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22/06/2023 | FRANCE | N°22/00237

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-7, 22 juin 2023, 22/00237


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7



ARRÊT AU FOND

DU 22 JUIN 2023



N° 2023/ 215













Rôle N° RG 22/00237 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BIUUQ







[S] [H]





C/



[N] [I]

[D] [R]























Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Alicia COLOMBO







Me Benjamin AYOUN

















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Juge des contentieux de la protection de MARSEILLE en date du 15 Novembre 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 21/02168.





APPELANT



Monsieur [S] [H]

né le [Date naissance 3] 1988 à [Localité 7], demeurant [Adresse 4]



représenté par Me Alicia COLOMBO, av...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7

ARRÊT AU FOND

DU 22 JUIN 2023

N° 2023/ 215

Rôle N° RG 22/00237 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BIUUQ

[S] [H]

C/

[N] [I]

[D] [R]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Alicia COLOMBO

Me Benjamin AYOUN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juge des contentieux de la protection de MARSEILLE en date du 15 Novembre 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 21/02168.

APPELANT

Monsieur [S] [H]

né le [Date naissance 3] 1988 à [Localité 7], demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Alicia COLOMBO, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

INTIMES

Monsieur [N] [I]

né le [Date naissance 2] 1974 à [Localité 6], demeurant [Adresse 5]

représenté par Me Benjamin AYOUN, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

Madame [D] [R]

née le [Date naissance 1] 1980 à [Localité 6], demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Benjamin AYOUN, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Avril 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre

Madame Carole MENDOZA, Conseillère

Madame Mireille CAURIER-LEHOT, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Juin 2023 puis les parties ont été avisées que le prononcé de la décision était prorogé au 22 juin 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Juin 2023

Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé en date du 18 janvier 2016, Monsieur [I] et Madame [R] ont donné bail à Monsieur [H] un appartement meublé situé à [Localité 6] moyennant un loyer de 550 euros et des provisions sur charges de 15 euros par mois.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 21 juin 2018, Monsieur [I] et Madame [R] ont fait signifier à Monsieur [H] un congé pour vendre, mentionnant une prise d'effet au 5 janvier 2019.

Suivant exploit d'huissier en date du 18 mars 2019, Monsieur [I] et Madame [R] ont fait signifier à Monsieur [H] un commandement de payer visant la clause résolutoire.

Par arrêté du 10 juillet 2020, il a été déclaré l'insalubrité du logement loué par Monsieur [H] et prononcé une interdiction temporaire d'occuper les lieux, le logement ne pouvant être réaffecté à un usage d'habitation qu'après réalisation de différents travaux prescrits.

Monsieur [H] a libéré les lieux le 6 septembre 2020.

Par ordonnance du 21 janvier 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Marseille a dit n'y avoir lieu à référé en raison de l'existence d'une contestation sérieuse et a débouté Monsieur [I] et Madame [R] de leurs demandes tendant notamment à voir constater la résiliation du bail, prononcer l'expulsion de Monsieur [H] et condamner ce dernier au paiement des loyers impayés,

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 16 février 2021, Monsieur [I] et Madame [R] mettaient en demeure Monsieur [H] de payer la somme de 8.775 euros au titre des loyers et indemnités d'occupation impayés.

Suivant acte d'huissier du 30 mars 2021, Monsieur [I] et Madame [R] ont assigné Monsieur [H], devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Marseille aux fins de voir ce dernier condamner au paiement de :

*la somme de 1.692 euros au titre des loyers impayés et de la somme de 7.183 euros au titre de l'indemnité d'occupation, soit la somme totale de 8.875 euros.

* la somme de 2. 825 euros au titre de leur préjudice de perte de chance de vendre le bien

*la somme de 2.000 euros au titre de leur préjudice moral.

* la somme de 1. 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

L'affaire était évoquée à l'audience du 6 septembre 2021

Monsieur [I] et Madame [R] demandaient au tribunal de leur allouer le bénéfice de leur exploit introductif d'instance.

Monsieur [H] n'était ni présent, ni représenté.

Par jugement réputé contradictoire en date du 15 novembre 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Marseille a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire:

* condamné Monsieur [H] à payer à Monsieur [I] et Madame [R] la somme de 8.775 euros, incluant les loyers et charges dus en exécution du bail du 18 janvier 2016 sur le logement sis à [Localité 6] et, postérieurement au 18 janvier 2019, les indemnités d'occupation impayées.

