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30/06/2023 | FRANCE | N°23/00943

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Rétention administrative, 30 juin 2023, 23/00943


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Rétention Administrative

CHAMBRE 1-11 RA



ORDONNANCE

DU 30 JUIN 2023



N° 2023/0943























Rôle N° RG 23/00943 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLRDV



























Copie conforme

délivrée le 30 Juin 2023 par courriel à :

-l'avocat

-le préfet

-le CRA

-le JLD/TJ

-le retenu

-le MP



Signature,

le greffier





























Décision déférée à la Cour :



Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 29 Juin 2023 à 10H55.







APPELANT



Monsieur [P] [D]

né le 26 Mars 1998 à [Localité 1]

de nationalité Tunisienne



compar...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Rétention Administrative

CHAMBRE 1-11 RA

ORDONNANCE

DU 30 JUIN 2023

N° 2023/0943

Rôle N° RG 23/00943 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLRDV

Copie conforme

délivrée le 30 Juin 2023 par courriel à :

-l'avocat

-le préfet

-le CRA

-le JLD/TJ

-le retenu

-le MP

Signature,

le greffier

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 29 Juin 2023 à 10H55.

APPELANT

Monsieur [P] [D]

né le 26 Mars 1998 à [Localité 1]

de nationalité Tunisienne

comparant en personne, assisté de Me Maeva LAURENS, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE, avocat, et de M. [E] [T] (Interprète en langue arabe) en vertu d'un pouvoir général, inscrit sur la liste des experts de la cour d'appel d'Aix-en-Provence.

INTIME

Monsieur le préfet des BOUCHES DU RHONE

non comparant, ni représenté

MINISTÈRE PUBLIC :

Avisé et non représenté

DEBATS

L'affaire a été débattue en audience publique le 30 Juin 2023 devant Mme Véronique NOCLAIN, Présidente de chambre à la cour d'appel déléguée par le premier président par ordonnance, assistée de Madame Michèle LELONG, Greffière,

ORDONNANCE

par décision réputée contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 30 Juin 2023 à 18h25

Signée par Madame Véronique NOCLAIN, Présidente de chambre et Madame Michèle LELONG, Greffière,

PROCÉDURE ET MOYENS

Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;

Vu le jugement du tribunal correctionnel en date du 27 janvier 2023 ordonnant l'interdiction temporaire du territoire français pour 5 ans à titre de peine complémentaire.

Vu la décision de placement en rétention prise le 27 juin 2023 par le préfet des BOUCHES DU RHONE notifiée le même jour à 11H11;

Vu l'ordonnance du 29 juin 2023 rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE décidant le maintien de Monsieur [P] [D] dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ;

Vu l'appel interjeté le 30 juin 2023 par Monsieur [P] [D] ;

Monsieur [P] [D] a comparu et a été entendu en ses explications ; il déclare qu'il a fait une 'erreur' et a été en prison, qu'il a purgé sa peine mais n'avait jamais été en prison avant, qu'il a des enfants et veut s'en occuper et à une adresse en France.

Son avocate a été régulièrement entendue ; elle a oralement développé les moyens repris dans ses écritures déposées en procédure.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La recevabilité de l'appel

La recevabilité de l'appel contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention n'est pas contestée et les éléments du dossier ne font pas apparaître d'irrégularité.

Les exceptions de nullité in limite litis.

1 l'absence d'avis au parquet du placement en rétention.

L'article L.741-8 du CESEDA précise que le procureur de la République est informé immédiatement de tout placement en rétention.

En l'espèce, il est établi que le procureur de la République a été informé le 26 juin 2023 de la sortie de détention du retenu et du fait qu'une mesure de rétention serait prise le 27 juin 2023; cet avis la veille n'est pas un 'défaut d'avis', comme soutenu à tort par monsieur [P] [D] ; au surplus, la délivrance de cet avis le 26 pour le 27 juin 2023 ne fait pas grief au retenu; il ne peut donc y avoir de nullité de ce chef.

