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06/07/2023 | FRANCE | N°18/18659

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 06 juillet 2023, 18/18659


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4



ARRÊT AU FOND

DU 06 JUILLET 2023



N° 2023/













Rôle N° RG 18/18659 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDMVR







[S] [B]

[Z] [R] épouse [B]







C/



[G] [T] épouse [T]

[A] [T]















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Patrice REVAH



Me Olivier DE PERMENTIER



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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de DIGNE-LES-BAINS en date du 17 Octobre 2018 enregistrée au répertoire général sous le n° 16/01417.





APPELANTS



Madame [S] [B]

, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Patrice REVAH de la SELARL BAYETTI S...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRÊT AU FOND

DU 06 JUILLET 2023

N° 2023/

Rôle N° RG 18/18659 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDMVR

[S] [B]

[Z] [R] épouse [B]

C/

[G] [T] épouse [T]

[A] [T]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Patrice REVAH

Me Olivier DE PERMENTIER

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de DIGNE-LES-BAINS en date du 17 Octobre 2018 enregistrée au répertoire général sous le n° 16/01417.

APPELANTS

Madame [S] [B]

, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Patrice REVAH de la SELARL BAYETTI SANTIAGO REVAH, avocat au barreau d'ALPES DE HAUTE-PROVENCE

Madame [Z] [R] épouse [B]

, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Patrice REVAH de la SELARL BAYETTI SANTIAGO REVAH, avocat au barreau d'ALPES DE HAUTE-PROVENCE

INTIMES

Madame [G] [T] épouse [T]

née le 17 Décembre 1956 à [Localité 6], demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Olivier DE PERMENTIER de la SCP TGA-AVOCATS, avocat au barreau d'ALPES DE HAUTE-PROVENCE

Monsieur [A] [T]

né le 19 Mars 1955 à [Localité 3], demeurant [Adresse 5]

représenté par Me Olivier DE PERMENTIER de la SCP TGA-AVOCATS, avocat au barreau d'ALPES DE HAUTE-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Mai 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Inès BONAFOS, Présidente, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Inès BONAFOS, Présidente

Mme Sophie LEYDIER, Conseillère

Madame Angélique NAKHLEH, Conseillère

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Juillet 2023.

ARRÊT

FAITS ET PROCÉDURE

Par compromis de vente signé 1e 19 et 20 mai 2011 les époux [B] ont acquis pour le prix de 377 000 euros un bien immobilier dont l'extension était inachevée. L'acte authentique en date du 30 juin 2011 indique que les travaux d'extension n'ont pas fait l'objet d'un certi'cat de conformité et ne sont pas garantis par l'assurance décennale et une assurance dommages ouvrage.

En juillet 2013 d'importantes infiltrations vont se produire au travers de la toiture terrasse de la villa construite par les vendeurs dans le cadre des travaux d'extension autorisés par le permis de construire du 30 juillet 2004.

Les plafonds et les murs Placoplatre vont s'imbiber menaçant de s'effondrer et d'importantes venues d'eau dans la cuisine vont être constatées ainsi que dans la cuisine d'été et dans la douche.

Deux réunions d'expertise vont être organisées par l'assureur avec mise en demeure de la MATMUT à la date du 21 février 2014.

Les vendeurs contestant le principe de leur responsabilité en arguant du fait que les acquéreurs ont acheté le bien en état et connaissaient l'existence des inltrations, une ordonnance de référé en date du 18 septembre 2014 a ordonné une expertise judiciaire.

L'expert a déposé son rapport le 20 juin 2016.

Monsieur [B], étant décédé le 26 mars 2017, sa fille madame [S] [B] est intervenue volontairement à l'instance aux côtés de sa mère, conjointe héritière.

Le 13 novembre 2016, les consorts [B] font assigner Monsieur et Madame [T] devant le Tribunal de Grande Instance de DIGNE LES BAINS pour demander la condamnation des défendeurs à payer les travaux de reprises au visa de la responsabilité décennale des constructeurs.

Ils ont sollicité du tribunal de :

Constater que les dommages affectant les pièces de l'immeuble désignées 1 à 4 par l'expert rendent l'ouvrage impropre à sa destination

- Constater l'achèvement de l'immeuble à la date de la vente

- Dire que les époux [T] sont tenus en qualité de vendeurs constructeurs de la responsabilité de plein droit des constructeurs au sens des articles 1792 et suivants du code civil

- Condamner solidairement les défendeurs à payer :

- 31.014, 35€ HT au titre des travaux de remise en état de l'immeuble,

- 4652, 15 € au titre des honoraires de maitrise d''uvre avec majoration de la TVA applicable à la date du règlement

- 500€ des frais de justice

Le tribunal a rendu un jugement le 17 octobre 2018 déboutant les consorts [B] de leurs demandes.