* débouté Monsieur [I] et Madame [R] de leurs demandes de dommages et intérêts.

* condamné Monsieur [H] à payer à Monsieur [I] et Madame [R] la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

* condamné Monsieur [H] aux dépens de l'instance.

Par déclaration d'appel en date du 06 janvier 2022, Monsieur [H] interjetait appel de ladite décision en ce qu'elle a dit :

- condamne Monsieur [H] à payer à Monsieur [I] et Madame [R] la somme de 8. 775 euros, incluant les loyers et charges dus en exécution du bail du 18 janvier 2016 sur le logement sis à [Localité 6] et, postérieurement au 18 janvier 2019, les indemnités d'occupation impayées.

- condamne Monsieur [H] à payer à Monsieur [I] et Madame [R] la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- condamne Monsieur [H] aux dépens de l'instance.

Par ordonnance d'incident en date du 29 novembre 2022, le magistrat de la mise en état de la chambre 1-7 de la cour de céans a :

* rejeté la demande de Monsieur [I] et Madame [R] tendant à voir ordonner la radiation de l'affaire RG 22/00237 du rôle de la cour d'appel d'Aix-en-Provence.

* dit n'y avoir lieu à statuer sur les dépens et sur les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.

Au terme de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 16 Février 2023 auxquelles il convient de se référer pour l'exposé de ses prétentions et de ses moyens, Monsieur [H] demande à la cour de :

*réformer le jugement du tribunal judiciaire de Marseille, rendu le 15 novembre 2021, seulement en ce qu'il a :

- condamné Monsieur [H] à payer à Monsieur [I] et Madame [R] la somme de 8. 775 euros, incluant les loyers et charges dus en exécution du bail du 18 janvier 2016 sur le logement sis à [Localité 6] et, postérieurement au 18 janvier 2019, les indemnités d'occupation impayées.

- condamné Monsieur [H] à payer à Monsieur [I] et Madame [R] la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- condamné Monsieur [H] aux dépens de l'instance.

Statuant à nouveau,

* débouter Monsieur [I] et Madame [R] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,

* juger que dès le mois d'avril 2018, le logement loué et occupé par Monsieur [H] et sa famille était indécent ne satisfaisant pas aux dispositions légales de la loi du 6 juillet 1989,

* juger que Monsieur [I] et Madame [R] n'ont pas satisfait, en qualité de bailleur, à leur obligation d'entretien du bien,

En conséquence,

A titre principal,

* juger que Monsieur [H] était bien fondé à se prévaloir d'une exception d'inexécution s'agissant du paiement de son loyer et par conséquent, à ne plus s'acquitter de la part du loyer restant à sa charge après déduction des APL.

* débouter Monsieur [I] et Madame [R] de leur demande tendant à voir condamner Monsieur [H] à leur payer la somme de 8.775 euros au titre des loyers, charges dus et des indemnités d'occupations impayées.

Attendu que si par extraordinaire la juridiction de Céans estimait que Monsieur [H] n'était pas bien fondé à se prévaloir d'une exception d'inexécution s'agissant du paiement de son loyer,

A titre subsidiaire,

* juger du fait de l'indécence puis de l'insalubrité du logement donné à bail que Monsieur [I] et Madame [R] manquaient à leur obligation de jouissance paisible,

* juger que Monsieur [H] subissait un trouble de jouissance et, par conséquent, un préjudice,

* condamner solidairement Monsieur [I] et Madame [R] à payer à Monsieur [H] la somme de 9. 000 euros en réparation de ce préjudice de jouissance,

A titre infiniment subsidiaire,

* juger que Monsieur [H] n'est redevable au titre des loyers, charges dus et des indemnités d'occupation impayées que de la somme de 3.519 euros,

* octroyer à Monsieur [H] les plus larges délais de paiement afin de lui permettre de s'acquitter de sa dette de 36 mensualités de 97,75 euros (dette de 3 519 euros) ou de 228, 47 euros si la Cour estimait devoir faire droit à la demande des consorts [I]/[R] sur la totalité de la déduction faite du dépôt de garantie conservé par ces derniers,

En tout état de cause,

* allouer à Monsieur [H] la somme de 5. 000 euros au titre de l'indemnisation de son préjudice moral né de l'indécence puis de l'état d'insalubrité de son logement et de la carence de ses propriétaires à y remédier,

* condamner solidairement Monsieur [I] et Madame [R] au paiement de cette somme au bénéfice de Monsieur [H],

* allouer à Monsieur [H] la somme de 8. 000 euros au titre de l'indemnisation de son préjudice de santé de l'indécence puis de l'état d'insalubrité de son logement et de la carence de ses propriétaires à y remédier,

* condamner solidairement Monsieur [I] et Madame [R] au paiement de cette somme au bénéfice de Monsieur [H],

*condamner solidairement Monsieur [I] et Madame [R] au paiement de la somme de 2.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

* condamner solidairement Monsieur [I] et Madame [R] aux entiers dépens en ce compris ceux de première instance.

