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06/07/2023 | FRANCE | N°19/06231

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 06 juillet 2023, 19/06231


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4



ARRÊT AU FOND

DU 6 JUILLET 2023



N° 2023/













Rôle N° RG 19/06231 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BED5G







[E] [C]





C/



[Z] [H]

SA MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES

SA MMA IARD

Compagnie d'assurances MGFA (GROUPEMENT DES MUTUELLES DU MANS)











Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Sébastien BADIE
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Me Françoise BOULAN



Me Pierre-alain RAVOT















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de Grasse en date du 30 Janvier 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 17/01959.



APPELANT



Monsieur [E] [C]

, demeurant...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRÊT AU FOND

DU 6 JUILLET 2023

N° 2023/

Rôle N° RG 19/06231 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BED5G

[E] [C]

C/

[Z] [H]

SA MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES

SA MMA IARD

Compagnie d'assurances MGFA (GROUPEMENT DES MUTUELLES DU MANS)

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Sébastien BADIE

Me Françoise BOULAN

Me Pierre-alain RAVOT

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de Grasse en date du 30 Janvier 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 17/01959.

APPELANT

Monsieur [E] [C]

, demeurant [Adresse 6]

représenté par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Sandra JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Christophe FIORENTINO de la SELARL FIORENTINO, avocat au barreau de GRASSE

INTIMES

Monsieur [Z] [H]

né le 18 Mai 1942 à [Localité 5] (ANGLETERRE), demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Françoise BOULAN de la SELARL BOULAN-CHERFILS-IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Rebecca VANDONI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Franck GHIGO, avocat au barreau de GRASSE

SA MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES

venant aux droits de la société COVEA RISKS en vertu de l'effet du transfert des portefeuilles entre ces sociétés approuvé par l'autorité de contrôle prudentiel et de résolution dans sa décision n°2015-C-83 du 22 10 15 parue au JO le 16 12 suivant

, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Pierre-alain RAVOT, avocat au barreau de GRASSE

SA MMA IARD

venant aux droits de la société COVEA RISKS en vertu de l'effet du transfert des portefeuilles entre ces sociétés approuvé par l'autorité de contrôle prudentiel et de résolution dans sa décision n°2015-C-83 du 22 10 15 parue au JO le 16 12 suivant

, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Pierre-alain RAVOT, avocat au barreau de GRASSE

Compagnie d'assurances MGFA (GROUPEMENT DES MUTUELLES DU MANS)

, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Pierre-alain RAVOT, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Avril 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Inès BONAFOS, Présidente, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Inès BONAFOS, Présidente

Mme Sophie LEYDIER, Conseillère

Madame Angélique NAKHLEH, Conseillère

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Juin 2023, puis avisées par message le 20 Juin 2023, que la décision était prorogée au 6 Juillet 2023.

ARRÊT

EXPOSÉ DU LITIGE

Suivant contrat du 30 décembre 2004, les époux [C] résidant au Royaume Uni, ont confié à Monsieur [Z] [H], assuré auprès de la MGFA (groupe des MUTUELLES DU MANS), une mission de maîtrise d''uvre complète pour la rénovation et la modification d'une maison ancienne située [Adresse 3] (06).

Les travaux ont été principalement exécutés par la société PIETRA NERA BTP, mais pas complètement achevés puisque cette société a cessé son activité, qu'elle a été dissoute le 30 juin 2006, puis radiée du RCS le 17 juillet 2006.

La société PIETRA NERA BTP était assurée auprès de la société COVEA RISKS, aux droits de laquelle viennent aujourd'hui la SA MMA IARD et la SA MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES.

Aucun procès-verbal de réception des travaux n'a été formalisé entre les parties.

Se plaignant d'infiltrations ayant affecté les murs, les sols et les carrelages du sous-sol partiellement enterré et aménagé en chambre, Monsieur [E] [C] a obtenu une mesure d'expertise confiée à Monsieur [P], suivant ordonnance de référé du 21 octobre 2013.

