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06/07/2023 | FRANCE | N°22/00442

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-7, 06 juillet 2023, 22/00442


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7



ARRÊT AU FOND

DU 06 JUILLET 2023



N° 2023/ 239













Rôle N° RG 22/00442 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BIVHR







[I] [W]





C/



S.A. FLOA



























Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Smaelle MELLITI





Me Valérie BARDI






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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de proximité de MARTIGUES en date du 14 Décembre 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 21-000229.





APPELANT





Monsieur [I] [W]

né le 06 Avril 1970 à [Localité 3], demeurant [Adresse 2]



représenté par Me Smaelle MELLITI, avocat au barreau d'AI...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7

ARRÊT AU FOND

DU 06 JUILLET 2023

N° 2023/ 239

Rôle N° RG 22/00442 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BIVHR

[I] [W]

C/

S.A. FLOA

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Smaelle MELLITI

Me Valérie BARDI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de proximité de MARTIGUES en date du 14 Décembre 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 21-000229.

APPELANT

Monsieur [I] [W]

né le 06 Avril 1970 à [Localité 3], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Smaelle MELLITI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

S.A. FLOA, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Valérie BARDI de la SCP BARDI, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Mai 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre

Madame Carole MENDOZA, Conseillère

Madame Mireille CAURIER-LEHOT, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Juillet 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Juillet 2023.

Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Suivant offre préalable émise le 17 mai 2018 et acceptée électroniquement le même jour, la société GROUPE BANQUE CASINO a consenti à Monsieur [I] [W] un prêt d'un montant de 12.300 euros au taux nominal de 5,73% remboursable en 60 mensualités de 236,34 euros hors assurance et de 254,69 euros avec assurances.

Par lettre du 29 septembre 2020, le prêteur a mis en demeure Monsieur [W] de régler la somme de 2 226,63 euros à peine de déchéance du terme.

La société FLOA a prononcé la déchéance du terme par lettre recommandée du 24 novembre 2020 distribuée le 02 décembre 2020.

Par acte d'huissier du 10 février 2021, la SA FLOA, anciennement dénommée la société GROUPE BANQUE CASINO, a fait assigner Monsieur [W] aux fins de le voir condamner à lui verser la somme de 10 497, 29 euros, assortie des intérêts au taux contractuel de 5,73% à compter du 24 novembre 2020 outre 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure et les entiers dépens.

Par jugement contradictoire du 14 décembre 2021, le juge des contentieux de la protection de Martigues a :

- constaté la résolution du crédit à la consommation du 17 mai 2018 consenti par la SA FLOA, anciennement dénommée société BANQUE DU GROUPE CASINO à M.[W] par acquisition de la clause résolutoire le 2 décembre 2020 ;

- débouté M.[W] de sa demande visant à déchoir la SA FLOA, anciennement dénommée société BANQUE DU GROUPE CASINO, de son droit aux intérêts en application du contrat conclu le 17 mai 2018 ;

- condamné M.[W] à payer à la SA FLOA, anciennement dénommé société BANQUE DU GROUPE CASINO, la somme de 9.874,68 euros, avec intérêts au taux contractuel de 5,73% à compter du 2 décembre 2020 et jusqu'à parfait paiement ;

- autorisé M.[W] à se libérer de sa dette en 24 mensualités dont 23 mensualités de 410 euros chacune, la dernière étant majorée du solde en principal et intérêts restant dus à cette date ;

- dit que la première mensualité devra être réglée au plus tard dans le délai de 1 mois suivant la signification de la présente décision et les suivantes au plus tard le 15 de chaque mois ;

-dit qu'à défaut d'un seul versement à l'échéance prévue, suivie d'une mise en demeure restée infructueuse durant quinze jours, l'intégralité des sommes restant dues reviendra immédiatement exigible ;

- rappelé que conformément à l'article 1244-2 du code civil, la présente décision suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier et que les majorations d'intérêts ou les pénalités encourues à raison du retard cessent d'être dues pendant le délai fixé par la présente décision ;

- débouté la SA FLOA de sa demande prise en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné M.[W] aux dépens ;

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit.

Le premier juge a rejeté la demande tendant à voir prononcer la déchéance du droit aux intérêts du prêteur. Il estimé que celui-ci avait rempli son devoir d'explication, qu'il n'était pas tenu à un devoir de mise en garde au regard des ressources de l'emprunteur et qu'il avait vérifié sa solvabilité. Il a précisé que Monsieur [W] ne pouvait faire état de la souscription d'un prêt postérieure à la conclusion du prêt litigieux.

Il a réduit le montant de l'indemnité légale de 8% à la somme de 100 euros.

Il a rejeté la demande de délai de grâce en l'absence d'éléments d'informations sur l'avancée du dossier de surendettement déposé par l'emprunteur mais lui a accordé des délais de paiement.