Par déclaration au greffe du 27/11/2018 madame [B] [S] et madame [Z] [R] ont interjeté appel d'un jugement du Tribunal de Grande Instance de DIGNE LES BAINS en date du 17/10/2018 en ce que cette décision les a débouté de l'intégralité de leurs demandes et les a condamné in solidum à payer aux époux [T] la somme de 5000€ en application de l'article 700 du CPC outre les entiers dépens de la procédure incluant les frais d'expertise.

Sont intimés madame [G] [P] épouse [T] et monsieur [A] [T].

Dans leurs dernières conclusions en date du 07/05/2020, madame [B] [S] et madame [Z] [R] veuve [B] exposent que leur demande est recevable dans la mesure où l'acte de vente du bien à la société LES COTES précise que l'acquéreur ne sera pas subrogé dans les droits et actions du vendeur à l'encontre du précédent propriétaire dans le cadre de la procédure existante.

Sur le fond, l'expert indique que les désordres sont réels et consistent en des infiltrations d'eau situées dans quatre pièces adjacentes situées à l'angle Nord-Ouest de la maison, qu'alors que dans les plans annexés à l'autorisation de construire, la destination de ces pièces revêt un caractère technique, les parties s'accordent sur les fonctions actuelles des locaux en tant que pièces habitables, que l'expert préconise de reprendre l'étanchéité de la terrasse supérieure couvrant les 4 pièces concernées par les infiltrations pour un coût estimé à la somme de 37.840 euros, qu'elles sollicitent la mise en 'uvre de la garantie qui est due pendant « 10 ans à compter de la réception des travaux », que la réception n'est absolument pas une condition pour la mise en 'uvre de la responsabilité décennale du vendeur constructeur , que le caractère apparent ou caché des désordres ne s'apprécie pas en la personne de l'acquéreur au jour de la vente, mais en la personne du vendeur au jour de l'achèvement des travaux , qu'il a été déclaré à l'acte de vente par les époux [T] que les travaux ont été achevés en janvier 2005 , que seuls restaient à être effectués les enduits des façades de l'agrandissement, comme le reconnait d'ailleurs expressément M. [W], agent immobilier, que les désordres apparus en 2013 sont donc bien couverts par la garantie décennale, qu'avant la vente du bien ils ont réalisé des travaux d'étanchéité pour un montant de 12.000 € dont ils demandent remboursement.

Les appelants de mandent la condamnation solidaire de monsieur et madame [T] à leur payer une somme de 6.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, distraits au profit de Maître [H] sur son affirmation de droit.

Par conclusions du 05/05/2022, les époux [T] se sont prévalus de l'irrecevabilité de la demande en raison du défaut de qualité et intérêt à agir des appelants au sens des dispositions des articles 31 et 32 du CPC en considération de la vente de la villa à la SCI LES COTES.

Sur le fond, ils exposent que la vente d'un immeuble non achevé est une vente en l'état, non assimilable à celle d'un immeuble achevé au sens des articles 1792 et suivants du code civil, que l'expert judiciaire lui-même, analysant les photographies des consorts [B] au moment de l'acquisition, en 2011, considère qu'au moment de la vente, une partie de la maison était en chantier et une photographie de 2011 porte la mention « terrasse d'où viennent les infiltrations», que l'ensemble immobilier n'était pas relié au réseau public d'assainissement bien que le permis de construire le prévoit. Dès lors qu'il n'y a pas d'ouvrage achevé, les consorts [B] ne sont pas fondés à engager la responsabilité des consorts [T] sur le fondement de la responsabilité décennale, de plus la garantie légale n'intervient qu'à compter de la réception de l'ouvrage et il est incontestable que les consorts [B] ont pu constater les désordres affectant les ouvrages inachevés ; même si ce désordre n'avait pas été réservé lors d'une prétendue réception tacite, la responsabilité décennale ne pourrait pas non plus être mise en 'uvre compte tenu du caractère apparent du vice lors de la réception.

