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08/06/2023 | FRANCE | N°21/15140

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-7, 08 juin 2023, 21/15140


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7



ARRÊT AU FOND

DU 08 JUIN 2023



N° 2023/ 191













Rôle N° RG 21/15140 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BIJMY







S.A.S. TBP CONSEIL





C/



[J] [H]

[E] [O]

[U] [V] épouse [O]

[I] [R]

















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Monika MAHY-MA-SOMGA



Me Florence BLANC




Me Philippe CORNET



Me Paul GUEDJ





Décision déférée à la Cour :



Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de MARSEILLE en date du 20 Septembre 2021 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 18/12788.



APPELANTE



S.A.S. TBP CONSEIL, demeurant [Adresse 7]



représentée ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7

ARRÊT AU FOND

DU 08 JUIN 2023

N° 2023/ 191

Rôle N° RG 21/15140 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BIJMY

S.A.S. TBP CONSEIL

C/

[J] [H]

[E] [O]

[U] [V] épouse [O]

[I] [R]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Monika MAHY-MA-SOMGA

Me Florence BLANC

Me Philippe CORNET

Me Paul GUEDJ

Décision déférée à la Cour :

Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de MARSEILLE en date du 20 Septembre 2021 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 18/12788.

APPELANTE

S.A.S. TBP CONSEIL, demeurant [Adresse 7]

représentée par Me Monika MAHY-MA-SOMGA de la SELARL LSCM & ASSOCIÉS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée de Me Gilles LASRY, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Marion CHOL,avocat au barreau de MONTPELLIER, plaidant

INTIMES

Madame [J] [H]

née le [Date naissance 2] 1990 à [Localité 10] (Pologne), demeurant [Adresse 6]

représentée par Me Florence BLANC de l'AARPI BCT AVOCATS, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

Monsieur [E] [O]

né le [Date naissance 3] 1986 à [Localité 8], demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Lionel CHARBONNEL de la SELARL CORNET - LE BRUN -GASSEND - CHARBONNEL, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

Madame [U] [V] épouse [O]

née le [Date naissance 1] 1987 à [Localité 8], demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Lionel CHARBONNEL de la SELARL CORNET - LE BRUN -GASSEND - CHARBONNEL, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

Maître [I] [R], demeurant [Adresse 5]

représenté par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assisté de Me Thomas DJOURNO, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 22 Mars 2023 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Mireille CAURIER-LEHOT, Conseillère,a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre

Madame Carole MENDOZA, Conseillère

Madame Mireille CAURIER-LEHOT, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Juin 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Juin 2023,

Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE :

Suivant compromis de vente signé le 14 juin 2018 devant Maître [I] [R], notaire, M. [E] [O] et Mme [U], [W] [V] épouse [O] ont vendu à Mme [J] [H] un bien immobilier situé à [Localité 9] au prix de 205000 euros, sous la condition suspensive de l'obtention d'un prêt.

Il était prévu que la réception de l'offre de prêt devait intervenir au plus tard le 14 août 2018 et l'acquéreur a versé un dépôt de garantie d'un montant de 10250 euros.

Le 15 juin 2018, Mme [J] [H] a confié à la SAS TBP CONSEIL un mandat de recherche de capitaux mais n'a pas obtenu le financement demandé auprès de différentes banques.

Par acte du 13 novembre 2018, Mme [J] [H] a assigné M. [E] [O] et Mme [W] [V] épouse [O], la SAS TBP CONSEIL et Maître [I] [R] aux fins d'obtenir à titre principal la restitution du dépôt de garantie d'un montant de 10250 euros, subsidiairement la réduction de la clause pénale à 1 euro, en tout état de cause la condamnation de la SAS TBP CONSEIL à la relever et garantir des condamnations prononcées à son encontre.