Au soutien de ses demandes, Monsieur [H] expose que très rapidement, le logement donné à bail s'est dégradé, présentant notamment des traces de moisissures sur les murs et dans la salle de bain.

Il explique que par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 6 mars 2017, Monsieur [I] et Madame [R] lui ont demandé de mettre en marche la WMC et d'enlever le scotch des aérations placées sous les fenêtres, mais précise que cette WMC était défectueuse et ne fonctionnait pas.

La situation atteignait son paroxysme le 11 avril 2018.

En effet en raison de fortes pluies, les plafonds, murs, sols, plinthes, fenêtres de l'appartement ainsi que les vêtements et les meubles de Monsieur [H] étaient fortement endommagés.

Le 14 avril 2018, les parties régularisaient un constat amiable de dégâts des eaux.

Toutefois l'ampleur des désordres affectant le logement conduisait Monsieur et Madame [H], parents depuis peu, à quitter le logement et à se rendre dans un hôtel.

Il indique que par la suite, un expert concluait à une prise en charge des dommages par l'assureur de l'immeuble.

Il précise avoir sollicité de son bailleur une réduction de son loyer afin de se reloger au moins le temps des travaux.

A la suite d'une nouvelle réunion d'expertise en date des 20 et 21 juin 2018, les consorts [I]/[R] signifiaient au concluant un congé pour vente avec prise d'effet au 5 janvier 2019.

Il expose avoir multiplié avec son épouse les démarches auprès des services de la Ville de [Localité 6] afin d'être aidés, aucun des travaux prévus n'ayant été effectué.

Aussi il soutient qu'il était bien fondé à ne plus s'acquitter de la part du loyer restant à sa charge après la déduction des APL , ajoutant que cette situation lui a causé un préjudice de jouissance certain.

Au terme de leurs dernières conclusions notifiées par RPVA le 16 mars 2023 auxquelles il convient de se référer pour l'exposé de leurs prétentions et de leurs moyens, Monsieur [I] et Madame [R] demandent à la cour de :

* confirmer la décision entreprise dans l'ensemble de ses dispositions

* débouter Monsieur [H] de l'ensemble de ses demandes

* condamner Monsieur [H] au paiement de la somme de 2. 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

* condamner Monsieur [H] aux dépens de la présente instance.

A l'appui de leurs demandes, Monsieur [I] et Madame [R] font valoir que comme cela est indiqué dans l'état des lieux d'entrée contradictoire du 18 janvier 2016, l'appartement donné à bail était en parfait état.

Ils expliquent que près d'un an après être entré dans les lieux, Monsieur [H] les a contactés afin de signaler des problèmes d'humidité dans l'appartement.

Suite à cela, Monsieur [I] a entrepris tous les travaux nécessaires afin de rénover son bien.

En avril 2018, ils indiquent que leur locataire les a avisés qu'une fuite s'était introduite dans l'appartement au niveau de leur entrée.

Ils précisent avoir fait le nécessaire pour la colmater en protégeant les tuiles et en prévenant le syndic afin qu'il intervienne au plus vite pour réparer.

Néanmoins, ils se sont heurtés à la réticence constante des locataires lesquels ne les ont pas autorisés à entrer dans le logement pour effectuer les travaux, ou n'ont jamais honoré les rendez-vous prévus pour ces travaux.

Aussi ils maintiennent que l'appelant ne peut prétendre, pour ne pas honorer les loyers, que le délabrement du logement serait due à l'ineptie de leurs bailleurs

******

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 23 mars 2023.

L'affaire a été appelée à l'audience du 6 avril 2023 et mise en délibéré au 8 juin 2023, prorogé au 22 juin 2023.

