tous les moyens utiles, dont la mise en oeuvre nécessite qu'ils prennent des actes complémentaires d'application et dont ils ont réservé le contrôle au seul système spécifique visé par la partie IV, ne sont pas d'effet direct en droit interne dans un litige entre particuliers.
L'invocation de son article 24 ne peut dès lors pas conduire à écarter l'application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail, dans leur rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017.
Ainsi, tenant compte, d'une ancienneté de 15 années, d'un salaire de référence de 1.850,12 € (pièce n°24 -attestation de l'employeur destiné à Pôle Emploi), d'un âge de 47 ans de ce que Mme [P] a subi une période de chômage en 2020 mais ne justifie pas de sa situation professionnelle et notamment de ses recherches d'emploi au-delà du mois de décembre 2020, il convient de condamner la SAS Docks du Savon à lui payer une somme de 20.351,32 euros en brut à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Sur la demande de dommages-intérêts de la société Les Docks du Savon pour procédure, appel et résistance abusifs:
Le présent arrêt ayant partiellement fait droit aux demandes de Mme [P] , le rejet par la juridiction prud'homale de la demande de dommages-intérêts de la société Les Docks du Savon pour procédure, appel et résistance abusifs est confirmé l'intimée n'ayant caractérisé ni l'abus du droit d'agir en justice de Mme [P] ni celui d'exercer une voie de recours.
Sur la délivrance sous astreinte des bulletins de paie et la régularisation auprès des organismes sociaux:
Le sens du présent arrêt qui a confirmé les dispositions du jugement entrepris ayant débouté la salariée de sa demande de modification de sa qualification professionnelle et des demandes financières subséquentes conduit à confirmer les dispositions du jugement entrepris ayant rejeté la demande de Mme [P] de délivrance sous astreinte de bulletins de paie rectifiés comportant la qualification 'vendeur hautement qualifié, niveau 6, échelon 3" et les rappels de rémunération judiciairement fixés.
Les dispositions du jugement entrepris ayant rejeté la demande de Mme [P] de régularisation sous astreinte de sa situation auprès des organismes sociaux au bénéfice desquels auront été prélevées les cotisations figurant sur les buleltins de paie rectifiés sont confirmées.
Sur les intérêts et leur capitalisation :
Les créances indemnitaires portent intérêt au taux légal à partir de la décision qui les prononce en l'espèce à compter du présent arrêt.
Les intérêts échus dus au moins pour une année entière seront capitalisés dans les conditions prévues par l'article 1343-2 du code civil.
Le jugement déféré, qui a rejeté la demande, sera infirmé.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Les dispositions du jugement entrepris ayant condamné Mme [P] aux dépens de première instance et ayant rejeté sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile sont infirmées.
La société les Docks du Savon est condamnée aux entiers dépens et à payer à Mme [P] une somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :
Vu le jugement du conseil de prud'hommes d'Aix en Provence du 06/12/2022 ayant dit qu'il y a litispendance entre la procédure dont il a été saisie et celle dont la cour d'appel est saisie et s'étant déclaré incompétent au profit de cette dernière pour statuer sur les demandes de Mme [P] relatives à la rupture du contrat de travail,
Déclare sans objet la demande de la société Les Docks du Savon de sursis à statuer dans l'attente du jugement du conseil de prud'hommes d'Aix en Provence sur la litispendance.
Déclare recevables les moyens nouveaux développés en appel par Mme [P].
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a:
- rejeté la demande de Mme [P] de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et manquement de l'employeur à l'obligation légale de sécurité,
- condamné celle-ci aux dépens de première instance et déboutée de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Statuant à nouveau et y ajoutant:
Condamne la société Les Docks du Savon à payer à Mme [P] une somme de 500 € à titre de dommages-intérêts pour exécution fautive du contrat de travail et manquement à l'obligation de sécurité.
Dit le licenciement de Mme [P] dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Condamne la société Les Docks du Savon à payer à Mme [P] une somme de Vingt mille trois cent cinquante et un euros et trente deux cts (20.351,32 €) en brut à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Dit que les créances indemnitaires portent intérêt au taux légal à partir de la décision qui les prononce en l'espèce à compter du présent arrêt et que les intérêts échus dus au moins pour une année entière seront capitalisés dans les conditions prévues par l'article 1343-2 du code civil.
Condamne la société Les Docks du Savon aux dépens d'appel et à payer à Mme [P] une somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier Le Président