COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-6
ARRÊT AU FOND
DU 06 JUILLET 2023
N° 2023/309
N° RG 22/00235
N° Portalis DBVB-V-B7G-BIUUK
S.A.S. HOPITAL PRIVE [Localité 9] [Localité 7] [8]
C/
[K] [V]
[S] [P]
CPAM DU VAR
Mutuelle SWISS LIFE
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
-SARL ATORI AVOCATS
-SELARL CABINET LIBERAS-FICI & ASSOCIÉS
-SELARL SOLUTIO AVOCATS
Décision déférée à la Cour :
Jugement du tribunal judiciaire de TOULON en date du 18 Novembre 2021 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 19/03406.
APPELANTE
S.A.S. HOPITAL PRIVE [Localité 9] [Localité 7] [8]
Prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège,
demeurant [Adresse 6]
représentée et assistée par Me Yves SOULAS de la SARL ATORI AVOCATS, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Emilie VERNE, avocat au barreau de MARSEILLE, postulant et plaidant.
INTIMES
Madame [K] [V]
née le [Date naissance 1] 1956 à [Localité 10],
demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Isabelle FICI de la SELARL CABINET LIBERAS-FICI & ASSOCIÉS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Magatte DIOP, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, postulant et assistée par Me Thierry CABELLO, avocat au barreau de TOULON, plaidant.
Monsieur [S] [P]
demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Emmanuelle PLAN de la SELARL SOLUTIO AVOCATS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, postulant et assisté par Me Véronique ESTEVE, avocat au barreau de NICE substituée par Me Laura FESNEAU, avocat au barreau de NICE, plaidant.
CPAM DU VAR,
Assignation en date du 04/03/2022 à personne habilitée,
demeurant [Adresse 4]
Défaillante.
Mutuelle SWISS LIFE,
Assignation en date du 02/03/2022 à personne habilitée,
demeurant [Adresse 5]
Défaillante.
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 23 Mai 2023 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Fabienne ALLARD, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président
Madame Anne VELLA, Conseillère
Madame Fabienne ALLARD, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Charlotte COMBARET.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Juillet 2023.
ARRÊT
Réputé contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Juillet 2023,
Signé par Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président et Madame Charlotte COMBARET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Exposé des faits et de la procédure
Le 14 avril 2009, Mme [K] [V] a bénéficié de la pose d'implants mammaires produits par la société Poly Implants Prothèse (PIP). L'implantation a été réalisée par le docteur [S] [P], chirurgien esthétique à l'hôpital privé [8] de [Localité 9].
Les suites de l'intervention ont été simples.
En mars 2010, l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (l'AFSSAPS), constatant une augmentation du nombre de ruptures de l'enveloppe des prothèses PIP a réalisé, dans les locaux de la société PIP, une inspection qui a révélé que les implants avaient été remplis avec un gel de silicone différent de celui déclaré par la société lors de sa mise sur le marché. Elle a donc préconisé, pour toutes les patientes concernées, un rappel avec suivi régulier de l'évolution des prothèses implantées, tout en suspendant la mise sur le marché de ces prothèses.
A la suite de ces recommandations, Mme [V] a sollicité le retrait de ses implants, qui a été réalisé le 14 janvier 2013 par M. [P].
Mme [V] a regagné son domicile le lendemain avec prescription de pansements à suivre durant quinze jours.
Les suites de cette intervention d'exérèse ont été marquées par un écoulement sur la partie médiane de la cicatrice péri-aréolaire du sein droit avec défaut de cicatrisation et douleurs persistantes.
Le 4 mars 2013, M. [P] a décidé de réopérer sous anesthésie générale pour une tuméfaction du sein droit avec mise à plat et drainage.