******

1°) Sur la dette locative

Attendu que l'article 7 a) de la loi du 6 juillet 1989 énonce que « le locataire est obligé de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus ; le paiement mensuel est de droit lorsque le locataire en fait la demande. Le paiement partiel du loyer par le locataire réalisé en application de l'article L. 843-1 du code de la construction et de l'habitation ne peut être considéré comme un défaut de paiement du locataire »

Que l'article 1728 du code civil dispose que « le preneur est tenu de deux obligations principales:

1° D'user de la chose louée en bon père de famille, et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail, ou suivant celle présumée d'après les circonstances, à défaut de convention ;

2° De payer le prix du bail aux termes convenus. »

Attendu qu'il résulte des pièces versées aux débats que suivant contrat en date du 18 janvier 2016, Monsieur [I] et Madame [R] ont donné bail à Monsieur [H] un appartement meublé situé à [Localité 6] moyennant un loyer de 550 euros et des provisions sur charges de 15 euros par mois.

Que ce dernier a libéré les lieux le 6 septembre 2020 alors que Monsieur [I] et Madame [R] lui avaient fait régulièrement signifié un congé pour vendre, suivant lettre recommandée avec accusé de réception en date du 21 juin 2018, mentionnant une prise d'effet au 5 janvier 2019, Monsieur [H] étant dès lors occupant sans droit ni titre du logement à compter de cette date.

Que Monsieur [I] et Madame [R] soutiennent que ce dernier reste leur devoir la somme de 8.775 euros au titre des loyers impayés et indemnités d'occupation et versent à l'appui de leur dire un décompte établi du mois d'avril 2018 à août 2020 inclus

Qu'il résulte de ce décompte que les intimés ont perçu les APL durant cette période à l'exception des mois de mai, juin, juillet et août 2019 et des mois de janvier, février, mars, avril, mai, juin , juillet et août 2020 Monsieur [H] n'ayant versé quant à lui que la somme de 188 euros en septembre 2018

Que Monsieur [H] ne conteste pas les faits

Qu'il indique avoir en effet suspendu le versement du loyer depuis le mois de mai 2018 tenant à l'absence de travaux effectués dans le logement et au manquement des bailleurs à leur obligation d'entretien

Qu'il rappelle que par arrêté du 10 juillet 2020, il a été déclaré l'insalubrité du logement loué par Monsieur [H] et prononcé une interdiction temporaire d'occuper les lieux, le logement ne pouvant être réaffecté à un usage d'habitation qu'après réalisation de différents travaux prescrits

Attendu que Monsieur [I] et Madame [R] contestent les dires de Monsieur [H], soutenant que ce dernier a lui-même dégradé l'appartement, ajoutant que contrairement à ce que ce dernier affirme , ils n'ont jamais donné leur accord pour voir suspendre le versement du loyer.

Attendu que l'exception d'inexécution n'est admise au bénéfice du locataire qu'à une double condition :

- le preneur doit se trouver dans l'impossibilité d'utiliser les lieux loués et

- cette situation résulte d'un manquement du bailleur à ses obligations contractuelles.

Qu'ainsi seul le manquement complet du bailleur à son obligation de délivrance peut justifier l'arrêt du paiement des loyers sur le fondement de l'exception d'inexécution

Que la 3ème chambre civile de la Cour de Cassation a jugé dans un arrêt du 28 juin 2018 qu'il ne peut suffire pour le locataire d'invoquer un manquement du bailleur à son obligation contractuelle d'entretien et de travaux pour se prévaloir de l'exception d'inexécution pour refuser le paiement des loyers.

Attendu qu'il résulte des pièces produites au débat et notamment de l'état des lieux d'entrée établi contradictoirement entre les parties le 18 janvier 2016 que les plafonds, les murs et les sols des différentes pièces composant l'appartement étaient en très bon état.

Que Monsieur [I] et Madame [R] ne contestent pas que l'appartement a présenté des traces d'humidité en janvier 2017 mais précisent que ces dernières ont été causées par l'obstruction des grilles d'aération et par le fait que leur locataire avait coupé la VMC.

Que la cour observe cependant qu'exceptés les courriers en date des 6 mars 2017, 15 avril 2018 et 24 octobre 2018 dans lesquelles ils reprochent à Monsieur [H] d'avoir scotché les aérations et arrêté la VMC, aucun élément n'est versé au débat démontrant que ces désordres seraient du fait de l'appelant

Que ce dernier ne conteste pas que ses bailleurs ont effectué des réparations mais soutient, sans le prouver, que celles-ci n'ont pas résolu les désordres.