Par déclaration d'appel du 11 janvier 2022, M.[W] a relevé appel de tous les chefs de cette décision, sauf en ce qu'elle a rejeté la demande de la SA FLOA au titre des frais irrépétibles.

La société FLOA a constitué avocat.

Par conclusions notifiées le 28 janvier 2022 sur le RPVA auxquelles il convient de se référer, M.[W] demande à la cour :

- de dire l'appel recevable,

- d'infirmer le jugement déféré

*statuant à titre principal,

- de prononcer un délai de grâce d'une durée de vingt-quatre mois à son bénéfice

- de dire que durant les vingt-quatre mois aucune échéance ne sera exigible par la BANQUE CASINO devenue la SOCIETE FLOA ;

- de dire que durant le délai de grâce d'une durée de vingt-quatre mois aucune mesure d'exécution ne pourra être intentée à son encontre

A titre subsidiaire,

- de lui octroyer des délais de paiement,

- de dire que durant 24 mois il versera la somme de 50 euros par mois à la société FLOA ;

*en tout état de cause,

- de dire que BANQUE CASINO devenue depuis la société FLOA n'a pas respecté les dispositions des articles L312-16 et suivants du Code de la consommation ;

- de prononcer la déchéance du droit au intérêts de l'établissement prêteur ;

- de dire que chacune des parties conservera ses dépens ;

- de dire n'y avoir lieu à article 700 du code de procédure civile.

Il sollicite la déchéance du droit à intérêts contractuels de la société FLOA à laquelle il reproche un manquement à son obligation d'explication et de vérification de sa solvabilité.

Il demande un délai de grâce de 24 mois. Il fait état d'une situation financière délicate en raison d'un arrêt de travail dû à un accident de la circulation. Il note avoir déposé un dossier de surendettement. A défaut, il sollicite des délais de paiement et propose de verser la somme mensuelle de 50 euros durant 24 mois.

Par conclusions notifiées le 21 avril sur le RPVA auxquelles il convient de se référer, la société FLOA demande à la cour :

- de confirmer le jugement déféré

- de débouter M.[W] de sa demande de report.

Y ajoutant,

- de condamner M.[W] à payer en outre la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en raison des frais irrépétibles exposés et qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la société COFIDIS.

- de condamner l'appelant aux entiers dépens d'appel.

Elle s'oppose aux délais de grâce et de paiement sollicités tout comme à la déchéance de son droit aux intérêts contractuels.

Elle soutient avoir respecté les obligations mises à sa charge, qu'il s'agisse des informations précontractuelles ou de la vérification de la solvabilité de l'emprunteur. Elle estime que ce dernier pouvait faire face aux mensualités du prêt au regard de ses revenus et charges déclarés.

Elle précise que les fonds ont été débloqués au profit de l'emprunteur le 1er juin 2018, soit postérieurement à la consultation du FICP. La déchéance du droit aux intérêts conventionnels n'est donc pas encourue du chef d'une prétendue consultation tardive du FICP.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 20 avril 2023.

MOTIVATION

Rien dans les éléments soumis à l'appréciation de la cour ne permet de critiquer la régularité, par ailleurs non contestée, de l'appel de Monsieur [W], qui sera déclaré recevable.

L'action de la société FLOA n'encourt pas la forclusion.

Sur la déchéance du droit aux intérêts

Aux termes des dispositions de l'article L 312-14 du code de la consommation, le prêteur ou l'intermédiaire de crédit fournit à l'emprunteur les explications lui permettant de déterminer si le contrat de crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière, notamment à partir des informations contenues dans la fiche mentionnée à l'article L. 312-12. Il attire l'attention de l'emprunteur sur les caractéristiques essentielles du ou des crédits proposés et sur les conséquences que ces crédits peuvent avoir sur sa situation financière, y compris en cas de défaut de paiement. Ces informations sont données, le cas échéant, sur la base des préférences exprimées par l'emprunteur(...).

L'article L 312-16 du même code énonce qu'avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur. Le prêteur consulte le fichier prévu à l'article L. 751-1, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné à l'article L. 751-6, sauf dans le cas d'une opération mentionnée au 1 de l'article L. 511-6 ou au 1 du I de l'article L. 511-7 du code monétaire et financier.

L'article L 312-24 du même code stipule que le contrat accepté par l'emprunteur ne devient parfait qu'à la double condition que celui-ci n'ait pas fait usage de sa faculté de rétractation et que le prêteur ait fait connaître à l'emprunteur sa décision d'accorder le crédit, dans un délai de sept jours. L'agrément de la personne de l'emprunteur est réputé refusé si, à l'expiration de ce délai, la décision d'accorder le crédit n'a pas été portée à la connaissance de l'intéressé. L'agrément de la personne de l'emprunteur parvenu à sa connaissance après l'expiration de ce délai reste néanmoins valable si celui-ci entend toujours bénéficier du crédit.