Par jugement contradictoire du 20 septembre 2021, le Tribunal judiciaire de Marseille a statué ainsi:

- DEBOUTE la SAS TBP CONSEIL de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- CONDAMNE [J] [H] à verser à [E] [O] et à [W] [V] épouse [O] ensemble :

- la somme de 20500 euros au titre de la clause pénale,

- la somme de 2000 Euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- ORDONNE à Maître [I] [R] de verser à [E] [O] et [W] [V] épouse [O] ensemble le dépôt de garantie d'un montant de 10250 Euros séquestré entre ses mains,

- DIT que cette somme de 10250 euros viendra en déduction de la somme de 20500 euros allouée à [E] [O] et à [W] [V] épouse [O] au titre de la clause pénale,

- CONDAMNE la SAS TBP CONSElL à relever et garantir [J] [H] des condamnations prononcées à son encontre,

- REJETTE la demande formée par [J] [H] sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- REJETTE toute autre demande,

- ORDONNE l'exécution provisoire du présent jugement,

- CONDAMNE la SAS TBP CONSEIL aux dépens.

Le jugement déféré retient que deux des trois refus de prêt opposés à Mme [J] [H] font suite à des demandes postérieures à la date limite à laquelle la réception des offres de prêt devait intervenir en vertu du compromis de vente ; que la condition suspensive d'obtention d'un prêt doit être déclarée reputée accomplie ; que la clause pénale d'un montant de 20500 euros prévue par ledit compromis n'apparaît pas manifestement excessive ; que le dépôt de garantie d'un montant de 10250 euros qui sera versé aux vendeurs viendra en déduction de la somme allouée à titre de clause pénale; que le mandataire, en la personne de la SAS TBP CONSEIL, a commis une faute en ne présentant pas concomitamment plusieurs demandes de prêt afin de respecter le délai prévu par le compromis de vente alors qu'il les a présentées après l'expiration dudit délai.

Selon déclaration du 25 octobre 2021, la SAS TBP CONSEIL a relevé appel de ce jugement en toutes ses dispositions.

Selon ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 21 juin 2022, auxquelles il sera référé pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la SAS TBP CONSEIL demande de voir :

- JUGER que la SAS TBP CONSEIL n'a commis aucune faute,

- JUGER que la SAS TBP CONSEIL n'est pas responsable des refus de prêt notifiés par les établissements de crédit,

- JUGER que le lien de causalité défaille entre l'intervention de TBP CONSEIL et le préjudice allégué,

- JUGER qu'il n'est justifié d'aucun préjudice indemnisable,

- Par conséquent,

- INFIRMER le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de MARSEILLE le 20 septembre 2021

en ce qu'il a :

- Débouté la SAS TBP CONSEIL de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- Condamné [J] [H] à verser à [E] [O] et à [W] [V] épouse [O] ensemble :

- La somme de 20500 euros au titre de la clause pénale,

- La somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Ordonné à Maître [I] [R] de verser à [E] [O] et à [W] [V] épouse [O] ensemble le dépôt de garantie d'un montant de 10250 euros séquestré entre ses mains,

- Dit que cette somme de 10250 euros viendra en déduction de la somme de 20500 euros allouée à [E] [O] et à [W] [V] épouse [O] au titre de la clause pénale,

- Condamné la SAS TBP CONSEIL à relever et garantir [J] [H] des condamnations prononcées à son encontre et aux dépens,

- Statuant à nouveau,

- DEBOUTER Madame [H] et toute partie de l'ensemble de leurs demandes à l'égard de la SAS TBP CONSEIL,

- DEBOUTER notamment les consorts [V]/[O] de la demande d'article 700 formalisée à l'encontre de TBP CONSEIL devant la Cour,

- CONDAMNER Madame [H] ou tout succombant au paiement de la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- LES CONDAMNER aux entiers dépens de première instance et d'appel.

La SAS TBP CONSEIL fait essentiellement valoir que les délais prévus au compromis de vente ne lui sont pas opposables puisqu'elle n'en est pas signataire ; qu'elle ne peut être tenue que des termes de son mandat, qui ont été respectés ; qu'en qualité de courtier chargé d'un mandat de recherche de financement, elle ne peut être tenue que d'une obligation de moyens ; que Mme [H] n'établit pas que la société détenait le compromis de vente lors de la signature du mandat ; que la société TBP CONSEIL a fait preuve de diligence ; qu'elle ne saurait être tenue des décisions des banques liées aux situations personnelles et financières des candidats acquéreurs ; que n'étant pas partie au compromis de vente, seule Mme [H] pourrait être tenue de réparer le préjudice éventuel des vendeurs dans le cadre de la mise en oeuvre de la clause pénale stipulée entre les parties ; que les consorts [O] ne justifient pas en outre du préjudice allégué ; que ces derniers ne formulent aucune prétention à l'encontre de l'appelante et qu'ainsi la demande faite au titre des frais irrépétibles n'est pas justifiée.

