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22/06/2023 | FRANCE | N°22/15376

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 22 juin 2023, 22/15376


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4



ARRÊT AU FOND

DU 22 JUIN 2023



N° 2023/













Rôle N° RG 22/15376 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BKLCQ







[B] [T]

[N] [O] épouse [T]





C/



[C] [S]

S.A.R.L. ENTREPRISE DE BATIMENTS GARINO ET FILS









Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Jean-françois JOURDAN



Me Séverine PATRIZIO



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Décision déférée à la Cour :



Ordonnance du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de GRASSE en date du 20 Octobre 2022 enregistrée au répertoire général sous le n° 22/01511.





APPELANTS



Monsieur [B] [T]

né le 15 Décembre 1965 à [Localité 3] (LIBAN), demeura...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRÊT AU FOND

DU 22 JUIN 2023

N° 2023/

Rôle N° RG 22/15376 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BKLCQ

[B] [T]

[N] [O] épouse [T]

C/

[C] [S]

S.A.R.L. ENTREPRISE DE BATIMENTS GARINO ET FILS

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Jean-françois JOURDAN

Me Séverine PATRIZIO

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de GRASSE en date du 20 Octobre 2022 enregistrée au répertoire général sous le n° 22/01511.

APPELANTS

Monsieur [B] [T]

né le 15 Décembre 1965 à [Localité 3] (LIBAN), demeurant [Adresse 8] EMIRATS ARABES UNIS

représenté par Me Jean-françois JOURDAN de la SCP JF JOURDAN - PG WATTECAMPS ET ASSOCIÉS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Véronique BOLIMOWSKI de la SCP SCP DIDIER VALETTE - VÉRONIQUE BOLIMOWSKI, avocat au barreau de GRASSE

Madame [N] [O] épouse [T]

née le 27 Juin 1979 à [Localité 6], demeurant [Adresse 8] EMIRATS ARABES UNIS

représenté par Me Jean-françois JOURDAN de la SCP JF JOURDAN - PG WATTECAMPS ET ASSOCIÉS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Véronique BOLIMOWSKI de la SCP SCP DIDIER VALETTE - VÉRONIQUE BOLIMOWSKI, avocat au barreau de GRASSE

INTIMEES

Madame [C] [S]

née le 08 Février 1973 à [Localité 5], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Séverine PATRIZIO, avocat au barreau de NICE

S.A.R.L. ENTREPRISE DE BATIMENTS GARINO ET FILS

, demeurant [Adresse 1]

défaillante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Avril 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Inès BONAFOS, Présidente, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Inès BONAFOS, Présidente

Mme Sophie LEYDIER, Conseillère

Madame Angélique NAKHLEH, Conseillère

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Juin 2023.

ARRÊT

EXPOSÉ DU LITIGE

Madame [C] [S] exploite à [Localité 7] une activité d'artiste peintre en vertu d'un contrat d'occupation d'une salle d'exposition consenti par Madame [H] le 4 mai 2008, au rez-de-chaussée de sa maison d'habitation située dans le village, lui appartenant initialement en totalité.

Par acte du 29 mai 2020, Madame [H] a cédé les lots de copropriété 2 (local à usage de garage) et 3 (maison élevée sur niveau bas de trois étages, à Monsieur [B] [T] et à Madame [N] [O] épouse [T] (désignés ci-après les époux [T]).

Faisant valoir que la partie habitable de la maison de village cédée aux époux [T] était située en partie supérieure de la galerie d'art qu'elle exploite et que ces derniers avaient fait faire des travaux d'envergure ayant notamment entraîné l'effritement du plafond du local commercial et la fragilisation du plancher objet des travaux de réfection entrepris, Madame [C] [S] a obtenu par ordonnance présidentielle du 10 octobre 2022, l'autorisation d'assigner à jour fixe d'heure à heure les époux [T] et la société Entreprise de Batiments Garino et Fils, devant le président du tribunal judiciaire de Grasse, au visa de l'article 835 alinéa 1er du code de procédure civile, afin principalement d'interdire la réalisation de certains travaux sous astreinte, et de cesser tous travaux dans l'enceinte de leurs lots situés à [Localité 7] sous astreinte.