La mise à disposition des fonds au-delà du délai de sept jours mentionné à l'article L. 312-25 vaut agrément de l'emprunteur par le prêteur.

L'article L 341-2 du même code stipule que le prêteur qui n'a pas respecté les obligations fixées aux articles L. 312-14 et L. 312-16 est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

Monsieur [W] ne peut faire état d'un crédit postérieur accepté le 05 mars 2019 pour reprocher au prêteur un défaut de vérification de sa solvabilité, d'explication et de vigilance.

A la date de souscription du crédit accepté le 17 mai 2018, Monsieur [W], qui indiquait dans la fiche de dialogue supporter des charges mensuelles de 980 euros et percevoir la somme mensuelle de 4000 euros dans le cadre d'un CDI (justifiée par un bulletin de salaire du mois de décembre 2017 faisant état d'un revenu net moyen mensuel imposable de 4046, 89 euros et par les quatre bulletins de salaire des mois de janvier à avril 2018) était en mesure de s'acquitter des mensualités prévues. En l'absence d'un risque d'endettement excessif né de l'octroi de ce prêt, le prêteur n'était pas tenu à un devoir de mise en garde.

Le prêteur a fourni à Monsieur [W] la fiche précontractuelle européennes normalisées, qui lui permet d'avoir des explications sur le crédit proposé.

Le prêteur a vérifié la solvabilité de Monsieur [W], par le biais de la fiche de dialogue et du recueil de bulletins de salaire.

La consultation obligatoire du FICP a pour objet d'éclairer la décision finale du prêteur avec les données les plus à jour.

Le prêteur a consulté le FICP le 18 mai 2018 , avant le déblocage des fonds du premier juin 2018 qui vaut agrément du prêteur. Cette consultation est donc régulière.

En conséquence, il convient de rejeter la demande de déchéance du droit aux intérêts contractuels soulevée par Monsieur [W]. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

La SA FLOA sollicite la confirmation du jugement déféré qui a notamment réduit le montant de l'indemnité légale de 8% et fixé sa créance.

Compte tenu des pièces produites au débat et du rejet de la demande de déchéance du droit aux intérêts contractuels de la SA FLOA, il convient de confirmer le jugement déféré qui a condamné Monsieur [W] à verser à cette société la somme de 9.874,68 euros, avec intérêts au taux contractuel de 5,73% à compter du 2 décembre 2020 et jusqu'à parfait paiement.

Sur la demande de délais de grâce et de délais de paiement

Selon l'article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.

Il peut subordonner ces mesures à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette.

La décision du juge suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d'intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge (...).

Monsieur [W] justifie avoir déposé une demande de surendettement le 18 mars 2021 (pièce 5) et être en possession d'un arrêt de travail au titre d'un accident du travail à compter du 08 janvier 2020. La dernière prolongation justifiée s'arrête au 24 mai 2021. Devant la cour, il produit le justificatif de la recevabilité de sa demande de surendettement du 02 février 2022, après dépôt d'une demande du 07 janvier 2022. Il est mentionné que son dossier sera orienté vers des mesures imposées (réaménagement de ses dettes). La commission retenait un salaire de 3414 euros, l'absence de patrimoine de l'intéressé et notait qu'il était hébergé.

La recevabilité d'une demande de surendettement n'empêche pas le créancier d'obtenir un titre exécutoire.

Monsieur [W] sera débouté sa demande de délai de grâce qui n'est pas justifiée, eu égard à sa situation financière. Il sera débouté de sa demande de délais de paiement, compte tenu des mesures qui seront mises en oeuvre dans le cadre de la procédure de surendettement. Le jugement déféré sera infirmé s'agissant des délais de paiement.

Sur les dépens et sur l'article 700 du code de procédure civile

Monsieur [W] est essentiellement succombant. Il sera condamné aux dépens de première instance et d'appel.

Pour des raisons tirées de l'équité, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a condamné Monsieur [W] aux dépens et rejeté la demande formée par la SA FLOA au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe

DÉCLARE l'appel de Monsieur [I] [W] recevable

CONFIRME le jugement déféré, sauf en ce qu'il a accordé à Monsieur [I] [W] des délais de paiement par le biais de 24 mensualités dont 23 mensualités de 410 euros chacune, la dernière étant majorée du solde en principal et intérêts restant dus à cette date, 

STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT,

REJETTE la demande de délais de paiement formée par Monsieur [I] [W],

RAPPELLE que la SA FLOA devra respecter l'échéancier mis en oeuvre dans le cadre de la procédure de surendettement,

REJETTE la demande de la SA FLOA au titre des frais irrépétibles d'appel,

CONDAMNE Monsieur [I] [W] aux dépens de la présente instance.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-7
Numéro d'arrêt : 22/00442
Date de la décision : 06/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-06;22.00442 ?
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