Selon ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 18 juillet 2022, auxquelles il sera référé pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, Mme [J] [H] demande de voir :

- la recevoir en son appel incident,

- A titre principal :

- REFORMER le jugement rendu le 20 septembre 2021 par le Tribunal judiciaire de Marseille en ce qu'il :

* CONDAMNE [J] [H] à verser à [E] [O] et à [W] [V] épouse [O] ensemble :

- la somme de 20500 euros au titre de la clause pénale,

- la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

* ORDONNE à Maître [I] [R] de verser à [E] [O] et à [W] [V] épouse [O] ensemble le dépôt de garantie d'un montant de 10250 euros séquestré entre ses mains,

* DIT que cette somme de 10250 euros viendra en déduction de la somme de 20500 euros allouée à [E] [O] et à [W] [V] épouse [O] au titre de la clause pénale,

* REJETTE la demande formée par [J] [H] sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- STATUANT A NOUVEAU :

- JUGER que Madame [J] [D] [H] n'a commis aucune faute ayant entrainé la défaillance de condition suspensive d'obtention du prêt,

- En conséquence,

- DEBOUTER Monsieur [E] [Z] [O] et Madame [U] [W] [V] épouse [O] de l'ensemble de leurs demandes et prétentions plus amples et contraires,

- JUGER que le dépôt de garantie de 10250 euros qui était détenu dans la comptabilité de l'étude de Maître [R], notaire, doit être intégralement restitué à Madame [J] [D] [H],

- ORDONNER la restitution à Madame [J] [D] [H] de la somme de 10250 euros qui était séquestrée en la comptabilité du notaire à titre de dépôt de garantie et que celui-ci a reversé à Monsieur [E] [Z] [O] et Madame [U] [W] [V] épouse [O] au bénéfice de l'exécution provisoire attachée au jugement rendu le 20 septembre 2021 par le Tribunal judiciaire de Marseille,

- CONDAMNER Monsieur [E] [Z] [O] et Madame [U] [W] [V] épouse [O] aux entiers dépens de l'instance par application de l'article 696 du Code de procédure civile,

- CONDAMNER Monsieur [E] [Z] [O] et Madame [U] [W] [V] épouse [O] à payer à Madame [J] [D] [H] une somme de 5000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- A titre subsidiaire :

- CONFIRMER la décision entreprise en ce qu'il a été jugé que le compromis ne comporte pas d'indemnité d'immobilisation, mais uniquement une clause pénale,

- CONFIRMER le jugement rendu le 20 septembre 2021 en ce qu'il a débouté Monsieur [E] [Z] [O] et Madame [U] [W] [V] épouse [O] de leur demande subsidiaire fondée sur une indemnité d'immobilisation,

- REDUIRE à un euro symbolique la clause pénale excessive stipulée dans le compromis de vente en date du 14 juin 2018 par application de l'article 1232-5 alinéa 2 du Code civil,

- En toutes hypothèses :

- CONFIRMER le jugement rendu le 20 septembre 2021 en ce qu'il :

* DEBOUTE la SAS TBP CONSEIL de toutes ses demandes, fins et conclusions,

* CONDAMNE la SAS TBP CONSEIL à relever et garantir [J] [H] des condamnations prononcées à son encontre,

*CONDAMNE la SAS TBP CONSEIL aux dépens

- CONDAMNER la SAS TBP CONSEIL à relever et garantir Madame [J] [D] [H] de toutes condamnations qui seraient prononcées à son encontre par application de l'article 1991 du Code civil, et des articles 696 et 700 du Code de procédure civile,

- CONDAMNER la SAS TBP CONSEIL aux entiers dépens de l'instance par application de l'article 696 du Code de procédure civile,

- CONDAMNER la SAS TBP CONSEIL à payer à Madame [J] [D] [H] une somme de 5000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- DEBOUTER Monsieur [E] [Z] [O] et Madame [U] [W] [V] épouse [O] et la SAS TBP CONSEIL de toutes demandes plus amples ou contraires.

