COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Rétention Administrative
CHAMBRE 1-11 RA
ORDONNANCE
DU 22 JUIN 2023
N° 2023/0901
Rôle N° RG 23/00901 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLPOI
Copie conforme
délivrée le 22 Juin 2023 par courriel à :
-l'avocat
-le préfet
-le CRA
-le JLD/TJ
-le retenu
-le MP
Signature,
le greffier
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 21 Juin 2023 à 12h13.
APPELANT
Monsieur [O] [U]
né le 16 avril 1997 à [Localité 2]
de nationalité algérienne
comparant en personne, assisté de Me Maeva LAURENS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, commis d'office
INTIME
Monsieur le préfet du VAR
représenté par Monsieur [W] [X]
MINISTÈRE PUBLIC :
Avisé et non représenté
DEBATS
L'affaire a été débattue en audience publique le 22 Juin 2023 devant Madame Catherine LEROI, Conseillère à la cour d'appel déléguée par le premier président par ordonnance, assistée de Madame Michèle LELONG, Greffière,
ORDONNANCE
Contradictoire,
Prononcée par mise à disposition au greffe le 22 Juin 2023 à 15h45,
Signée par Madame Catherine LEROI, Conseillère et Madame Michèle LELONG, Greffière,
PROCÉDURE ET MOYENS
Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;
Vu le jugement du tribunal correctionnel de Toulon en date du 19 mai 2023 prononçant une interdiction définitive du territoire français ;
Vu la décision de placement en rétention prise le 19 mai 2023 par le préfet du VAR notifiée le 22 mai 2023 à 9h12 ;
Vu l'ordonnance du 21 juin 2023 rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE décidant une seconde prolongation de la rétention de Monsieur [O] [U] dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ;
Vu l'appel interjeté le 21 juin 2023 par Monsieur [O] [U] ;
Monsieur [O] [U] a comparu et a été entendu en ses explications ; il déclare : 'j'ai une adresse, je suis venu pour les vacances. Je ne veux pas retourner en Algérie. Je n'ai personne là-bas. Je demande qu'on me prenne les empreintes, je veux aller en Autriche, je suis demandeur d'asile en Autriche'.
Son avocat a été régulièrement entendu ; se référant à l'acte d'appel, il sollicite la mise en liberté de M. [U] en invoquant les moyens suivants :
- le défaut de diligences de l'administration auprès des autorités consulaires algériennes, au motif qu'il n'est toujours pas reconnu depuis son audition par ces dernières le 17 mai 2023 et que la préfecture, contrairement à ses dires, n'a pas saisi les autorités italiennes,
- le fait que la demande de bornage faite le 16 juin 2023 par l'intéressé, en sa qualité de demandeur d'asile en Autriche, a été rejetée par la préfecture alors qu'il produit la photographie de sa carte de demandeur d'asile établie au nom de [E] [O] né le 25 avril 1999 et portant sa photographie, ce qui s'explique par sa peur de donner sa véritable identité.
Il sollicite, à défaut de mise en liberté, l'assignation à résidence de M. [U].
Le représentant de la préfecture sollicite la confirmation de la décision déférée. Il fait valoir que la préfecture du Var, qui a le droit d'apprécier l'intérêt d'une consultation de la borne EURODAC, en application de l'article 17 du règlement DUBLIN, n'a pas estimé utile d'y procéder, au regard de la production par l'intéressé d'une photographie floue d'une carte de demande d'asile, établie sous une identité autre que la sienne et que par ailleurs, il ressort de la procédure, qu'une relance, au demeurant non obligatoire, a été adressée aux autorités
consulaires algériennes et que le CCDP de [Localité 1] a également été consulté faisant apparaître que l'intéressé n'était pas connu en Italie.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La recevabilité de l'appel contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention n'est pas contestée et les éléments du dossier ne font pas apparaître d'irrégularité.
Aux termes de l'article L742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile le juge des libertés et de la détention peut être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants :
1° En cas d'urgence absolue ou de menace d'une particulière gravité pour l'ordre public ;
2° Lorsque l'impossibilité d'exécuter la décision d'éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l'intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l'obstruction volontaire faite à son éloignement ;
3° Lorsque la décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison :
a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l'exécution de la décision d'éloignement ;
b) de l'absence de moyens de transport.
L'étranger peut être maintenu à disposition de la justice dans les conditions prévues à l'article L. 742-2.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d'une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas soixante jours.