À la suite de cette intervention, dont le compte rendu ne mentionnait la présence d'aucune collection ni corps étranger, un écoulement discontinu a persisté au niveau de la cicatrice, conduisant le gynécologue de Mme [V] à prescrire une échographie mammaire. Celle-ci a révélé la présence d'une volumineuse formation hyper atténuante de six centimètres de largeur par trois centimètres de hauteur bien palpable, décollement périphérique de la coque rétractile sur son pourtour antérieur et écoulement par une porte de fistulation sous mamelonnaire.
Le 21 mai 2013, Mme [V] a été réopérée par le docteur [G] qui, en explorant le trajet fistuleux, a découvert la présence d'une compresse de cinq centimètres par cinq centimètres.
Celle-ci retirée, les suites ont été simples.
Mme [V] a saisi le juge des référés qui, par ordonnance du 7 juillet 2015 a désigné le docteur [B] [L] en qualité d'expert.
Celui-ci a déposé son rapport le 22 décembre 2015.
Par actes des 6 et 8 juin 1918, Mme [V] a fait assigner la société hôpital privé [8] et M. [P] devant le tribunal de grande instance de Toulon, afin d'obtenir, au contradictoire de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Var et de la société Swisslife, l'indemnisation de son préjudice corporel.
Par jugement du 18 novembre 2021, auquel il convient de se référer pour un exposé plus exhaustif des moyens, le tribunal judiciaire de Toulon a :
- déclaré M. [P] et la société hôpital privé [8] responsables des préjudices subis par Mme [V] lors de l'intervention du 14 janvier 2013 ;
- condamné in solidum M. [P] et la société hôpital privé [8] à lui payer une somme de 16 712,72 € en réparation de ses préjudices, hors postes soumis au recours de la CPAM ;
- dit que dans les rapports entre co-responsables, l'indemnisation sera supportée à hauteur de 75 % par M. [P] et de 25 % par la société hôpital privé [8] ;
- condamné solidairement M. [P] et la société hôpital privé [8] à payer à Mme [V] une indemnité de 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens comprenant les frais d'expertise judiciaire, avec droit de recouvrement direct ;
- ordonné l'exécution provisoire.
Le tribunal a détaillé ainsi les différents chefs de dommage de la victime directe :
- dépenses de santé actuelles : 1 861,85 € dont 1 843,85 € revenant à la CPAM et 18 € revenant à la victime ;
- perte de gains professionnels actuels : 5 798,72 € revenant à la victime
- déficit fonctionnel temporaire (28 €/jour) : 896 €
- souffrances endurées 3,5/7 : 8 000 €
- préjudice esthétique temporaire 2/7 : 2 000 €.
Pour statuer ainsi, le tribunal a considéré en substance, d'une part que l'oubli d'une compresse dans le corps d'un patient pendant une intervention consacre un manquement fautif du chirurgien mais également de l'établissement de soins sans qu'il y ait lieu de distinguer selon la taille de la compresse, d'autre part qu'en ne prenant pas la précaution de réaliser une échographie avant l'intervention du 4 mars 2013 qui avait pour objectif de rechercher l'origine de l'écoulement cicatriciel, M. [P] a commis une faute engageant sa responsabilité.
Dans les rapports entre co-responsables, le tribunal a considéré que la responsabilité se partageait à parts égales entre le chirurgien et l'établissement de soins ce qui concerne l'oubli de la compresse.
Par acte du 6 janvier 2022, dont la régularité et la recevabilité ne sont pas contestées, la société hôpital privé [8] a interjeté appel de cette décision en visant expressément tous les chefs de son dispositif.
La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 9 mai 2023.
Prétentions et moyens des parties
Dans ses dernières conclusions, régulièrement notifiées le 22 mars 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, la société Hôpital privé [8] demande à la cour de :
' infirmer le jugement en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau,
' prononcer sa mise hors de cause ;
' débouter Mme [V] de ses demandes à son encontre ;
' débouter M. [P] de sa demande de partage de responsabilité
' condamner Mme [V] à lui payer une indemnité de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
' condamner Mme [V] aux dépens distraits au profit de son avocat.