L'affaire a été appelée à l'audience de référé du 19 octobre 2022, date à laquelle elle a été plaidée, les époux [T] ayant été représentés par leur conseil, de même que la demanderesse, tandis que la société Entreprise de Batiments Garino et Fils n'a pas comparu et n'a pas constitué avocat.

Les époux [T] ont soulevé in limine litis la nullité de l'assignation en référé d'heure à heure délivrée à leur encontre.

Sur le fond, ils ont principalement conclu au débouté des demandes formées à leur encontre, et ils ont sollicité une provision pour procédure abusive et vexatoire.

Par ordonnance réputée contradictoire du 20 octobre 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Grasse a:

- rejeté l'exception de nullité soulevée par Mr et Mme [T] et déclaré Madame [C] [S] recevable,

- fait interdiction immédiate à Monsieur et Madame [T] et à la société Entreprise de Bâtiments Garino et Fils de réaliser les travaux de ragréage et de pose des carrelages ou de tout autre revêtement, sur le sol situé au-dessus de la galerie exploitée par Madame [C] [S], sous astreinte de 15 000 euros chacun par infraction constatée,

- dit que les dits travaux ne pourront être entrepris que sur justification préalable, au moins 8 jours avant la réalisation des travaux, par les époux [T] à Madame [C] [S] et à son conseil, d'une étude par un BET présentant des garanties de compétence, sur la faisabilité du projet et sur les caractéristiques techniques, notamment le poids, que devront présenter les matériaux à utiliser (enduit de ragréage, revêtement de sol), et sur justification que les matériaux choisis (enduit de ragréage, revêtement sol) présentent bien des caractéristiques techniques, notamment en ce qui concerne le poids, conformes aux préconisations dudit BET,

- dit n'y avoir lieu à référé sur le surplus des demandes formées par Madame [C] [S],

- dit n'y avoir lieu à référé sur la demande reconventionnelle provisionnelle pour procédure abusive et vexatoire,

- condamné in solidum Monsieur [B] [T] et Madame [N] [O] épouse [T] à payer à Madame [C] [S] la somme de 2 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum Monsieur [B] [T] et Madame [N] [O] épouse [T] aux dépens, lesquels comprendront le coût des procès-verbaux de constat des 1-8 mars 2022 et du 17 septembre 2022,

- rejeté toutes autres demandes.

Par déclaration reçue au greffe le 21 novembre 2022, Monsieur [B] [T] et Madame [N] [O] épouse [T] ont interjeté appel de tous les chefs de cette ordonnance en intimant:

1/ Madame [C] [S],

2/ la société Entreprise de Bâtiments Garino et Fils.

Par dernières conclusions notifiées par le RPVA le 04 avril 2023, les appelants demandent à la cour:

Vu les articles 56 et 114 du code de procédure civile,

REFORMER la décision entreprise,

PRONONCER la nullité de l'assignation en référé d'heure à heure délivrée le 10 octobre 2022 à 10H40 à une adresse que la demanderesse savait fausse et de l'ordonnance subséquente rendue le 20 octobre 2022,

A défaut, et Statuant à nouveau,

Vu l'article 835 du code de procédure civile,

Vu l'absence de dommage imminent,

REFORMER en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise,

DEBOUTER Madame [S] de l'intégralité de ses demandes, fins, et conclusions,

Vu l'article 564 du code de procédure civile,

Vu l'avis de la Cour de Cassation 2ème chambre du 11 octobre 2022,

DECLARER irrecevable la demande nouvelle de Madame [S] visant à obtenir leur condamnation à lui payer une somme provisionnelle de 25 000 euros à valoir sur la réparation de son prétendu préjudice,

Reconventionnellement,

CONDAMNER Madame [S] à leur payer la somme de 7 000 euros à titre provisionnel pour procédure abusive et vexatoire en réparation du préjudice subi pour lesquels ils se réservent de saisir la juridiction du fond,

CONDAMNER Madame [S] à leur payer 7 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance en application de l'article 696 du code de procédure civile, en ce compris les constats d'huissier qu'ils ont dû faire dresser le 12 octobre 2022, et le 06 février 2023, et les frais et honoraires engagés auprès de Monsieur l'expert [U] pour les rapports des 22 et 29 novembre 2022 et du 26 janvier 2023 et du BET CADZETO du 07 novembre 2022 et du 25 janvier 2023.