2 la nullité de l'arrêté fixant le pays de destination et de l'arrêté de placement en rétention

L'appelant rappelle que l'administration doit prendre un arrêté motivé de placement en rétention et qu'il doit être en mesure de présenter ses observations sur le pays de destination , faute d'irrégularité faisant 'naître un doute sérieux sur la légalité' de la décision. Il affirme qu'en l'espèce, il n'a pas été en mesure de faire des observations utiles parce qu'il n'a pas été asssité d'un interprète et a refusé de signer le formulaire, ce qui constitue une violation du principe du contradictoire entachant les décisions préfectorales.

Or, la lecture de la procédure permet de vérifier que le retenu a pu faire part de ses observations en langue française lors de la notification des mesures de placement en rétention et que ses observations ont permis de noter dans le formulaire requis qu'il était père de deux enfants, avait une compagne et un emploi; si le retenu a refusé de signer le formulaire sus-dit, cela ne signifie pas qu'il n'a pas pu comprendre la procédure ni faire état d'observations utiles.

Quant à l'insuffisance de motivation de l'arrêté de placement en rétention, il sera rappelé que le juge judiciaire a compétence pour vérifier l'existence d'une motivation mais non a pertinence, qu'en l'espèce, l'acte contesté est motivé , qu'enfin, la question soumise au débat sur la motivation n'entraînerait au surplus pas nullité de l'acte mais son irrégularité, ce qui n'est au regard des éléments vérifiés, pas encourue en l'espèce.

3 le défaut de notification de l'arrêté de maintien en rétention suite à la demande d'asile

L'appelant affirme au visa de l'article L.754-3 du CESDA qu'il existe une nullité de procédure en ce qu'il a présenté une demande d'asile le 27 juin 2023, qu'aucun arrêté portant maintien en rétention ne lui a été notifié, que le registre ne fait pas mention de cette notification et que sa remise immédiate en liberté s'impose donc.

Or, les pièces de la procédure permettent de vérifier que la décision de placement en rétention du 27 juin 2023 a été notifiée à monsieur [P] [D] le même jour à 11h11, le jour de sa levée d'écrou, que sur cette notification, outre les signatures du Préfet et du service ayant procédé à la notification, apparaît la signature du retenu avec mention que ce dernier n'a pas besoin d'un interprète: ces signatures sont également présentes sur la notification des droits.

Le moyen soulevé ci-dessus n'est donc pas opérant.

Le contrôle de la décision initiale de placement en rétention

1 La légalité externe de l'acte

L'appelant conteste la réalité de la motivation en droit et en fait de la décision; les dispositions de l'article L.741-6 du CESEDA exigent à ce titre que la décision soit écrite et motivée. La décision doit ainsi comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision.

Or, en l'espèce, le Préfet a relevé que l'intéressé avait été condamné par le tribunal correctionnel d'Aix-en-Provence le 27 janvier 2023 à une ITN de 5 ans, qu'il ne présentait pas de garanties de représentation suffisantes ne disposant pas de passeport en cours de validité, qu'il avait fait l'objet de deux précédentes mesures d'éloignement les 3 novembre 2021 et 4 novembre 2022 non respectées et était connu des services de police sous différentes identités; ces éléments sont suffisants à caractériser la décision critiquée.

Quant au bien-fondé de la décision (pertinence de la motivation), elle ne relève pas de la compétence du juge judiciaire.

2 La légalité interne de l'acte

L'appelant fait état du fait que la mesure de rétention est disproportionnée eu égard à sa situation personnelle et familiale, qu'une assignation à résidence aurait pu lui être accordée même sans passeport valide, et vise l'article 8 paragraphe 4 de la directive 2008/ 115 sur les mesures coercitives.

Or, les éléments développés par monsieur [P] [D] au sujet de sa vie de famille en France, au regard des faits repris dans la décision de rétention quant au prononcé de la peine d'ITN de 5ans, de la non-exécution par le retenu de deux décisions d'éloignement de 2021 et 2022 et des nombreuses identités qu'il utilise, ne suffisent pas à caractériser de la part du Préfet une insuffisance d'examen des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de fuite.