Attendu que Monsieur [I] et Madame [R] reconnaissent également que le 11 avril 2018, ils ont été avisés par Monsieur [H] que de l'eau s'infiltrait par une fissure au plafond mais précisent avoir posé une bâche sur les tuiles en attendant l'intervention du syndic

Que toutefois il est constant que la situation s'est aggravée en raison de fortes pluies, les plafonds, murs, sols, plinthes, fenêtres de l'appartement ainsi que les vêtements et les meubles de Monsieur [H] ayant été fortement endommagés.

Qu'un constat amiable dégâts des eaux était régularisé entre les parties le 14 avril 2018.

Que le rapport d'expertise diligentée à la suite de ce sinistre en date du 27 avril 2018 mentionnait que « les dommages liés aux infiltrations d'eaux pluviales par toiture sont limités ( auréoles en plafond) et ne justifient pas un relogement »

Qu'il n'est pas contesté que Monsieur [H] a demeuré dans le logement, refusant les propositions de relogement que lui avait proposées la ville de [Localité 6] comme cela résulte du courrier du 13 décembre 2019 du service logement de la mairie de [Localité 6]

Qu'il avait cependant la possibilité de saisir, sur le fondement de l'article 20-1 de la loi du 6 juillet 1989, le juge lequel aurait pu ordonner les travaux nécessaires et jusqu'à la pleine exécution de ces travaux, réduire le montant du loyer ou en suspendre le paiement, avec ou sans consignation.  

Attendu enfin qu'il résulte de l'arrêté d'insalubrité du 20 juillet 2020 que les principales causes d'insalubrités qui ont été relevées sont :

une humidité importante et un développement de moisissures important dans la salle d'eau et la chambre.

la présence de traces d'infiltrations au niveau des plafonds du coin cuisine et de la chambre.

des revêtements fortement dégradés au niveau des plafonds et des murs de la salle d'eau et de la chambre.

une ventilation insuffisante et inadaptée

Que l'article 2 de cet arrêté du 20 juillet 2020 dispose que « l'interdiction temporaire d'habiter les lieux est prononcée. Elle prendra effet dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêté et sera effective tant que les mesures prescrites à l'article 4 n'ont pas été réalisées » de sorte que l'indemnité d'occupation de mois d'août 2020 était due

Attendu qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que Monsieur [H] ne peut valablement se prévaloir de l'exception d'inexécution, les conditions requises n'étant pas réunies

Qu'il y a lieu par conséquent de le débouter de sa demande et de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné Monsieur [H] à payer à Monsieur [I] et Madame [R] la somme de 8. 775 euros, incluant les loyers et charges dus en exécution du bail du 18 janvier 2016 sur le logement sis à [Localité 6] et, postérieurement au 18 janvier 2019, les indemnités d'occupation impayées.

2°) Sur la demande de dommages et intérêts de Monsieur [H]

Attendu qu'il résulte de l'article 1719 du code civile que « le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière :

1° De délivrer au preneur la chose louée et, s'il s'agit de son habitation principale, un logement décent. Lorsque des locaux loués à usage d'habitation sont impropres à cet usage, le bailleur ne peut se prévaloir de la nullité du bail ou de sa résiliation pour demander l'expulsion de l'occupant ;

2° D'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée ;

3° D'en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail ;

4° D'assurer également la permanence et la qualité des plantations. »

Attendu que Monsieur [H] soutient qu'en l'état de son logement il a indiscutablement subi un trouble de jouissance, trouble de jouissance accentué par la carence de ses propriétaires lesquels pendant près de deux ans promettaient des travaux qui n'ont jamais été effectués.

Qu'il ajoute que l'indécence du logement puis l'état d'insalubrité de ce dernier lui ont également causé un préjudice moral.

Qu'il produit divers certificats médicaux et attestations de proches à l'appui de sa demande.

Attendu Monsieur [I] et Madame [R] font valoir que ce dernier est responsable de cette situation dans la mesure où ils n'ont pu accéder à leur appartement, Monsieur [H] ne répondant pas à leurs appels et messages afin de planifier l'intervention des artisans

Qu'ils versent à l'appui de leurs dires les nombreux courriers adressés à ce dernier notamment les 10 décembre 2018 afin qu'il les autorise à pénétrer dans le logement.