Par dernières conclusions responsives notifiées par le RPVA le 10 avril 2023, Madame [C] [S], intimée, demande à la cour:

Vu les pièces versées aux débats,

Vu l'article 835 alinéa 1 du code de procédure civile,

Vu l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile,

Vu l'article 1240 du code civil,

' CONFIRMER l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a:

- REJETÉ l'exception de nullité soulevée par les époux [T] et la déclarer recevable,

- FAIT interdiction immédiate aux époux [T] et à la société ENTREPRISE DE BATIMENTS GARINO ET FILS de réaliser les travaux de ragréage et de pose de carrelages ou de tout autre revêtement, sur le sol situé au-dessus de la galerie exploitée par Madame [S], sous astreinte de 15 000 euros chacun par infraction constatée,

- DIT que lesdits travaux ne pourront être entrepris que sur justification préalable, au moins 8 jours avant la réalisation des travaux, par les époux [T] à Madame [S] et à son conseil, d'une étude par un BET présentant des garanties de compétence, sur la faisabilité du projet et sur les caractéristiques techniques, notamment le poids, que devront présenter les matériaux à utiliser (enduit de ragréage, revêtement de sol), et sur justification que les matériaux choisis (enduit de ragréage, revêtement de sol) présentent bien des caractéristiques techniques, notamment en ce qui concerne le poids, conforme aux préconisations dudit BET,

- CONDAMNÉ in solidum les époux [T] à lui payer la somme de 2 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- CONDAMNÉ in solidum les époux [T] aux dépens, en ce compris le coût des procès-verbaux de constat des 18 mars 2022 et 10 septembre 2022,

- DÉBOUTÉ les époux [T] de l'intégralité de leurs prétentions.

Et y ajoutant:

' DÉCLARER recevable sa demande en paiement de la somme provisionnelle de 25 000 euros,

' CONDAMNER in solidum les époux [T] à lui payer à titre provisionnel la somme de 25.000 euros à valoir sur la réparation définitive de son préjudice,

' DÉBOUTER les époux [T] de l'intégralité de leurs prétentions,

' CONDAMNER in solidum les époux [T] à lui payer la somme de 6 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et au titre des frais irrépétibles d'appel,

' CONDAMNER in solidum les époux [T] aux entiers dépens, lesquels comprendront le coût des procès-verbaux de constat des 18 mars 2022, 17 septembre 2022, 10 octobre 2022, 11 octobre 2022 et 3 mars 2023.

La société Entreprise de Bâtiments Garino et Fils n'a pas constitué avocat.

MOTIFS

En application de l'article 474 du code de procédure civile, il sera statué par arrêt réputé contradictoire, dans la mesure où la société Entreprise de Bâtiments Garino et Fils, défaillante, a été régulièrement assignée par acte du 23 décembre 2022, remis à personne habilitée à le recevoir.

Sur l'exception de nullité de l'assignation en référé d'heure à heure

Après avoir rappelé les dispositions de l'article 114 du code de procédure civile, et que la nullité d'un acte ne pouvait être prononcée qu'à charge pour celui qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, puis relevé:

- que l'assignation critiquée avait été délivrée aux défendeurs le 10 octobre 2022 à 10H40 à l'adresse de l'immeuble leur appartenant,

- que l'huissier qui avait délivré l'acte avait pris la précaution d'aviser immédiatement et préventivement le conseil des époux [T] afin qu'il lui confirme l'adresse dont il disposait, soit l'adresse du bien litigieux au [Adresse 2] à [Localité 7],

- qu'il n'était pas contesté que le conseil de la demanderesse avait lui- même avisé le conseil des défendeurs de la délivrance d'une assignation d'heure à heure,

- que les époux [T] avaient constitué avocat et pu organiser leur défense, de sorte qu'ils ne démontraient l'existence d'aucun grief,

le premier juge a, à juste titre, estimé qu'ils ne pouvaient se prévaloir de la nullité de l'assignation délivrée à leur encontre à l'adresse de leur bien à [Localité 7] et non à l'adresse où ils sont domiciliés à [Localité 4].