Ils ajoutent que sur le fondement de l'article 1642 du code civil, le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même comme en l'espèce puisque les consorts [B] connaissaient l'existence d'infiltrations lorsqu'ils visitent le bien immobilier.

En ce qui concerne les autres demandes les consorts [B] ont estimé devoir terminer les travaux entrepris par les consorts [T] et notamment réaliser les façades sans se soucier des infiltrations d'eau affectant les murs et le Placoplatre lors de la vente, que lors de la vente la dépendance s'entendait d'un abri voiture ouvert, à savoir l'adjonction d'un toit accolé à un atelier de jardin, totalement brut et non d'un abri fermé , qu'ils ont également fait le choix de modifier l'abri piscine, lequel était un auvent ouvert à l'air, pour le fermer de vitres et le transformer en pièce habitable (de plus non munie de ventilation), alors même qu'ils n'avaient jamais entrepris les travaux de reprise de l'étanchéité.

A titre reconventionnel les intimés sollicitent la somme de 15.000,00 € à titre de dommages et intérêts outre la somme de 7.500,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, les entiers dépens, au titre de la procédure d'appel.

La clôture a été prononcée par ordonnance du conseiller de la mise en Etat du 16 janvier 2023 et l'affaire a été fixée à l'audience de plaidoiries du 09 mai 2023 à laquelle elle a été retenue.

MOTIVATION

Sur la recevabilité de l'action de madame [B] [S] et madame [Z] [R] :

Les intimés font valoir que le bien ayant été vendu à la SCI LES COTES, l'action de madame [B] [S] et madame [Z] [R] est irrecevable faute de qualité et d'intérêt à agir.

Page 14 de l'acte de vente à la SCI LES COTES il est mentionné que les époux [B] ont constaté lorsqu'ils ont acquis le bien un vice affectant la terrasse liée à l'étanchéité et ont saisi la juridiction compétente qui a rendu un jugement dont ils ont fait appel.

Il est précisé que l'acquéreur ne sera pas subrogé dans les droits et actions du vendeur à l'encontre du précédent propriétaire dans le cadre de la procédure existante. 

Il en résulte que la demande de madame [B] [S] et madame [Z] [R] n'est pas irrecevable pour défaut de qualité et d'intérêt à agir.

Sur la demande d'application de la garantie décennale aux travaux litigieux:

L'article 1792 du code civil dispose que tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.

Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.

Aux termes de l'article 1792-1, 2° du code civil est réputé constructeur de l'ouvrage toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire ;

Pour rejeter la demande de remboursement de travaux réalisés par les consorts [B] sur le bien acquis des consorts [T], le premier juge a retenu que les acquéreurs avaient connaissance des désordres au moment de la vente puisqu'il est fait état de traces visibles lors de la visite des lieux par les acquéreurs, qu'un courriel de monsieur [B] démontre une parfaite connaissance de la nécessité de travaux d'étanchéité de la terrasse à réaliser pour juguler les fuites de la cuisine d'été , que les acquéreurs avaient ainsi pu se convaincre utilement et efficacement de la gravité des désordres du système d'étanchéité de la terrasse dans toute son étendue , qu'ainsi le désordre d'étanchéité de la terrasse avait un caractère apparent , ce qui est exclusif de la garantie décennale.

Mesdames [B] font valoir que le fait que les désordres soient apparents à la date de la vente n'est pas exclusif de la garantie décennale, le caractère apparent des désordres s'appréciant à la date de réception des travaux par le maître d'ouvrage.

Les vendeurs font valoir que les travaux n'étaient pas achevés au moment de la vente puisque les enduits extérieurs, les rambardes, le raccordement à l'égout n'étaient pas réalisés.

En fait, les parties sont liées par un acte de vente signé le 30 juin 2011.

Le bien vendu est décrit dans l'acte comme suit :

Maison d'habitation élevée sur d'un étage sur rez-de-chaussée avec terrain attenant, piscine et dépendances (abri voitures et atelier) comprenant :

1) une habitation type T4

2) un appartement indépendant

3) un espace de détente avec terrasse couverte, cuisine d'été équipée, salle d'eau avec douche italienne et wc, local technique.

Les désordres portent sur la partie 3) de la désignation du bien par l'acte notarié.

Le permis de construire délivré le 03/08/2004 à monsieur [T] a effectivement été accordé pour une extension à usage de chambre et de bureau, qui est en fait le 2) de l'acte notarié soit un logement indépendant, outre un abri voitures, une piscine et un mur de soutènement.