Mme [H] fait principalement valoir que les vendeurs ont décidé de prendre à bail un nouvel appartement dès le mois d'août 2018 et qu'elle ne les a pas pressés de déménager ; que les époux [O] l'ont mise en demeure de justifier sous 8 jours la réalisation ou la non-réalisation de la condition suspensive d'obtention du prêt par courrier RAR du 30 août 2018 ; qu'elle a répondu dans les 8 jours par mail du 4 septembre 2018 en transmettant les deux attestations de refus de prêt ; qu'elle n'a pas commis de faute alors qu'elle avait pris un courtier afin d'effectuer les demandes de financement auquel elle a transmis un dossier complet dès le 9 juillet 2018 ; qu'aucune sanction en cas de dépassement de la date du 14/08/2018 n'est prévue au compromis de vente ; que les demandes de prêt ont été refusées par les banques et donc aucun lien causal ne peut être établi entre la défaillance de la condition et le comportement de l'acquéreur ; que la tardiveté des demandes de prêt relèvent de la seule responsabilité de la SAS TBP CONSEIL ; qu'elle n'était pas non plus tenue aux termes du compromis de fournir plusieurs attestations de refus de prêt ; que la clause pénale prévue au compromis ne peut être due en cas de défaillance d'une condition suspensive ; que le montant fixé par le jugement déféré est manifestement excessif car les vendeurs ont immédiatement trouvé un nouvel acheteur pour leur bien, qu'ils ont vendu le 26 novembre 2018, pour un prix de 205000 euros.

Selon leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 23 décembre 2022, auxquelles il sera référé pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens, M. [E] [O] et Mme [U] [V] épouse [O] demandent de voir :

- A titre principal

- CONFRIMER la décision dont appel en ce qu'elle a :

- « DEBOUTE la SAS TBP CONSEIL de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- CONDAMNE [J] [H] à verser à [E] [O] et à [W] [V] épouse [O] ensemble :

- la somme de 20500,00 euros au titre de la clause pénale,

- la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile;

- ORDONNE à Maître [I] [R] de verser à [E] [O] et à [W] [V] épouse [O] ensemble le dépôt de garantie d'un montant de 10250 euros séquestré entre ses mains,

- DIT que cette somme de 10250 euros viendra en déduction de la somme de 20500 euros allouée à [E] [O] et à [W] [V] épouse [O] au titre de la clause pénale,

- CONDAMNE la SAS TBP CONSEIL à relever et garantir [J] [H] des condamnations prononcées à son encontre,

- REJETTE la demande formée par [J] [H] sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- REJETTE toute autre demande,

- CONDAMNE la SAS TBP CONSEIL aux dépens »

- RECTIFIER l'erreur matérielle affectant le jugement dont appel et CORRIGER le prénom de Madame [U] [V], improprement désignée dans le dispositif du jugement « [W] »;

- A titre subsidiaire, en cas de réformation ;

- CONDAMNER Madame [H] à payer aux consorts [V] et [O] la somme de 10250 euros au titre de l'indemnité d'immobilisation séquestrée ;

- REJETER toutes les demandes de Madame [H] ;

- REJETER toutes les demandes formulées contre les consorts [V] et [O] ;

- En tout état de cause,

- CONDAMNER TBP CONSEIL au paiement de la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, outre sa condamnation aux dépens.

M. et Mme [O] font principalement valoir que l'acquéreur était pressé de prendre possession du bien, les contraignant à louer un autre bien dans l'attente du projet d'achat immobilier qu'ils avaient en vue ; que cette dernière ne justifie pas avoir accompli les démarches nécessaires pour l'obtention du prêt dans les délais requis même si elle a respecté les obligations tenant à l'information de la défaillance de la conditions suspensive ; que deux des trois courriers de refus ne faisaient pas mention du taux du prêt sollicité comme cela état prévu par le compromis ; qu'il existe bien une stipulation (p.7) d'une indemnité d'immobilisation, distincte de la clause pénale ; qu'une demande de prêt a été faite dans les délais mais ses caractéristiques ne sont pas justifiées ; que les deux autres demandes de prêt ont été faites après la date d'obtention prévue ; qu'il n'existe pas de disproportion du fait du préjudice subi lié à la location d'un autre bien tout en payant les charges courantes de l'appartement et du fait de leur préjudice moral.