A ces justes motifs que la cour adopte, il convient seulement d'ajouter:

- que comme le fait exactement valoir l'intimée, elle n'a jamais été informée de l'adresse précise des époux [T] à DUBAI avant la délivrance de l'assignation du 11 octobre 2022, et ce même s'il y a eu des échanges de courriers et de mails entre leurs avocats et entre eux,

- que les délais de distance prévus aux articles 643 et suivants du code de procédure civile sont inapplicables au référé, de sorte que les époux [T] ne sont pas fondés à se prévaloir d'un quelconque grief lié à l'absence de respect des règles de signification de l'assignation à leur domicile à l'étranger.

En conséquence, l'ordonnance entreprise doit être confirmée en ce que le premier juge a rejeté l'exception de nullité de l'assignation soulevée par les époux [T] et déclaré l'action en référé d'heure à heure diligentée par Madame [C] [S] recevable.

Sur les demandes relatives à l'interruption et à la reprise des travaux

Au jour où le premier juge a statué, il a exactement retenu au vu des pièces produites par les parties:

- que le procès-verbal de constat préventif établi le 06 janvier 2022, avant le démarrage des travaux, ne portait aucune constatation ni photographie sur l'état du plafond de la galerie occupée par Madame [C] [S], et qu'il mentionnait simplement une fissure dans l'encadrement de la fenêtre et une microfissure apparente le long de la poutre suite à un dégât des eaux,

- qu'il résultait du procès-verbal du commissaire de justice établi le 18 mars 2022 que le plafond du local exploité par Madame [C] [S] était constitué d'un plancher manifestement très ancien, à solives en bois et enduit, et que certains morceaux d'enduit étaient tombés au sol de manière généralisée dans la galerie,

- que le procès-verbal de constat du commissaire de justice établi le 17 septembre 2022 établissait que différents endroits et le sol du local étaient recouverts de petits éclats et de poussière blanche,

- que par courrier du 06 octobre 2022, l'expert d'assuré, Monsieur [J], avait informé le conseil de Madame [C] [S] de ses inquiétudes quant à la poursuite des travaux, faisant état d'importants risques de chute d'éléments en sous-face du plafond du local, décrit comme particulièrement sensible aux vibrations découlant de travaux lourds,

- qu'il résultait du procès-verbal de constat du commissaire de justice établi le 12 octobre 2022 qu'au premier étage, dans la future cuisine salle à manger des époux [T] qui surplombe la galerie [S], une partie de la chape et des carreaux avaient été déposés pour 31,5 m2,

- que si l'entreprise Garino et Fils et l'architecte Sharma affirmaient que le gros-oeuvre était terminé et qu'il ne restait plus que des travaux de second oeuvre à effectuer, il devait être considéré que des travaux de ragréage et d'installation de carrelage ne pouvaient être qualifiés de travaux de second oeuvre, sans aucune incidence sur la structure, alors qu'il s'agissait d'un immeuble ancien sur structure bois, qui manifestait depuis plusieurs mois des signes de fragilité.

En l'état de ces éléments, non contredits par une analyse technique d'un bureau d'études, le premier juge a exactement estimé qu'il existait un dommage imminent au sens de l'article 835 du code de procédure civile, en ce qu'une inadéquation entre l'enduit de ragréage et le carrelage avec les capacités du plancher risquait d'entraîner des conséquences irréversibles pour l'immeuble, et a donc à juste titre fait interdiction aux époux [T] de poursuivre ces travaux, et dit qu'ils ne pourront être entrepris que selon les modalités particulières susvisées (page 2).

Devant la cour, les appelants justifient:

- avoir fait appel au BET Cadzeto qui a réalisé un audit structurel du plancher bois de l'appartement des époux [T], dont le gérant indique 'que la structure du plancher bois existant ne nécessite aucun renfort particulier, que les nouveaux revêtements choisis sont plus légers que l'ancien complexe déposé de la pièce, que la structure du plancher est saine et ne nécessite pas d'intervention particulière, que les travaux prévus sont de type « second 'uvre » et ne mettent nullement en péril la structure existante (attestation du 07 décembre 2022 pièce 22), ce dernier ayant établi une 'note de calcul-charges revêtement sur structure existante' en date du 25 janvier 2023, notifiée le 27 janvier 2023 à Madame [S] et son conseil par mail et RAR réceptionné par Madame [S] le 28 janvier 2023 (pièce n°32),