L'expert a déposé son rapport le 21 octobre 2015.

Par acte d'huissier du 3 mars 2016, Monsieur [E] [C] a fait assigner Monsieur [Z] [H], la société MMA IARD et la société MMA ASSURANCES MUTUELLES, prises en leur qualité d'assureur de Monsieur [H] et venant aux droits de COVEA RISKS, assureur de la société PIETRA NERA BTP, aux fins d'obtenir leur condamnation en référé à lui payer une provision à valoir sur le montant des travaux réparatoires préconisés par l'expert.

Par ordonnance du 13 juin 2016, le juge des référés a dit n'y avoir lieu à référé, retenant les contestations sérieuses soulevées par les défendeurs.

Par actes d'huissier des 29 et 31 mars 2017, Monsieur [E] [C] a fait assigner Monsieur [Z] [H], le GROUPE DES MUTUELLES DU MANS, la société MMA IARD et la société MMA ASSURANCES MUTUELLES devant le tribunal de grande instance de Grasse aux fins principalement d'obtenir leur condamnation in solidum à lui payer diverses sommes en réparation de ses préjudices, à titre principal sur le fondement de l'article 1792 du code civil et à titre subsidiaire sur le fondement de l'article 1240 du même code.

Par jugement réputé contradictoire du 30 janvier 2019, le tribunal de grande instance de GRASSE a:

- débouté Monsieur [E] [C] de ses demandes formées à l'encontre de Monsieur [Z] [H] et de son assureur MMA IARD,

- débouté Monsieur [E] [C] de ses demandes formées à l'encontre de la société MMA IARD, venant aux droits de la société COVEA RISKS, assureur décennal de la société PIETRA NERA BTP,

- rejeté les demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Monsieur [E] [C] aux entiers dépens,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration d'appel reçue au greffe le 12 avril 2019, Monsieur [E] [C] a interjeté appel de toutes les dispositions de ce jugement.

Par dernières conclusions notifiées par le RPVA le 16 décembre 2019, l'appelant demande à la cour:

Vu les articles 1792 et suivants du code civil,

Vu l'article 1240 et suivants du code civil,

Vu le rapport d'expertise en date du 21 octobre 2015,

REFORMER le jugement entrepris en ce qu'il l'a débouté de l'ensemble de ses demandes,

CONSTATER la réalité des désordres invoqués,

CONSTATER l'existence d'une réception tacite de l'ouvrage,

CONDAMNER en conséquence in solidum Monsieur [H], le Groupe Mutuelle du Mans MPGA pour défaut de conception et l'assurance COVEA RISK en sa qualité d'assureur décennal de la SARL PIETRA NERA BTP pour malfaçons d'exécution au paiement de la somme de 227.891 euros, ce montant devant être indexé sur le coût de la construction,

REJETER la demande de désignation d'un technicien afin de vérifier le coût de la rénovation de la maison,

A titre subsidiaire,

CONDAMNER monsieur [H] sur le fondement de la responsabilité contractuelle du maître d''uvre,

En tous les cas,

CONDAMNER in solidum les requis au paiement de la somme de 13 625 euros au titre du préjudice de jouissance jusqu'en octobre 2015,

CONDAMNER in solidum les requis au paiement:

* de la somme de 625 euros par mois à dater du mois de novembre 2015, date du dépôt du rapport de l'expert jusqu'au jugement à intervenir,

* de la somme de 6 973 euros TTC au titre des frais d'assistance technique engagés par lui,

* de la somme de 25 000 euros au titre du préjudice moral,

* de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNER les requis aux entiers dépens dont ceux de l'expertise judiciaire pour un montant de 16 383 euros.