Au soutien de son appel et de ses prétentions, elle fait valoir que :
- le premier juge a dénaturé les termes du rapport d'expertise puisque l'expert n'a pas considéré qu'il appartenait au personnel de l'établissement de recompter l'ensemble des compresses quelle que soit leur taille ;
- si elle ne conteste pas qu'il n'existe aucune traçabilité du comptage des compresses lors de l'intervention du 14 mars 2013, rien ne lui imposait d'y procéder et lors de l'intervention ultérieure, réalisée par le docteur [G], seule les grandes compresses ont été recomptées et il appartenait au chirurgien d'être vigilant, sachant que seules les grandes compresses devaient être décomptées ;
- le personnel soignant salarié se trouvait, au moment des faits survenus au bloc lors de l'intervention chirurgicale, sous l'autorité du chirurgien qui, dès lors, est seul responsable de l'oubli de la compresse.
Dans ses dernières conclusions d'intimé régulièrement notifiées le 20 juin 2022, auxquelles il convient de renvoyer pour un exposé plus exhaustif des moyens, M. [P] demande à la cour de :
' confirmer le jugement en toutes ses dispositions ;
' condamner la société hôpital privé [8] à lui payer une indemnité de 2 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
' condamner la société hôpital privé [8] aux dépens.
Il ne conteste aucun des manquements fautifs qui lui sont reprochés et fait valoir que :
- la société hôpital [8] n'a adressé aucun dire à l'expert alors que, dès le dépôt de son pré-rapport, celui-ci a retenu à son encontre une faute en raison de l'absence de preuve d'un décompte des compresses ;
- au regard du déroulement d'une intervention c'est l'infirmier de bloc, salarié de l'établissement, qui compte les compresses en début d'intervention avant de les remettre au chirurgien puis qui procède à l'issue de l'intervention, à un nouveau décompte afin de vérifier qu'aucune n'a été oubliée dans le corps du patient, le chirurgien ne procédant à la fermeture que si le décompte est exact ; il s'agit d'une obligation propre et autonome du personnel du bloc qui ne nécessite aucune instruction du chirurgien, lequel n'est responsable des actes réalisés par les infirmiers que lorsque ceux-ci lui servent directement à opérer, mais non de ceux relevant de leur compétence propre ;
- contrairement à ce que soutient la société hôpital [8], le comptage des compresses, dénommé 'check list' est une obligation légale depuis le 1er janvier 2010, de sorte qu'il importe peu que le protocole propre à l'établissement ne prévoit qu'un décompte des grandes compresses.
Dans ses dernières conclusions, régulièrement notifiées le 10 juin 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, Mme [V] demande à la cour de :
' confirmer le jugement en toutes ses dispositions ;
' condamner la société hôpital privé [8] à lui payer une indemnité de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, distraits au profit de son avocat.
Elle fait valoir que :
- elle droit à l'indemnisation des conséquences dommageables de l'intervention dès lors qu'au cours de celle-ci une compresse a été oubliée ;
- M. [P] ne conteste pas sa responsabilité mais l'établissement doit également être condamné puisque le document de décompte des compresses à l'issue de l'intervention n'a pas été produit et qu'il n'est pas démontré que le comptage a bien été réalisé ;
- si le chirurgien est responsable en cas d'oubli d'une compresse, le personnel de l'établissement commet également une faute qui engage la responsabilité de son employeur lorsqu'une compresse est oubliée puisque l'oubli démontre que le décompte a, soit été mal fait, soit oublié et il n'y a pas lieu de distinguer selon la taille des compresses.
La CPAM du Var, assignée par la société hôpital privé [8] par acte du 4 mars 2022, délivré à personne habilitée et contenant dénonce de l'appel, n'a pas constitué avocat.
Par courrier adressé au greffe de la cour d'appel le 24 janvier 2022 elle a fait connaître le montant définitif de ses débours pour 1 843,85 €, correspondant à des prestations en nature.