Il convient de préciser que l'absence de passeport équivaut à la perte ou à la destruction de documents de voyage au sens de l'article L 742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Aux termes de l'article L741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet.
En l'espèce, M. [U] n'est pas possesseur d'un passeport en cours de validité. Il a été placé en rétention administrative le 22 mai 2023 et l'administration, par courrier du même jour, a sollicité le consul général de la République algérienne afin de procéder à l'identification de l'intéressé et à la délivrance d'un laissez -passer. Il a été procédé à cette audition le 17 mai 2023 et, en l'absence de réponse donnée par l'Algérie, la préfecture a adressé une relance aux autorités consulaires le 16 juin 2023, laquelle est restée sans suite à ce jour.
L'administration justifie ainsi de la réalisation des diligences utiles à l'éloignement de l'étranger dans les meilleurs délais, étant précisé que le préfet n'a pas à justifier des relances faites aux autorités étrangères saisies en temps utile et ce, en l'absence de pouvoir de contrainte sur ces dernières.
Par ailleurs, M. [U], qui n'avait jamais fait état d'une demande d'asile en Autriche lors de son audition en détention le 4 mai 2023 et avait seulement évoqué un passage par l'Italie, et ce, jusqu'à sa comparution devant cette cour d'appel le 25 mai 2023, se prévaut d'une demande d'asile faite en Autriche qu'il justifie par la photographie d'une carte rédigée en allemand, laquelle ne comporte aucune date d'émission et concerne une personne présentant une identité différente de la sienne soit celle de [E] [O] né le 25 avril 1999. Par ailleurs, il ne justifie d'aucun titre de réadmission en Italie.
Dans ces conditions, il ne saurait être reproché à la préfecture, qui dispose d'un pouvoir d'appréciation de la nécessité de consulter la borne EURODAC, d'avoir refusé cette consultation, au vu des déclarations contradictoires du retenu et de la pièce n'ayant aucune valeur probante alléguée qu'il produit, étant précisé que les explications de l'intéressé quant à sa crainte d'être identifié par son pays d'origine comme demandeur d'asile, n'apparaissent pas sérieuses.
Enfin, il résulte de l'article 17 du règlement ' Dublin' n° 604/2013 1° fixant les règles de détermination de l'Etat responsable de la demande d'asile, que tout Etat-membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement.
L'État- membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. Le cas échéant, il en informe, au moyen du réseau de communication électronique «DubliNet» établi au titre de l'article 18 du règlement (CE) n°1560/2003, l'État membre antérieurement responsable, l'État membre menant une procédure de détermination de l'État membre responsable ou celui qui a été requis aux fins de prise en charge ou de reprise en charge.
L'État membre qui devient responsable en application présent paragraphe l'indique immédiatement dans EURODAC conformément au règlement (UE) n° 603/2013 en ajoutant la date à laquelle la décision d'examiner la demande a été prise.
L'intéressé ayant sollicité l'asile le 31 mai 2023 auprès de la France, sa demande a été examinée et une décision de rejet a été rendue par l'OFPRA le 9 juin 2023.
Le moyen sera donc rejeté.
L'assignation à résidence se trouve subordonnée en application de l'article L 743-13 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile à l'existence de garanties de représentation effectives ainsi qu'à la remise préalable de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité en échange d'un récépissé valant justification de l'identité
et sur lequel est portée la mention de la décision d'éloignement en instance d'exécution. Lorsque l'étranger s'est préalablement soustrait à l'exécution d'une décision mentionnée à l'article L 700-1, à l'exception de son 4°, l'assignation à résidence fait l'objet d'une motivation spéciale.
L'appréciation de l'opportunité d'accorder cette mesure, qui ne saurait non plus être automatique, suppose que les éléments de la procédure ne laissent pas apparaître un risque de non exécution de la mesure d'éloignement.
En l'espèce, M. [U] qui n'a pas remis de passeport en cours de validité, qui ne justifie d'aucune adresse en France et qui refuse catégoriquement de retourner en Algérie, ne présente aucune garantie de représentation permettant de l'assigner à résidence.
Sa demande sera en conséquence rejetée et la décision déférée, confirmée.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par décision contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,
Confirmons l'ordonnance du Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 21 Juin 2023.
Les parties sont avisées qu'elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d'Etat ou de la Cour de cassation.
La greffière, La présidente,
Reçu copie et pris connaissance le
- Monsieur [O] [U]