Par dernières conclusions notifiées par le RPVA le 5 novembre 2019, Monsieur [Z] [H], intimé, demande à la cour:

Vu les articles 1792 et suivants du code civil,

Vu le rapport d'expertise MASSIS,

Vu le contrat de maîtrise d''uvre,

Vu les pièces,

Vu le jugement du 30 janvier 2019,

A titre principal,

CONSTATER que les stipulations contractuelles et plans dressés par Monsieur [Z] [H], notamment le plan d'exécution des travaux du 30 décembre 2004, ne portent pas sur la création d'une chambre et d'une salle de bain au sous-sol,

DIRE ET JUGER que Monsieur [Z] [H] n'est pas intervenu, à quelque titre que ce soit, dans la réalisation des travaux effectués au sous-sol et notamment pour la réalisation d'une chambre et d'une salle de bain,

DIRE ET JUGER que Monsieur [E] [C] a été informé par Monsieur [Z] [H] de l'illicéité des travaux projetés,

DIRE ET JUGER que Monsieur [E] [C] avait parfaitement connaissance de l'existence de désordres identiques à ceux aujourd'hui reprochés et a décidé de passer outre les recommandations des professionnels intervenus sur le chantier,

CONSTATER au demeurant que les erreurs de conception retenues par l'expert judiciaire ne peuvent l'être qu'en cas de pièces ayant un caractère habitable et non s'il s'agit d'un simple garage,

DIRE ET JUGER qu'aucune erreur de conception n'a donc été commise par Monsieur [H],

DIRE ET JUGER que la responsabilité de Monsieur [Z] [H] ne saurait être engagée pour des malfaçons dans l'exécution des travaux,

CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a:

Débouté Monsieur [E] [C] de ses demandes formées à l'encontre de Monsieur [Z] [H] et de son assureur MMA IARD,

Débouté Monsieur [E] [C] de ses demandes formées à l'encontre de la société MMA IARD, venant aux droits de la société COVEA RISKS, assureur décennal de la société PIETRA NERA BTP,

Condamné Monsieur [E] [C] aux entiers dépens,

Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

A titre subsidiaire,

CONSTATER que Monsieur [E] [C] avait fait chiffrer le coût des travaux de reprise à la somme de 13 156 euros TTC,

DIRE ET JUGER que Monsieur [E] [C] ne peut aujourd'hui faire chiffrer le coût des travaux de reprise à la somme de 185 677,32 euros TTC en considérant qu'il s'agit d'une pièce habitable, nul ne pouvant se prévaloir de sa propre turpitude,

REDUIRE à de plus justes proportions l'indemnité pour trouble de jouissance,

A titre d'appel incident :

CONSTATER que Monsieur [Z] [H] a été contraint de construire sa défense,

CONSTATER que Monsieur [E] [C] a perdu son procès en première instance,

REFORMER le jugement du 30 janvier 2019 en ce qu'il a rejeté la demande de Monsieur [Z] [H] formulée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

DIRE ET JUGER qu'il serait inéquitable de laisser les frais irrépétibles exposés en première instance à la charge de Monsieur [E] [C],

Par conséquent,

CONDAMNER Monsieur [E] [C], partie perdante, à lui payer la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance,

En tout état de cause,

DEBOUTER Monsieur [E] [C] de toutes ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de Monsieur [Z] [H],

CONDAMNER Monsieur [E] [C] à payer à Monsieur [Z] [H] la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNER Monsieur [E] [C] à prendre en charge les entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de Maître François BOULAN sous a due affirmation de droit.

Par dernières conclusions notifiées par le RPVA le 24 octobre 2019, les sociétés MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES, venant aux droits de COVEA RISKS, et la MGFA (Groupement des Mutuelles du Mans), intimées demandent à la cour:

CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Monsieur [E] [C] de ses prétentions envers les compagnies MGFA, MMA Iard et MMA Assurances Mutuelles Iard,

Le CONDAMNER à leur verser une indemnité pour chacune de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'à supporter les dépens, dont distraction au profit de Maître Pierre-Alain RAVOT dans les conditions de l'article 699 du même code,

A titre subsidiaire

CONSULTER par écrit un technicien sur le coût de réparation des pièces en sous-sol,

DEBOUTER Monsieur [E] [C] de ses prétentions d'indemnisation de ses préjudices de jouissance et moral contre les sociétés MGFA, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles,

STATUER ce que de droit sur les frais irrépétibles et les dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 6 mars 2023.