- avoir fait appel à Monsieur [U], ingénieur Arts et Métiers, expert en bâtiment près la présente cour, lequel a procédé à diverses investigations et à la tenue d'une réunion contradictoire le 29 novembre 2022 en présence de l'entreprise Garino en charge des travaux, de l'architecte Sharma, de Monsieur [J], expert technique de Madame [S], et de Monsieur [S] (représentant la galerie [S]), et a préconisé de réaliser une chape allégée en béton type polystyrène d'une épaisseur de 10 cm sur le plancher haut au dessus du local de la galerie, avec mise en place d'un polyane sur toute la surface du plancher au-dessus de la galerie et ancrage tous les 40 cms dans les murs périphériques avec des fers à béton de 12, outre la mise en place d'un treillis soudé (pièce 28),

- que Monsieur [U] a été destinataire du courrier de Monsieur [J] du 28 décembre 2022 adressé au conseil de Madame [S] et de la note de calcul du BET Cadzeto du 25 janvier 2013 qu'il a commenté dans sa note du 26 janvier 2023 comme suit:

'la note de calcul du BET Cadzeto inclus le calcul de charge qui vérifie que les matériaux choisis par Madame [O] (épouse [T]) présentent bien les caractéristiques en terme de poids conformes aux préconisations.

Les nouveaux revêtements choisis sont plus légers que l'ancien complexe déposé de la pièce. La structure du plancher est saine et ne nécessite pas d'intervention particulière.

Le BET Cadzeto indique que les travaux prévus sont de type 'second oeuvre' et ne mettent nullement en péril la structure existante.

Le fil polyane qui sera mis en place au-dessus du plancher est une précaution supplémentaire afin d'éviter tout passage de poussière, d'air ou d'eau dans la galerie pendant les travaux, ce qui veut dire qu'aucun gravat, aucune particule de poussière ne pourra tomber dans la galerie en provenance du chantier [O].

Seulement quelques petits morceaux de plâtre (situé entre les solives du plafond) du plafond de la galerie pourront se détacher compte tenu de son état ancien (......)

Je rappelle que l'entreprise en charge des travaux du chantier [O] s'était engagée à faire les reprises de plâtre en plafond de la galerie en cas de chute de quelques morceaux' (pièce 36),

- que par courrier du 03 avril 2023, l'entreprise Garino et Fils a informé les époux [T] de la reprise des travaux le 15 février 2023 et de la réalisation de l'intégralité de la chape conformément aux préconisations du BET le 1er mars 2023 (pièce 38).

Il résulte de ces éléments que le risque d'un dommage imminent affectant la structure du plancher de l'appartement des époux [T] et donc le risque d'un effondrement du plafond du local occupé par Madame [S], lié aux travaux des époux [T] sur leur bien n'est plus avéré à ce jour, contrairement à ce que soutient l'intimée, étant observé que le fait que des morceaux de plâtre du plafond se soient encore détachés comme constaté par procès-verbal du commissaire de justice du 3 mars 2023 (pièce 21-1) est insuffisant à caractériser un dommage imminent d'effondrement du plafond, au vu des éléments techniques susvisés.

Contrairement à ce que soutient encore l'intimée, il se déduit des pièces produites par les époux [T] qu'ils se sont conformés aux termes de l'ordonnance entreprise, laquelle doit être confirmée jusqu'à la reprise des travaux intervenue le 15 février 2023.

Postérieurement à cette date, et même si Madame [S] se plaint de troubles dans la jouissance de son local liés selon elle aux travaux réalisés sous la maîtrise d'ouvrage des époux [T], il n'existe plus pour autant de péril imminent justifiant d'interrompre à nouveau les travaux et/ou d'imposer aux époux [T] la justification d'études sur la faisabilité du projet et sur ses caractéristiques techniques puisque ces dernières ont été effectuées, sans qu'elle ne produise d'étude technique émanant d'un professionnel de la construction ou d'un expert contredisant les conclusions de Monsieur [U] et du BET Cadzeto.