Selon ses conclusions notifiées par voie électronique le 11 février 2022, auxquelles il sera référé pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, M. [I] [R] demande de voir:

- lui donner acte de ce qu'il s'en rapporte à justice sur les mérites des prétentions des parties,

- lui donner acte qu'en exécution du jugement revêtu de l'exécution provisoire il s'est dessaisi de la somme de 10250 euros le 24 septembre 2021,

- condamner tout succombant aux entiers dépens d'appel, ces derniers distraits au profit de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ sur son offre de droit.

La procédure a été clôturée le 8 mars 2023.

MOTIVATION :

Sur la rectification d'une erreur matérielle :

En vertu de l'article 462 du code de procédure civile, les erreurs et omissions matérielles qui affectent un jugement, même passé en force de chose jugée, peuvent toujours être réparées par la juridiction qui l'a rendu ou par celle à laquelle elle est déférée, selon ce que le dossier révèle ou, à défaut, ce que la raison commande.

Le juge est saisi par simple requête de l'une des parties, ou par requête commune ; il peut se saisir d'office.

Le juge statue après avoir entendu les parties ou celles-ci appelées.Toutefois, lorsqu'il est saisi par requête, il statue sans audience, à moins qu'il estime nécessaire d'entendre les parties.

En l'espèce, dans leurs dernières conclusions, M et Mme [O] demandent la rectification de l'erreur matérielle affectant le dispositif du jugement déféré en ce que le prénom de Mme [V] est indiqué à tort être '[W]' au lieu de '[U]'.

Au vu de la pièce d'identité de l'intéressée versée aux débats, il apparaît que Mme [V] épouse [O] porte les prénoms suivants : [U], [W].

Il convient donc de rectifier le dispositif du jugement déféré en ce sens.

Sur le dépôt de garantie de 10500 euros :

En vertu de l'article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

Il résulte de l'article 1104 du code civil que les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. Cette disposition est d'ordre public.

En vertu de l'article 1304-3 du code civil, la condition suspensive est réputée accomplie si celui qui y avait intérêt en a empêché l'accomplissement.

En l'espèce, suivant compromis de vente signé le 14 juin 2018 devant Maître [I] [R], notaire, M. [E] [O] et Mme [W] [V] épouse [O] ont vendu à Mme [J] [H] un bien immobilier situé à [Localité 9] au prix de 205000 euros, à la condition suspensive de l'obtention d'un crédit aux conditions énoncées par ledit acte.

Ces conditions sont que le prix devait être financé par un prêt d'un montant de 205000 euros, d'une durée maximale de 25 ans, et d'un taux nominal, outre assurance, de 1,80% l'an.

Le compromis prévoit en page 7 que le prêt sera réputé obtenu et la condition suspensive sera réalisée par la remise par la banque à l'acquéreur de l'offre écrite, telle que prévue aux articles L. 313-24 et suivants du code de la consommation, de consentir le crédit aux conditions principales sus-énoncées et dans le délai de réalisation prévu.

La réception de l'offre devra intervenir au plus tard le 14 août 2018.

L'obtention ou la non-obtention du prêt devra être notifiée par l'acquéreur au vendeur par lettre recommandée avec avis de réception adressée dans les trois jours suivants l'expiration du délai ci-dessus.

A défaut de réception de cette lettre dans le délai fixé, le vendeur aura la faculté de mettre l'acquéreur en demeure de lui justifier sous huitaine de la réalisation ou de la défaillance de la condition.

Cette demande devra être faite par lettre recommandée avec avis de réception au domicile ci-après élu.

Il résulte également de cette clause que l'acquéreur ne pourra recouvrer le dépôt de garantie qu'il aura, le cas échéant, versé qu'après justification qu'il accompli les démarches nécessaires pour l'obtention du prêt et que la condition n'est pas défaillie de son fait ; à défaut, le dépôt de garantie restera acquis au vendeur.