Qu'ils rappellent qu'un rendez-vous tripartie avec leur locataire et l' AMPIL avait été fixé le 6 novembre 2018 afin de mettre en place le relogement de la famille [H], lequel rendez vous n'a pu avoir lieu, l'appelant ayant annulé son rendez-vous le jour même comme cela résulte du mail de Madame [C].

Que Monsieur [I] et Madame [R] versent également au débat un courrier adressé par lettre recommandée avec accusé de réception le 3 mars 2020 à leur locataire afin que ce dernier les autorise à pénétrer dans l'appartement pour réaliser les travaux, demande restée sans réponse.

Qu'il résulte de ces éléments que l'appelant ne saurait reprocher à Monsieur [I] et Madame [R] de ne pas avoir effectuer les travaux alors qu'il a lui-même fait obstacle à leur réalisation.

Que surtout il ressort du courrier de la mairie du 7ème secteur (13e et 14e arrondissement) de la ville de [Localité 6] du 13 décembre 2019 que cette dernière avait présenté depuis 2018 à l'appelant plusieurs propositions de logement toutes refusées par ce dernier bien que convenant à sa situation financière.

Qu'il résulte ainsi de ces éléments que Monsieur [H] ne peut se prévaloir d'un quelconque préjudice de jouissance et préjudice moral depuis décembre 2018, préférant se maintenir dans les lieux sans payer le loyer et refusant l'accès au logement pour la réalisation des travaux.

Que par contre il est établi que l'appartement de ce dernier a présenté des traces d'humidité et des moisissures dès janvier 2017, désordres dont Monsieur [H] ne saurait être tenu pour responsable.

Qu'il convient par conséquent de lui allouer la somme de 2.000 euros au titre de son préjudice de jouissance et préjudice moral et de condamner Monsieur [I] et Madame [R] au paiement de cette somme.

3°) Sur les demandes de délais de paiement

Attendu que l'article 24 V.de la loi du 6 juillet 1989 dispose que 'le juge peut, même d'office, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l'article 1343-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative. Le quatrième alinéa de l'article 1343-5 s'applique lorsque la décision du juge est prise sur le fondement du présent alinéa. Le juge peut d'office vérifier tout élément constitutif de la dette locative et le respect de l'obligation prévue au premier alinéa de l'article 6 de la présente loi. Il invite les parties à lui produire tous éléments relatifs à l'existence d'une procédure de traitement du surendettement au sens du livre VII du code de la consommation.'

Que l'article 1343-5 du code civil énonce que « le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.

Il peut subordonner ces mesures à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette.

La décision du juge suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d'intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge.

Toute stipulation contraire est réputée non écrite.

Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux dettes d'aliment. »

Attendu que Monsieur [H] sollicite les plus larges délais de paiement afin de lui permettre de s'acquitter de sa dette.

Qu'il verse à l'appui de sa demande l'attestation de paiement CAF 2022, les bulletins de paie des mois d'octobre 2021, décembre 2021, janvier 2022, février 2022 , les avis d'impôt sur le revenu de 2019 et 2020 ainsi que l'attestation de paiement d'indemnités journalières de décembre 2022 et janvier 2023.

Qu'il résulte de ces éléments que la situation financière de Monsieur [H] ne lui permet pas de régler sa dette locative.

Qu'il y a lieu par conséquent de débouter Monsieur [H] de cette demande.

4° ) Sur les dépens et les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Attendu que l'article 696 alinéa 1 du code de procédure civile dispose que 'la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.'

Qu'il convient de confirmer le jugement déféré sur ce point et de condamner Monsieur [H] aux dépens en première instance et en cause d'appel.

Attendu que l'article 700 du code de procédure civile prévoit que le tribunal condamne la partie tenue aux dépens à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens en tenant compte de l'équité et de la situation économique des parties.

Qu'il y a lieu de confirmer le jugement déféré sur ce point et de condamner Monsieur [H] au paiement de la somme de 1.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d 'appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort et par mise à disposition au greffe

CONFIRME le jugement du 16 décembre 2021 du juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Marseille en toutes ses dispositions.

Y AJOUTANT,

DÉBOUTE Monsieur [H] de sa demande de délais de paiement.

CONDAMNE Monsieur [I] et Madame [R] à payer à Monsieur [H] la somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts.

CONDAMNE Monsieur [H] au paiement de la somme de 1.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d 'appel.

CONDAMNE Monsieur [H] aux dépens en première instance et en cause d'appel.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-7
Numéro d'arrêt : 22/00237
Date de la décision : 22/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-22;22.00237 ?
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