COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-3
ARRÊT SUR DEFERE
DU 23 JUIN 2023
N°2023/ 123
RG 22/15450
N° Portalis DBVB-V-B7G-BKLME
S.A.S. INSTITUT HELIO MARIN DE LA COTE D'AZUR
C/
[O] [C]
Copie exécutoire délivrée
le 23 Juin 2023 à :
- Me Maxime DE MARGERIE, avocat au barreau de MARSEILLE
- Me Olivier SINELLE, avocat au barreau de TOULON
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du magistrat de la mise en état de la Cour d'Appel d'AIX-EN-PROVENCE en date du 04 Novembre 2022 enregistrée au répertoire général sous le n° 2022/M161.
DEMANDEUR A LA REQUETE
S.A.S. INSTITUT HELIO MARIN DE LA COTE D'AZUR, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Maxime DE MARGERIE, avocat au barreau de MARSEILLE
DEFENDEUR A LA REQUETE
Madame [O] [C], demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Olivier SINELLE de l'AARPI ESCLAPEZ-SINELLE-PILLIARD, avocat au barreau de TOULON
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Mai 2023 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, et Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant, chargées du rapport.
Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre
Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président
Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant
Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 02 Juin 2023, délibéré prorogé en raison de la survenance d'une difficulté dans la mise en oeuvre de la décision au 23 Juin 2023.
ARRÊT
CONTRADICTOIRE
Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Juin 2023.
Signé par Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* * * * * * * * * *
Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Toulon du 21/06/2019;
Vu l'appel interjeté par la société Institut Helio Marin de la Côte d'Azur le 22/07/2019;
Vu l'ordonnance du conseiller de la mise en état de la chambre 4-6 du 4 novembre 2022 ayant constaté la péremption de l'instance.
Par requête notifiée par voie électronique au greffe le 18 novembre 2022, la société appelante demande à la cour de :
Infirmer l'ordonnance.
Dire et Juger que l'instance en cours n'est pas périmée.
Condamner Mme [O] [C] à payer 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Elle explique avoir accompli toutes les diligences utiles qui lui revenaient dans le strict respect des délais impartis et n'a fait que subir un délai de traitement qui dépend du stock de la chambre des affaires à programmer, sans que l'on puisse présumer un quelconque désintérêt de sa part pour l'affaire.
Elle observe que la décision est contraire à la jurisprudence constante de la chambre 4-6 et invoque également l'article 6 §1 de la CEDH.
Dans ses écritures en réponse communiquées par voie électronique le 23 avril 2023, Mme [O] [C] demande à la cour de :
Confirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions.
Constater la péremption de l'instance.
Débouter la société de l'intégralité de ses demandes fins et prétentions.
Condamner la société à la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens distraits.
Elle indique que la dernière diligence accomplie date du 20 avril 2020.
Elle rappelle la décision de la Cour de cassation du 16 décembre 2016 qui précise de manière solennelle que la sanction de la péremption ne disparaît qu'après fixation de l'affaire à plaider.
Pour l'exposé plus détaillé des prétentions et moyens des parties, il sera renvoyé, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions des parties.
MOTIFS DE L'ARRÊT
Sur la péremption
L'article 386 du code de procédure civile dispose que « l'instance est périmée lorsque aucune des parties n'accomplit de diligence pendant deux ans ».
L'article 387 du même code rappelle que « la péremption peut être demandée par l'une quelconque des parties » et qu' « elle peut être opposée par voie d'exception à la partie qui accomplit un acte après l'expiration du délai de péremption ».
Selon l'article 388 du même code, « la péremption doit, à peine d'irrecevabilité, être demandée ou opposée avant tout moyen ; elle est de droit ». Depuis le décret n 2017-892 du 6 mai 2017, «le juge peut la constater d'office après avoir invité les parties à présenter leurs observations».