Il résulte des débats que suite à la lettre recommandée avec accusé de réception du 30 août 2018 par laquelle les vendeurs ont mis en demeure l'acquéreur de leur justifier de la réalisation ou de la défaillance de la condition suspensive, Mme [H] leur a transmis par mail du 4 septembre 2018 deux attestations de refus de prêt de banques.

La première date du 30 août 2018 et émane de la banque LCL ; la seconde date du 3 septembre 2018 et émane du Crédit Foncier.

Mme [H] justifie également d'une lettre de refus de la CIC-Lyonnaise de Banque en date du 19 septembre 2018.

Si l'acquéreur a justifié de deux refus de prêt dans les huit jours de la lettre de mise en demeure adressé par les vendeurs, les deux premières lettres de refus ne reprennent pas les conditions telles qu'énoncées par le compromis de vente, ne permettant pas de vérifier que les demandes de prêt ont été faites conformément aux caractéristiques prévues.

De plus, seule la première demande de prêt a été faite avant le délai du 14 août 2018 fixée par le compromis comme date limite de la réception de l'offre de prêt devant être faite par le prêteur.

Il convient donc de considérer qu'en ne déposant pas, dans le délai imparti, deux demandes de prêts conformes, Mme [H] a empêché l'accomplissement de la condition suspensive qui doit donc être réputée accomplie.

En outre, c'est à bon droit que les vendeurs demandent à conserver le montant du dépôt de garantie comme cela est stipulé expressément par le compromis de vente dans la clause susvisée.

Par conséquent, Mme [H] est mal-fondée à demander la restitution du montant du dépôt de garantie de 10250 euros versé entre les mains de Maître [I] [R].

Sur la clause pénale de 20500 euros :

L'article 1231-5 du code civil prévoit que lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte ni moindre.

Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.

En l'espèce, le compromis de vente prévoit dans sa page 8 que dans le cas où, toutes les conditions relatives à l'exécution des présentes étant remplies, l'une des parties ne régulariserait pas l'acte authentique et ne satisferait pas aux obligations alors exigibles, elle devra verser à l'autre partie la somme de 20500 euros à titre de dommages-intérêts, conformément aux dispositions de l'article 1231-5 du code civil.

En l'espèce, la condition suspensive de l'obtention d'un prêt étant réputée accomplie suite à la défaillance de l'acquéreur, les vendeurs sont en droit de demander le versement de la clause pénale précitée.

En vertu de la jurisprudence de la Cour de cassation, la clause pénale, sanction contractuelle du manquement d'une partie à ses obligations, s'applique du seul fait de cette inexécution (absence de justification d'un préjudice subi par le créancier) (Cass. 3e civ., 12 janvier 1994, n°91-19.540 P).

De même, il est de jurisprudence constante que le juge, pour qui la réduction des obligations résultant d'une clause pénale 'manifestement excessive' n'est qu'une simple faculté, n'a pas à motiver spécialement sa décision lorsque, faisant application pure et simple de la convention, il refuse de modifier le montant de la 'peine' qui est forfaitrement prévue (Cass. 1ère civ., 23 février 1982).

En l'espèce, M et Mme [O] sont bien-fondés à se prévaloir du montant de 20500 euros prévu à titre de clause pénale par le compromis de vente alors que Mme [H] a manqué à son obligation contractuelle et qu'ils n'ont pas à justifier du préjudice subi.

Par conséquent, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné Mme [H] à verser à M. [E] [O] et Mme [U] [V], son épouse, la somme de 20500 euros au titre de clause pénale, ordonné à Maître [I] [R] de verser à ces derniers le dépôt de garantie d'un montant de 10250 euros séquestré entre ses mains, et dit que la somme de 10250 euros viendra en déduction de la somme de 20500 euros allouée à M. [E] [O] et Mme [U] [V], son épouse, au titre de la clause pénale, étant précisé que le notaire s'est déjà dessaisi de la somme de 10250 euros en date du 24 septembre 2021.

Sur la responsabilité de la société TBP CONSEIL :

En vertu de l'article 1991 du code civil, le mandataire est tenu d'accomplir le mandat tant qu'il en demeure chargé, et répond des dommages-intérêts qui pourraient résulter de son inexécution.