Sur les demandes de provisions

Recevabilité:

S'il est exact qu'en principe les demandes nouvelles en appel ne sont pas recevables, ce principe posé par l'article 564 du code de procédure civil comporte des exceptions prévues notamment par l'article 566 qui dispose que sont recevables en appel les demandes accessoires aux prétentions initiales soumises au premier juge, ou celles qui en sont la conséquence ou le complément nécessaire.

Contrairement à ce que soutiennent les appelants, tel est bien le cas en l'espèce puisque la demande de provision formée par l'intimée a pour objet le trouble causé selon elle par les travaux réalisés par les appelants, dont elle a principalement demandé l'interruption.

Il s'ensuit que la demande de provision formée par l'intimée est recevable.

Provision réclamée par l'intimée:

L'intimée fonde sa demande de provision sur l'article 1240 du code civil qui implique la démonstration d'une faute imputable aux époux [T], d'un préjudice et d'un lien de causalité entre les deux.

En l'espèce, au vu des explications fournies par les appelants, il existe une contestation sérieuse sur l'existence d'une faute imputable aux époux [T] ayant directement causé le préjudice dont se plaint l'intimée.

En conséquence, elle doit être déboutée de sa demande de provision.

Provision réclamée par les appelants:

Alors que les demandes initiales formées par Madame [S] ont été à raison accueillies partiellement par le premier juge, c'est à juste titre que le premier juge a débouté les époux [T] de leur demande de provision pour procédure abusive ou vexatoire d'un montant de 3.000 euros.

En appel, les époux [T] réclament une provision pour procédure abusive ou vexatoire d'un montant de 7 000 euros, néanmoins, même s'il n'y a plus lieu à maintenir l'interdiction de poursuivre les travaux et les obligations imposées par le premier juge, il n'est pour autant nullement démontré que Madame [S] a abusivement engagé la présente action en référé, pas davantage que l'existence d'un préjudice résultant de la vexation des époux [T].

En conséquence, l'ordonnance entreprise doit être ici confirmée et les époux [T] seront déboutés du surplus de leur demande de provision pour procédure abusive ou vexatoire.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Contrairement à ce qu'a décidé le premier juge, les frais de constats des commissaires de justice ne sont pas compris dans les dépens, tels que précisés par l'article 695 du code de procédure civile.

L'ordonnance entreprise doit donc être partiellement infirmée sur ce seul point.

Succombant chacun partiellement, il convient de dire que les appelants et l'intimée supporteront par moitié les dépens d'appel.

Dans la mesure où il était nécessaire de vérifier la faisabilité technique des travaux initiés sous la maîtrise d'ouvrage des époux [T], les frais et honoraires engagés par eux en exécution de l'ordonnance entreprise auprès de l'expert [U] et du BET Cadzeto doivent rester à leur entière charge, de sorte que leur demande à ce titre doit être rejetée.

Et, aucune considération d'équité ne justifie de leur allouer une indemnité au titre des frais irrépétibles qu'ils ont dû exposer en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe, et après en avoir délibéré conformément à la loi,  

CONFIRME l'ordonnance entreprise jusqu'au 15 février 2023, excepté en ce que le premier juge a inclus le coût des procès-verbaux de constat des 18 mars 2022 et 17 septembre 2022 dans les dépens,

Statuant à nouveau et, y ajoutant,

DEBOUTE Madame [C] [S] de toutes ses demandes,

DEBOUTEMonsieur [B] [T] et Madame [N] [O] épouse [T] du surplus de leur demande de provision pour procédure abusive ou vexatoire et de leur demande tendant à inclure dans les dépens les frais et honoraires engagés par eux auprès de l'expert [U] et du BET Cadzeto,

REJETTE les demandes formées en appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

 

REJETTE les demandes formées au titre des frais de constats des commissaires de justice et des frais et honoraires de l'expert [U] et du BET Cadzeto,

FAIT MASSE des dépens d'appel et dit qu'ils seront supportés par moitié par Madame [C] [S], et par Monsieur [B] [T] et Madame [N] [O] épouse [T], et en ordonne la distraction.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Juin 2023

Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Monsieur Achille TAMPREAU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 22/15376
Date de la décision : 22/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-22;22.15376 ?
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