Enfin, l'article 390 du même code précise que « la péremption en cause d'appel ou d'opposition confère au jugement force de la chose jugée, même s'il n'a pas été notifié ».
En l'espèce, il est acquis que depuis la notification par voie électronique des conclusions de l'appelante le 20 avril 2020, aucune diligence n'a plus été accomplie par les parties.
Il convient de rappeler que la mention «à fixer» portée par le greffe dans le dossier électronique de l'affaire atteste seulement du dépôt des écritures des parties dans les délais d'échanges initiaux prévus par les articles 908 et suivants du code de procédure civile et qu'il incombe non au greffe mais au conseiller de la mise en état ou à défaut au président de la chambre de fixer l'affaire.
Lorsque comme en l'espèce, le conseiller de la mise en état, au terme des échanges de conclusions visés ci-dessus, n'a, en application de l'article 912 du même code, ni fixé les dates de clôture de l'instruction et des plaidoiries ni établi un calendrier des échanges, les parties qui, en application de l'article 2 du même code, conduisent l'instance, doivent accomplir des diligences pour faire avancer l'affaire ou obtenir une fixation de la date des débats.
Cette exigence n'est pas remise en cause par l'encombrement éventuel du rôle qui n'a pas en soi pour effet de paralyser toute diligence des parties pour obtenir l'avancement de la procédure.
A défaut, le constat de la péremption de l'instance, qui tire les conséquences de l'absence de diligences des parties pendant deux années en vue de voir aboutir le jugement de l'affaire et qui poursuit un but légitime de bonne administration de la justice et de sécurité juridique afin que cette instance s'achève dans un délai raisonnable, ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit à un procès équitable.
Dès lors qu'il n'a pas été réceptionné au greffe de nouvelles conclusions ni de demande de fixation par l'une ou l'autre des parties, - exécution d'un acte simple et adéquat pour un professionnel avisé, de nature à ce que la péremption ne soit pas acquise - entre le 21 avril 2020 et le 30 mai 2022, date de la requête sur incident, il convient de constater qu'il s'est écoulé plus de deux ans depuis le dernier acte interruptif.
Ces règles ont été rappelées notamment dans un avis de la Cour de cassation du 9 janvier 2017 mais aussi dans un arrêt du 1er février 2018, les décisions de la Haute Cour ayant constaté que «le cours du délai de péremption de l'instance est suspendu, en l'absence de possibilité pour les parties d'accomplir des diligences de nature à accélérer le déroulement de l'instance, à compter de la date de la fixation de l'affaire pour être plaidée», ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
Il y a lieu d'ajouter que la CEDH juge notamment que si le droit d'exercer un recours est bien entendu soumis à des conditions légales, les tribunaux doivent, en appliquant des règles de procédure, éviter à la fois un excès de formalisme qui porterait atteinte à l'équité de la procédure, mais aussi une souplesse excessive qui aboutirait à supprimer les conditions de procédures établies par les lois.
En conséquence, il convient de confirmer l'ordonnance du conseiller de la mise en état, de faire droit à la demande de Mme [O] [C] concernant l'extinction de l'instance ayant pour effet de conférer au jugement déféré, force de chose jugée.
La société doit en conséquence être déboutée de ses demandes et condamnée aux dépens de la procédure, lesquels ne peuvent être distraits, la procédure en matière sociale ne donnant pas l'exclusivité à l'avocat dans la représentation.
L'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,
Confirme l'ordonnance déférée en ce qu'elle a prononcé la péremption de l'instance d'appel inscrite sous le RG 19/11936,
Dit en conséquence que le jugement du 21 juin 2019 a acquis force de chose jugée,
Constate l'extinction de l'instance d'appel par l'effet de la péremption,
Condamne la société Institut Helio Marin de la Côte d'Azur à payer à Mme [O] [C] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Laisse les dépens de la présente procédure à la charge de la société Institut Helio Marin de la Côte d'Azur.
LE GREFFIER LE PRESIDENT