Le moyen n'est donc pas opérant.

Le défaut de diligences de la part de l'administration

L'appelant affirme que l'administration n'a pas fait les diligences utiles au visa du décret n° 2009-905 du 24 juillet 2009 portant publication de l'accord-cadre relatif à la gestion concertée de migrations et du développement solidaire, du protocole relatif à la gestion concertée des migrations et du protocole en matière de développement solidaire entre la France et la Tunisie signés à [Localité 1] le 28 avril 2008, qu'ainsi, les autorités tunisiennes ont été saisies de sa situation mais sans élément complémentaire et sans que l'accord sus-dit ne soit visé, que son relevé d'empreintes décadactylaires en original n'a pas été transmis, ni ses photographies d'identité ni ses auditions préalables qui pourraient faire présumer de sa nationalité; il affirme que les diligences vers la Tunisie n'ont donc pas été entreprises et ce, dans les meilleurs délais.

La directive européenne n°2008-115/CE dite directive 'retour' dispose en son article 15§1 que toute rétention est aussi brève que possible et n'est maintenue qu'aussi longtemps que le dispositif d'éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise. La rétention doit reposer sur des circonstances de fait qui la rendent nécessaire et proportionnée ( CJUE 5 juin 2014 M. [N], C-146/14).

Lorsqu'il est constaté que la procédure de retour, d'examen de la demande de protection internationale ou de transfert, selon le cas, n'est plus exécutée avec toute la diligence requise.

la personne concernée doit, ainsi que le législateur de l'Union l'indique d'ailleurs expressément à l'article 15, paragraphe 2, quatrième alinéa, et paragraphe 4, de la directive 2008/115 et à l'article 9, paragraphe 3, second alinéa, de la directive 2013/33, être immédiatement remise en liberté ( arrêt CJUE -Grande Chambre- 8 novembre 2022 C-704/20 et C-39/21)

Suivant l'article L. 742-1 du CESEDA, quand un délai de quarante-huit heures s'est écoulé depuis la décision de placement en rétention, le juge des libertés et de la détention est saisi aux fins de prolongation de la rétention. Aux termes de l'article 742-3 du CESEDA, si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court pour une période de 28 jours à compter de l'expiration du délai de 48 heures.

Aux termes de l'article L.741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration doit exercer toute diligence à cet effet.

Si ce texte impose en effet au préfet d'effectuer sans désemparer les démarches nécessaires à l'exécution, dans les meilleurs délais, de la décision d'éloignement, l'appréciation des diligences qu'il a effectuées doit être faite in concreto en tenant compte des circonstances propres à chaque cas.

S'il est constant qu'il n'appartient pas au juge judiciaire de se prononcer sur la légalité de la décision fixant le pays de retour, il lui incombe d'apprécier les diligences mises en oeuvre pour reconduire l'intéressé dans son pays ou tout autre pays.

Monsieur [P] [D] a été placé en rétention le 27 juin 2023 et les autorités consulaires tunisiennes ont été saisies par l'administration le 27 juin 2023 en première intention puisque le retenu a dit être de nationalité tunisienne; toutefois, ainsi que vu plus haut, il a usé de plusieurs identités et sa nationalité à ce jour n'est pas encore certifiée; il est donc prématuré d'exiger à ce stade le respect des accords-cadre pris avec la Tunisie.

Dès lors, les diligences sus-dites utiles à l'exécution de la mesure d'éloignement dans les meilleurs délais ont été effectuées et le moyen soutenu à ce titre sera rejeté.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, la décision déférée sera donc confirmée.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par décision par décision réputée contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,

Ecartons les exceptions de nullité;

Confirmons l'ordonnance du Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 29 Juin 2023.

Les parties sont avisées qu'elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d'Etat ou de la Cour de cassation.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Rétention administrative
Numéro d'arrêt : 23/00943
Date de la décision : 30/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-30;23.00943 ?
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