MOTIFS

L'appelant critique essentiellement le jugement entrepris en ce que le premier juge n'a pas retenu l'imputabilité des désordres à l'encontre de Monsieur [Z] [H], maître d'oeuvre, et n'a pas retenu la garantie de l' assureur, ni celle de l'assureur de l'entreprise ayant réalisé les travaux de gros-oeuvre.

Sur les demandes formées à l'encontre du maître d'oeuvre et de son assureur

Comme l'a exactement rappelé le premier juge, il appartient à Monsieur [C] de prouver que Monsieur [H] a bien été chargé de la conception du projet et du suivi de la réalisation de transformation du sous-sol essentiellement composé d'une cave et d'un garage, et comportant après rénovation la création d'une chambre et d'une salle de bain à la place du garage ainsi que d'une salle à manger d'été.

En l'espèce, il résulte des pièces régulièrement produites et des explications des parties :

- qu'avant la signature du contrat de maîtrise d'oeuvre intervenue le 30 décembre 2004, Monsieur [H] a fait effectuer un diagnostic de l'état de la propriété par un ingénieur conseil, Monsieur [D], lequel indique, dans un courrier du 18 avril 2002 porté à la connaissance du maître d'ouvrage au cours de l'année 2002 (pièces 1 et 3 de Monsieur [H]), les éléments suivants :

' veuillez trouver ci-joint la photocopie du relevé sur place des fissures de façades les plus significatives (...), il apparaît que cette maison est en très mauvais état. Elle est des plus vétuste.

Nous avons pu y constater de nombreuses fissures, des décollements, des murs en façade Nord qui s'ouvrent...... Il doit y avoir un problème de sol (pas d'étude géologique) qui occasionne des déplacements, voire des glissements. Le sol est certainement constitué d'un support hétérogène avec couches d'argile. Il a pu se produire des frictions de sol avec des eaux d'infiltrations sous-jacentes.

En façade Nord, nous avons le raccordement d'une buse d'eau pluviale qui est cassée, cela crée un point faible quant aux infiltrations qui minent la fondation.

En façade Ouest, le dallage extérieur du rez de jardin est cassé, créant également un point d'infiltration.

En conclusion, cette maison risque de coûter très chère pour pallier tous ces désagréments, qui, par la suite, peuvent se reproduire. La sagesse voudrait que l'on démolisse l'ensemble et que l'on pense à une rénovation complète mais ce n'est peut être pas le but recherché par le maître d'ouvrage. Il est cependant très important d'attirer son attention quant au coût de cette rénovation que l'on ne peut garantir dans le temps» (pièce 1 des assureurs),

- que le rapport du géologue du 5 août 2002, dont il n'est pas contesté qu'il a également été porté à la connaissance du maître d'ouvrage, précise notamment: 'les fondations de cette villa ont été «normalement » réalisées à faible profondeur et celles-ci ne possèdent aucun ferraillage.

Les fondations sont en grande partie dans la zone altérée, et elles ne reposent pas directement sur le substratum induré.

Aucun drainage n'a été réalisé car on négligeait cet aspect (à l'époque de la construction), mais au cours des décennies les fines dans la zone entre la base des fondations et le substranum sain ont été éliminées' et le sont toujours.

Absence totale d'évacuation des eaux de pluie provenant des surfaces imperméabilisées. L'effet s'est ajouté au manque de drainage ».

Etant donné l'ancienneté de la construction, la conception de l'ouvrage, en plusieurs étapes et le manque de drainage et d'évacuation des eaux de surface provenant des surfaces imperméabilisées, il nous semble normal que la villa subisse ces tassements (...)