Il n'est pas fait état d'une cuisine d'été, d'une salle d'eau, des aménagements qui concernent l'espace détente.

L'acte prévoit expressément page 8 dans le paragraphe relatif à l'état de l'immeuble que le vendeur subroge l'acquéreur dans le bénéfice des garanties prévues par les articles 1792 et suivant du code civil et notamment s'agissant des travaux objet du permis de construire en date du 03 août 2004.

L'acte précise que les travaux réalisés afférents à ce permis de construire s'ils n'ont pas donné lieu à délivrance d'un certificat de conformité, n'ont pas fait l'objet des assurances obligatoires, ont été néanmoins achevés en janvier 2005 par monsieur [V] [X], tâcheron dépourvu d'assurance décennale selon déclaration du vendeur.

L'attestation de monsieur [U] indiquant que des infiltrations sont intervenues dès décembre 2004 est inopérante dans la mesure où elle n'est accompagnée d'aucune pièce la corroborant alors que le vendeur déclare les travaux achevés en janvier 2005.

Les vendeurs ne peuvent prétendre les travaux inachevés dans le cadre du litige après avoir fait une déclaration en sens contraire devant le notaire en charge de la vente.

Les photographies intégrées au rapport confirment qu'à la date de la vente le 30 juin 2011 l'ouvrage était achevé en ce sens que seuls les enduits n'étaient pas réalisés tant sur le logement indépendant que sur l'auvent actuellement à destination de cuisine d'été qui n'était pas non plus clos par des baies vitrées ;

S'agissant des travaux de raccordement à l'égout, ils ne pouvaient être réalisés avant 2009, la notification de disponibilité du réseau étant en date du 09 décembre 2009.

Ainsi, la date de réception tacite des travaux objet du litige par le vendeur doit être fixée en janvier 2005.

Les désordres consistent en des infiltrations par toit terrasse, ils sont de nature décennale pour le vendeur puisque rien ne permet d'affirmer qu'ils sont apparus antérieurement la date de la réception et qu'il n'est produit aucun justificatif des sinistres survenus avant la vente du bien même si compte tenu de l'existence de traces d'infiltration au moment de la vente, il est certain que les premières infiltrations sont antérieures à celle-ci.

En effet, l'expert désigné par le juge des référés, monsieur [O] [K], indique dans son rapport en date du 20 juin 2016 que les fuite sont préexistantes à la vente, des infiltrations étant nécessairement intervenues entre 2005 et 2011, année de la vente du bien.

Il constate des infiltrations d'eau dans quatre pièces adjacentes situées à l'angle Nord-Ouest de la maison, pièces qui dans les plans annexés à l'autorisation de construire sont à destination technique ;

Il précise après avoir réalisé une mise en eau , que situées sous terrasses extérieures dont les parois Nord sont enterrées, les pièces à l'origine non destinées à l'habitation subissent une défaillance générale du système d'étanchéité.

Les vendeurs font valoir que les acquéreurs étaient informés de l'existence des fuites et ont obtenu une réduction du prix à 377 000 euros en conséquence sans rapporter la preuve qu'à l'origine le prix était supérieur à 448 000 euros (annonce de l'agence) alors que l'acquéreur reconnait avoir bénéficié d'une réduction de prix d'usage.

Les consorts [B] justifient d'une facture de travaux d'étanchéité d'un montant de 12000 euros soit une somme équivalente à la réduction de prix et rien ne permet de qualifier la réduction susvisée de « réduction d'usage » alors qu'il résulte des éléments précités du dossier qu'il y a eu une discussion sur une réduction de prix en considération de travaux à faire.

La réduction de prix de 448 000€ (annonce de l'agence) à 405 000€ (bon de visite) dont fait état le vendeur n'est pas cohérente avec une réduction d'usage.

Il est produit une attestation en date du 12 juillet 2013 de l'agent immobilier instrumentaire de la vente , l'agence [W] IMMO, qui certifie que monsieur [T] [A] alors occupant de la maison jusqu'à la vente effective le 30 juin 2011 avait volontairement laissé apparent dans la cuisine d'été les traces d'humidité sur les murs afin que tous les clients visiteurs sans exception potentiellement intéressés par l'acquisition de la propriété puissent constater qu'il y avait un souci d'infiltration d'eau supposé occasionné par la terrasse au-dessus.

Monsieur [W] a confirmé ses déclarations par une autre attestation en date du 24 février 2015.