En vertu de l'article 1992 du code civil, le mandataire répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu'il commet dans sa gestion.

En l'espèce par acte du 15 juin 2018, Mme [H] a mandaté la société TBP CONSEIL aux fins d'effectuer les études, démarches et négociations auprès de tout organisme au choix du mandataire, aux fins d'obtention d'un prêt répondant si possible aux cararactéristiques suivantes : achat résidence principale, montant envisagé de 205000 euros, durée de 25 ans.

Il résulte de cette convention que n'est mise à la charge de la société TBP CONSEIL aucune obligation de résultat mais seulement une obligation de moyens.

De plus, si à la demande de Mme [H] et de son conseil, la société TBP CONSEIL a rédigé une analyse du dossier le 4 octobre 2018, cette note ne permet pas de s'assurer que le courtier avait, lors de la signature du mandat de recherche, connaissance du contenu du compromis de vente notamment quant à la date du 14 août 2018 comme date limite de réception de l'offre de prêt pour permettre la réalisation de la condition suspensive.

Il est constant que la société TBP CONSEIL n'est pas partie au compromis de vente et que les modalités prévues par ce dernier acte quant à la condition suspensive d'obtention de prêt ne sont pas reproduites dans leur intégralité dans le mandat signé le 15 juin 2018.

D'ailleurs, il n'est stipulé aucune condition de date ou de délai dans le mandat liant Mme [H] et la société TBP CONSEIL.

Ainsi, Mme [H] n'établit pas que le mandataire savait qu'il devait effectuer des demandes de prêt antérieurement à la date du 14 août 2018.

S'il résulte des débats que trois autres demandes de prêt ont été faites trop tardivement, soit après la date du 14 août 2018, Mme [H] ne démontre pas que la société TPB CONSEIL a commis une faute en agissant, en toute connaissance de cause, au-delà du délai prévu par le compromis de vente.

En effet, au contraire de ce qu'a retenu le jugement déféré, Mme [H] ne peut valablement reproché à la société TBP CONSEIL de ne pas avoir présenté concomitamment plusieurs demandes de prêt afin de respecter le délai prévu par le compromis s'il n'est pas établi que ce délai était connu du courtier dès la signature du mandat qui lui était confié.

Par conséquent, il convient de débouter Mme [H] de sa demande de voir condamner la SAS TBP CONSEIL à la relever et garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre et par là même d'infirmer la décision déférée sur ce point.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

En vertu de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

Mme [H], partie succombante, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel, le jugement déféré étant infirmé en ce qu'il a condamné la SAS TBP CONSEIL aux dépens.

Il y a lieu de dire que les dépens d'appel pourront être recouvrés directement au profit de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de l'article 700 du code de procédure civile, dans toutes les instances le juge condamne la partie tenue aux dépens à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation.

Compte tenu de la situation économique respective des parties et de l'équité, il convient de décider qu'il n'y a pas lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il convient de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a condamnée Mme [H] à payer à M. [E] [O] et Mme [U] [V] épouse [O] la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort :

ORDONNE la rectification de l'erreur matérielle qui entache le dispositif du jugement déféré (page 9) en ce qu'il convient de lire [U] [V] épouse [O] au lieu de [W] [V] épouse [O];

DIT que la présente décision rectificative sera mentionnée sur la minute et sur les expéditions du jugement déféré ;

CONFIRME le jugement déféré rendu le 20 septembre 2021 par le Tribunal judiciaire de Marseille excepté en ce qu'il a condamné la SAS TBP CONSEIL à relever et garantir Mme [J] [H] des condamnations prononcées à son encontre et a condamné la même société aux dépens ;

STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT ;

DÉBOUTE Mme [J] [H] de toutes ses demandes ;

DIT n'y avoir lieu condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel ;

CONDAMNE Mme [J] [H] aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers pouvant être recouvrés directement au profit de la SCP COHEN GUEDJ - MONTERO - DAVAL GUEDJ, avocat, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-7
Numéro d'arrêt : 21/15140
Date de la décision : 08/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-08;21.15140 ?
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