A notre avis, l'évacuation des eaux de surfaces et de drainage est indispensable et préliminaire à tous travaux. De toutes façons, ils sont indispensables dans tous les cas de figure. Ne rien faire induit une dégradation rapide de l'existant» (pièce 2 des assureurs),

- que par plusieurs échanges de mails du 20 novembre 2002, monsieur [H] a informé monsieur [C] sur les surfaces de la maison et lui a notamment indiqué 'il est illégal de modifier le sous-sol (...) Donc, bien que j'avais indiqué que le sous-sol pouvait être habitable, ce ne serait pas légal, je vous serai reconnaissant de me donner votre sentiment à ce sujet' ce à quoi monsieur [C] lui répondait 'tout ça me parait bien intimidant (...) La contrainte de la conversion du sous-sol est un coup dur. Auriez-vous une idée comment on pourrait contourner cet obstacle' Est-ce que les conversions illégales sont courantes' Est-ce qu'une conversion pourrait être maquillée en autre chose' (....)' monsieur [H] lui répondant immédiatement 'les conversions illégales sont répandues mais les amendes peuvent être très sévères. Ce que nous pourrions faire, c'est enlever le réservoir, quelques murs et de la terre lors du renforcement par l'ingénieur et installer l'escalier.... sachant cela, vous aimeriez peut-être reconsidérer vos instructions du 13 novembre (la solution 1 du projet A pour l'étage principal)',

monsieur [C] répondant encore 'cher [Z], les conversions illégales sont une grande partie de la vie de HK. Ceci ne me pose aucun problème mais je comprends votre position professionnelle ainsi que l'effet que de tels travaux/améliorations pourraient avoir sur la plus-value lors d'une revente (ce qui ne m'intéresse pas pour le moment)

Y-a-t-il une possibilité de faire une demande pour un permis spécial pour modifier une maison existante, faire une extension et ensuite cacher le travail, quelles seraients les éventuelles amendes (pour nous et pour vous) au cas où nous le ferions malgré tout (....)'

- que le contrat de maîtrise d'oeuvre du 30 décembre 2004 signé entre monsieur [C] et monsieur [H] est relatif à la rénovation et la modification de la maison litigieuse ainsi décrite 'maison d'habitation de 6 pièces (d'une surface d'environ 200 m2)' (pièce 28 de Monsieur [H]),

- le plan du sous-sol annexé à la déclaration de travaux mentionnant un 'état projeté' 'de septembre 2003" (pièce 4 des assureurs) et un plan d'exécution daté du 08 décembre 2004 comportant un tampon 'Pté [C] Exécution Modifications' fait apparaître au sous-sol un grand garage et une salle à manger d'été, au RDC un plan détaillé comportant notamment une cuisine, un séjour/salon, une salle à manger et une chambre outre une réserve, un vestiaire, une salle de bain et à l'étage, un atelier réception, un bureau et une chambre, outre une salle de bain (pièce 5 des assureurs),

- que le plan joint au rapport d'expertise judiciaire en annexe A17 est une photocopie incomplète ne comportant aucun élément permettant d'en attribuer la réalisation à monsieur [H], ainsi qu'une date manifestement ajoutée à la main du '30 août 06", soit postérieurement au

règlement de l'intégralité des honoraires de monsieur [H] le 3 février 2016 suivant le décompte du montant total des travaux précisant que la direction des travaux était réalisée à 100% à cette date (pièce 6 de l'appelant),

- que contrairement à ce que soutient l'appelant, le plan annexé C2 au rapport d'expertise judiciaire (pièce 31) comporte bien la mention 'garage' avec une superficie de 97.53 m2 pour l'ensemble de la pièce représentée.

Alors que l'appelant sollicite la fixation d'une réception tacite des travaux en mai 2006 (pages 18 et 24 de ses écritures), qu'il ne conteste pas avoir réglé l'intégralité des honoraires du maître d'oeuvre en février 2006 alors que ce dernier avait exécuté 100% de sa mission de direction de travaux, il n'est pas fondé à se prévaloir des devis signés par lui concernant les travaux exécutés par la société IBERIQUE DE CONSTRUCTION et PLAISANCE JARDIN (pièce 14) comme éléments de preuve permettant de retenir que monsieur [H] a effectivement conçu et suivi les travaux ayant consisté à transformer une partie du sous-sol en une grande chambre, laquelle a été principalement atteinte par les désordres.

Et, si par mail du 13 novembre 2002 (pièce 10 de l'appelant) monsieur [H] a indiqué au maître d'ouvrage qu'il essaiera de suivre ses instructions, il lui a néanmoins précisé qu'il était inquiet à propos du prix particulièrement pour ce niveau du sous-sol, puis il lui a réclamé des précisions sur la terrasse couverte.

Si in fine ce mail indique qu'il s'occupera de la modification du projet préliminaire (A pour qu'il devienne B), il convient de souligner que ce mail est antérieur aux échanges de mails du 20 novembre 2002 retranscrits ci-dessus dont il ressort très clairement que monsieur [H] n'a pas voulu se charger de la transformation du garage en un espace habitable du type chambre, compte tenu de l'illégalité de cette transformation, ce que le maître d'ouvrage a parfaitement compris puisqu'il lui a notamment indiqué ' je comprends votre position professionnelle'.

Si l'appelant fait exactement remarquer que l'éventuelle non-conformité des travaux avec l'autorisation accordée relève du non-respect des règles d'urbanisme, il ressort des différentes pièces du dossier que ce n'est pas seulement en raison de cette éventuelle non-conformité que le maître d'oeuvre a refusé de prendre la responsabilité des travaux consistant à réaliser une grande chambre dans l'ancien espace garage, puisqu'il avait préalablement informé le maître d'ouvrage qu'il s'inquiétait du coût d'une telle transformation, inquiétude résultant nécessairement du très mauvais état de l'existant et de la situation géologique du bien, dont le maître d'ouvrage était parfaitement conscient puisqu'il a eu possession des études géologiques et structures réalisées en 2002.

Et, il résulte de la chronologie des événements reprise ci-dessus, que lorsque le maître d'oeuvre a déposé la déclaration de travaux il y a annexé un plan daté de septembre 2003 faisant apparaître un grand garage de 97.53 m2, qu'il n'a déposé aucune demande de permis modificatif, et n'a pas répondu aux demandes de modifications du maître d'ouvrage pour transformer cet espace en chambre, et que la signature du contrat de maîtrise d'oeuvre intervenue le 30 décembre 2003 fait référence à la rénovation et à la modification d'une maison d'habitation de 6 pièces (sans aucune indication d'un sous-sol habitable), étant observé que les plans d'exécution postérieurs comprennent au moins 6 pièces sans compter la chambre installée au sous-sol.

Enfin, l'attestation du voisin de l'appelant (pièce 23) et le fait qu'en 2007 monsieur [H] se soit occupé, à la demande du maître d'ouvrage, de constater les infiltrations en sous-sol et de l'informer des démarches à faire à ce sujet, notamment auprès des assureurs, sont insuffisantes à établir que monsieur [H] a effectivement conçu et suivi la direction des travaux ayant consisté à créer une chambre dans le garage, étant observé que l'appelant ne peut sérieusement se prévaloir de ce que monsieur [H] 'pratiquait une relation professionnelle très souple à l'anglo-saxonne assez éloignée du droit français', puisqu'il l'a manifestement choisi notamment pour cette raison.

Il s'ensuit que le jugement entrepris doit être confirmé en ce que le premier juge a rejeté les demandes formées par monsieur [C] relativement aux infiltrations ayant affecté la chambre.

S'agissant de la salle à manger d'été aménagée dans une terrasse couverte, il résulte des différentes pièces produites et notamment du plan d'exécution du 8 décembre 2004 établi par monsieur [H] que celle-ci a bien été conçue par lui puis réalisée sous sa direction.