La mutuelle Swisslife, assignée par la société hôpital privé [8] par acte du 2 mars 2022, délivré à personne habilitée et contenant dénonce de l'appel, n'a pas constitué avocat.
*****
L'arrêt sera réputé contradictoire conformément aux dispositions de l'article 474 du code de procédure civile.
Motifs de la décision
L'appel porte exclusivement sur les responsabilités, l'évaluation du préjudice n'étant remise en cause ni par l'appelant ni par les intimés.
Sur les responsabilités
En application de l'article L. 1142-1 I du code de la santé publique, hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute.
Il appartient à la victime, qui prétend être indemnisée de préjudices, de démontrer en quoi le médecin et/ou l'établissement de soins ont manqué à leur obligation de diligenter des soins consciencieux, attentifs et conformes aux données acquises de la science au jour de l'acte médical et, cette preuve étant rapportée, le lien de causalité entre le ou les manquements et les préjudices dont elle demande réparation.
En l'espèce, il résulte du rapport d'expertise qu'une compresse a été oubliée dans le corps de Mme [V] lors de l'intervention d'explantation de la prothèse mammaire qui a eu lieu à l'hôpital privé [8] le 14 janvier 2013.
L'expert n'a pas retrouvé de preuve d'un comptage des compresses lors de l'intervention.
Par ailleurs, il souligne que, postérieurement à l'oubli de la compresse, aucune imagerie n'a été réalisée par M. [P] en dépit de signes évoquant une complication locale alors que, si une échographie avait été réalisée d'emblée, elle aurait permis de poser le diagnostic et d'éviter l'échec de l'intervention du 4 mars 2013.
L'oubli d'un corps étranger dans le corps d'un patient pendant une intervention chirurgicale démontre une inattention lors des soins, révélant, soit que les compresses n'ont pas été comptabilisées avant et après intervention, soit qu'elles l'ont été de manière inexacte.
En ceci, il consacre un manquement fautif.
M. [P], chirurgien qui a opéré, ne le conteste pas, pas plus qu'il ne conteste avoir commis un autre manquement fautif après l'intervention en ne réalisant aucune imagerie en dépit de signes évoquant une complication locale afin de poser le bon diagnostic.
La société hôpital privé [8], en revanche, conteste être responsable de l'oubli de la compresse, considérant d'une part que le personnel mis à la disposition du chirurgien pendant l'intervention se contente d'exécuter les instructions du médecin sans prendre la moindre initiative, d'autre part que le protocole en vigueur en son sein n'impose que le comptage des grandes compresses.
Il n'existe aucun texte réglementaire qui impose le comptage des compresses lors d'une intervention chirurgicale.
Cependant, la Haute autorité de santé impose depuis 2010, dans le cadre de la procédure de certification des établissements de santé, la mise en place d'une 'check-list' lors des interventions chirurgicales afin de recenser le matériel utilisé et de veiller à ce qu'aucun ne soit oublié dans le corps du patient.
Le comptage est donc recommandé par la HAS au titre des bonnes pratiques concertées entre les différents intervenants au sein du bloc opératoire.
Il est d'ailleurs présenté par celle-ci comme un outil de sécurisation des prises en charge sanitaires.
Il en résulte que ce sont le comptage et la concertation entre les différents intervenants qui permet une sécurisation optimale de la prise en charge sanitaire.
Au sein d'un bloc opératoire plusieurs professionnels interviennent. Une infirmière dite « circulante » assure le relais entre l'équipe opératoire stérile (et donc le chirurgien) et l'environnement non stérile.
Par définition, le chirurgien ne peut se déstériliser pour prendre en charge le comptage du matériel utilisé en fin d'intervention avant de refermer la plaie.
La tâche de comptage des compresses incombe donc matériellement à l'infirmier et il s'agit d'un acte relevant pleinement de la compétence de celui qui y procède sans qu'aucune instruction ne soit nécessaire de la part du chirurgien.