A cette attestation il joint copie d'un mail adressé par madame [B] le 26 avril 2011 indiquant que les époux [B] sont intéressés par le bien mais qu'il fallait revoir les prix car il reste de nombreux travaux à faire dont « Etanchéité de la terrasse concernant les fuites de la cuisine d'été »

Mesdames [B] indiquent que la cuisine d'été représente une surface de 4,20m² à étancher et non 20m² si l'on prend la surface de l'ensemble des pièces qui subissent des infiltrations, que l'importance des travaux à envisager était moindre que ceux qui ont dû être effectivement réalisés.

Outre que l'expert indique que la surface de la cuisine d'été reconnue comme telle par les parties (page 16 du rapport d'expertise) représente 7,50m² (page 26 du rapport d'expertise) et non 4,20m², le courriel ne comporte pas cette précision et madame [B] se réfère expressément à l'étanchéité de la terrasse ; c'est donc nécessairement la surface de la terrasse fuyarde qui est la référence puisque c'est le lieu de réalisation des travaux à exécuter et madame [B] avait ainsi connaissance qu'il convenait de refaire cette étanchéité.

De plus, il est de sens commun qu'un défaut d'étanchéité de toit terrasse ne provient pas forcément de la surface verticalement au-dessus des traces d'infiltrations, qu'un tel défaut commande nécessairement une recherche plus précise de l'origine du désordre lorsqu'on entend limiter la surface d'intervention et le montant des travaux et que s'il n'y a pas été procédé, c'est que les époux [B] envisageaient que les travaux de reprise portent sur l'étanchéité de la terrasse comme l'indique madame [B] dans son mail.

Il est ainsi démontré que les acquéreurs avaient connaissance des infiltrations objet du litige lors de la vente et ont obtenu une réduction de prix en conséquence.

Toutefois, l'acte de vente se référant expressément à la garantie décennale transmise par le vendeur s'agissant des travaux réalisés suite à la délivrance du permis de construire en août 2004 et donc réceptionnés en janvier 2005 ne précise aucune restriction de cette garantie quant aux travaux effectivement réalisés atteints des désordres objet du litige ou en raison d'une convention de réduction de prix en raison des désordres dont est atteint le bien vendu.

Par voie de conséquence, le vendeur est débiteur de cette garantie et la décision du premier juge doit être réformée.

Les consorts [B] produisent une facture de travaux de reprise d'un montant de 12000euros qui n'est pas contestée.

Leur demande sera reconnue fondée à concurrence de ce montant.

Sur la demande de dommages intérêts des vendeurs

A l'issue du litige, la demande de dommages intérêts de madame [P] et monsieur [T] pour procédure abusive ne peut prospérer, la demande de leurs adversaires étant reconnue fondée.

Sur les autres demandes

La décision du premier juge étant réformée dans son intégralité sur le fond, les dispositions prises sur le fondement de l'article 700 du code de procédure et au titre des dépens doivent également être infirmées.

Compte tenu des circonstances de l'espèce, l'équité commande d'allouer aux appelants la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Parties perdantes, madame [P] et monsieur [T] devront payer les entiers dépens incluant les frais d'expertise dont distraction au profit de maître REVAH et de maître Olivier DE PERMENTIER

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement par mise à disposition au greffe :

Infirme le jugement du tribunal de grande instance de Digne-les-Bains du 17 octobre 2018 en toutes ses dispositions déférées à la Cour,

Statuant à nouveau,

Dit recevable la demande de madame [B] [S] et madame [Z] [R] veuve [B]

Dit que les travaux objet du litige ont fait l'objet d'une réception tacite par les époux [T] en janvier 2005;

Condamne solidairement madame [G] [P] et monsieur [A] [T] à payer à madame [B] [S] et madame [Z] [R] veuve [B] au titre de la garantie décennale la somme de 12 000 euros.

Déboute madame [G] [P] et monsieur [A] [T] de leur demande de dommages intérêts.

Condamne solidairement madame [G] [P] et monsieur [A] [T] à payer à madame [B] [S] et madame [Z] [R] veuve [B] la somme de 2000euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne solidairement madame [G] [P] et monsieur [A] [T] aux entiers dépens de première instance et d'appel incluant les frais d'expertise et dont distraction au profit de maître REVAH et de maître Olivier DE PERMENTIER.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Juillet 2023

Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Monsieur Achille TAMPREAU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 18/18659
Date de la décision : 06/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-06;18.18659 ?
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