Dans son rapport, l'expert indique:

- en page 33, que dans la mesure où cette salle à manger d'été a été aménagée dans une terrasse couverte qui n'était pas hors d'eau ni hors d'air, aucun désordre relatif à l'humidité ne peut être retenu pour cette partie, ce qui n'est pas contesté,

- en page 38 qu'il existe au sol de cette salle à manger d'été une fissure qui se situe dans l'épaisseur du carrelage et sa chape de pose, la dalle n'étant affectée d'aucun désordre,

- en page 40 que cette fissure résulte d'une erreur de conception en l'absence d'étude pour la mise en oeuvre de joints de périmètre et de fractionnement du carrelage sur le sol de cette partie,

- en annexe A19 que les travaux de reprise de ce désordre s'élèvent à 1164 euros (pose de carrelage) et 1224 euros (création d'un joint de fractionnement et pose d'un joint souple), ces montants s'entendant H T.

Contrairement à ce qu'a estimé le premier juge, ce désordre est bien imputable à monsieur [H], de sorte que ce dernier doit être condamné à régler à l'appelant une somme totale de 2388 euros HT, outre indexation au taux de TVA applicable au jour du présent arrêt, et indexation sur l'indice BT 01 à compter du 21 octobre 2015 (date du dépôt du rapport) jusqu'au jour du présent arrêt.

Comme le fait exactement valoir l'assureur de monsieur [H], il résulte des conclusions de l'expert que cette fissure est purement esthétique, de sorte que COVEA RIKS avait à bon droit refusé de garantir ce désordre (pièce 7), ce qui est admis par monsieur [H], et n'est pas véritablement contesté par l'appelant.

Il s'ensuit que le jugement entrepris doit être partiellement infirmé en ce qu'il a rejeté la demande d'indemnisation du maître d'ouvrage portant sur ce désordre (fissure au sol de la salle à manger d'été).

Sur les demandes formées à l'encontre de l'assureur de la société PIETRA NERA BTP

L'appelant ne peut utilement se prévaloir d'une réception tacite des travaux exécutés par la société PIETRA NERA BTP, alors qu'il ne produit qu'un devis daté du 18 novembre 2004 de cette société ne comportant aucune acceptation du maître d'ouvrage et n'étant complété par aucune facture correspondante (pièce 36), qu'il est constant que cette société n'a pas achevé les travaux qui lui ont été confiés, sans qu'aucun constat des travaux effectivement réalisés par elle n'ait eu lieu, et que l'appelant ne démontre par aucune pièce avoir intégralement réglé cette société pour ces travaux, même par le biais de son maître d'oeuvre, la pièce 6 ne comportant aucune indication concernant cette société.

En outre, il n'est nullement démontré que cette société avait été chargée de réaliser un dispositif d'étanchéité permettant de rendre habitable le sous-sol de la maison.

Il s'ensuit que c'est avec raison que le premier juge a débouté monsieur [C] de ses demandes à l'encontre de son assureur, le jugement entrepris devant être ici confirmé.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Compte tenu de la solution du litige, l'appelant supportera 80% des dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire, et monsieur [H] en supportera 20%.

Compte tenu des circonstances de l'espèce, aucune considération d'équité ne justifie de faire droit aux demandes formées par les parties au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, et après en avoir délibéré conformément à la loi,  

 

CONFIRME le jugement entrepris, excepté en ce que le premier juge a rejeté la demande d'indemnisation concernant la fissure du sol de la salle à manger d'été, et sur les dépens,

STATUANT A NOUVEAU de ces chefs,

Et, y ajoutant,

CONDAMNE monsieur [Z] [H] à payer à monsieur [E] [C], la somme de 2.388 euros HT, outre indexation au taux de TVA applicable au jour du présent arrêt, et indexation sur l'indice BT 01 à compter du 21 octobre 2015 jusqu'au jour du présent arrêt,

REJETTE toutes les autres demandes,

CONDAMNE monsieur [Z] [H] à supporter 20% des dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire, et monsieur [E] [C] à en supporter les 80% restants, et en ordonne la distraction.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 6 Juillet 2023.

Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Monsieur Achille TAMPREAU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 19/06231
Date de la décision : 06/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-06;19.06231 ?
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