De son côté, le chirurgien doit, avant de commencer l'intervention et après le dernier point de suture, s'assurer que le comptage a bien été effectué et que le nombre de compresses et champs récupérés correspond au nombre initial.
L'intérêt de cette check list réside donc dans le comptage, la comparaison des chiffres avant ouverture et après fermeture du corps du patient, le tout sous le double regard de l'infirmier et du chirurgien afin de minimiser les risques d'oubli.
Dans cette mesure, l'argumentation de la société Hôpital [8] qui, se prévalant du protocole en vigueur en son sein, soutient que seules les grandes compresses devaient être comptabilisées, est inopérant.
Outre que ce protocole n'est pas produit aux débats, il n'a aucun sens en regard de la procédure de sécurisation dont la teneur a été rappelée ci dessus et dont l'objectif est de recenser l'ensemble des compresses utilisées.
A supposer qu'un tel protocole soit en vigueur au sein de l'établissement, il ne permet pas de sécuriser dans les meilleures conditions la prise en charge sanitaire des patients puisque la distinction grandes/petites compresses n'est pas compréhensible dès lors que le risque d'oublier une compresse de petite taille, donc moins repérable, est tout aussi, voire plus, prégnant.
En l'espèce, c'est justement une compresse de petite taille qui a été oubliée dans le corps de Mme [V].
Au regard de ces éléments, le document produit par l'établissement, intitulé 'suivi d'intervention' et mentionnant le comptage de grandes compresses, à savoir vingt données et vingt reçues, au demeurant dénué de tout élément d'identification du patient ou de l'intervention, est inopérant.
La société hôpital privé [8] concède ne pas être en mesure de justifier du comptage des compresses lors de l'intervention du 14 janvier 2013.
Il en résulte que lors de l'intervention du 14 janvier 2023, ce comptage par le personnel et sa vérification par le chirurgien n'ont pas été assurés dans des conditions permettant une prise en charge sanitaire sécurisée de la patiente.
La responsabilité en incombe à égalité au personnel de l'établissement qui aurait dû compter toutes les compresses, petites ou grandes, et au chirurgien qui aurait dû s'assurer qu'un comptage exhaustif avait bien été réalisé et qui, au demeurant ne conteste pas sa part de responsabilité.
Chacun des responsables d'un même dommage devant être condamné à le réparer en totalité, c'est à juste titre que le tribunal a condamné M. [P] et la société Hôpital privé [8] in solidum à réparer l'intégralité du préjudice subi par Mme [V].
Par ailleurs, dans les rapports entre co-responsables, au regard des éléments exposés plus haut, c'est également à juste titre que le premier juge a dit que M. [P], chirurgien, est responsable de 75 % des préjudices (25 % au titre du manquement fautif au cours de l'intervention et 50 % au titre du manquement postérieur dans le repérage de la complication) et l'hôpital [8], qui en tant que commettant répond des fautes de ses préposées, de 25 % de ceux-ci.
Le jugement est donc confirmé.
Sur les demandes annexes
Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles alloués à la victime sont confirmées.
La société hôpital privé [8], qui succombe, supportera la charge des entiers dépens d'appel. La partie qui doit supporter l'intégralité des dépens n'est pas fondée à obtenir une indemnité pour frais irrépétibles.
Aucune considération d'équité ne justifie de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de M. [P].
En revanche, l'équité justifie d'allouer à Mme [V] une indemnité de 2 500 € au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour.
Par ces motifs
La Cour,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 18 novembre 2021 par le tribunal judiciaire de Toulon ;
Y ajoutant,
Condamne la société hôpital privé [8] à payer à Mme [K] [V] une indemnité de 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés non compris dans les dépens exposés en appel ;
Déboute la société hôpital privé [8] de sa demande d'indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés devant la cour ;
Dit n'y avoir lieu à condamnation en application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de M. [P] au titre des frais exposés devant la cour ;
Condamne la société hôpital privé [8] aux entiers dépens d'appel et accorde aux avocats qui en ont fait la demande, le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT